Le principe de la responsabilité de protéger : une issue pour la protection des populations civiles. Cas de la république démocratique du Congo( Télécharger le fichier original )par Patience KATUNDA AGANDGI Université de Kinshasa RDC - Licence en droit international 2010 |
Section 2. LE RECUL ET L'INSTRUMENTALISATION DU PRINCIPELa responsabilité de protéger, dès que conçue, est soumise à l'épreuve sans complaisance de l'application sur terrain, et les Etats, toujours jaloux de leur souveraineté, l'ont amputé d'une de ces cas d'ouverture à savoir le cas de famine et de catastrophe naturelle ou écologique entrainant des nombreuses pertes en vies humaines. Et aussi elle peut être instrumentalisée par les Etats comme toute autre institution de droit international, si l'on n'y prend garde ! §.1. Le recul du principe : l'amputation des cas de famines et catastrophe naturelleLa responsabilité de protéger dans sa conception originelle183(*) pouvait être mise en mouvement pas seulement en cas de crimes de guerre, de génocide ou de crimes contre l'humanité, mais aussi de catastrophe naturelle. En effet, consciente des expériences du passé, la commission s'était surement imaginé que les catastrophes naturelles peuvent causer d'indicibles souffrances et entrainer des sérieuses menaces pour la vie des populations (Tchernobyl, volcan Nyiragongo, trouver des exemples). Et dans ces hypothèses, rien ne garantie que l'Etat concerné puisse accepter volontiers le secours venant de l'extérieur. D'où la nécessité pour la commission d'intégrer aussi cette situation comme cas d'ouverture d'une intervention - à l'extrême - militaire. Hélas ! Au sommet du milliaire en 2005, plus de soixante chef d'Etat et de gouvernement réunis à New York au siège de l'ONU, ont supprimé les cas de catastrophe naturelle comme occasion d'appliquer la responsabilité de protéger. S'agissant des raisons pour lesquelles les Etats ont enlevé cette hypothèse, il nous paraît claire au-delà de toutes les arguties que ce pour préserver leur souveraineté. Mais la réalité a rattrapé tout le monde avec le cyclone Nargis en 2008 en Birmanie (Myanmar). En effet, le 2 mai 2008, le cyclone Nargis a balayé la Birmanie en laissant derrière lui des populations sans habitation et ni nourriture. Un chapelet d'ONG internationales ont accourus pour venir en aide aux populations en danger, mais la junte birmane au pouvoir a fermé toutes ses frontières et à rejeter toutes les propositions de secours. Plusieurs voix se sont élevées pour dénoncer cette situation et forcer la communauté internationale à aborder la crise dans le cadre de la responsabilité de protéger, comme par exemple, Bernard Kouchner. Le soucie était d'établir dans quelle mesure la situation résultait d'une négligence de la part du gouvernement birmane et si cette négligence était avérée, déterminer si elle correspondait à l'un des quatre crimes couverts par la responsabilité de protéger. Aucun accord ne s'est profilé à ce sujet, étant donné que la crise humanitaire dérivait d'une catastrophe naturelle et pas d'un conflit généré ou ignoré par la junte184(*). Kouchner et les ONG ont tenté d'établir l'existence d'un crime contre l'humanité à charge du gouvernement birman pour justifier une action coercitive afin de secourir les populations délaissées, mais le contenu ce crime ne trouve application en l'espèce. (Maryam Massorouri) Finalement les pays voisins et les alliés du Myanmar ont réagi et ont poussé la junte à s'ouvrir à l'aide internationale canalisée par des acteurs régionaux pour permettre enfin que les populations les plus touchées puissent accéder à l'aide dont elles avaient grandement besoin. Une diplomatie régionale a donc pris le relais en débloquant la situation. Il s'agit d'une des possibilités dans le contexte de l'application de la responsabilité de protéger, même si pour l'instant il n'existe pas de consensus dans la doctrine sur l'application régionale sans l'accord du conseil de sécurité185(*). Le cas de la Birmanie a mis encore en lumière le « syndrome du retard » et la maladie du « plus jamais ça »186(*) dont souffre la communauté internationale dans le domaine de l'humanitaire. Il a fallu le génocide rwandais et le massacre de Srebrenica pour que la communauté se réveille et pense à agir dans ce genre de situation. Ne pourrait-on pas devancer d'autres situations macabres et inhumaines en prévoyant des mécanismes visionnaires solides et efficaces pour les éviter autant que possible. Il est donc temps pour la communauté internationale d'intégrer la possibilité d'une intervention à l'extrême militaire pour le cas de catastrophe naturelle ou de famine, sinon on criera toujours après « pourquoi avons-nous omis cela ! ». * 183 Conception de la commission internationale sur l'intervention et la souveraineté des Etats. * 184 MANRIQUE Marie-France, « La responsabilité de protéger : un concept en mal d'application », p. 12 * 185 MANRIQUE Marie-France, « La responsabilité de protéger : un concept en mal d'application », p. 13 * 186 BOUCHET-SAULNIER Françoise, Dictionnaire de droit humanitaire, Paris, La Découverte, p. 9 |
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