A. L'insuffisance des ressources
L'insuffisance des ressources se constate d'une part au niveau
du personnel et d'autre part au niveau des ressources matérielles
disponibles.
1. Le personnel.
La sécurité est avant tout l'oeuvre des acteurs
publics commis à cette tâche. La lutte contre le grand banditisme
exige une mobilisation grandiose des forces d'intervention compte tenu de
l'omniprésence du phénomène sur tout le territoire
national. Si c'est vrai qu'il y a des disparités dans les
fréquences des attaques à mains armées, aucune
région du Burkina Faso n'est à l'abri. C'est pourquoi il faut une
couverture conséquente des forces de sécurité sur le
terrain. Malheureusement, le manque de personnel rend difficile cette exigence.
En effet, les effectifs
75 Art. 6 al 2 de la loi n°017, op.cit.
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des forces de sécurité paraissent
dérisoires devant le besoin de sécurité d'une population
estimée à plus de 18 millions d'habitants. A titre illustratif,
avec un effectif de cinq mille deux cent dix-neuf (5219) hommes dont cinq cent
(500) en formation au 31 août 2009, le ratio gendarmerie/population est
d'un (01) gendarme pour deux mille six cent quatre-vingt-cinq (2685) habitants.
Avec un effectif de sept mille trois cent soixante-huit (7368) fonctionnaires
de police au 31 août 2009 dont huit cent treize (813) en formation, le
ratio police/population est d'un (01) policier pour mille neuf cent deux (1902)
habitants. Cependant, le ratio optimum est de 300 à 400 habitants par
policier.
De nombreux efforts sont en train d'être faits en faveur
du renforcement des capacités des forces de sécurité en
vue de leur permettre de lutter efficacement contre le grand banditisme et les
autres formes de criminalité. . Depuis 2013, la police nationale a
lancé un programme biennal de recrutement spécial de 1300
policiers avec le recrutement ordinaire annuel qui porte l'effectif des
nouveaux recrus à 2400 policiers par an. Cette initiative pourrait bien
permettre une meilleure couverture sécuritaire du pays les années
à venir.
2. Le manque de ressources matérielles,
logistiques et financières.
Une chose est de recruter le personnel, une autre est de
l'équiper pour le travail du terrain. La répression du grand
banditisme comporte constamment le défi de faire face à des
délinquants souvent mieux armés que les agents
républicains. En effet, il est constamment ressorti des rapports que le
développement des attaques à mains armées a un lien avec
la fuite d'armes et de munitions provenant des pays en crise. En plus, quelques
crises socio-politiques qui ont secoué le Burkina Faso cette
dernière décennie ont favorisé l'expansion de la
criminalité. Il faut donc armer conséquemment les hommes sur le
terrain. Mais malheureusement, ce n'est pas toujours le cas. Les armes de
points sont en nombre insuffisant ; les mesures de protection sont
dérisoires, ce qui n'encourage pas les intervenants76;
véhicules de terrain et carburant sont en manque à tel point que
souvent les hommes interviennent avec des moyens personnels. Cette insuffisance
des ressources ne sont pas de nature à faciliter la répression.
Cependant, les équipements des agents de sécurité font
parties des exigences des conventions internationales de protection des droits
de l'Homme. En effet, pour éviter le recours systématique aux
armes pour se défendre, l'Etat a l'obligation de « munir les
responsables de l'application des lois d'équipements défensifs
tels que pare-balles, casques ou gilets anti balles et véhicules
blindés,
76 Les informations récoltées lors de
nos enquêtes font état de cas où des éléments
porteraient des cartons en guise de pare-balle, juste pour une protection
psychologique.
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afin qu'il soit de moins en moins nécessaire d'utiliser
des armes de tout genre »77. Or, au Burkina Faso, les forces de
sécurité sont mal équipées en moyens
défensifs78 ; d'où le risque d'une
systématisation de l'usage des armes pour leur défense.
B. Le manque de coopération inter
corps
La quête d'un environnement sécuritaire est
l'oeuvre de tous, mais particulièrement celles des corps de
sécurité à qui la loi confie cette tâche. Elle est
précisément l'oeuvre de la gendarmerie et de la police nationale.
Ayant un ennemi commun, les acteurs de la sécurité devraient
coopérer en vue de multiplier leurs forces de frappe et décupler
leur efficacité dans la lutte contre l'insécurité.
Cependant, l'expérience révèle bien souvent des
rivalités résultant de complexes de supériorité
entre les corps, chose qui est de nature à nuire à la bonne
exécution des missions.
La coordination et la coopération entre les forces de
sécurité intérieure et la gendarmerie ne sauraient
constituer à elles seules des conditions suffisantes et
nécessaires pour créer un climat exempt de concurrence
contre-productive.
« Elles seraient même inopérantes sans la
relecture de la loi sur la sécurité intérieure et
l'adoption des différents textes juridiques évoqués
à maintes reprises. Ces textes devront comporter des dispositions
claires en ce qui concerne les attributions républicaines, les missions,
les circonstances et les périmètres d'intervention de chacune des
forces, en même temps qu'elles devront leur fixer les objectifs à
atteindre. Il faudra aussi leur fournir les moyens nécessaires et
adaptés à l'accomplissement de leurs missions afin de permettre
à chacune de s'affirmer sur le terrain sans complexe vis-à-vis
des autres. Au-delà de ces principes de précaution, demeurera
toujours cependant l'épineuse question de la confiance que les
décideurs politiques placent en chaque force, quand on sait que la
politique y a acquis droit de cité79».
77 Principes de base sur le recours à la
force et à l'usage des armes à feu par les responsables de
l'application des lois, précité, principe 2.
78 Voir réponse du Ministre de
l'Administration Territoriale, de la Décentralisation et de la
Sécurité à la question orale avec débat du
député Bendi OUOBA, précitée.
79BAYALA. Jean-Pierre. 2009. Les
défis de la gouvernance du secteur de la sécurité en
Afrique de l'Ouest -cas du Burkina Faso. Sus cité
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