I.1.5.CONTEXTE HUMAIN
Depuis 1950, une grande partie de la demande croissante en
nourriture dans le monde a été satisfaite par l'intensification
des systèmes de culture, d'élevage et d'aquaculture, plutôt
que par l'augmentation de la surface des zones de production. Ainsi, dans
l'ensemble des pays en développement, entre 1961 et 1999, l'expansion
des surfaces agricoles n'a compté que pour 29 % dans l'augmentation de
la production des cultures. Mais la situation est inverse en Afrique
Sub-Saharienne : la participation de l'expansion des surfaces agricoles a
contribué aux deux tiers de cette augmentation en Afrique Soudano
Sahélienne (ASS) (Millenium Ecosystem Assessment, 2005). On comprend que
l'augmentation de la production en ASS ne peut pas être assurée
uniquement par l'amélioration de la productivité (production par
unité de surface et par unité de temps) parce que le
progrès ne suit pas encore le rythme imposé. De ce fait, on
assiste à une extension des surfaces transformées par
l'agriculture et l'élevage aux dépends des espaces naturels et de
la biodiversité en général. L'effort de
développement en ASS passe donc forcément, dans l'état
actuel des choses, par une accélération de la transformation des
espaces naturels, jusqu'à ce que les schémas de
développement classique bénéficient d'un changement majeur
de stratégie. Cette situation d'ensemble reflète la
réalité de la périphérie du Parc W. Kaabougou et
Kotchari sont deux terroirs villageois prototypes de la
périphérie du parc W.
Sur le plan administratif ces deux terroirs villageois
adjacents au Parc relèvent du département de Tansarga,
désormais commune rurale. Cette commune rurale est elle-même
rattachée à la province de la Tapoa qui dépend de la
Région de l'Est.
Kaabougou est situé sur le flanc Ouest des falaises de
Gobnangou à 18 Km au Nord de Tansarga. C'est un village
détaché de Tansarga constitué d'hameaux et de campements
dispersés.
Kotchari est situé sur le flanc Est du Gobnangou,
à peu près à la même latitude que Tansarga à
25 Km en contournant les falaises et à environ 6 Km en escaladant les
falaises (piste autochtone).
Au-delà des différences de statut qui
régissent ces deux terroirs, le dénominateur commun est sans
conteste la forte poussée cotonnière qui a tendance à
redéfinir les paysages agraires. Face à la richesse des sols de
la zone, seule la mise en valeur extensive guide les populations. Cette
situation a occasionné un nomadisme agricole avec comme directions
cibles les terres périmédales du parc.
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xx
- Les peuplements de la périphérie du Parc
W
La périphérie du parc W du Burkina Faso est
dominée par l'ethnie Gourmantché. Les peulh sont aussi
disséminés à la périphérie des parcs.
Actuellement il existe un brassage ethnique de plus en plus important, surtout
avec le mouvement migratoire des Mossé, des Régions du Plateau
central plus densément peuplés vers la périphérie
pour pratiquer l'agriculture. Les organisations socio traditionnelles sont
cependant toujours bien structurées. On y rencontre des réseaux
villageois dont l'autorité politique endogène incarne la
région ou le groupe ethnique est dominant. Une étude
réalisée par Guissou (ECOPAS, 2004) montre que les
périphéries des W et Arly sont habitées par des
populations qui sont originellement des chasseurs comme les Lompo, Combary et
Koulidiati. Tandis que d'autres comme les Tankoano était
spécialisées dans la teinture. Les wôba étaient des
tisserands et des commerçants.
- Les activités socio
économiques
La taille des populations des villages autour de ce
sous-complexe varie entre 5-500 et atteignent souvent 3501-6500 habitants. Les
principales activités économiques concernent la production
végétale et l'élevage, auxquelles s'ajoutent d'autres
activités telles que la cueillette, la pêche, la chasse et
l'apiculture (GRAD, 2004). , la chasse telle qu'organisée, intervient
peu dans le revenu régional, les produits étant principalement
répartis entre l'Etat et les concessionnaires. Enfin, une forte pression
des activités de cueillette a été rapportée dans le
Parc d'Arly (Casti, 2003).
L'élevage et la transhumance L'élevage occupe le
second rang après l'agriculture dans les activités
socio-économiques. Les espèces élevées sont les
bovins, les ovins, les caprins, les porcins et la volaille. L'élevage de
la volaille est beaucoup pratiqué par les femmes, et leur assure
quelquefois une autonomie financière vis-à-vis du mari et un
apport aux charges de la famille. La pêche et la chasse constituent
également des activités économiques qui contribuent
à la création de revenus. Selon DRED-Est (2003), la transhumance
est omniprésente à la périphérie du Parc. Stenning
définissait la transhumance comme « un mouvement régulier de
bovins, en direction du sud pendant la saison sèche pour répondre
aux manques de pâture et d'eau sur leur terroir d'attache »
(Stenning, 1959 in Convers et al, 2005). Il ajoutait par la suite que «
c'est un modèle constant parmi les bergers peuls de la zone savane
». Actuellement, cette stratégie de déplacement
adaptée aux variations climatiques saisonnières est toujours de
mise dans les zones sahéliennes et soudano-sahéliennes. Mais ses
modalités ont quelque peu changé (Somda, 2005). D'une
manière générale, la transhumance transfrontalière
dans les écosystèmes protégés d'Afrique
soudano-sahélienne a pris de
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l'importance au lendemain des grandes sécheresses des
années soixante dix et quatre vingt. Les pays sahéliens comme le
Niger et le Burkina Faso représentent alors les zones de départ
tandis que les pays côtiers que sont le Bénin et le Togo sont
considérés comme des zones d'accueil. Mais ce canevas est
faussé dorénavant par le front agricole qui tend à
réduire les zones pastorales au profit de la culture de coton (Tamou,
2002). De ce fait, la crise écologique des zones d'attache et la
saturation foncière des zones d'accueil aidant, le
phénomène d'intrusion dans le Parc s'est considérablement
amplifié. Les éleveurs ont profité des campagnes
d'éradication des glossines et des simulies dans la zone du Parc,
jusqu'alors considérée comme insalubre. En outre, les moyens mis
à la disposition (pistes, véhicules, personnel) pour la
surveillance du Parc étant jusqu'ici clairement déficients
(surtout dans les zones d'accueil pastoral), peu d'obstacles s'élevaient
face à la volonté du pasteur d'effectuer sa transhumance au sein
du Parc W.
Ainsi, un recensement aérien au-dessus du Parc
organisé par l'UICN lors de la saison sèche en avril 1994,
évalua les troupeaux transhumants à près de 30 000
à 50 000 têtes de bétail (Convers et al, 2005). Dans le
cadre du Programme MIKE (Monitoring Killing Elephants), un nouveau recensement
aérien a été effectué au mois de mai 2003 sur
l'ensemble du complexe WAPO (W, Arly, Pendjari, Oti-Mondouri) où le
cheptel bovin transhumant a été estimé à environ 65
000 individus. La seule partie du Parc W n'en regroupait toutefois « que
» 20 000. Une baisse de la fréquentation est donc observable
notamment depuis le démarrage du Programme européen ECOPAS, qui a
permis une intensification des moyens de surveillance au sein de l'aire
protégée tout en lançant un processus d'études et
de mesures d'aménagements pour établir des modalités
pérennes de pratiques transhumantes en périphérie du Parc.
Mais avec encore un tel effectif de troupeaux illégaux, les impacts sur
les écosystèmes du parc peuvent toujours s'avérer
préjudiciables et les conflits entre forestiers et éleveurs sont
encore fréquents (Casti, 2003).
L'agriculture et la prédominance de la
cotonculture
L'agriculture occupe la quasi-totalité des
ménages dans la région Sud-est et mobilise environ 80% de la
population de l'Est (DRED-Est, 2003). Les principales productions agricoles
sont les cultures vivrières (mil, maïs, sorgho, riz, fonio) suivies
des cultures de rente et des oléagineux destinés en grande partie
à la commercialisation (coton, arachide, soja, sésame). Le coton
représente de loin la première production de rente.
xxii
Une étude commanditée par la FAO montre qu'au
Burkina Faso et dans d'autre pays de la sous région comme le Mali et le
Bénin la production cotonnière connait une progression
considérable. Au Burkina Faso et au Benin en particulier, les terroirs
villageois adjacents au Parc Transfrontalier W se développent autour de
la culture du coton qui fournit les revenus dont dépendent le bien
être des villageois (Chardonnet et al, 2005). La cotonculture est
l'activité la plus rémunératrice et c'est la seule culture
pour laquelle les paysans bénéficient de crédit de
campagne auprès des banques agricoles (Burini et Ghisalberti, 2001). Le
boom cotonnier a engendré une course à l'espace pour l'expansion
des surfaces emblavées en coton. Cela se fait largement au dépend
des espaces naturelles notamment à la périphérie des aires
protégées. On assiste d'autre part à une augmentation
considérable de l'usage des produits phytosanitaires et une
compétition avec les éleveurs qui, disposant de moins en moins de
pâturage par tête de bétail (Chardonnet et al, 2005) sont
poussés à pénétrer à l'intérieur du
Parc.
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