L'école et la violence. Analyse sémio- pragmatique de l'ONG IDI (Initiatives pour le Développement Intégral )en RDC( Télécharger le fichier original )par jean- Claude MUHINDO MATABARO Université catholique du Congo - 2012 |
3.2.5. Les dimensions de l'énonciationLa méthodologie issue de la théorie énonciative consiste à dégager les différents moyens linguistiques, par lesquels un locuteur : - Imprime sa marque à l'énoncé ; - S'inscrit dans le message (implicitement ou explicitement) ; - Se situe par rapport à l'énoncé (« distance énonciative ») en l'assumant plus ou moins. En effet, le principe de base consiste à partir des traces formelles de la présence d'un énonciateur et de la façon dont il anime la production de son message. De façon plus systématique, l'analyse de la situation d'énonciation vise à dégager : - Le cadre physique et spatio-temporel ; - Le canal de transmission (oral/écrit ; verbal/non verbal) ; - Le cadre symbolique (espace discursif et de représentation) et le système de référence ; - La distribution des coénonciateurs ; - Les éléments constitutifs de l'environnement tels que peuvent le percevoir les coénonciateurs ; - Comment ces derniers, partenaires de la communication, se prêtent mutuellement leurs connaissances142(*). 3.2.6. Les interlocuteurs et la polyphonie
La pragmatique a développé un intérêt marqué pour ce qu'il est convenu d'appeler aujourd'hui la polyphonie et l'hétérogénéité énonciative143(*). Nous le savons, le concept de polyphonie est l'un des concepts centraux de la théorie de l'énonciation. Ses origines remontent aux travaux de M.Bakthine sur le roman polyphonique de Dostoïevski. La particularité de ce roman serait liée à la multiplicité des voix équipollentes qui s'y expriment. Ainsi, la polyphonie qui peut se définir comme le discours d'autrui dans le langage d'autrui se manifesterait sur le mode du recours au langage commun à travers notamment les personnages144(*). Selon ce principe, tout texte doit donc être considéré comme le lieu d'une interaction entre différents discours et analysé comme une instance énonciative plurielle145(*). La polyphonie se redéfinit alors comme la possibilité qu'une lecture d'un énoncé fasse éclater l'énonciation en une multiplicité illocutionnaire désignant, dans le modèle d'Austin, l'acte effectué en disant quelque chose : l'assertif, le directif, l'expressif, etc. aussi, considère-t-il que les interlocuteurs ne sont pas homogènes dans un discours146(*). Selon nos auteurs, pour qu'il y ait réellement polyphonie, il faut que l'acte illocutoire d'assertion, celui qui fait l'objet de l'énonciation, soit attribué à un personnage différent du locuteur ou que le destinataire de l'acte illocutoire puisse être identifié comme un personnage différent de l'allocutaire147(*). Comme on l'aura remarqué, le concept de polyphonie touche à l'un des aspects fondamentaux de la communication : le fait que les sujets communicants font souvent résonner-raisonner dans leur voix, la voix des autres. Les sujets communicants ne sont donc pas seulement des êtres de discours : des rapports d'identification mutuelle les lient très certainement148(*). En tant qu'il est une description de son énonciation, l'énoncé indique les protagonistes de l'énonciation. Il arrive qu'un même énoncé implique que son énonciation accomplisse plusieurs actes illocutoires distincts, qu'une lecture unique d'un énoncé fasse éclater l'énonciation en multiplicité illocutionnaire. Il advient donc indispensable de spécifier les deux pôles de l'interlocution. Pour Ducrot, il y a quatre rôles - figures ou personnages - de l'énonciation : le locuteur, l'allocutaire, l'énonciateur et le destinataire149(*). Il faut distinguer, du côté de l'émission, celui qui produit l'acte de langage(le locuteur) et celui qui en prend la responsabilité (l'énonciateur) ; et du côté de la réception, la personne qui écoute le discours (l'allocutaire) et celle à qui l'acte de langage est adressé (le destinataire). P.Charadeau et D. Maingueneau150(*) parlent des mêmes concepts sous l'expression grammaticale de sujet parlant. L'opposition production/réception renvoie aux rôles que tiennent les partenaires d'un échange verbal lors de son déroulement. Successivement et alternativement, ils tiennent le rôle de celui qui produit l'acte de langage à l'adresse d'un autre, et de celui qui reçoit un acte de langage et tente de l'interpréter. Ainsi, malgré les emplois multiples et souvent croisés, on pourrait répartir les différents sujets du langage de la façon suivante : Tableau n°2 : Les différents acteurs du langage
Source : R. MUKENDI, Analyse pragmatique du discours de Barack H. Obama à Accra. Approche énonciative, mémoire de Licence, Kinshasa, IFASIC, 2010.
**** Dans ce premier chapitre, nous avons tenté d'éclaircir et de définir les concepts théoriques qui nous permettront de comprendre les contours de notre thème de recherche. D'une part, nous nous sommes appesantis sur le cadre théorique qui n'est rien d'autre que celui de la communication socio-éducative. Cette communication qui recourt aux médias et aux dispositifs socio-éducatifs favorise un meilleur apprentissage car, croyons-nous, est un meilleur outil apte à favoriser le changement de comportement. L'approche sémio-pragmatique et l'analyse du contenu soutiendront ce cadre théorique dans la mesure où ceux-ci faciliteront la tâche pour interpréter les autres supports à l'instar du protocole d'enquête. D'autre part, nous avons aligné tous les concepts clés qui nous serviront dans notre travail. Il s'agit de médias socio-éducatifs, de dispositifs socio-éducatifs, discipline positive, violence scolaire, ONG, parce que la saisie de la pertinence du travail en dépend. * 142 L. FAURE, L'approche énonciative pistes et conseils pour l'analyse, http://www.asl.univ-montp3.fr/e21slmc/doc_CM/Approche_énonciative.pdf (consulté le 01 mai 2013) * 143 J.P. MEUNIER, D. PERAYA, op.cit., p.88. * 144 R. MUKENDI, op.cit., (consulté le 16 mai 2013). * 145 J.P. MEUNIER, D. PERAYA, op.cit., p.88. * 146 R. MUKENDI, op.cit., (consulté le 16 mai 2013). * 147 J.P. MEUNIER, D. PERAYA, op.cit., p.91. * 148 J.-P. MEUNIER, D. PERAYA, op.cit., p.91. * 149 DUCROT cité par Id., p.89. * 150 Il est aisé de lire attentivement nos deux auteurs pour comprendre la pertinence de leur réflexion cf. P.CHARADEAU, D. MAINGUENEAU, Dictionnaire d'analyse du discours, Paris, Ed. Seuil, 2002, pp. 556-557. |
|