I.2 ENONCE DU PROBLEME
La grossesse peut être une période à
risque en termes de morbidité et de mortalité périnatales
et/ou maternelles. Afin de diminuer l'apparition de ces risques au cours d'une
grossesse, un suivi régulier est nécessaire.
Selon Bechir Ould Aouen (2007), la
consultation prénatale est un ensemble de mesures permettant de
prévenir la mortalité maternelle par la détection à
temps et la prise en charge des complications potentielles et les facteurs de
risque
Jacques Courte Joie de l'OMS (2005) souligne
que la grossesse est une période très favorable aux
activités éducatives car la femme est particulièrement
réceptive aux conseils qui lui sont donnés tant pour elle que
pour son futur enfant. La femme enceinte doit être encadrée de
manière à se porter en bonne santé pour assurer le bon
déroulement de sa gestation ainsi qu'un accouchement normal. Il est donc
important pour elle de savoir qu'elle doit se soumettre inconditionnellement
aux soins prénataux.
Un bon suivi médical permet à la femme enceinte
d'éviter plusieurs troubles plus ou moins graves ainsi que les
complications. Il permet aussi d'aborder l'accouchement dans les meilleures
conditions. C'est dans ce sens que l'OMS /UNICEF(2005)
affirme : « quand les femmes ont accès à
des soins prénataux, et à des conseils des professionnels, bon
nombre de dangers et de complications liés à la grossesse peuvent
être évités ».
Nous référant au rapport de l'OMS
(2009),45% des femmes enceintes vont en consultation prénatale
dans le monde.
Au Cameroun, sur une population globale d'environ 19060382
habitants(2009), les femmes enceintes représentent 5% dont 903019 qui
devraient recevoir les soins prénataux.
D'après l'OMS(2009), chaque minute
dans le monde une femme meurt des complications liées à la
grossesse soit 600000 par an.
Selon l'OMS(2008) en Afrique une femme sur 26
meurt suite aux complications liées à la grossesse.
Annie Hortense. A(2010) stipule qu'au
Cameroun il ya 100 décès maternels pour 1000 naissances vivantes
et ceci serait dû à la faible utilisation des services de CPN.
L'éducation de la femme enceinte au cours des CPN
constitue une attribution fondamentale du personnel chargé de la prise
en charge de la future mère. Les conseils donnés à la
femme enceinte lors des CPN peuvent permettre d'éviter de nombreuses
complications qui surviennent lors des grossesses Jean-Marie T.
(1996).
Selon l'OMS (2006), la CPN doit permettre de
mener la grossesse à bien pour la mère et son enfant, surtout
que la plupart des facteurs de risque liés à la grossesse peut
être détectée au cours des CPN ; d'autant meilleure
qu'elle est bien faite. Une approche actualisée appelée soins
prénataux recentrés met l'accent sur la qualité des
consultations plutôt que sur le nombre de visites prénatales.
Cette approche reconnaît aussi que les CPN fréquentes
n'améliorent pas nécessairement les résultats de la
grossesse.
Selon le Dr Pierre Panel (2005), les CPN sont
souvent difficiles à réaliser du point de vue de la
disponibilité des femmes enceintes ou de leur accessibilité aux
CPN dans les pays en voie de développement.
D'après le rapport du MSP du
Cameroun(2008) relatif à la santé de reproduction, il est reconnu
que beaucoup de femmes identifiées comme étant à haut
risque ne développent pas toujours des complications tandis que des
femmes qui sont censées être à faible risque en
développent souvent. Une autre stratégie clé des soins
prénataux recentrés est que chaque consultation doit être
menée par un prestataire de soins de santé compétent,
c'est-à-dire une infirmière, une sage femme ou un
médecin.
Le gouvernement Camerounais avait mis en place une
stratégie sectorielle de santé 2001-2010 dont les objectifs
étaient les suivants :
- Vacciner au moins 80% des femmes enceintes contre le
tétanos maternel et néonatal ;
- Augmenter la PEC des accouchements par un personnel
qualifié de 54% à au moins 70% ;
- Mettre la PCIME dans au moins 80% des districts de
santé ;
- Réduire la mortalité maternelle de 50% en
2010 ;
- Réduire de 30% les pratiques néfastes à
la santé de la reproduction (excisions, mariages
précoces) ;
- Réduire la mortalité infantile de 77à
50% pour 100 naissances en 2010.
Cependant, le Cameroun avec les partenaires au
développement ont convenu de l'évaluer à mi-parcours et
l'actualiser pour la porter à l'horizon 2015 en conformité avec
les objectifs du millénaire pour le développement.
Synergies Africaines(2009) stipulent qu'au
Cameroun une femme meurt chaque deux heures en donnant la vie, laquelle mort
est due aux complications de la grossesse.
L'OMS a mené une enquête
démographique et sociale en Afrique centrale(2008) et les statistiques
ont révélé que 57% des femmes enceintes ne sont pas
surveillées et suivies en CPN ; 58%d'entre elles n'ont pas
été protégées contre le tétanos maternel et
néonatal et 92% des femmes accouchent sans assistance du personnel
qualifié.
De nombreux pays les plus avancés en matière de
protection sociale des femmes enceintes et des enfants, et dans le souci de la
réduction de la mortalité maternelle, périnatale et
infantile, ont mis l'accent sur l'éducation et l'ont considérer
comme une activité essentielle offerte à la femme enceinte au
cours de la CPN. Cette dernière constitue tout au long de la grossesse,
le principal élément de suivi et une occasion pour la future
maman de se préparer et affronter sans craintes les différents
changements liés à l'état de grossesse ainsi que la
conduite à tenir afin de vivre sa grossesse de manière
épanouie et consciente, ceci grâce à des méthodes
éducatives utilisées pendant les CPN.
Etant donné que l'issue d'une grossesse est difficile
à prédire, puisque aucun suivi de la femme enceinte ne peut
être considéré comme normal tant que l'accouchement n'a pas
encore réussi, le personnel soignant qui a la responsabilité de
prendre les femmes enceintes en charge, doit mettre en pratique tous les
enseignements reçus, afin de réduire au mieux les complications
liées à la grossesse car l'objectif des soins en
maternité est de protéger la santé de la mère et
celle de son enfant ;
Au cours de nos différents stages hospitaliers et
surtout communautaires, nous avons constaté avec regret que grand
nombre des femmes enceintes arrivaient à terme sans avoir fait le
minimum de quatre consultations prénatales telles que
recommandées par l'OMS à savoir :
Ø 1ère visite avant la
16ème semaine ou au moment où la femme pense qu'elle
est enceinte.
Ø 2ème visite située entre la
24ème et la 28ème semaine (5 à 6
mois) ou au moins une fois pendant le deuxième trimestre
Ø 3ème visite à la
32ème semaine soit 7 mois
Ø 4ème visite à la
36èmesemaine soit 8 mois
Certaines par contre bien qu'ayant respecté ces CPN
n'avaient pas fait plusieurs des examens qui leur avaient été
prescrits ; d'autres encore, multipares n'avaient pas fini leurs doses de
VAT
Les statistiques relevés dans le service de CPN de
l'HDD des trois dernières années montrent que :
Années
|
Nombre de femmes reçues en CPN
|
2009
|
2686
|
2010
|
3781
|
2011
|
3953
|
Source : statistiques du service
de CPN de l'HDD (2009-2011)
Ce tableau montre une augmentation de la fréquentation
des femmes enceintes dans le service de CPN à l'HDD.
Ce qui nous a le plus irrité c'est le cas de Mme XA
âgée de 37 ans, ménagère, mariée, mère
de 04 enfants, se trouvant à 41 semaines et 04
jours d'aménorrhée. Etant en phase de dégagement,
elle est conduite et installée sur la table d'accouchement. A l'issu de
l'accouchement, on constate que le nouveau-né présente un
encombrement bronchique avec un score d'APGAR de 6/10 à la
première minute, de ce fait, on procède à une aspiration
d'environ 30cc de liquide amniotique d'aspect méconial et malgré
de nombreuses tentatives de réanimation, l'enfant ne survit pas.
A l'interrogatoire, la mère de la parturiente nous
révèle que les contractions auraient débuté
12heures avant son arrivée et elle nous signale par ailleurs que sa
fille a pris une décoction et du miel pour faciliter l'accouchement dit
elle ; suivant toujours l'anamnèse, cette patiente avait fait un
total de 06 consultations prénatales.
Au vue de tout ce qui précède, nous nous sommes
posé la question suivante :
|