SOMMAIRE
INTRODUCTION 1
PARTIE I : BILAN DE LA LUTTE CONTRE LE GRAND BANDITISME
AU BURKINA
FASO : DE 2009 A NOS JOURS 4
CHAPITRE I : Bilan de la lutte contre le grand banditisme au
plan de la prévention 5
Section I : Bilan normatif de la lutte contre le grand
banditisme 5
Section II : Bilan de la prévention au plan
institutionnel 12
CHAPITRE II : Bilan de la répression du grand
banditisme au Burkina Faso. 20
Section I : Le rôle des acteurs judiciaires dans la
répression du grand banditisme 20
Section II : L'impact de la répression sur le grand
banditisme. 28
PARTIE II : ANALYSE ET PERSPECTIVES DU SYSTEME DE
REPRESSION DU
GRAND BANDITISME 35
CHAPITRE I : Evaluation du système de répression
du grand banditisme 36
Section I : Les forces de la politique de répression du
grand banditisme 36
Section II : Les faiblesses de la politique de
répression du grand banditisme 43
CHAPITRE II : Perspectives pour une meilleure
répression du grand banditisme 50
Section I : Suggestions pour un renforcement du système
de répression actuel 50
Section II : Pour une innovation dans l'approche du
phénomène de grand banditisme 57
CONCLUSION 66
Bibliographie 68
TABLE DES MATIERES 70
1
INTRODUCTION
Six Décembre 2010. Monsieur Dénis quitte la
capitale. Il venait de rendre visite à ses enfants restés dans la
cour familiale pour des raisons d'étude. Il rejoint sa femme au
centre-sud à deux centaines de kilomètres. Il est 5 heures du
soir quand le car démarra. A bord, une soixantaine de passagers
composés essentiellement de commerçants en partance pour le
Ghana.
Après deux heures de route, aux environs de 08
heures du soir, et à l'entrée du parc d'Arly, alors que
Dénis et bien d'autres passagers se laissaient aller à
l'assoupissement, ils furent violemment extirpés de leurs torpeurs par
des tirs de sommation d'un gang lourdement armé qui essayait de stopper
le convoi. Le chauffeur ayant pris conscience du danger se mit à faire
marche-arrière en toute vitesse. Mais sitôt, une balle le faucha
mortellement avant de frôler l'oreille de Dénis alors
plaqué contre la paroi du véhicule. Perforé au
côté droit, gisant dans le sang et gémissant jusqu'à
l'aube, le chauffeur rendit l'âme après une lente agonie.
Dénis fut témoin de cette mort effroyable et des coups
portés à tous les passagers, desquels les fortunes furent
littéralement confisquées jusqu'aux centimes. L'opération
dura jusqu'au matin sans aucune intervention.1
Ce fait loin d'être isolé et propre au Burkina
Faso est omniprésent dans toutes les sociétés du monde
entier. Sous diverses qualifications, la criminalité reste un
défi majeur de la communauté internationale. Elle
représente aujourd'hui la menace non militaire la plus importante contre
la sécurité et la stabilité économique nationale et
internationale. Difficile à chiffrer, le produit global de la
criminalité organisée serait de l'ordre de mille milliards
d'euros annuels2. De nombreux instruments juridiques et de plans de
coopérations ont été adoptés à
l'échelle internationale pour, sinon conjurer le
phénomène, au moins, le contenir dans des proportions
acceptables. En effet, s'il faut convenir avec Emile DURKHEIM que « le
crime est un phénomène normal de société
»3, il faut admettre néanmoins que toute
société humaine, quelle qu'elle soit, a intérêt
à maîtriser sa criminalité et à la contenir dans des
limites acceptables. Nulle communauté humaine ne peut prospérer
dans la délinquance. C'est pourquoi une
1 Enquêtes personnelles : Témoignage
de Dénis, pasteur installé au centre-sud.
2 La France et la lutte contre la
criminalité organisée : criminalité
organisée-France-diplomatie-Ministère des affaires
étrangères et du développement international/ Mai
2013.
3 Émile Durkheim, «Le crime,
phénomène normal» (1894). [Source: Les
règles de la méthode sociologique (1894), Paris, P.U.F., 14e
édition, 1960, pp. 65-72].
2
politique criminelle adaptée à la
criminalité du moment est une nécessité constante dans
tout type de société.
Au Burkina Faso, un aspect particulier de criminalité
organisée sous le vocable d' « acte de grand banditisme » mine
notre économie, perturbe la quiétude de nos populations et
hypothèque l'avenir de notre nation. Il est en passe de devenir l'enjeu
majeur des politiques de sécurité. C'est dans cette perspective,
et conscient de l'impact du phénomène sur les fortes aspirations
du peuple à la sécurité sociale et à la
prospérité économique que les tenants du pouvoir
décisionnel ont pris à bras-le-corps la question et
l'ont posé sur la table des priorités. Ainsi, il a
été mis en place depuis peu une politique de répression
qui se veut sévère, pour répondre aux exigences de
sécurité du moment. Elle a consisté d'une part à
l'adoption d'une loi créant une infraction nouvelle4 avec une
procédure pénale particulière :la loi 017/AN du
05 Mai 2009 portant répression du grand banditisme qui constitue le
texte de base de la répression ; d'autre part, au renforcement des
moyens d'action dans les rangs des organes chargés de la
prévention et de la répression, au redéploiement du
personnel des officiers de police judiciaire, à la constitution de
nouvelles unités d'intervention rapides telles que la Brigade Anti
Criminalité (B.A.C.) et l'Unité Intervention Polyvalente de la
Police Nationale (U.I.P.-PN). Au sein des forces armées nationales,
d'autres unités telles que les unités mobiles de la gendarmerie
nationale ont été créées pour contribuer à
la lutte contre le grand banditisme. Mais en dépit de ce dispositif,
l'insécurité demeure une préoccupation. Et ce constat
appelle les interrogations suivantes :
La politique de répression actuelle en matière
de grand banditisme répond-t-elle aux attentes de la population en
matière de sécurité ? Il s'agit ici de juger de
l'efficacité du système de répression mis en place et de
juger de la nature des moyens employés dans la lutte contre le grand
banditisme. Cette question principale soulève d'autres
inquiétudes: les droits de la personne sont-ils suffisamment
protégés dans la politique de répression ? Quelles
perspectives sont envisageables en vue de concilier au mieux les besoins de
sécurité des peuples et les libertés fondamentales des
individus5? Quelles sont les correctifs qui pourraient
réaliser le meilleur équilibre entre les nécessités
de la répression et la protection des libertés individuelles?
Autant de questions à examiner dans la présente
réflexion.
4 L'avis des spécialistes et praticiens du
droit est mitigé là-dessus. D'aucuns pensent qu'il ne s'agit pas
d'une nouvelle incrimination et d'autres pensent que c'est le cas en se
référant à l'article 3 du texte de loi.
5 Nous ferons fi des éventuelles nuances qui
pourraient exister entre « droits de l'Homme », « droits
humains» « libertés individuelles » et «
libertés fondamentales », pour les considérer comme
étant rigoureusement identiques. Nous les emploierons
indifféremment pour désigner « les prérogatives
inhérentes à tout être humain » de sexe féminin
ou masculin.
3
Mesure-t-on suffisamment l'importance d'une telle
réflexion ? Le bilan donne une idée précise du niveau
réel de criminalité relative aux actes de grand banditisme et
permettra non seulement de juger de l'opportunité de redéployer
les stratégies et les moyens d'interventions, mais aussi de rectifier
certaines actions au regard de l'évolution du droit. La lutte contre le
grand banditisme remonte bien loin dans le temps. Mais la présente
réflexion porte sur la criminalité bien définie par la loi
017/AN du 05 Mai 2009 portant répression du grand banditisme. Elle se
limite au bilan de la lutte engagée sous cette loi. Néanmoins, la
répression du grand banditisme se faisant dans le cadre d'une
procédure soucieuse des libertés individuelles, il sera fait un
état des lieux en matière de respect de ces libertés.
La présente étude se subdivise en deux parties
essentielles.
La première présente le bilan de la lutte contre
le grand banditisme et se décline en deux chapitres dont le premier
aborde le cadre juridique de la lutte tandis que le deuxième traite de
l'organisation de la répression.
La deuxième partie qui se veut concrète comporte
aussi deux chapitres dont le premier fait une évaluation du
système de répression et le second fait des suggestions pour une
répression plus efficace.
4
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