V.2.
Vente illicite des médicaments de la rue
L'émergence de cette activité est l'une des
conséquences de la crise économique des années 1980.
Ainsi, Hamel (2006) pense que cette vente constitue un véritable
phénomène de société dans certains pays à
revenu intermédiaire et faible. Pour lui le recours à ce
marché est intégré aux moeurs dans la mesure où les
vendeurs sont connus de la population et les zones concernées sont
autant rurales qu'urbaines. Pour les plus démunis, l'achat
facilité (crédits, vente à l'unité) de
médicaments livrés à domicile est une aubaine. Le
marché informel distribue les médicaments jusque dans les zones
rurales isolées, autant par le biais des marchés hebdomadaires
que par les petits vendeurs ambulants qui parcourent parfois plusieurs villages
par journée. L'avantage économique de ce recours est
considérable puisqu'il épargne des coûts
d'opportunité et de déplacement parfois très
élevés ; surtout lorsque plusieurs dizaines de kilomètres
séparent les malades du centre de santé le plus proche. Le
travail de Hamel nous permet donc de constater, de voir comment les
médicaments contrefaits dans lesquels se trouvent également les
médicaments dopants sont vendus. En même temps, cette thèse
va nous aider dans l'élaboration des circuits de ventes et les atouts du
commerce illicite des médicaments à des fins dopants. C'est dans
la même perspective en parlant du circuit de vente des médicaments
dopants, Pouillot et al., ont mené une étude à
Yaoundé et à Niamey.
Pouillot et al., (2007) ont menés une étude
pour la santé publique sur le circuit informel dans les
médicaments à Yaoundé (Cameroun) et à Niamey
(Niger). Elle a pour objectif de décrire la population des vendeurs des
médicaments dudit circuit à Yaoundé et à Niamey et
d'évaluer la qualité des médicaments vendus. Ici,
l'analyse des données issues de l'échantillon des vendeurs
illicites dans ces villes montre qu'il pourrait avoir un impact en termes de
santé publique sur les consommateurs, du fait que le taux de
non-conformité s'élève globalement à environ 50%
des médicaments analysés dans les deux villes. Ainsi, des
études complémentaires sont nécessaires pour connaitre
l'origine de ces non-conformités, entre contrefaçon, faible
qualité ou instabilité des formulations. Cette étude a le
méritez de nous édifier sur le phénomène des vents
illicites des médicaments dans les rues de Yaoundé et de Niamey.
Cependant, cette étude ne prend pas en compte la nature des
médicaments contrefaits qui est l'objet de notre thème de
mémoire. A sa suite Wogaing évoque également la question
du circuit de vente illicite des médicaments.
Ainsi, Wogaing (2010) mentionne que le circuit illicite des
médicaments est en plein expansion en Afrique et on observe que de plus
en plus de personnes en quête de médicaments ont recours aux deux
secteurs, formel et informel. Dans cet article, elle fait un essai d'analyse du
circuit thérapeutique suivi par une population en quête de
médicaments modernes au Cameroun. A travers une enquête
menée auprès de la population de Douala, cet article vise
à montrer à la fois les risques sanitaires pris par les
populations à la recherche du médicament par les vendeurs. Ici,
le constat est que pour les clients et vendeurs les médicaments sont de
bonnes1 qualités, disponibles et financièrement accessibles au
grand nombre. Mais le travail de Jeannette Wogaing se limite seulement dans la
ville de Douala. Nous cherchons à comprendre le circuit et la vente des
médicaments à des fins dopants dans la ville de Maroua.
Ouedraogo (2008) constate que le développement du
marché parallèle des médicaments constitue un
véritable problème de santé publique dans les pays en
développement et plus particulièrement au Burkina Faso. A cet
effet, elle montre que les résultats des luttes déjà
menées sont en deçà des attentes sur le sujet. Il est donc
impératif de renforcer les stratégies de lutte déjà
en place afin d'aboutir à la maîtrise du circuit
d'approvisionnement et de distribution du médicament (fabrication
approvisionnement et distribution) ; à un accès favorable et
facile (financier et géographique) aux soins et aux médicaments
dans les structures légales ; à un accès à une
médecine et une pharmacopée traditionnelle de qualité. En
mettant l'accent sur l'élaboration des stratégies pouvant
maîtriser le circuit de vente illicite des médicaments de la rue
au Burkina Faso, Fassin traite ce thème sur la banlieue de Dakar tout en
dénonçant la passivité du l'Etat sur la question.
Fassin (1985) aborde ce thème sous l'angle
économique et consacre une étude sur la banlieue de Dakar
dénommé Pikine. Dans ce travail, l'auteur explique les raisons
d'intervention des Marabouts dans le réseau de la vente illicite des
médicaments au Sénégal. Il dénonce par la
même occasion le non intervention ou la passivité de l'Etat sur ce
type de problème.
«L'Afrique malade de médicaments» est un
titre évocateur du problème des médicaments de la rue.
Dans cet article, est évoquée la situation dans certains pays en
Afrique (Benin, Burkina-Faso, Cameroun). Le marché des
médicaments de la rue, au Benin est aussi florissant qu'il est illicite,
comme partout ailleurs. Selon l'organisation mondiale de la santé, 25%
des médicaments consommés dans les pays pauvres sont des
contrefaçons ou des produits de qualité inférieure. En
Afrique de l'Ouest, le phénomène a particulièrement pris
de l'ampleur depuis la dévaluation du franc CFA. Ici l'explosion du
marché informel des médicaments est le corollaire des coupes
claires dans les budgets de la santé imposés par les politiques
d'ajustement structurel initiées dans les années 1980. La vente
de médicaments dans le circuit informel est extrêmement populaire
au Niger où les vendeurs des rues sont légion et où le
phénomène semble prendre une ampleur grandissante ; Idrissa
(2005) relève un nombre d'aberrations dans la capitale nigérienne
: Un anxiolytique tel que le vanadium peut ainsi être vendu comme
vitamine. Les conséquences de ce commerce ne sont pas anodines puisque,
selon une analyse documentaire, 146 malades intoxiqués par les
médicaments vendus sur le marché illicite ont été
recensés aux urgences de l'hôpital national de Niamey et de
l'hôpital universitaire de Lamordé. Dans ses travaux pour une
bonne approche de la vente des médicaments dans les rues, il cible son
investigation sur la distribution des anti-infectieux. Dans son travail il note
les différentes caractéristiques des vendeurs comme par exemple :
modes de ventes des médicaments de la rue, le sexe et l'âge des
vendeurs, leur ancienneté dans la vente de médicaments. Mais il
ne fait pas allusion aux lieux de vente desdits médicaments, ni à
leur localisation dans la ville de Niamey. Toujours sur la question du circuit
des médicaments, une étude a été menée sur
la distribution des médicaments au Tchad.
Donato et Odjimbey (1998) dans leurs travaux portant sur la
distribution des médicaments au Tchad, adoptent une attitude alarmiste.
Selon eux, la vente illicite des médicaments est une activité
dangereuse pour la vie publique. De même, elle tue le secteur
privé de la pharmacie. A leur suite, Ngarssen (1998), après avoir
mené une étude sur la prolifération des médicaments
illicites note que le circuit est étranglé par les vendeurs
ambulants des produits pharmaceutiques.
Dans le même sens le rapport de l'AIA (2008) met en
exergue l'ambigüité de la sous-région de la
Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC)
qui est dotée d'une richesse incontestable, mais qui figure
paradoxalement parmi les Etats les moins avancés. La pauvreté
associée à d'autres facteurs tels que la
perméabilité des frontières pousse les individus à
emprunter le chemin des activités illicites dont la contrefaçon.
Ainsi, la synergie des efforts entre les Etats doit être de mise pour
mieux limiter le phénomène.
Suivant la même logique du rapport de l'AIA, les
stratégies développées par les vendeurs de
médicaments de la rue sont particulières. Médeibou (2004)
dans ses travaux à Ngaoundéré aborde ce thème sous
un aspect spatio-temporel. Aussi les réseaux des médicaments
illicites intéressent Yadang (2005) qui se focalise sur les
réseaux sur l'espace frontalière Banki-Amchidé. Elle a
regroupé de nombreux acteurs intervenant dans la vente illicite de
médicaments (grossistes, détaillants et vendeurs ambulants).
Ceux-ci s'insinuent dans cette activité dans le but de répondre
à leurs besoins financiers et sanitaires tout en ignorant l'impact y
afférant sur la santé humaine.
L'impact des médicaments de la rue sur la
santé, est soulevé par Wabo (2003) vue leurs moyens de
conservation qui sont très précaires et leurs provenances
douteuses. Les médicaments vendus au Cameroun en général
et en particulier à Dschang dans le secteur informel, proviennent en
grande majorité du Nigeria. Compte tenu de l'ignorance de l'impact de
l'environnement physique (température, degré de chaleur ou
d'humidité) sur les médicaments par des acteurs sans formation,
ces produits sont très dangereux éventuellement pour les
consommateurs, malgré, que certains d'entre eux s'avèrent
soulageant. L'informel dans le secteur de la pharmacie constitue une
véritable plaie sociale, une gangrène qu'il est urgent de
supprimer.
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