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Comparaison des populations de poissons amont/ aval du barrage anti- sel de Maka sur la Casamance au Sénégal

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par Ismaà¯la NDOUR
Université Cheikh Anta Diop de Dakar - Diplôme d'études approfondies 2007
  

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IV.5- Reproduction

IV.5.1- Sarotherodon melanotheron heudelotii et Tilapia guineensis

IV.5.1.1-.Fécondité et taille des ovocytes

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Le choix porté sur l'étude de la fécondité relative à la place de la fécondité absolue relève des résultats obtenus sur cette dernière par diverses études (Legendre & Ecoutin, 1989, 1996). Ces auteurs ont montré une relation nettement positive entre le nombre d'ovocytes pondus et le poids corporel des femelles. Ceci reflète l'avantage que présente l'étude du nombre d'ovocytes par kg de femelle ou d'ovaire par rapport à celle du nombre d'ovocytes produits par individu mature.

La fécondité et la taille des ovocytes des poissons varient généralement en fonction des paramètres environnementaux. En situation environnementale difficile, le poisson qui se reproduit doit ajuster sa fécondité ainsi que la qualité des ovocytes produits (Schreck et al., 2001). Plusieurs auteurs ont montré l'existence d'un équilibre entre la fécondité et la taille des ovocytes chez les poissons en général (Albaret, 1982 ; Duarte & Alcaraz, 1989) et chez les tilapias en particulier (Legendre & Ecoutin, 1989, 1996 ; Duponchelle, 1997 ; Gueye, 2006). Les comparaisons des fécondités relatives moyennes et des tailles moyennes des ovocytes de S. m. heudelotii et de T. guineensis montrent une tendance inverse entre les évolutions spatio-temporelles de la fécondité et du diamètre ovocytaire. Globalement les populations d'aval du barrage ayant de fortes fécondités relatives ont en conséquence des ovocytes de petites tailles. Par contre celles d'amont ont des fécondités relatives faibles et de gros ovocytes. Mais la population de poissons de Diana Malary a en particulier une forte fécondité forte en mai.

Cette évolution « en miroir» du nombre et de la taille des ovocytes a déjà été observée chez S. m. heudelotii par Legendre & Ecoutin (1996) en Côte d'Ivoire, par Panfili et al, (2004b) et par Gueye (2006) dans le Saloum.

Ces observations mettent en évidence une stratégie adaptative de ces espèces aux variations spatio-temporelles des paramètres environnementaux, dont la salinité : paramètre le plus fluctuant dans l'estuaire au cours de cette étude. Une approche expérimentale du rôle de la salinité sur la reproduction, réalisée par Gueye (2006) montre clairement qu'elle peut constituer un facteur limitant pour la reproduction chez S. m. heudelotii quand celle-ci avoisine 70. Des résultats similaires ont été obtenus par Panfili et al, (2004b, 2006) au Saloum.

Ces résutats sont proches de ceux que nous avons obtenus lors de cette étude. Une salinité maximale de 75 a été mesurée, salinité où des variations spatiales et temporelles de la fécondité relative et du diamètre ovocytaire moyen de S. m heudelotii et de T guineensis ont été observées. De plus nous avons travaillé sur des populations (d'amont et d'aval du barrage) qui pourraient génétiquement se différencier le long du temps et sous l'effet des conditions particulières dont elles sont exposées. Pouyaud (comm. pers) rapporte que tous les tilapias de

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l'espèce Sarotherodon melanotheron du Sénégal et de la Gambie appartiennent à la sous< espèce S. m. heudelotii avec une structuration génétique des différentes populations probablement liée à l'échelle temporelle. D'autres auteurs (Gourène et al., 1993 ; Pouyaud, 1994 ; Falk et al., 2003) qui ont travaillé sur la génétique des poissons en Afrique de l'ouest, affirment que les différentes populations de S. m. heudelotii devraient être génétiquement différentes.

Ces variations notées sur ces traits de vie montrent que ces espèces doivent adapter leurs caractéristiques reproductives aux variations des conditions environnementales et en particulier à celle de la salinité. En environnement salé tel est le cas de particulier de la partie aval du barrage et du mois de mai, ces tilapias produisent un grand nombre de petits ovocytes. Par contre en eau douce ou faiblement salée (amont du barrage), ils produisent un petit nombre de gros ovocytes. Diverses études (Legendre & Ecoutin, 1996 ; Panfili et al., 2004b ; Gueye, 2006) prétendent qu'un poisson dans un environnement donné doit « choisir» entre: produire un grand nombre de petits ovocytes ou produire un petit nombre de gros ovocytes. Ces stratégies reproductives adoptées par ces espèces en amont et en aval du barrage s'expliquent par le fait qu'elles allouent une partie de leur énergie à l'osmorégulation au détriment de la reproduction. Mais également les petits ovocytes en eau salée (aval du barrage) pourraient diminuer les échanges avec le milieu extérieur et réduire les dépenses énergétiques pour le maintien de la pression osmotique. Ces résultats ont déjà été démontrés chez S. m. heudelotii (Panfili et al., 2004b; Gilles et al., 2004). La production de nombreux ovocytes de petites tailles en aval du barrage peut s'expliquer par l'adoption par ces populations d'une stratégie particulière d'accélération de l'effort de reproduction pour assurer leur pérennité malgré le stress halin. Gueye (2006) avait trouvé des résultats identiques chez S. m. heudelotii dans le Saloum. A l'inverse le petit nombre d'ovocytes de grandes tailles produits par S. m. heudelotii et T. guineensis en amont du barrage pourrait constituer un choix stratégique afin de donner naissance à une progéniture peu nombreuse mais très résistante aux contraintes dont elle pourrait être exposée. Legendre & Trébaol (1991) attribuaient les fortes variations de la fécondité absolue en Côte d'Ivoire à l'incubation buccale. Mais cela n'est pas le cas en amont du barrage, car les mâles incubateurs capturés, ont été rencontrés à Sakar (février) et à Maka aval (mai) : stations et périodes où les plus fortes fécondités relatives ont été trouvées. Ceci confirme une fois encore le rôle de la salinité dans ce phénomène.

La forte fécondité relative moyenne et par conséquent les nombreux ovocytes de petites tailles rencontrés dans la station de Diana Malary au mois de mai, trouvent leurs justifications dans l'envahissement de cette station par les eaux salées de l'aval suite à la destruction des vannes

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au cours de ce mois mais également à la forte température. Cette nouvelle situation a pu augmenter la sensibilité de la population de poisson qui a demeurée longtemps en eau douce à l'augmentation de la salinité. Watanabe & Kuo (1985) ont observé une meilleure résistance à la salinité après une exposition aussi précoce que possible des individus aux fortes salinités. Ces résultats expliquent également l'absence d'une induction identique de la population de Maka amont, station soumise à des invasions temporaires d'eau salée. Les variations spatio-temporelles de ces caractéristiques biologiques sont pratiquement identiques pour S. m. heudelotii et T. guineensis et répondent aux mêmes interprétations. En revanche, l'absence de différence significative de la fécondité relative chez T. guineensis entre l'amont et l'aval du barrage peut être liée au nombre réduit de femelles de stade 4 capturées en octobre et en février au pied amont et aval du barrage, mais également à la dégradation des vannes en mai. Par contre la comparaison des diamètres ovocytaires, nécessite moins de femelles de stade 4 que celle de la fécondité relative, d'où l'absence de différence significative des diamètres ovocytaires s'expliquerait par la large gamme de tolérence aux variations de la salinité en particulier dont dispose cette espèce. Mais également aux effets de la dégradation des vannes en mai. L'absence de différence significative de la fécondité relative chez ces deux espèces entre octobre et février serait liée à la faible variation de la salinité entre ces deux périodes.

La fécondité relative moyenne de S. m heudelotii trouvée dans cette partie de l'estuaire de la Casamance (6172 ovocytes/kg de femelle) peut être rapprochée à celle obtenue par Gueye (2006) dans le Saloum chez cette même espèce (6042 ovocytes/kg de femelle). Le diamètre moyen des ovocytes (1,7 #177; 0,27 mm) trouvé au cours de cette étude est légèrement inférieur à celui obtenu dans le Saloum (2,6 #177; 0,06 mm) par Gueye (2006). Ceci suggère que les populations de poissons de cette partie de la Casamance, qui est un estuaire inverse tout comme l'estuaire du Saloum, sont très stressées (Tableau 24).

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