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La révision constitutionnelle en droit positif congolais et français. Analyse comparative des procédures et limites à  la révision

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par Hervé KIDIA KUBATAKANA
Université de Kinshasa - Licence 2011
  

Disponible en mode multipage

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INTRODUCTION

I.PROBLEMATIQUE

L'interrogation prioritaire ou fondamentale autour de laquelle cette réflexion gravitera sera celle de savoir si les deux textes constitutionnels, à savoir français et congolais prévoient des procédures et des limites à la révision constitutionnelle identiques ou encore voir si le constituant congolais de 2006 est tombé dans le mimétisme constitutionnel quant à la question de révision constitutionnelle. Et la question subsidiaire consistera à voir si les révisions constitutionnelles dans les deux Etats sont influencées par les mêmes facteurs. Nous ne manquerons pas aussi à tourner notre regard vers la question de la constitutionnalité de la loi constitutionnelle dans les deux Etats susmentionnés.

La caractéristique principale et visible de tout Etat aspirant ou postulant à la qualification d'un Etat de droit est l'existence d'une constitution.

Substantiellement définie comme étant l'expression philosophique et politique d'une communauté, d'une unité politique enracinée dans un ensemble culturel. Elle n'est pas seulement un ensemble de règles, mais elle est un texte qui exprime une vision du monde, un projet de société, un projet politique, une idée de l'homme de valeurs1(*).

De cette définition, il en ressort noir sur blanc que la constitution est appréhendée comme le bien le plus précieux ou encore la norme fondamentale que le juriste autrichien HANS Kelsen place au sommet de sa pyramide des normes juridiques.

Jean GICQUEL et jean Eric GICQUEL quant à ce, soulignent : « au sens formel, la constitution se présente comme l'ensemble des règles juridiques élaborées et révisées selon une procédure supérieure à celle utilisée pour la loi ordinaire.il suit de là la norme constitutionnelle est tout à la fois privilégiée et protégée, des lors qu'elle est hors d'atteinte des autres normes qui par définition lui sont inferieures. Elle relève de la super légalité en un mot2(*) »

Il résulte de cette définition que le pouvoir constituant, domine et prime les pouvoirs constitués, à savoir le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif.

Toujours pour exprimer l'importance et la suprématie de la constitution, l'article 16 de la déclaration des droits et du citoyen de 1789 affirme : « toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de constitution »

Pour sa part, Francis DELPEREE opine que : «  la constitution est une digue ou une berge qui encadre le fleuve pour que celui-ci ne déborde pas3(*) ».

Cette définition reconnait à la constitution le rôle d'encadrement juridique des phénomènes politiques sans se subordonner à ces derniers.

Partant d'un point de vue diachronique, KALUBA DIBWA martèle et souligne pour sa part que : « la constitution est un document solennel, écrit selon une procédure spéciale et contenant des règles relatives aux institutions politiques, aux normes régissant celles-ci et les citoyens ainsi qu'aux droits et libertés reconnus à ces derniers 4(*)»

Nous portons totalement suffrage à cette définition pour la simple et bonne raison que dans un style clair et avec des termes simples, l'auteur fait ressortir la particularité et la suprématie de la constitution par rapport à d'autres normes.

De cette revue de littérature, il en ressort que partant de la spécificité et de la particularité qui caractérise son élaboration et les procédures de ses révisions, nous pouvons affirmer que la constitution est le soutènement voire le soubassement d'un Etat qui postule au qualificatif d'Etat de droit.

Bien qu'à l'unanimité la doctrine s'accorde pour admettre la suprématie et le Caractère fondamental de la constitution, cette dernière néanmoins pour demeurer telle, doit aussi s'adapter aux exigences et contraintes temporelles.

C'est ainsi qu'abondant dans le même sens, DJOLI ESENG'EKELI opine : « considérée comme le fondement des préoccupations majeures d'un peuple, la constitution doit s'il echet, être repensée pour s'accommoder aux nouvelles mentalités5(*) »

Dans la même optique, jean GICQUEL et jean Eric GICQUEL estiment pour leur part que : « une constitution est aussi vivante, elle reproduit avec exactitude le cycle biologique. Elle nait, se développe et meurt.son existence est rythmée par l'exercice du pouvoir constituant, appelé successivement originaire au moment de son élaboration et dérivé lors de sa révision6(*) »

Dans la même logique, Philipe SEGUR avance : « toute constitution prétend fonder un ordre juridique et social, et par là même, le faire durer. Cette entreprise n'est concevable qu'à la condition de prévoir simultanément une adaptabilité minimale du système.la sclérose menace toute société qui ne sait pas évoluer et un régime politique qui n'épouse pas les courbes du devenir se soumet à l'usure du temps .Il convient par conséquent d'instaurer un pouvoir constituant dérivé et relatif qui procédera à l'actualisation du texte constitutionnel 7(*)»

Toutes ces affirmations susmentionnées plaident en faveur d'une logique d'adaptabilité de la constitution. Mais est-ce autant dire que la constitution doit subir à tout moment des modifications n'importe comment et par n'importe quel organe ?

C'est ainsi que KAZADI MPIANA opine : « la constitution étant une oeuvre humaine, elle est soumise aux aléas de la vie politique, économico-sociale, culturelle d'un Etat dont elle peut accompagner les différentes mutations ou subir elle-même les conséquences. dans cette dernière hypothèse, le constituant aménage la procédure pour la révision de la constitution en tenant compte soit de l'organe investi de la compétence de sa révision, soit précise les dispositions susceptibles de révision constitutionnelle, soit cristallise pour l'éternité certaines clauses de la constitution, soit prescrit les circonstances dans lesquelles la révision peut s'opérer, soit dicte les modalités de son adoption.il arrive en outre que la constitution se caractérise par le mutisme sur la procédure de sa révision8(*) »

Mais les constitutions sous examen, à savoir française du 04 octobre 1958 et congolaise du 18 février 2006 ne sont pas muettes concernant les procédures de leur révision. Elles ont prévues des procédures voire des limitations en matière de leur révision ; c'est ce qui fonde et explique d'ailleurs leur rigidité.

L'avertissement de Maurice KAMTO n'est pas aussi à passer sous silence quant à la question de la rigidité : « une constitution trop rigide, n'offrant pas de possibilités d'adaptation à l'évolution ou aux transformations sociopolitiques de la société peut, par le blocage qu'elle crée, être à l'origine d'un mouvement ou d'une dynamique révolutionnaire 9(*)»

La doctrine après maintes analyses, avance que certaines révisions constitutionnelles sont influencées par certains facteurs. C'est ainsi que Philipe SEGUR en analysant les révisions dont la constitution française du 04 octobre 1958 a fait l'objet, opine que certaines de celles-ci ont été influencées par certains facteurs politiques et également par le non respect du principe démocratique10(*).

Toujours dans cette même logique, en analysant la révision constitutionnelle du 20 janvier 2011, MAMPUYA KANUNK'A estime pour sa part que cette révision a subie l'influence des quelques facteurs11(*).

Partant de ces argumentations de la doctrine, nous nous posons la question de savoir si existe-il des similitudes quant aux facteurs qui influent sur les révisions constitutionnelles dans les deux Etats sous examen.

Très souvent les facteurs non fondés et non justifiés influençant certaines révisions constitutionnelles, suscitent de nombreuses controverses au niveau de la classe politique.et l'un des arbitres susceptibles de remédier à ce problème est sans doute le juge constitutionnel.la loi constitutionnelle par conséquent doit être soumise au contrôle de constitutionnalité des lois étant donné son caractère intrinsèque de loi.

Mais le juge constitutionnel français ne s'inscrit pas dans cette logique car, il estime pour sa part que le pouvoir constituant est souverain et qu'il lui est loisible d'abroger ou de compléter les dispositions de valeur constitutionnelle12(*).en revanche le Benin s'inscrivant dans la logique italienne, la cour constitutionnelle béninoise se déclare compétente pour examiner la constitutionnalité d'une loi constitutionnelle13(*).

Et la grande question qui se pose ici est de chercher à savoir la position du constituant congolais de 2006 quant à cette question du contrôle de la constitutionnalité de la loi constitutionnelle.

Partant évidemment d'une approche comparatiste, dans les lignes qui constitueront la charpente osseuse ou le corps de ce travail, nous allons nous engager dans cet exercice rocailleux et pénible qui sera celui de répondre aux interrogations susmentionnées.

Pour débuter cet exercice, voyons si notre travail a réellement un intérêt

II.INTERET DU SUJET

Il est classique opine KALUBA DIBWA de dire que le sujet présente un intérêt pratique et théorique14(*).il sied de mentionner par ailleurs aussi que notre travail essaie d'épiloguer sur une question qui n'est pas trop exploitées jusqu'ici dans la doctrine constitutionnelle congolaise, à savoir la question du contrôle de la constitutionnalité de la loi constitutionnelle. Dans une approche comparatiste, cette étude se propose d'analyser les dispositions constitutionnelles consacrant les procédures et limites à la révision dans les deux textes constitutionnels sous examen ; c'est ici même que réside l'intérêt théorique de cette étude. S'inspirant des expériences françaises en matière de révisions constitutionnelles, à travers cette étude, les dirigeants congolais trouveront quelques tentatives de réflexion pouvant solutionner les problèmes relatifs à la révision constitutionnelle ; tel est l'intérêt pratique de cette étude. Mais une telle étude pour qu'elle soit réellement logique, doit se réaliser suivant une méthodologie d'approche.

III.METHODES D'APPROCHE

S'inscrivant dans la logique de madeleine GRAWITS et de PINTO, MBOKO DJ'ANDIMA définit la méthode comme étant la marche rationnelle de l'esprit pour arriver à la connaissance ou à la démonstration de la vérité15(*).Cette définition reconnait à la méthode le rôle d'un véritable guide dans la recherche scientifique.

Bien qu'en droit public une méthode d'approche unique n'existe pas comme le précise Marie-Anne COHENDET, mais recourir à l'approche exégétique, sociopolitique et historique est d'une importance capitale à cause du lien étroit qui existe entre le droit public et l'exercice des pouvoirs publics.

Dans cette étude, l'approche exégétique nous servira à analyser les dispositions constitutionnelles consacrant les procédures et limites à la révision constitutionnelle dans les deux textes en examen et l'approche historique nous permettra de faire une traçabilité brève de l'historicité de l'élaboration de deux constitutions en examen. Elle nous permettra en outre d'avoir un regard sur les textes constitutionnels étrangers ayant influencés le constituant congolais de 2006 concernant l'élaboration des procédures et limites à la revision.car, comme opine KALUBA DIBWA : « une étude de droit public ne peut légitimement ignorer ses bases historiques et ses sources d'inspiration intellectuelle16(*) »

Par ailleurs étant dans une étude comparative, l'approche comparatiste ici sera d'un apport très important et très significatif. Opinant quant à ce, van der MENSBRUGGHE avance dans un style lyrique que : «le comparatiste en tentant de construire de nouvelles pensées, decloissonantes, il oeuvre pour la compréhension du droit voisin et du sien propre.il faut reconnaitre cependant que rien aujourd'hui dans les sciences humaines, ne peut avancer vraiment sans les passeurs de frontières17(*) »

Toujours dans la même perspective, Francis DELPEREE fait remarquer que : « la leçon de la science comparatiste des institutions publiques est aussi de démontrer que par delà les ressemblances institutionnelles qu'il est légitime de relever, voire de grouper en système ou en régime, des différences fondamentales subsistent. Elles tiennent à la diversité des circonstances historiques qui entourent la création des Etats18(*) »

Dans le cadre de la présente étude, l'approche comparatiste nous permettra de confronter et de dégager les ressemblances et les dissemblances existantes entre les procédures et limites à la révision constitutionnelle prévues dans les deux textes constitutionnels en examen, pour enfin en dégager un rapport.

Mais avant tout, la délimitation du sujet s'avère indispensable.

IV.DELIMITATION DU TRAVAIL

SHOMBA affirme que : « tout travail scientifique pour être circoncis, précis et objectif doit être limité dans le temps et dans l'espace car, toute démarche scientifique procède fatalement par un découpage de la réalité.il n'est pas possible d'étudier, de parcourir tous les éléments influents jusqu'aux extrémités de la terre et jusqu'au début de temps19(*) »

Notre travail s'inscrit aussi dans cette logique de chose car, il est limité tant sur le plan temporel que sur le plan spatial.sur le plan spatial, il concerne les républiques française et congolaise. Du point de vu temporel en revanche, cette étude concerne les procédures et limites à la révision constitutionnelles contenues respectivement dans la constitution française du 04 octobre 1958 et dans la constitution congolaise du 18 février 2006.il sied en outre de mentionner qu'étant dans une perspective comparatiste, la discipline scientifique constituant l'assiette et l'assise de cette étude, est bien entendue le droit constitutionnel comparé.

Pour atteindre l'objectif assigné dans le cadre de ce travail, un plan sommaire nous semble également prioritaire.

V.PLAN SOMMAIRE

En dehors de l'introduction et de la conclusion, cette étude comportera trois chapitres. le premier intitulé considérations générales sur la constitution, dans ses différentes sections, il s'appesantira tour à tour sur la notion de la constitution, sur son élaboration, sur la notion de la révision constitutionnelle, sur les procédures et limites à la révision constitutionnelle en général.

Et le deuxième chapitre titré la révision constitutionnelle en droit positif congolais, dans ses sections, ce chapitre examinera respectivement de l'historique de l'élaboration de la constitution du 18 février 2006,de la procédure de révision prévue dans cette constitution, de limites à la révision prévue dans cette constitution, de la pratique de la révision constitutionnelle sous cette constitution et enfin de la question du contrôle de la constitutionnalité de la loi constitutionnelle en république démocratique du Congo.

Le troisième chapitre intitulé la révision constitutionnelle en droit positif français, aura le mérite d'analyser dans ses différentes sections, de l'historique de l'élaboration de la constitution du 4 octobre 1958,de la procédure de révision prévue dans cette constitution, de limites à la révision constitutionnelle prévue dans cette constitution, de la pratique de la révision sous cette constitution et enfin de la question du contrôle de la constitutionnalité de la loi de révision en France.

Le quatrième et dernier chapitre titré considérations comparatives, examinera à son tour des considérations comparatives au niveau de la procédure prévues par les deux constituants originaires en examen, des considérations comparatives au niveau de limites à la révision constitutionnelle prévues dans les deux constitutions, des considérations comparatives sur la question du contrôle de la constitutionnalité de la loi constitutionnelle dans les deux Etats et enfin des considérations comparatives au niveau de la pratique de la révision constitutionnelle dans les deux Etats.

CHAPITRE I : THEORIE GENERALE SUR LA CONSTITUTION

Etant une notion largement abordée dans la doctrine et de peur de tomber dans les rabâchages ou encore dans des études superfétatoires, nous nous limiterons ici qu'à faire un bref rappel sur des notions que nous qualifions d'essentielles à cause du lien étroit qu'elles ont d'avec notre sujet de travail.

Cela étant, dans ses différentes sections, ce chapitre analysera respectivement la définition et des formes de constitutions (section I) ainsi que l'élaboration et de la révision de la constitution (section II)

SECTION I : DEFINITION ET FORMES DES CONSTITUTIONS

S'inspirant des travaux du juriste autrichien Hans Kelsen, la doctrine définie généralement la constitution de deux manières. À savoir au sens matériel et au sens formel.

§1. La constitution au sens matériel

Le professeur DJOLI ESENG'EKELI défini la constitution au sens matériel comme étant : « l'ensemble des règles écrites ou non relatives à l'accession, à l'exercice et à la dévolution du pouvoir politique, aux libertés et droits fondamentaux des citoyens20(*) »

Le professeur MPONGO BOKAKO s'inscrivant dans une logique synthétique, défini pour sa part la constitution du point de vue matériel comme : « un ensemble de normes juridiques régissant le fonctionnement des pouvoirs publics 21(*)»

Très concis et laconique, Dmitri Georges LAVROFF avance pour sa part : « au sens matériel, la constitution n'est autre qu'un ensemble de règles, écrites ou coutumières, qui déterminent l'organisation et le fonctionnement des organes de l'Etat22(*) »

Dans le cadre de notre travail, nous ne saurons porter suffrage à la définition de la constitution dans son sens matériel telle qu'elle est susmentionnée.et cela pour la simple et bonne raison que cette définition ne fait pas ressortir la place suprême de la constitution dans la hiérarchie de normes. Elle l'assimile par contre à une loi ordinaire. Or, les procédures de la révision de la constitution sont spéciales et supérieures à celles utilisées pour la révision d'une loi ordinaire, et cela aussi comme l'affirme si bien carre de MALBERG : « en droit, le critérium qui permet de discerner les lois constitutionnelles des lois ordinaires, réside uniquement dans un élément de forme : la notion de constitution est purement formelle »

Apres avoir examiné la constitution au sens matériel, voyons à présent comment elle se définie au sens formel.

§2.la constitution au sens formel

DJOLI ESENG'EKELI appréhende la constitution au sens formel comme étant : « un ensemble des règles juridiques élaborées et révisées selon une procédure supérieure spécifique à celle utilisée pour la loi ordinaire23(*) »

Abondant dans la même vision de choses, MPONGO BOKAKO défini pour sa part la constitution au sens formel comme étant : « le document qui réglemente les institutions et qui ne peut être élaboré ou modifié que selon une procédure différente des autres formes d'établissement des règles de droit 24(*)»

A la suite de Hans KELSEN, Georges BURDEAU, Jacques CADART et autres, Pierre PACTET et Dominique TURPIN définissent à leur tour la constitution au sens formel comme étant : « l'ensemble des règles qui occupent le rang le plus élevé dans la hiérarchie des normes et qui sont établies et révisées selon une procédure spéciale et supérieure à celle utilisée pour la loi ordinaire 25(*)»

Examinant la constitution au sens formel comme définie par différents auteurs ci-haut cités, nous ne pourrons que donner suffrage à cette conception de la constitution car, elle rentre dans la ligne droite de la vision globale de notre travail. Cette définition fait ressortir avec une clarté sans pareille la place prépondérante de la constitution dans la hiérarchie des normes et la particularité ainsi que la spécialité de la procédure de sa révision.

Intégrant l'élément substance parmi les aspects de la définition de la constitution, DJOLI ESENG'EKELI apporte ici il faut le souligner une nouvelle donne dans la doctrine constitutionnelle.au sens substantiel, il défini la constitution comme étant : « l'expression philosophique et politique d'une communauté, d'une unité politique enracinée dans un ensemble culturel. Elle n'est pas seulement un ensemble de règles, mais elle est un texte qui exprime une vision du monde, un projet de société, un projet politique, une idée de l'homme de valeurs.cet esprit surdétermine et transverse le texte ; c'est son âme, son identité, son principe structurant 26(*)»

Il sied également de dire que cette définition substantielle de la constitution s'apparente dans une certaine mesure à la définition formelle en ce sens qu'elle reconnait à la constitution sa valeur suprême et sacro-sainte dans la société.

La notion première de la constitution ne se résume pas uniquement à sa seule définition. Dire quelques choses sur ses formes nous semble aussi prioritaire.

§1 .formes des constitutions

Traditionnellement la doctrine distingue deux formes des constitutions : la constitution coutumière et la constitution écrite

1. la constitution coutumière

L'on parle de constitution coutumière lorsque les règles concernant le fonctionnement politique de l'Etat, se sont cristallisées progressivement sans être nécessairement inscrites dans un seul texte écrit qui se nomme constitution.

Il faut mentionner que les constitutions coutumières sont aujourd'hui très peu nombreuses. Actuellement, parmi les grands Etats, il n y a que la Grande-Bretagne qui reste fidele à cette forme de constitution. Encore que faudra t-il souligner comme opine Bernard CHANTEBOUT : « la constitution anglaise n'est et n'a toujours été que partiellement coutumière »et cela s'explique par la présence massive de quelques documents écrits à coté de la constitution coutumière. parmi lesquels la grande charte de 1215,la pétition des droits de 1628,l'acts d'habeas corpus de 1679 ayant protégés les sujets britanniques contre l'arbitraire monarchique, ou le bill des droits de 1689,l'act d'établissement de 1701,les parliament acts de 1911 et de 1949 qui organisent l'exercice du pouvoir, le european community act de 1972 et le human rights act de 1998 qui incorporent les traités européens au droit britannique, les Scotland act,governement of wales act et northern ireland act de 1998 qui rendent leur autonomie aux régions périphériques .néanmoins les règles essentielles telles le droit de dissolution de la chambre des communes, l'obligation pour le roi de ne jamais prendre publiquement position dans une controverse politique et de nommer le premier ministre issu du parti possédant la majorité parlementaire, l'interdiction pour le monarque de présider le cabinet, etc., relèvent purement de la coutume et n'en ont pas moins force obligatoire. C'est partant de tous ces éléments que MPONGO BOKAKO affirme qu'il n'existe pas de constitution totalement coutumière, il faudra plutôt parler des constitutions à prédominance coutumière.

2. la constitution écrite

On parle de constitution écrite lorsque les règles fixant le statut du pouvoir de l'Etat et les garanties accordées aux citoyens sont fixées et coulées dans un document écrit qui se qualifie lui-même de fondamental.

L'avantage des constitutions écrites sur les constitutions coutumières réside d'abord dans leur plus grande accessibilité pour le citoyen : ici, même les non-juristes peuvent en consulter le texte pour connaitre leur droits qui y sont garantis.et leur mode d'établissement peut être plus démocratique car le peuple est généralement appelé à se prononcer sur leur adoption ou leur révision, ce qui est évidemment exclu dans le cas des constitutions coutumières.la constitution écrite présente en outre l'avantage de la précision, et c'est la raison pour laquelle la pratique des constitutions écrites a coïncidé avec le déclin de l'absolutisme.

Il sied en outre de souligner que la coutume a toujours joué un rôle considérable dans l'interprétation des constitutions ecrites.si précise qu'elle veuille être, une constitution écrite comporte toujours certaines difficultés d'interprétation, et c'est la coutume qui tranche ces obscurités. C'est ainsi que l'on parle de la coutume constitutionnelle. Elle se définie comme étant : « l'ensemble des usages nés de la pratique de la constitution et considérées comme ayant force obligatoire 27(*)»

La doctrine reconnait à la coutume constitutionnelle quatre caractères, à savoir : la constance qui implique la répétition dans le temps d'un même fait, la continuité qui suppose la répétition ininterrompue d'un même fait, la conviction qui veut dire que la coutume doit être considérée comme une véritable règle de droit, c'est donc le sentiment de l'obligation juridique.et enfin le consensus qui fait allusion à une concertation élargie des parties concernées qui doit aboutir à un accord.

Apres avoir parlé de la définition et des formes des constitutions, voyons à présent ce qui est de son élaboration et de sa révision.

SECTIONII : ELABORATION ET REVISION DE LA CONSTITUTION

§1.élaboration de la constitution

Lorsque l'on parle de l'élaboration de la constitution, on fait directement allusion au pouvoir constituant originaire qui se défini comme étant ce pouvoir qui intervient pour élaborer une constitution.il sied en outre de souligner que le pouvoir constituant est un pouvoir initial et inconditionné.il intervient dans un espace de vide juridique.il est aussi un pouvoir qui bénéficie d'une liberté totale et illimité. Mais ce caractère illimité et quasi divin de son pouvoir doit être relativisé, il doit donc être encadré.car une constitution reflète toujours un certain nombre des valeurs supra-constitutionnelles. C'est-à-dire l'existence dans la hiérarchie des normes, des valeurs supérieures à l'ordre constitutionnel existant.

Le pouvoir constituant originaire intervient donc chaque fois que se fonde un Etat nouveau, ce qui se produit dans trois circonstances :

-il y a d'abord Etat nouveau lorsque, sur un territoire déterminé, il n'y avait pas d'Etat et qu'il s'en crée un.de nos jours, la formation de nouveaux Etats est devenue beaucoup plus fréquente en raison de l'accession à l'indépendance d'un grand nombre de pays.

-il y a également formation d'un Etat nouveau lorsque plusieurs Etats jusque là indépendants décident de se federer.ces Etats remettent en général à une convention ou à une assemblée constituante le soin d'élaborer le projet de constitution sous réserve d'une ratification ultérieure par une majorité qualifiée d'entre eux. C'est ainsi notamment qu'ont été établies la constitution fédérale des Etats-Unis en 1787 et la première constitution fédérale helvétique en 1848.

-il y a enfin apparition d'un Etat nouveau, au regard du droit constitutionnel, lorsqu'un régime s'effondre complètement à la suite d'une révolution ou d'une guerre.

A. Modes d'élaboration des constitutions

Généralement il existe trois modes d'élaboration des constitutions ; à savoir : les modes autoritaires, les modes semi démocratiques, et les modes démocratiques.

Dans les modes autoritaires ici le peuple est mis à l'écart. C'est donc une exclusivité des gouvernants et le peuple ne fait que l'objet d'une ratification ou d'un habillage populaire.les modes autoritaires en question sont l'octroi et le plébiscite. Dans le premier, le titulaire du pouvoir accorde par sa seule volonté une constitution à ses sujets. Dans le second, le peuple intervient juste pour approuver un texte dont il connait ni les tenants ni les aboutissants28(*).

Pour ce qui est des modes semi-démocratiques, ici par contre il s'établit une transaction ou un compromis entre une seule personne et une ou plusieurs assemblées représentatives. Bien qu'il y ait une forte controverse doctrinale quant à la nature du pacte, Jacques DJOLI le considère comme un mode semi-démocratique. Pour accentuer son point de vue, il opine : « l'orthodoxie scientifique nous pousse à le considérer comme un mode semi-démocratique29(*) »

Enfin pour ce qui est des modes démocratiques, il faudra marteler ici que c'est le peuple qui rédige seul sa constitution.il élabore et adopte cette dernière directement en assemblée constituante ou indirectement par l'intermédiaire des représentants elus.et parmi ces modes, nous avons l'élection d'une assemblée constituante ainsi que le referendum. Dans le premier cas, l'élaboration de la constitution est confiée à une assemblée désignée à cet effet. En dehors de la rédaction de la constitution, l'assemblée constituante ou la convention a aussi le pouvoir de l'approuver sans que le peuple y intervienne. Dans le referendum constituant par contre ici, le peuple participe en amont et en aval, de la genèse à l'apocalypse30(*). Dans l'élaboration de la constitution. Bien que mise au point par l'assemblée constituante élue, le dit projet n'entrera en vigueur qu'après la ratification populaire.

§2. Révision de la constitution

La constitution comme nous l'avions bien mentionner dans les lignes introductives de notre travail, bien qu'elle soit la loi suprême et fondamentale d'un Etat, elle doit aussi s'adapter aux nouvelles mentalités et aux transformations sociopolitiques que subissent la société pour n'est pas perdre son caractère fondamentale.car,une constitution trop rigide n'offrant pas de possibilités d'adaptation à l'évolution ou aux transformations sociopolitiques de la société comme l'estime MAURICE KAMTO, peut par le blocage qu'elle crée, être à l'origine d'un mouvement ou d'une dynamique révolutionnaire .

Il faudra encore renchérir que la constitution étant l'expression de la volonté du souverain primaire, ce dernier a par ce fait, toujours le droit imprescriptible de changer sa constitution car, un peuple est toujours maitre de changer ses lois, même les meilleures31(*).

A. Définition de la révision constitutionnelle

Georges VEDEL défini la révision constitutionnelle comme étant : « la modification d'une constitution, c'est-à-dire l'abrogation de certaines de ses règles et leur remplacement par d'autres règles32(*) »

Gérard CORNU avance quant à ce que : « la révision constitutionnelle est un réexamen d'un corps de règles en vue de son amélioration33(*) »

Par contre Olivier BEAUD appréhende la révision constitutionnelle sous deux angles. C'est ainsi qu'il tranche : « sur le plan formel, la révision de la constitution est une technique juridique par laquelle les pouvoirs publics modifient expressément le texte de la constitution, après avoir suivi une procédure spéciale qu'on appelle procédure de revision.sur le plan matériel en revanche, la révision de la constitution est le résultat de cette procédure dans la mesure où elle décrit l'objet de la modification de la constitution34(*) »

Dans leur lexique des termes juridiques, Serge GUINCHARS et Gabriel MONTAGNIER définissent à leur tour la révision constitutionnelle comme étant : « un procédé des techniques juridique par lequel la constitution est modifiée dans sa forme ou plus fréquemment dans son contenu35(*) »

Partant de toutes ces définitions susmentionnées, nous pouvons à notre tour tenter de définir la révision de la constitution comme étant cette opération à travers laquelle la constitution est modifiée en vue de son adaptation aux exigences du moment et surtout en vue de son amélioration.

B.les procédures de la révision constitutionnelle

Contrairement au pouvoir constituant originaire qui lui, a un pouvoir illimité et qui s'exerce en dehors du cadre constitutionnel, le pouvoir constituant dérivé ou pouvoir de révision constitutionnelle lui en revanche, s'exerce dans le cadre limité par la constitution, et ce cadre est appelé procédure de révision constitutionnelle.

Il importe également de souligner que les procédures de révision constitutionnelle dépendent selon que l'on est en face d'une constitution souple ou d'une constitution rigide.une constitution est rigide lorsque sa révision s'opère selon une procédure particulière et spéciale différente de celle utilisée pour les lois ordinaires.la constitution est dite souple en revanche lorsque sa révision n'est soumise à aucune procédure particulière et s'opère selon les modalités prévues pour l'adoption des lois ordinaires.

Il sied de noter qu'actuellement, bon nombre d'Etats sont régies par des constitutions rigides.il est donc rare de rencontrer des constitutions souples. L'exemple le plus caractéristique d'une constitution souple est celui de la grande Bretagne. en dehors de cette dernière, la nouvelle Zélande depuis 1947, la chine depuis 1975 et l'Israël depuis sa création, possèdent aussi des constitutions souples.

B1. Les phases de la procédure de la révision d'une constitution rigide

La procédure de révision constitutionnelle comprend généralement trois phases : l'initiative, l'élaboration ainsi que l'adoption ou la ratification.

a. L'initiative

Le pouvoir de l'initiative de la révision constitutionnelle peut être conféré à l'exécutif exclusivement, au législatif exclusivement, ou encore il peut être partagé entre l'exécutif et le législatif. L'initiative peut aussi être accordée au peuple.

Concernant l'initiative accordée exclusivement à l'exécutif, nous pouvons citer ici le cas de la constitution française de 1852.en son article 31, elle disposait que la proposition de révision du sénat devait être adoptée par l'executif.de même le sénatus-consulte fixant la constitution de l'empire du 21 mars 1870 précisait que la constitution ne peut être modifiée que par le peuple sur la proposition de l'empereur (article 44).

Quant à l'initiative accordée exclusivement au législatif, nous pouvons épingler le cas de la constitution américaine. cette dernière accorde le pouvoir de proposer les amendements à la constitution exclusivement au congrès ou aux législatures des Etats(article 5).aux Etats-Unis, l'exécutif n'a pas le pouvoir de proposer les amendements constitutionnels.de même selon la constitution des philippines, le pouvoir de proposer la révision constitutionnelle appartient exclusivement au congrès.la constitution turque quant à elle, attribue ce pouvoir à seul un tiers des membres de l'assemblée nationale(article 175).

Pour ce qui est de l'initiative accordée concurremment au législatif et à l'exécutif, il faudra souligner que c'est la formule la plus repandue.la France et l'Espagne font partie de cette panoplie d'Etats dont les constitutions consacrent cette forme d'initiative.

Il importe également de signaler que le pouvoir de l'initiative de la révision constitutionnelle peut être conféré au peuple, et dans tel cas l'on parle de l'initiative populaire. C'est le cas en suisse, au Liechtenstein, en Corée du sud et en Uruguay.

a. les conditions de forme dans la phase de l'initiative de la révision

Les initiatives de la révision émanant de l'exécutif ne sont pas en général soumises à des conditions particulières. Cependant en France, le pouvoir de l'initiative du président de la république est soumis à une condition. à savoir, il s'exerce sous la proposition du premier ministre.

Pour ce qui est des initiatives parlementaires, il faudra dire que cela dépend d'une constitution à une autre. Dans certaines constitutions, ces initiatives n'obéissent pas à des conditions particulières. en France par exemple, un membre du sénat ou de l'assemblée nationale peut déposer une proposition de révision. En revanche, dans d'autres constitutions les initiatives parlementaires sont soumises à des conditions particulières, comme la signature de la proposition par un certain nombre des parlementaires.tel est le cas de la Grèce où la proposition de révision doit être faite par au moins cinquante députés (article 110 al.2 de la constitution grecque de 1975).dans d'autres Etats, cette condition est déterminée comme un taux des membres du parlement. Selon par exemple l'article 175, al.1 de la constitution turque : « les révisions constitutionnelles peuvent être proposées par un tiers au moins du nombre total des membres de la grande assemblée » en Algérie et en Uruguay, les révisions peuvent être proposées par la majorité absolue des parlementaires. L'article 5 de la constitution américaine prévoit que la proposition de révision constitutionnelle doit être faite par les deux tiers des chambres ou par les législatures des deux tiers des Etats.

Les initiatives populaires sont elles aussi soumises à quelques conditions.la proposition de la révision constitutionnelle doit être signée par un certain nombre d'électeurs. En suisse par exemple, la proposition de révision constitutionnelle doit être signée par 100.000 électeurs au moins.au Liechtenstein ce chiffre est de 900, en Corée du sud 500.000, en Uruguay c'est 10 pour cent d'électeurs.

b.élaboration de la révision

Dans cette deuxième phase de la procédure de révision comme opine Kemal GOZLER, on décide si l'on doit prendre l'initiative en considération et lui donner suite. Cette décision est prise tantôt par une assemblée réunie à cette fin, tantôt par les assemblées ordinaires.

La forte majorité des constitutions donne le pouvoir d'élaboration de la révision aux organes législatifs ordinaires. Cependant pour assurer la rigidité de la constitution, ces constitutions exigent les conditions plus solennelles que celles prévues pour l'adoption des lois ordinaires. Parmi celles-ci nous pouvons énumérer la dissolution du parlement ayant proposé la révision constitutionnelle36(*),l'adoption de la proposition de la révision en terme identique par les deux chambres dans le cas des parlements bicaméraux37(*),l'exigence de la double délibération dans une procédure de révision constitutionnelle38(*).l'autre condition est celle de la majorité.ici,les constitutions prévoient différentes majorités pour l'adoption de la proposition de la révision constitutionnelle en fonction de leur rigidité.la dite majorité peut être relative, absolue, la majorité de 3/5,la majorité de 2/3,3/4...

c.la ratification de la révision constitutionnelle

La ratification est donc la toute dernière phase dans la procédure de la révision constitutionnelle. Dans bon nombre des cas, les constitutions attribuent le pouvoir de la ratification à l'organe qui a élaboré cette révision constitutionnelle sous réserve de certaines conditions, soit à un organe spécial ou encore au souverain primaire à travers le referendum constituant.

Il importe également de mentionner qu'il existe de par le monde des constitutions qui attribuent le pouvoir de la ratification d'une révision constitutionnelle au chef de l'Etat. Ce pouvoir est en quelque sorte considéré comme un droit de veto accordé au chef de l'Etat en matière de révision constitutionnelle.tel est le cas de la constitution turque du 7 novembre 1982(article 175 al.3)

Pour éviter tout abus dans l'opération de la révision constitutionnelle, le constituant originaire a toujours pris le soin d'instaurer des limites que le constituant dérivé ou institué ne peut dépasser.

C.les limites à la révision constitutionnelle

Le constituant originaire exclut de toute révision certaines dispositions constitutionnelles avec souvent comme objectif final de protéger les bases fondamentales du système Etatique39(*) et également pour pallier à tout abus pouvant subvenir à la suite d'une révision constitutionnelle tel que la fraude à la constitution, que DEBBASCH défini comme : « le procédé par lequel l'autorité de révision utilise ses pouvoirs dans un but autre que celui en vue duquel ils lui ont été conférés, c'est-à-dire dans le but d'établir un régime fondamentalement différent 40(*)»

La doctrine distingue généralement deux types de limites à la révision constitutionnelle : les limites matérielles ainsi que des limites temporelles

C1.les limites matérielles

Les limites matérielles sont celles qui sont relatives à l'objet ou aux matières ne pouvant subir une révision constitutionnelle.

Parmi ces dernières, nous pouvons mentionner l'interdiction de réviser la forme républicaine du gouvernement.et ici, il faudra citer la France qui, depuis la loi du 14 aout 1884, toutes les constitutions qui se sont succédées ont toujours eu à consacrer cette interdiction. C'est aussi le cas des constitutions italienne, portugaise et turque.

Certaines constitutions monarchiques déclarent intangible la forme monarchique de l'Etat. C'est ici le cas des constitutions koweitienne et marocaine.

Il y a également de ces constitutions qui interdisent dans le cadre des limites matérielles, la structure fédérale de l'Etat, le caractère unitaire de l'Etat, l'interdiction de réviser les fondements idéologiques de l'Etat, les dispositions relatives aux droits de l'homme, l'intégrité du territoire.

Il sied de noter que ces limites matérielles susmentionnées sont les principales que l'on rencontre dans bon nombre des constitutions. Cependant il faut signaler comme opine Kemal GOZLER, qu'il est presque impossible de faire une liste exhaustive des limites matérielles à la révision constitutionnelle.car, ces limites sont parfois formulées très largement.tel est le cas de la constitution portugaise qui prévoit 18 limites matérielles à la révision constitutionnelle41(*).

. Les limites temporelles

Les limites temporelles à la révision constitutionnelle sont celles liées au temps pendant lequel la constitution ne peut être révisée.

Ces limites apparaissent souvent de deux façons : la constitution peut interdire sa révision avant l'écoulement d'un certain délai à partir de sa mise en vigueur. Ou bien encore elle peut exclure sa révision dans certaines circonstances42(*).

Pour ce qui est de l'interdiction avant l'écoulement d'un certain délai, ici la question de la révision constitutionnelle ne peut être posée qu'après un certain temps après sa mise en vigueur. Donc, après un certain délai.

La constitution peut donc ici interdire sa révision jusqu'à une date précise, soit elle détermine un délai à partir de son entrée en vigueur.

A titre D'exemple, nous pouvons citer le cas de la constitution française de 1791.à ce sujet, Kemal GOZLER nous renseigne que cette constitution interdisait toute proposition de révision aux deux premières législatures, c'est-à-dire pendant quatre ans.de même la constitution de Paraguay de 1967 interdit sa révision totale avant l'écoulement de dix ans, et sa révision partielle avant cinq ans à partir de sa promulgation(artice 219).

Il faut signaler aussi que certaines constitutions prévoient un laps de temps après la dernière révision. C'est le cas de la constitution portugaise de 1976 qui précise en son article 284 al.1 que l'Assemblée de la République peut réviser la constitution cinq après la date de la publication de la dernière loi de révision constitutionnelle. C'est également le cas de la constitution grecque de 1975(article110.al.6)43(*).

Une autre forme de limitation du pouvoir de révision constitutionnelle dans le temps consiste à prévoir deux délibérations successives séparées par un intervalle de temps pour l'adoption des lois constitutionnelles. C'est par exemple le cas de la constitution italienne de 1947(article 138 al.1) et de la constitution française de 1946(article 90)44(*).

De choeur avec Georges BURDEAU, nous pouvons avancer que l'objet de limites de la révision constitutionnelle dans le temps est de permettre à la nouvelle constitution de se consolider45(*).

Quant à la deuxième hypothèse qui consiste à interdire la révision constitutionnelle dans certaines circonstances, nous dirons ensemble avec DEBBASCH que cette limitation a donc pour but d'éviter toute révision constitutionnelle sous la pression des événements46(*).

C'est justement partant de cette optique que des constitutions interdisent toute révision constitutionnelle notamment lorsqu'elle porte atteinte à l'intégrité du territoire, pendant la période de régence pour les constitutions monarchiques, pendant l'intérim de la présidence de la république, pendant l'état de siège, l'état d'urgence, l'état d'exception ou en temps de guerre47(*).

Les limites à la révision constitutionnelle que nous venons d'examiner ci-haut, sont des limites inscrites dans les textes constitutionnels. Mais faudra t-il encore ajouter qu'il y a certaines limites à la révision constitutionnelle qui sont extra-constitutionnelle, donc non inscrites dans la constitution.la doctrine dans sa quasi-unanimité désigne ces dernières de limites supra-constitutionnelles.

Opinant quant à ce, Serge ARNE appréhende la supra-constitutionnalité comme : « la supériorité de certaines règles ou principes qualifiés normes sur le contenu de la constitution48(*) »

De son coté, Robert BADINTER ajoute à ce sujet que : « la supra-constitutionnalité réside dans la proclamation par le constituant ou le juge constitutionnel, qu'il existe dans la hiérarchie des normes, des valeurs supérieures à l'ordre constitutionnel existant »

Les principes supra-constitutionnels que les positivistes nient toute existence parce que manquant un fondement positif ou textuel, ne sont donc pas susceptibles d'être révisés par le pouvoir de révision constitutionnelle. Ainsi, ils constituent des limites matérielles à la révision constitutionnelle.

Parmi les principes supra-constitutionnels, serge ARNE mentionne entre autre le respect de la dignité de la personne humaine, la non discrimination et la solidarité ainsi que le pluralisme49(*).Stéphane RIALS par contre se fonde sur l'article 16 de la déclaration des droit de l'homme et du peuple de 1789 pour énumérer les principes supra-constitutionnels.il mentionne donc comme principes supra-constitutionnels :l'existence d'une constitution écrite, la nation est seule titulaire du pouvoir suprême et par voie de conséquence constituante, le principe de la séparation des pouvoirs ainsi que la supériorité des droits fondamentaux sur la volonté du constituant50(*).

A la suite de Kemal GOZLER, nous pouvons dire qu'il est pratiquement impossible d'établir une liste exhaustive des limites supra-constitutionnelles. Pour la bonne et simple raison qu'elles sont des fruits des réflexions doctrinales.et donc chaque doctrinaire l'appréhende d'âpres ses cogitations.

Apres avoir examiné des limites à la révision constitutionnelles, il se pose alors la question de leur validité juridique. Est-ce que ces limites contiennent-elles une valeur juridique ?si oui, est-ce qu'elles ont aussi des sanctions ?

D.valeur juridique des limites à la révision constitutionnelle

D'entrée de jeu, devons-nous dire que cette question de la valeur juridique des limites à la révision constitutionnelle, fait l'objet d'un débat doctrinal.les uns estiment que ces limites n'ont aucune valeur juridique.et pour justifier leur position, ils avancent entre autre comme argumentaire qu'une génération ne peut lier une génération future51(*),le pouvoir constituant d'aujourd'hui ne peut lier le pouvoir constituant de l'avenir52(*),la valeur juridique de ces limites est l'illégitimité de mettre des entraves à l'exercice de la souveraineté du peuple, la constitution est une loi et, par nature, une loi est perpétuellement révisable, la possibilité pour le pouvoir de révision constitutionnelle de surmonter ces limites par les révisions successives, c'est-à-dire en abrogeant d'abord la norme consacrant la limite et en suite en révisant la norme dont la révision est interdite.

D'une voix identique avec Kemal GOZLER, nous n'acquiesçons pas la position de cette doctrine.et cela pour la simple raison que cette dernière nie toute existence d'un quelconque pouvoir de révision constitutionnelle. Pour eux, l'autorité de révisons constitutionnelle reste et demeure le constituant originaire. Or, à ce que nous sachions, le constituant originaire en réglant la question de la révision constitutionnelle, crée un pouvoir de révision constitutionnelle et qu'ainsi elles prévoient des limites à son exercice53(*).

L'autre frange de la doctrine à la quelle nous appartenons, avance par contre que ces limites à la révision constitutionnelle ont réellement une valeur juridique.et cela s'explique par le fait qu'en premier lieu les dispositions constitutionnelles qui consacrent ces limites, ont pour objet d'assurer la permanence du régime, ainsi que de protéger l'ordre de l'Etat contre un mouvement révolutionnaire qui, sans déchainement de violence, suivrait les règles prévues pour la révision de la constitution, mais bouleverserait l'ordonnancement constitutionnel fondamental54(*).et en second lieu, ces limites sont prévues par la constitution, et le pouvoir de révision constitutionnelle, étant un pouvoir organisé par la constitution, doit nécessairement les respecter.

C'est ainsi qu'opinant quant à ce, Maurice DUVERGER avance que juridiquement, les limites à la révision constitutionnelle s'imposent à l'organe de révision puisqu'il tient son pouvoir de la constitution, il doit la respecter55(*).

Mais il faudra encore signaler que même les partisans qui soutiennent la thèse de la valeur juridique des limites à la révision constitutionnelle, ont du mal à trouver une sanction en cas de transgression de celles-ci. C'est peut être ici que réside l'inefficacité et la faiblesse de ces limites !

C'est ainsi que Pierre PACTET avance à ce sujet : « en revanche, on est obligé d'admettre que si ces interdictions sont transgressées, il n y a pratiquement pas aucune sanction possible »

C'est la raison qui nous pousse, à la suite d'autres auteurs, de proposer entre autre comme sanction, un contrôle de la constitutionnalité des lois de révision constitutionnelle par la cour constitutionnelle. Cette solution parait à notre point de vue un moyen par excellence contre les éventuels abus pouvant subvenir lors d'une révision constitutionnelle, et le juge constitutionnel devient donc ici comme l'avance WANDJI, un rempart incontournable56(*), un contrepouvoir nécessaire pour éviter le despotisme57(*). À Jacques CHEVALIER de renchérir : « le rôle politique de la juridiction constitutionnelle apparait en pleine lumière en période des fortes tensions »58(*).

Là nous venons d'examiner de fond en comble les hypothèses des constitutions qui prévoient elles-mêmes leurs procédures de révision. Mais lorsque la constitution est caractérisée par un mutisme au sujet de sa procédure de révision, comment alors réviser une telle constitution ? Quelle est donc la solution à adopter face à une telle situation ?

E. procédure de révision constitutionnelle au silence de la constitution

Bon nombre des constitutions restent muettes à propos de leurs procédures de révision. L'histoire constitutionnelle française nous fournis quelques exemples à ce sujet.les chartes françaises de 1814 et de 1830 étaient aussi muettes à propos de la procédure de leur révision.

Cette situation avait donc suscitée dans la doctrine des maintes cogitations. C'est ainsi que Julien LAFFERIERE était arrivé à affirmer que : « juridiquement, la constitution est une loi. Or de part sa nature, la loi est un acte modifiable59(*) » il poursuivit : « si une constitution ne comporte aucune disposition sur sa révision, il faut en déduire qu'elle peut être révisée par la mise en oeuvre de la procédure d'adoption des lois ordinaires.car la constitution est dernière analyse une loi, et par conséquent elle est révisable comme toutes les autres lois60(*) »

Joseph BARTHELEMY et Paul DUEZ affirmeront pour leur part que : « il est des constitutions qui restent muettes quant à leur révision. Le silence de la constitution ne doit pas être interprété comme une consécration de l'immutabilité absolue.la constitution étant susceptible de révision, en dépit de son silence à cet égard apparait une deuxième question plus délicate : quel sera l'organe compétent pour opérer la révision et quelle procédure devra être suivie ? 61(*)»Face à cette interrogation, les deux auteurs proposent l'application du principe logique du parallélisme de forme : « la constitution va donc être modifiée par l'autorité même qui l'a établie et suivant une procédure analogue à celle qui a présidé à son élaboration 62(*)»

Il faut souligner que face à la situation du mutisme de la constitution concernant sa procédure de révision, c'est plus la solution proposée par joseph BARTHELEMY et Paul DUEZ qui nous semble être la plus usitée.

CHAPITRE II : LA REVISION CONSTITUTIONNELLE EN DROIT POSITIF CONGOLAIS

D'emblée, devons nous affirmer que la source de la révision constitutionnelle en droit positif congolais est donc la constitution du 18 février 2006 telle que révisée à ces jours.

Parler en premier lieu du contexte d'élaboration de cette constitution s'avère important.

SECTION I : CONTEXTE D'ELABORATION DE LA CONSTITUTION DU 18 FEVRIER 2006

Comme nous le rappel l'exposé des motifs de la dite constitution, depuis son indépendance, le 30 juin 1960, la république démocratique du Congo est confrontée à des crises politiques dont l'une des causes fondamentales est la contestation de la légitimité des institutions et de leurs animateurs. Cette contestation a pris un relief particulier avec les guerres qui ont déchiré le pays de 1996 à 2003.

En vue de mettre fin à cette crise chronique de légitimité et de donner au pays toutes les chances de se reconstruire, les délégués de la classe politique et de la société civile, forces vives de la nation, réunis en dialogue inter congolais, ont convenu, dans l'accord global et inclusif signé à Pretoria en Afrique du sud le 17 décembre 2002,de mettre en place un nouvel ordre politique, fondé sur une nouvelle constitution démocratique sur base de laquelle le peuple congolais puisse choisir souverainement ses dirigeants au terme des élections libres, pluralistes, démocratiques, transparentes et crédibles.

§1. De l'élaboration de l'avant-projet par la commission du Senat

Pour matérialiser la volonté politique exprimée par les participants au dialogue inter congolais que le sénat, issu de l'accord global et inclusif précité, déposera conformément à l'article 104 de la constitution de la transition, un avant-projet de la nouvelle constitution à l'assemblée nationale.

DJOLI ESENG'EKELI Jacques nous renseigne qu'une commission constitutionnelle fut instituée.des séminaires furent organisés à l'intention de ces sénateurs, qui vont se rendre à Kisangani avec l'appui matériel et financier de l'Electoral Institute South Africa et d'autres partenaires en vue de rédiger la première mouture de la première constitution, qui sera par la suite débattue et adoptée par la plénière du Senat.

Les rédacteurs, renchérit-il, se rendront en voyage d'étude et recevront les conseils des juristes étrangers dont le président du Conseil Constitutionnel français, le professeur MAZEAUD, des contributions turque, polonaise...

Les critiques, confie-t-il, sur le peu de place accordée au peuple Congolais lors de l'élaboration de ce texte, amènera le Senat à organiser des consultations populaires plus au moins confuses pour valider les options dégagées à Kisangani.

§2. L'approbation de la constitution

Transmis à l'Assemblée nationale, ce texte sera adopté le 13 mai 2005, et soumis au referendum du 18 au 19 décembre 2005.les résultats de cette consultation seront publiés le 11 janvier 2006 par la commission électorale indépendante et la cour suprême va proclamer les résultats définitifs le 3 février 2006.

Le statut de rédacteurs de ce texte, avance le professeur DJOLI ESENG'EKELI, des parlementaires non élus mais nommés par des entités et composantes, le peuple étant tenu à l'écart, même s'il a été appelé à ratifier, pousse tout observateur averti à parler d'un plébiscite en lieu et place du referendum.il sied de noter que la doctrine dominante en droit constitutionnel a toujours catégorisée le plébiscite parmi les techniques non démocratiques d'élaboration de la constituions.

Toujours parlant de l'élaboration de la dite constitution, Jean-Louis ESAMBO KANGASHE avance que dans la rédaction de cette dernière, la communauté internationale aux travers les experts internationaux a aussi été d'un apport très important63(*).

En peu des mots, nous retiendrons qu'élaborer dans une situation des graves crises et tensions politiques, la mise en place de la constitution du 18 février 2006 avait comme objectif ultime et primordial de résorber ces crises en mettant en place un régime politique qui aura la légitimité comme assise.

Effectivement que la constitution du 18 février 2006 n'est pa s muette à propos de sa révision. Examinons à présent ce qu'est alors de la procédure et de limites à cette révision.

SECTION II : PROCEDURES ET LIMITES A LA REVISION CONSTITUTIONNELLE SOUS LA CONSTITUTION DU18FEVRIER 2006

En droit positif congolais, les articles 218,219 et 220 de la constitution du 18 février 2006, constituent l'assise de la révision constitutionnelle.

Nous traiterons tour à tour de la procédure et des limites à la révision de la constitution du 18 février 2006.

§1. Procédure de révision de la constitution du 18 février 2006

Comme nous l'avions mentionné dans les lignes précédentes, la procédure d'une opération de révision constitutionnelle passe généralement par trois étapes, à savoir : l'étape de l'initiative de la révision, l'étape de l'élaboration de la révision ainsi que l'étape de l'adoption de la révision.

a. Initiative

La constitution du 18 février 2006 telle que révisée à ces jours, confie ce droit d'initiative de la révision constitutionnelle : au président de la république, au gouvernement après délibération en conseil des ministres, à chacune des chambres du parlement à l'initiative de la moitié de ses membres, à une fraction du peuple congolais, en l'occurrence 100.000 personnes s'exprimant par une pétition adressée à l'une de deux chambres64(*).

En examinant de près ce droit d'initiative de révision constitutionnelle, nous nous rendons compte qu'en république démocratique du Congo, en dehors d'être partagée entre l'exécutif et le législatif, cette initiative est aussi confiée au souverain primaire.la RDC s'inscrit donc dans la liste de ces quelques Etats qui consacrent la pétition à la révision constitutionnelle.

Apres cette initiative, les deux chambres du parlement examineront du bien fondé du projet, de la proposition ou encore de la pétition de révision.

b. décision du bien fondé du projet, de la proposition et de la pétition de révision

C'est l'assemblée nationale et le sénat qui décideront à la majorité absolue de chaque chambre, du bien fondé du projet, de la proposition ou de la pétition de révision65(*).

Il faudra noter qu'ici, chaque chambre votera dans son coin en tenant compte du quorum prescrit. On parle don ici d'un vote séparé.

La phase de l'approbation vient donc couronner la procédure de révision constitutionnelle.

c. approbation du projet, de la proposition ainsi que de la pétition de révision

Quant à l'approbation de la révision, la constitution sous examen précise que la révision n'est définitive que si le projet, la proposition ou la pétition est approuvée par referendum. Elle renchérit, toute fois, le projet, la proposition ou la pétition n'est pas soumis au referendum lorsque l'assemblée nationale et le sénat réunis en congres l'approuvent à la majorité des trois cinquième des membres les composant66(*).

Nous remarquons donc ici que le referendum sur convocation du président de la république67(*) est la règle ou le principe pour ce qui est de l'approbation définitive d'un projet, d'une proposition ou encore d'une pétition de révision. Le congrès ou la réunion de l'assemblée nationale et du sénat constitue donc une exception à ce principe.

En dehors des dispositions constitutionnelles précitées, il faut noter qu'il y a d'autres dispositions constitutionnelles qui parlent de la procédure de révision constitutionnelle. Tels sont les cas des articles 119,125 et 216.l'article 219 dans son alinéa 1, parle de la réunion du congrès en cas de révision constitutionnelle telle que prévue par les articles 218 à 220 de la constitution. L'article 125 à son tour, réglemente la procédure législative de priorité en faveur d'un projet ou d'une proposition de loi déclaré urgent par le gouvernement. L'alinéa 2 de ce même article, interdit aux chambres du parlement de recourir à cette procédure pour des propositions ou des projets de loi portant amendement de la constitution. Dans ce cas, c'est la procédure normale qu'il faudra suivre.et enfin l'article 216 exige une révision constitutionnelle préalable en cas de l'approbation ou de la ratification d'un traité ou d'un accord international comportant une clause contraire à la constitution. Dans ce cas donc, la révision constitutionnelle permettra à la constitution de s'adapter préalablement aux exigences de la dite traité ou accord international que l'Etat veut ratifier.

En dehors des procédures, le constituant originaire congolais de 2006 a prévu aussi des limitations à la révision constitutionnelle.

§2.limites à la révision constitutionnelle prévues par la constitution du 18 février 2006

Comme mentionner autre fois, le but ultime de la mise en place des clauses constitutionnelles intangibles par le constituant originaire est la préservation du régime politique institué.

Les expériences malheureuses vécues par le passé telles que : le monopartisme avec le parti-Etat, la quasi-inexistence du respect des droits et libertés individuels et collectifs tant politique que syndicaux, l'indépendance théorique du pouvoir judiciaire, le simulacre du principe de la séparation des pouvoirs, pour ne citer que celles-là, n'ont pas laissées indifférent le constituant originaire de 2006.c'est ainsi qu'il a rendu intangible certaines dispositions constitutionnelles.

Des limites en question sont généralement de deux ordres : les limites matérielles qui sont liées aux matières ne pouvant faire l'objet d'une révision ainsi que des limites temporelles liées à leur tour au temps pendant lequel aucune révision ne peut avoir lieu.

Comme limites matérielles prévues par la constitution du 18 février 2006,nous pouvons mentionner entre autre :l'interdiction de réviser la forme républicaine de l'Etat, le principe du suffrage universel, la forme représentative du gouvernement, le nombre et la durée des mandats du président de la république, l'indépendance du pouvoir judiciaire, le pluralisme politique et syndical ainsi que toute révision constitutionnelle ayant pour objet ou pour effet de réduire les droits et libertés de la personne ou de réduire les prérogatives des provinces et des entités territoriales décentralisées68(*).

Pour ce qui est des limites temporelles, le constituant a donc ici interdit toute révision constitutionnelle pendant :l'état de guerre, l'état d'urgence ou l'état de siège, pendant l'intérim à la présidence de la république, lorsque l'assemblée nationale et le sénat se trouvent empêchés de se réunir librement69(*).

Il sied de noter que contrairement au droit comparé où bon nombre des textes constitutionnels rendent intangibles l'atteinte à l'intégrité du territoire ainsi que la forme républicaine70(*) ou monarchique de l'Etat, la république démocratique du Congo aux travers les dispositions de l'article 220 de sa constitution, parait prolifique en matière de clauses d'intangibilités.

En dehors des limites inscrites explicitement dans le texte constitutionnel, lesquelles limites que nous venons d'examiner ci-haut, une autre frange de la doctrine parle aussi des limites non contenues explicitement dans les textes constitutionnels, appelées limites supra-constitutionnelles. Examinons à présent ces limites dans le contexte constitutionnel congolais.

§3.limites supra-constitutionnelles à la révision constitutionnelle en république démocratique du Congo

D'emblée, nous devons mentionner que l'école positiviste, nie toute existence des limites supra-constitutionnelles.et cela pour la bonne et simple raison que ces dernières manquent des fondements ou d'assises textuels.

L'école jus naturaliste porte par contre totalement suffrage à l'existence des limites supra-constitutionnelles.car, bien que non inscrites explicitement dans la constitution, ces limites concourent néanmoins à la mise en place du texte constitutionnel.et le fait pour le constituant dérivé de respecter ces limites, constitue un des palliatifs contre toute controverse pouvant subvenir à la suite d'une opération de révision constitutionnelle.

Dans la même perspective avec joseph KAZADI MPIANA, nous estimons utile de préciser le caractère illimité de la compétence du constituant originaire.il sied de noter que l'opération de l'élaboration de la constitution par le constituant originaire est encadré par certains principes dont l'importance est indéniable.ces principes peuvent ressortir du droit international, notamment les normes de jus cogens que le constituant ne peut meconnaitre.il en est de même des principes de la constitution matérielle que Bruno GENEVOIS définie comme étant un système ordonné à travers un complexe de valeurs dans lesquelles se reconnaissent les forces politiques et sociales dominantes71(*).

La Constitution congolaise du 18 février 2006 s'inscrit aussi dans cette perspective.et cela parce qu'elle résulte du rapport des forces qui s'est déterminée lors de la tenue du dialogue inter congolais sanctionné par l'adoption de l'accord global et inclusif et l'inauguration conséquente d'un nouvel ordre juridique et politique transitoire, culminé par l'adoption de la part des acteurs politiques de la dite constitution comme la résultante du processus d'une transition concertée et pilotée autour de l'ingénierie institutionnelle appelée 1plus 4.cette formule faisait donc référence à un président qui était entouré de quatre vice-president.et de l'autre part nous avions le comité international d'accompagnement à la transition, CIAT en sigle.

Ce texte constitutionnel qui a était adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative du Sénat et adopté par referendum, est donc en quelque sorte l'expression du compromis politique de la période post conflit. Certains principes dégagés lors de ce compromis et qui ne sont pas expressément repris dans ce texte, n'en constituent pas moins des principes à valeur constitutionnelle dès lors qu'ils participent de sa finalité et de sa philosophie.

Toujours dans l'objectif d'éviter toute tension ou contradiction pouvant surgir en marge d'une révision constitutionnelle, la cour constitutionnelle béninoise a reconnue le principe du consensus comme ayant une valeur à caractère constitutionnel et par conséquent non susceptible de méconnaissance lors du processus de révision.72(*)

La référence au droit comparé sur cette question se justifie par l'influence que ce dernier a exercée sur le constituant originaire congolais. ESAMBO KANGASHE un des expert congolais ayant participé à l'élaboration du projet de cette constitution, nous renseigne que le constituant avait fait appel aussi au droit comparé, notamment belge, français, mauricien, sud-africain, béninois, sénégalais et togolais73(*).

Il affirme, d'ailleurs avec raison que le texte constitutionnel adopté, traduit l'idée d'une constitution de compromis et d'équilibre74(*). Dans l'énumération donc des clauses d'intangibilité constitutionnelle, il faudrait tenir compte aussi de la constitution matérielle et la cour constitutionnelle congolaise ferait oeuvre utile à s'en inspirer aux fins d'éradiquer le risque que les majorités parlementaires et présidentielles fortes puissent disposer de la constitution selon leur desiderata75(*). D'où l'importance après avoir établi la constitution, d'enraciner le constitutionnalisme congolais qui doit faire preuve de maturité aux travers de l'indépendance dont devait faire montre la cour constitutionnelle à l'instar des pouvoirs législatif et exécutif76(*).

En définitive, nous dirons que jusqu'ici, les limites supra-constitutionnelles à la révision constitutionnelle ne sont pas encore d'une existence effective en droit congolais.car, le juge constitutionnel congolais ne s'est pas encore prononcé là-dessus. A la suite des auteurs susmentionnés, nous proposons donc à ce que cette cour puisse ériger le principe du consensus comme limite supra constitutionnelle à la révision constitutionnelle.cet acte viendra encore tonifier cet élan de la démocratie qui est encore jusqu'ici somnambulique.

§.4 la question du contrôle de la constitutionalité de la loi de révision constitutionnelle dans le contexte congolais

D'emblée, il nous faut rappeler que par définition, une loi constitutionnelle ou une loi de révision constitutionnelle est cette loi qui porte modification de la constitution. Elle se distingue de la loi ordinaire par le vote renforcé dont elle fait l'objet ainsi que par la procédure spéciale de révision constitutionnelle prévue77(*).

Dans les lignes précédentes, nous avons eu à rappeler que le contrôle de la constitutionnalité de la loi constitutionnelle par la cour constitutionnelle, constitue l'un de ces moyens efficaces pour contrecarrer les éventuels abus pouvant subvenir à la suite d'une opération de révision constitutionnelle.

Mais après lecture approfondie de la constitution du 18 février 2006 telle que révisée à ces jours, nous avons remarqué que sur cette question du contrôle de la constitutionnalité de la loi de révision constitutionnelle, le constituant originaire est caractérisé par un mutisme. Le constituant congolais n'a pas donc clairement spécifié si la loi de révision constitutionnelle pouvait être soumise à une procédure de droit commun concernant le contrôle de la constitutionnalité de loi étant donné son caractère intrinsèque de loi.

C'est ainsi que pour couvrir cette lacune, s'inspirant du droit comparé et à la suite d'autres auteurs, nous plaidons pour la constitutionnalisation de ce principe du contrôle de la constitutionnalité de la loi constitutionnelle en RDC. en clair donc, nous proposons ceci : si l'initiative de la révision constitutionnelle émane du chef de l'Etat, du gouvernement ou du parlement, et que ledit projet ou la proposition est voté à la majorité de 3/5 sur pied de l'article 218 dans son alinéa 4 de la constitution, la loi constitutionnelle ne serait pas épargnée du contrôle de la constitutionnalité.et cela parce que, les chambres, réunies en congres, ne constituent pas le souverain primaire, mais plutôt les représentants du souverain primaire.

En revanche, si l'initiative de révision constitutionnelle émane du peuple, la loi constitutionnelle issue d'une telle initiative serait à l'abri de tout contrôle de constitutionnalité.et cela pour la simple raison que les actes de la démocratie directe échappent donc à tout juge congolais. Le peuple est lui-même titulaire du pouvoir, souverain primaire78(*).

Il faut noter que la constitution du 18 février 2006 a connu il y a sous peu une révision. Examinons à présent si cette révision s'est opérée dans le respect des dispositions constitutionnelles y relatives.

§4.pratique de la révision constitutionnelle sous la constitution du 18 février 2006

Il faut souligner au préalable que la constitution congolaise du 18 février 2006 a déjà inscrit son nom dans le livre d'or des constitutions congolaises.car, contrairement à la plus part de ses prédécesseurs, cette dernière a atteint le seuil de 5ans d'existence sans qu'aucune révision soit portée à ses dispositions.la première révision qu'elle vient de connaitre depuis sa promulgation en 2006, date de janvier 2011.

Rappelons tout de même que cette révision du 20 janvier 2011 a concernée au total 8 articles de la constitution.

l'article 71 organise l'élection du président de la république à la majorité simple des suffrages exprimés ;l'article 110 institue le droit du député national ou du sénateur de retrouver son mandat après l'exercice d'une fonction politique incompatible ;l'article 126 prévoit l'ouverture des crédits provisoires dans le cas du renvoi au parlement, par le président de la république, pour une nouvelle délibération du projet de lois des finances votés en temps utile et transmis pour promulgation avant l'ouverture du nouvel exercice budgétaire ;l'amendement introduit à l'article 149 consiste en la suppression du parquet dans l'énumération des titulaires du pouvoir judiciaire. celui-ci est dévolu aux seuls cours et tribunaux.cet amendement remet ainsi en harmonie l'article 149 avec les articles 150 et 151 qui proclament l'indépendance du seul magistrat du siège dans sa mission de dire le droit ainsi que son inamovibilité ;les articles 197 et 198 reconnaissent au président de la république, sans restreindre les prérogatives des provinces, en concertation avec les bureaux de l'assemblée nationale et du sénat ,le pouvoir de dissoudre une assemblée provinciale ou relever de ses fonctions un gouverneur de province en cas de crise grave et persistante menaçant le fonctionnement régulier des institutions provinciales ;l'article 218 reconnait au président de la république le pouvoir de convoquer le referendum prévu au dit article pour l'approbation d'une révision constitutionnelle ;l'article 226 transfère à la loi la compétence de fixer les modalités d'installation de nouvelles provinces citées à l'article 2 de la constitution79(*).

Notre analyse autour de cette révision du 20 janvier 2011 sera beaucoup plus axée sur le point de vue juridique et subsidiairement politique.et cela en vue de s'écarter du sensationnel et de toutes passions. En clair donc, nous chercherons à voir si cette révision s'est déroulée dans le respect des procédures et limites telles que prévues par le constituant originaire.

Comme mentionner plus-haut, la procédure de révision d'une constitution passe par trois étapes principales, à savoir : l'initiative, l'élaboration de la révision et enfin la promulgation de la révision.

1.initiative

Sur pied de l'article 218, al.1 de la constitution du 18 février 2006, l'initiative d'une révision constitutionnelle appartient concurremment au Président de la République, au Gouvernement après délibération en conseil des ministres, à chacune des chambres du Parlement à l'initiative de la moitié de ses membres, à une fraction du peuple congolais, en l'occurrence 100.000 personnes s'exprimant par une pétition adressée à l'une de deux chambres.

Pour ce qui est de la révision constitutionnelle du 20 janvier 2011, il faut souligner que cette dernière a été initiée au niveau de l'Assemblée Nationale sous l'instigation du gouvernement.il s'agissait donc d'une proposition de loi.

2.élaboration de la révision constitutionnelle

Dans les lignes susmentionnées, nous avions eu à rappeler que dans bon nombre des cas, le constituant originaire confie la mission d'élaboration de la révision constitutionnelle soit à l'une des chambres du parlement ou soit encore au congrès qui suppose la réunion de deux chambres du parlement.

S'inscrivant dans cette perspective, la constitution du 18 février 2006 dispose en son article 218, al.2 dispose clairement que toutes les initiatives de révision constitutionnelles seront soumises à l'assemblée nationale et au sénat qui décident a la majorité absolue de chaque chambre, du bien fondé du projet, de la proposition ou de la pétition de révision.

Quant à la révision du 20 janvier 2011, il faut souligner qu'elle a été aussi confiée au parlement pour élaboration. En voici le parcours :

-le 11 janvier 2011 :l'assemblée nationale qui compte 500 membres juge, la proposition de la loi de révision constitutionnelle recevable. Prennent part au vote 327 députés nationaux.324 se prononcent favorablement, deux voix contraires et une abstention ;

-le 13 janvier 2011 : le sénat approuve cette proposition.sur 108 membres qu'il compte, 81 participent au vote.71 se déclarent favorables,1 sénateur contraire et 9 abstentions ;

-le 14 janvier 2011 : le sénat et l'assemblée nationale mettent sur pied une commission ayant pour tache d'examiner la proposition de loi portant révision de la constitution ainsi que les amendements à y apporter ;

-le 15 janvier 2011 :l'adoption définitive de la loi de révision constitutionnelle par les deux chambres réunies en congres.sur les 608 membres que compte le parlement congolais, 504 ont participé au vote et les résultats se présentent de la manière suivante : 485 pour, 8 contre et 11 abstentions. A souligner par ailleurs que l'opposition n'a pas pris part au vote.

-le 20 janvier 2011 : promulgation par le président de la république de la loi portant révision constitutionnelle ;

-le 1 février 2010 : publication au journal officiel de la loi portant révision de certains articles de la constitution du 18 février 2006.

Examinons à présent si cette révision constitutionnelle a péchée contre les limites à la révision telles qu'instituées par le constituant originaire.

Nous devons tout de même rappeler que les limites à la révision constitutionnelles sont généralement de deux ordres : les limites temporelles d'un coté et les limites matérielles de l'autre.

A propos des limites temporelles à la révision constitutionnelle, la constitution du 18 février 2006 dispose en son article 219 qu'aucune révision ne peut intervenir pendant l'état de guerre, l'état d'urgence ou l'état de siège ni pendant l'intérim à la présidence de la république ni lorsque l'assemblée nationale et le sénat se trouvent empêchés de se réunir librement.

Pour ce qui est des limites matérielles à la révision constitutionnelle, la constitution dispose sur pied de son article 220 que la forme républicaine de l'Etat, le principe du suffrage universel, la forme représentative du gouvernement, le nombre et la durée des mandats du président de la république, l'indépendance du pouvoir judiciaire, le pluralisme politique et syndical, ne peuvent faire l'objet d'aucune révision constitutionnelle.il renchérit dans son deuxième alinéa qu'est formellement interdite toute révision constitutionnelle ayant pour objet ou pour effet de réduire les droits et libertés de la personne ou de réduire les prérogatives des provinces et des entités territoriales décentralisées.

A la lumière de ce qui précède, nous pouvons déduire suivant la logique juridique que nous avons adoptés pour analyser cette révision constitutionnelle et en la regardant à la loupe, que sur le plan de la procédure et des limites à la révision telles que prévue par le constituant originaire, cette révision a été sur ce point de vue quasiment irréprochable. le problème par contre s'est posé sur le plan politique.car,à voir la célérité à la bagbo 80(*)avec laquelle cette révision s'est opérée, pousserait tout observateur averti à voir en filigrane de cette révision, des intentions non révélées de la part de la majorité au pouvoir initiatrice de cette dernière.car,comme opine le professeur Auguste MAMPUYA : « une question d'une telle importance ferait l'objet de grands et longs débats au moins pour aborder toutes se facettes ,recueillir des avis, confronter les opinions, essayer de convaincre sur le bien-fondé afin que l'aventure ne soit pas suivie des contestations »

Partant de ce point de vue, nous pouvons affirmer en outre que sous l'angle politique, cette révision a péchée contre le principe du compromis et du consensus qui ont concouru fortement pour la mise en place de la constitution du 18 février 2006.c'est ainsi que nous avions plaidé dans les lignes précédentes en faveur de la reconnaissance par la cour constitutionnelle, du principe du consensus comme étant une valeur à caractère constitutionnel tel que c'est aussi le cas dans d'autres Etats africains81(*).à notre humble point de vue, cette dernière demeure sans doute l'un de ces moyens efficaces permettant de lutter contre les contestations pouvant subvenir lors d'une opération de révision constitutionnelle.

CHAPITRE III : LA REVISION CONSTITUTIONNELLE EN DROIT POSITIF FRANÇAIS

Il sied également de rappeler ici que la source ou l'assise de la révision constitutionnelle en droit positif français demeure sans doute la constitution du 4 octobre 1958 telle que révisée à ces jours.

Mais avant de nous lancer totalement dans ses profondeurs et confins, voyons un peu ce qu'ont été les temps forts de son élaboration.

SECTION I : BREVE HISTORIQUE DE L'ELABORATION DE LA CONSTITUTION FRANCAISE DU 4 OCTOBRE 1958

Concernant les origines de la constitution française du 04 octobre 1958, jean GICQUEL et jean Eric GICQUEL écrivent quant à ce que la V ieme république se situe au point de rencontre d'une cause conjoncturelle appelée crise de la décolonisation et une cause structurelle appelée crise des instituions82(*).

La IV république française est morte du mal de la décolonisation en algerie.la rupture qui se produit à Alger, le 13 mai 1958, à la suite d'un coup d'Etat militaire, débouche sur le retour au pouvoir du général de gaulle, le 1 juin de la même année83(*).

Au cour de cette IV République toujours, il faudra signaler aussi que la situation financière de la république française était de plus en plus critique. à cela s'est ajoutée une crise de fonctionnement. En moins d'un an, deux gouvernements se sont succédé : celui du radical Maurice BOURGES et celui du radical Félix gaillard. René COTY alors président de la république, après avoir pressenti plusieurs candidats, il désigne pierre PFLIMLIN, président du mouvement républicain populaire pour occuper l'hôtel Matignon ou la primature84(*).

Mais ce gouvernement dirigé par pierre PFLIMLIN, semble dépourvue d'autorité.car, l'armée et la police apparaissent peu. En s'en prenant au gouvernement général, siège du ministre résident, la foule d'Alger a attaqué un de symboles du pouvoir français. Cette crise de fonctionnement était transformée en crise de régime. Incapable de résorber la crise, le gouvernement de pierre PFLIMLIN présentera sa démission le 28 mai 1958.

Le 29 mai 1958, le président de la république René COTY, annonce dans un message au parlement son intention d'appeler le générale de GAULE. Le 1 juin 1958, c'est l'investiture du gouvernement de GAULLE par l'assemblée nationale. Le 2 juin de la même année, l'assemblée nationale vote trois lois en faveur du nouveau gouvernement : une loi accordant les pouvoirs spéciaux en Algérie, une loi accordant les pleins pouvoirs législatifs pour 6mois au chef du gouvernement et enfin une loi constitutionnelle modifiant la procédure de révision de la constitution prévue par l'article 90 de la constitution de 1946, jugée trop lente. Elle impose au gouvernement les conditions de procédure. Elle lui confie le soin d'élaborer un avant projet qui doit être soumis ensuite à l'avis d'un organisme créée spécialement pour l'occasion appelé comité consultatif constitutionnel85(*).

Par ailleurs, la loi énonce 5 principes que le gouvernement doit mettre en oeuvre dans la nouvelle constitution. à savoir :le suffrage universel est la source du pouvoir, le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif doivent être effectivement séparés afin que chacun assument la plénitude de ses attributions, l'autorité judicaire doit demeurer indépendante et enfin la constitution doit permettre d'organiser les rapports de la république avec les peuples associés.il s'agi donc par ces conditions et ces principes, d'éviter tout rapprochement avec le vote des pleins pouvoirs par le parlement, le 10 juillet 1940,au maréchal PETAIN.

Les travaux de préparation du projet de constitution ont été élaborés au cour de la période allant de mi-juin à mi-juillet.les dits travaux de préparation n'étaient autre que un compromis entre les idées du général de GAULLE ?exprimées notamment dans son discours de Bayeux du 16 juin 1946,et partagées par Michel DEBRE, véritable chef d'orchestre de ces travaux de préparation, et celles des parlementaires.ils mettent à contribution deux équipes :un comité technique d'expert, constitué des juristes membres du conseil d'Etat et de spécialistes du droit représentant les ministres d'Etat, pilotés par les gardes des sceaux, Michel DEBRE.et la seconde équipe elle, réunit à Matignon les quatre ministres d'Etat et deux juristes représentant le chef du gouvernement. Cette dernière équipe a un rôle important de proposition et d'amendement des propositions du comité d'experts.les travaux commencés à la mi-juin, aboutissent un mois plus tard à un avant-projet, appelé le cahier rouge.

Le 29 juin 1958, le comité consultatif constitutionnel est mis en place. Le 8 aout, le général de GAULLE vient répondre aux questions des membres du comité consultatif constitutionnel. Le travail du comité s'achève le 14 aout 1958.le gouvernement adopte alors l'avant projet et le transmet au conseil d'Etat. La campagne pour le referendum a été lancée le 4 septembre 1958 avec la présentation de la constitution par le général de GAULLE place de la république.les grands partis appellent à voter oui sauf pierre POUJADE, le parti communiste et un nouveau regroupement, l'union des forces démocratiques. Le camp des partisans de non n'obtient que 20,75 pour cent des voix.la nouvelle constitution est donc adoptée par 79,25 pour cent des voix avec une faible abstention de 15,6 pour cent. Le oui l'emporte dans tous les départements sans exception conférant aux nouvelles institutions une très large légitimité et interdisant toute contestation. Le général de GAULLE est, par la même occasion, plébiscité par les francais.et la constitution de la V ieme république française sera promulguée le 4 octobre 1958 et publiée au journal officiel le lendemain86(*).

De tout ce qui précède, nous pouvons conclure que la mise en place de la constitution du 4 octobre 1958 instituant la cinquième république, a été motivée par la guerre d'Algérie et par la fragilité des institutions issue de la quatrième république.et cette dernière avait entre autre comme mission principale de mettre en place des institutions fortes et solides,

SECTION II : PROCEDURES ET LIMITES A LA REVISION CONSTITUTIONNELLE SOUS LA CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

Les articles 89, 7,11 et 16 de la constitution française du 4 octobre 1958 telle que révisée à ces jours, demeurent sans doute l'assise juridique du droit positif de la révision constitutionnelle en France.

Nous examinerons à tour de rôle de la procédure de révision constitutionnelle ainsi que des limites à la révision constitutionnelle telles que prévues par la constitution du 4 octobre 1958.

§1. Procédure de la révision constitutionnelle

La constitution française du 4 octobre 1958 règle essentiellement la procédure de révision constitutionnelle dans son article 89 alinéa 1 à 3, sous le titre: « de la révision ».

Ledit article dispose : « l'initiative de la révision constitutionnelle appartient concurremment au président de la république sur proposition du premier ministre et aux membres du parlement. Le projet ou la proposition de révision doit être voté par les deux assemblées en termes identiques.la révision est définitive après avoir été approuvée par référendum. Toute fois, le projet de révision n'est pas présenté au referendum lorsque le président de la république décide de le soumettre au parlement convoqué en congres ; dans ce cas, le projet de révision n'est approuvé que s'il réunit la majorité des trois cinquième des suffrages exprimés. Le bureau du congrès est celui de l'assemblée nationale. Aucune procédure de révision ne peut être engagée ou poursuivie lorsqu'il est porté atteinte à l'intégrité du territoire.la forme républicaine du gouvernement ne peut faire l'objet d'une révision. 87(*)»

a.initiative

De la lecture de cet article 89, il en ressort clairement qu'en France, l'initiative de la révision constitutionnelle est partagée entre les membres du parlement et le président de la république. Les propositions de révision constitutionnelle faites par les membres du parlement n'obéissent pas à des conditions particulières. Comme le souligne LAVROFF, elles sont déposées sous le nom de proposition de révision dans les formes habituellement suivies pour l'exercice du droit de proposition en matière législative88(*).

Il faut également souligner que contrairement à d'autres constitutions, la constitution française n'exige pas la signature de la proposition de révision par un certain nombre de parlementaires. En France, un seul membre de l'assemblée nationale ou du sénat peut déposer une proposition de révision.

En revanche, l'initiative du président de la république est soumise à une condition. À savoir : le président de la république ne peut exercer son pouvoir d'initiative que sur proposition du premier ministre. En d'autres termes, l'initiative du président de la république doit être contresignée par le premier ministre. Ainsi, la proposition de révision du président de la république nécessite un accord entre lui et le premier ministre.

Il sied donc de se demander ici si le président de la république est tenu d'accepter la proposition du premier ministre. Une poignée de la doctrine à laquelle nous adhérons, estime quant à ce, qu'au terme de l'alinéa 1 de l'article 89, l'initiative appartient au président de la république. Ce qui suppose qu'il est libre de donner suite ou pas à la proposition lui faite par le premier ministre.par contre le président de la république doit respecter le contenu de la proposition du premier ministre. Enfin, on remarquera que le président de la république a la liberté d'appréciation quant à l'opportunité d'une initiative de révision constitutionnelle émanant du premier ministre.

b.élaboration de la révision

En France, l'élaboration de la révision est confiée au parlement. L'alinéa 2 de l'article 89 précise que le projet ou la proposition de révision doit être voté par les deux chambres en terme identique.il en ressort noir sur blanc qu'aucune révision de la constitution ne peut s'opérer dans le cadre de l'article 89 sans l'accord de deux chambres. le sénat et l'assemblée nationale se trouvent donc dans une situation d'équidistance. le premier ministre ne peut provoquer la réunion d'une commission mixte paritaire, et le gouvernement ne peut pas demander à l'assemblée nationale de statuer définitivement (article 45).l'article 89 impose donc un bicamérisme parfait ou égalitaire.

Il faut aussi mentionner qu'au parlement, comme pour les lois ordinaires, les projets ou les propositions de révision sont votés à la majorité relative. C'est-à-dire à la majorité des suffrages exprimés sans tenir compte des absences ou d'abstentions. Mais seulement, contrairement aux lois ordinaires, pour ce qui est de projet ou de la proposition de révision, le gouvernement ne dispose d'aucun moyen de contrainte à l'égard du sénat.

c.approbation de la révision

pour ce qui est de l'approbation de la révision, l'article 89 prévoit deux alternatives : le recours au referendum ou le vote par le parlement réuni en congres.de la lecture de cet article 89,il en ressort que le referendum constitue la principale voie ou le droit commun en ce qui concerne l'approbation de la révision. En d'autres termes, le referendum est la règle et les congres l'exception. mais seulement selon toujours cet article 89,le recours au referendum est d'application obligatoire pour ce qui est de l'initiative parlementaire .pour le projet de révision, la constitution précise quant à ce que, lorsque le président de la république décide de soumettre le projet de révision au parlement convoqué en congres, dans ce cas le projet ne passera pas par le referendum. Selon Philippe SEGUR, cette différence de traitement s'explique par le fait que le constituant originaire a voulu éviter à ce que le parlement qui a déjà l'initiative et l'approbation de la révision, ne maitrise la procédure de bout en bout. Le constituant a voulu en quelque sorte limiter le parlement. C'est ainsi qu'il a institué le referendum obligatoire pour ce qui est de proposition de la révision constitutionnelle89(*).

Il appert encore de mentionner ici que le choix entre les congres et le referendum appartient au président de la république.la décision du président de la république est soumise au contreseing du premier ministre. Ce choix nécessite donc un compromis entre le premier ministre et le président de la république.

Et si jamais le congrès n'approuve pas le projet de révision à la majorité qualifiée comme l'exige l'article 89, dans ce cas le recours au referendum n'est plus possible.

En dehors de la procédure principale de la révision constitutionnelle prévue par l'article 89, il faut noter qu'en France, il existe une autre procédure concurrente de révision constitutionnelle.la dite procédure est celle prévue par l'article 11 de la constitution.

§2.procédure concurrente de la révision constitutionnelle

Cette procédure est prévue par l'article 11 de la constitution du 4 octobre 1958.le texte de cette disposition précise : « le président de la république sur proposition du gouvernement pendant la durée des sessions ou sur proposition conjointe de deux assemblées ,publiées au journal officiel ,peut soumettre au referendum tout projet de loi portant sur l'organisation des pouvoirs publics, comportant approbation d'un accord de communauté ou tendant à autoriser la ratification d'un traité qui, sans être contraire à la constitution ,aurait des incidences sur le fonctionnement des institutions. Lorsque le referendum a conclu à l'adoption du projet, le président de la république le promulgue dans le délai prévu à l'article précédent ».

Il faut souligner que cette procédure concurrente de révision a été utilisée pour la toute première fois en 1962 par le général DE GAULLE. ayant vu la voie de l'article 89 bloquée, le général avait contourné le parlement pour confier son projet de révision constitutionnelle relative à l'instauration de l'élection du chef de l'Etat au suffrage universel direct à l'approbation populaire.et pour justifier ce comportement, il invoqua l'article 11 de la constitution lui autorisant de soumettre notamment au referendum tout projet de loi portant sur l'organisation des pouvoirs publics.il y a lieu de rappeler que la population en son temps a eu à approuver ce projet de révision. Précisons en plus que cette interprétation du général de GAULLE à propos de cette révision constitutionnelle avait nourri des amples contestations. Consulter pour trancher là dessus, le conseil constitutionnel français en son temps avait décliné sa compétence au motif que le referendum est une expression directe de la souveraineté nationale conformément aux prescrits de l'alinéa 3 de l'article 3 de la constitution.et depuis lors, cette procédure a été instituée comme procédure concurrente de révision constitutionnelle.

De la lecture attentive de cet article 11, contrairement à la procédure principale de l'article 89, il en ressort que c'est le chef de l'Etat qui détient le monopole en matière d'initiative de révision constitutionnelle.

§3.limites à la révision constitutionnelle

Nous examinerons à tour de rôle de limites matérielles ainsi que de limites temporelles.

a. Limites matérielles

Dans la constitution française sous examen, il n y a qu'une limite matérielle. Elle est prévue à l'alinéa 5 de l'article 89.explicitement, le dit alinéa précise : la forme républicaine du gouvernement ne peut faire l'objet d'une révision.

Plus explicite, jean GICQUEL avance avec raison que cet alinéa protège en d'autres termes la forme démocratique du gouvernement. En protégeant la démocratie, il s'oppose donc à la restauration d'une monarchie et à l'établissement d'une république dictatoriale.

b.limites temporelles

La constitution française du 4 octobre 1958 ne renferme en son sein que deux limites temporelles. À savoir : l'interdiction de réviser la constitution lorsqu'il est porté atteinte à l'intégrité du territoire ainsi que l'interdiction de réviser la constitution pendant l'intérim à la présidence de la république.

La première interdiction temporelle est prévue par l'alinéa 4 de l'article 89 de la constitution du 4 octobre 1958.le dit alinéa précise : aucune procédure de révision ne peut être engagée ou poursuivie lorsqu'il est porté atteinte à l'intégrité du territoire.

S'exprimant à propos de cette disposition constitutionnelle, Dmitri Georges LAVROFF précise que cette dernière est justifiée par le fait que, si l'intégrité du territoire n'est pas respectée au moment où la proposition de révision de la constitution est faite, on peut craindre qu'il y ait des pressions exercées sur les assemblées parlementaires, ou sur le peuple, qui les empêchent d'exprimer librement leur volonté.

La seconde limite temporelle est prévue par le dernier alinéa de l'article 7 de la constitution du 4 octobre 1958.il mentionne quant à ce : « il ne peut être faite application ni des articles 49 et 50 ni de l'article 89 de la constitution durant la vacance de la présidence de la république ou durant la période qui s'écoule entre la déclaration du caractère définitif de l'empêchement du président de la république et l'élection de son successeur ».

Il faut noter, comme le remarque Bernard BRANCHET, que cette disposition a été adoptée par la loi numéro 62-1292 du 6 novembre 1962 qui prévoit l'élection du président de la république au suffrage universel direct. Cette disposition, précise-t-il, a été interprétée comme ayant pour objet d'empêcher que le parlement ne prenne prétexte, voire ne profite, de la vacance inopinée de la présidence de la république, pour procéder à une révision hâtive de la constitution et tendant à remettre en cause l'élection du président de la république au suffrage universel direct.

Toujours dans la même perspective, Dmitri Georges LAVROFF avance à son tour : cette disposition est tout à fait justifiée par le fait que la révision de la constitution est un acte d'une très grande importance politique et que l'urgence d'y procéder n'est pas telle qu'il faille en accorder l'exercice à un président de la république par intérim qui n'exerce ses fonctions que pendant quarante-cinq jours au maximum90(*).

§4.pratique de la révision constitutionnelle sous la constitution française du 4 octobre 1958

Il convient de noter, comme le remarque si bien Jean GICQUEL, que la constitution française du 4 octobre 1958 a connue jusqu'à ces jours, 24 révisions constitutionnelles dont la dernière en date est celle de 2008.

Dans le cadre de notre étude, nous ne saurons examiner toutes ces révisions constitutionnelles.par conséquent, nous nous limiterons qu'à examiner la seule révision constitutionnelle du 6 novembre 1962.Et notre choix sur cette dernière, se justifie par le fait que c'est au cours de cette révision que l'élection du président de la république française au suffrage universel direct a été instituée ;cette élection au suffrage universel direct est l'un des éléments caractéristiques et fondamentaux de la cinquième république française. Et la seconde raison de notre choix, qui parait à nos yeux la principale, est parce que cette révision constitutionnelle est la toute première sur laquelle le conseil constitutionnel français a eu à statuer.celà étant, elle nous permettra en outre de parler directement de la question du contrôle de la constitutionnalité de la loi constitutionnelle en France.

1. la révision constitutionnelle du 6 novembre 1962

D'emblée il faut souligner que cette révision constitutionnelle s'est opérée suivant la procédure concurrente, à savoir celle prévue par l'article 11 de la constitution du 4 octobre 1958.Il faut mentionner en outre, contrairement à la procédure de l'article 89, celle de l'article 11 ne prévoit aucune formalité entre l'adoption d'un projet de loi par le peuple et sa promulgation par le président de la république.

Les articles 6 et 7 de la constitution du 4 octobre 1958 prévoyaient l'élection du chef de l'Etat au suffrage universel indirect. D'âpres ces articles, le chef de l'Etat français devrait être voté par les parlementaires. Voulant rompre à ce système qui paraissait moins démocratique selon le général DE GAULLE, c'est ainsi qu'il initia la révision de ces articles avec comme objectif ultime d'instaurer l'élection du président de la république au suffrage universel direct91(*).

Ayant vu la voie de l'article 89 bloqué après une motion de censure par les députés, il décidera de contourner le parlement. Pour réussir son entreprise, il décidera par la suite de soumettre son projet à l'approbation populaire ou referendum.et pour justifier cette position il invoquera l'article 11 de la constitution lui rendant compétent de soumettre au referendum tout projet de loi portant sur l'organisation des pouvoirs publics.il faut en plus mentionner que cette interprétation de l'article 11 de la constitution faite par le général DE GAULLE en vue de réviser la constitution, a suscitée des nombreuses controverses de la part de ses détracteurs92(*).

Parmi les mecontents, figurait aussi le président du sénat. Ce dernier décidera de saisir le conseil constitutionnel sur pied de l'article 61 de la constitution du 4 octobre 1958 en date du 3 novembre 1962 afin que ce dernier se prononce sur la conformité de cette loi constitutionnelle à la constitution. a titre de rappel, cet article 61 de la constitution précise : « les lois organiques, avant leur promulgation, et les règlements des assemblées parlementaires, avant leur mise en application, doivent être soumis au conseil constitutionnel qui se prononce sur leur conformité à la constitution.aux mêmes fins, les lois peuvent être déferrées au conseil constitutionnel, avant leur promulgation, par le président de la république, le premier ministre, le président de l'assemblée nationale, le président du sénat ou soixante députés ou soixante sénateurs. »

Selon l'auteur de cette saisine, Gaston MONNERVILLE, président du sénat en son temps, les lois au sens de l'article 61 alinéa 2, englobaient non seulement les lois votées par le parlement, mais aussi celles adoptées par voie du referendum.car, renchérit-il, les termes du second alinéa de l'article 61 ne comportent aucune distinction entre les lois votées par le parlement et celles qui ont été adoptées par referendum93(*).

À son tour, le conseil constitutionnel s'était déclaré incompétent pour statuer sur la conformité de cette loi de révision constitutionnelle à la constitution. Pour justifier sa position, il avancera comme avis que cette loi était l'expression directe de la souveraineté nationale. En conclusion, le conseil constitutionnel avancera qu'il n'avait pas reçu compétence d'assurer la régulation de l'expression directe de la souveraineté nationale94(*).

À la question de l'interprétation de l'article 61 de la constitution, le conseil constitutionnel soutiendra que les lois dont la constitution a entendue viser dans son article 61 sont uniquement les lois votées par le parlement et non point celles adoptées par le peule au referendum95(*).

De ce qui précède, nous pouvons en déduire qu'en France, le conseil constitutionnel n'est pas compétent pour statuer sur le contrôle de la constitutionnalité d'une loi constitutionnelle approuvée par le souverain primaire au referendum. Mais pour ce qui est de la question du contrôle de la constitutionnalité d'une loi de révision constitutionnelle émanant du parlement, bien que la constitution ne soit pas explicite là-dessus, le silence et le mutisme du conseil constitutionnel sur cette question, nous laisse entendre que cette dernière est susceptible d'être soumise à un contrôle de constitutionnalité par le conseil constitutionnel.

CHAPITRE III : CONSIDERATIONS COMPARATIVES

Comme nous avions eu à le relever dans les premières lignes de notre travail, le comparatiste en tentant de construire de nouvelles pensées, decloissonantes, il oeuvre pour la compréhension du droit voisin et du sien propre.il faut reconnaitre cependant que rien aujourd'hui dans les sciences humaines ne peut avancer sans les passeurs de frontières96(*).

Toujours dans la même perspective, Francis DELPEREE souligne que la leçon de la science comparatiste des institutions publiques est aussi de démontrer que par de là les ressemblances institutionnelles, qu'il est légitime de relever, voire de grouper en système ou en régime, des différences fondamentales subsistent. Elles tiennent à la diversité des circonstances historiques qui entourent la création des Etats97(*).

Partant des points de vue sus évoqués, ce chapitre aura donc le mérite, comme son intitulé le mentionne clairement, de relever dans ses différentes sections les ressemblances et les dissemblances en matière des procédures et des limites à la révision constitutionnelles contenues dans les constitution sous examen pour enfin en dégager un rapport unique.

Pour ce faire, nous comparerons à tour de rôle des procédures et des limites à la révision constitutionnelle pour aboutir enfin à la question de la constitutionnalité de la loi constitutionnelle.

SECTION I : CONSIDERATIONS COMPARATIVES AU NIVEAU DE LA PROCEDURE DE REVISION CONSTITUTIONNELLE

Comme souligner autre fois, la procédure d'une révision constitutionnelle passe généralement par trois étapes principales. A savoir : l'initiative, l'élaboration et enfin la ratification ou l'adoption.

§1.au niveau de l'initiative

À propos de l'initiative, la constitution congolaise du 18 février 2006 précise en son article 218 alinéa 1 : « l'initiative de la révision constitutionnelle appartient concurremment au président de la république, au gouvernement après délibération en conseil des ministres, à chacune des chambres du parlement à l'initiative de la moitié de ses membres, à une fraction du peuple congolais, en l'occurrence 100.000 personnes s'exprimant par une pétition adressée à l'une de deux chambres ».

Parlant toujours de l'initiative, la constitution française du 4 octobre 1958 souligne en son article 89 alinéa 1 : « l'initiative de la révision constitutionnelle appartient concurremment au président de la république sur proposition du premier ministre et aux membres du parlement »

Après une lecture minutieuse, nous remarquons une nette démarcation dans l'écriture de ces deux constituants originaires. Le premier, à savoir le constituant originaire congolais est beaucoup plus prolifique par rapport au constituant originaire francais.car, il confie ce pouvoir d'initiative de révision à quatre autorités : le président de la république, le gouvernement, le parlement et enfin au souverain primaire. Pendant que le constituant originaire français se limite juste à le confier au président de la république et aux membres du parlement.

Nous remarquons en outre que l'initiative du président de la république en France, est conditionnée par le contre seing du premier ministre. Ce qui n'est pas le cas pour l'initiative du président de la république en République Démocratique du Congo.ici, sur le plan juridique, la proposition du premier ministre ne lie pas le chef de l'Etat en matière de révision.

Pour ce qui est de l'initiative du parlement, il faut souligner qu'en RDC cette dernière est soumise à une condition.il faut donc que la proposition de révision soit signée par la moitié des membres composant chacune de chambres du parlement. C'est-à-dire qu'elle doit être signée par la moitié de députés nationaux et des sénateurs. Alors qu'en France, cette condition n'est pas admise. Ici, même un seul membre du parlement peut initier une proposition de révision constitutionnelle.

Enfin, devons-nous mentionner que sur cette question d'initiative, la République Démocratique du Congo est théoriquement plus démocratique que la république française. Car, au-delà de confier ce pouvoir aux autorités politiques, le constituant originaire congolais le confie en outre au souverain primaire. A notre humble point de vue, c'est une véritable expression de la démocratie.

§2.au niveau de l'élaboration

À propos de cette phase, le constituant originaire congolais précise en son article 218 alinéa 2 : « chacune de ces initiatives est soumise à l'assemblée nationale et au sénat qui décident, à la majorité absolue de chaque chambre, du bien fondé du projet, de la proposition ou de la pétition de révision »

Sur cette même question, le constituant originaire français sur pied de l'article 89 alinéa 2 précise à son tour : « le projet ou la proposition de révision doit être voté par les deux assemblées en termes identiques »

Nous remarquons donc ici, que les deux constituants originaires confient, comme d'ailleurs c'est généralement le cas, ce pouvoir d'élaboration de la révision constitutionnelle au parlement. Mais seulement à propos de la décision du bien fondé de cette révision, il y a une nuance dans l'écriture de ces deux constituants originaires. Le constituant congolais précise quant à ce que, le parlement décidera à la majorité absolue de chaque chambre du parlement. Le constituant originaire français précise par contre que l'initiative de révision doit être votée par les deux assemblées en termes identiques.

Nous comprenons ici que, contrairement au constituant originaire congolais, le constituant originaire français prône sur cette question un bicamérisme parfait ou égalitaire.

§3.au niveau de l'approbation ou de la ratification

Pour ce qui est de l'approbation ou de la ratification de la révision, le constituant originaire congolais mentionne en son article 218 et plus spécialement dans ses alinéas 3et 4 : « la révision n'est définitive que si le projet, la proposition ou la pétition est approuvée par referendum sur convocation du président de la république. Toute fois, le projet, la proposition ou la pétition n'est pas soumis au referendum lorsque l'assemblée nationale et le sénat réunis en congres l'approuvent à la majorité de trois cinquièmes des membres les composant »

Le constituant originaire français, sur ce sujet, précise en son article 89 et plus singulièrement dans ses alinéas 2 et 3 : « la révision n'est définitive après avoir été approuvée par referendum. Toute fois, le projet de révision n'est pas présenté au referendum lorsque le président de la république décide de le soumettre au parlement convoqué en congres ; dans ce cas, le projet de révision n'est approuvé que s'il réunit la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés. Le bureau du congres est celui de l'assemblée nationale »

A lire attentivement ces deux dispositions constitutionnelles, nous remarquons que les deux constituants originaires font du referendum la règle ou le principe pour ce qui est de l'approbation de la révision, et par contre l'approbation par le congres, comme étant une exception à ce principe. Mais la dissemblance entre les deux dispositions constitutionnelles réside au niveau de l'exception qui est l'approbation par le congres. Sur cette question, le constituant originaire congolais soumet à l'approbation parlementaire toute formes d'initiatives, à savoir : le projet, la proposition et la pétition. Alors que le constituant originaire français, se limite à soumettre à l'approbation parlementaire, le seul projet de révision bien qu'il soit approuvé, comme c'est le cas en RDC, par la majorité de trois cinquième des membres du parlement.

Selon cette disposition, en France, l'application du referendum comme l'unique moyen d'approbation d'une révision constitutionnelle est obligatoire lorsque l'on est en face d'une initiative parlementaire ou d'une proposition de révision. Alors que pour le projet de révision, il existe une autre alternative. À savoir : la décision du président de la république de soumettre ce projet au parlement réuni en congres. Pendant qu'en RDC, l'approbation par referendum tout comme par le congres, concerne toutes les formes d'initiatives de révision prévues par le constituant originaire : projet, proposition et pétition. Opinant quant à ce, Philippe SEGUR avance que le constituant originaire français n'a pas voulu à ce que le parlement qui a déjà l'initiative et le pouvoir d'approbation, ne maitrise la procédure de bout en bout. C'est ainsi qu'il a rendu le referendum obligatoire en cas d'initiative parlementaire.

Nous remarquons en outre, que sur la question de l'approbation par le congrès d'une révision constitutionnelle, le constituant originaire français précise que le bureau du congrès en question sera celui de l'assemblée nationale. Mais le constituant originaire congolais est caractérisé par un mutisme sur cette question du bureau du congrès.

SECTION II : CONSIDERATIONS COMPARATIVES AU NIVEAU DE LIMITES A LA REVISION CONSTITUTIONNELLES

Les limites à la révision constitutionnelle, avions nous rappelé, sont généralement de deux ordres : les limites matérielles et les limites temporelles.

§1.au niveau de limites matérielles

Le constituant originaire congolais rend intangible : la forme républicaine de l'Etat, le principe du suffrage universel, la forme représentative du gouvernement, le nombre et la durée des mandats du président de la république, l'indépendance du pouvoir judiciaire, le pluralisme politique et syndical, les droits et libertés de la personne, les prérogatives des provinces et des entités territoriales décentralisées98(*).

Sur cette même question, le constituant originaire français à son tour, rend intangible la forme républicaine du gouvernement99(*).

De la lecture attentive de ces deux constitutions sur cette question, il en ressort noir sur blanc que la constituions du 18 février 2006 est plus prolifique par rapport à la constitution du 4 octobre 1958 qui, elle, est parcimonieuse sur cette question. Pendant que le constituant originaire français se contente à prévoir qu'une seule limite matérielle, le constituant originaire congolais en prévoit par contre huit. Nous sommes tenté d'affirmer encore ici que la république démocratique du Congo est théoriquement plus démocratique que la république française sur cette question de limites temporelles à la révision.

Certains auteurs français avancent que l'intangibilité de la forme républicaine du gouvernement implique également l'intangibilité des principes démocratiques tels : le suffrage universel, les droits de l'homme, la séparation des pouvoirs, le pluralisme, l'alternance au pouvoir. Mais nous n'acquiesçons pas ce point de vue.car, si réellement ce constituant originaire avait l'intention de rendre intangibles tous ces principes susmentionnés, il le mentionnerait d'une manière explicite dans la constitution comme c'est le cas avec le constituant originaire congolais et tant d'autres.

§2.au niveau de limites temporelles

L'article 219 de la constitution du 18 février 2006 interdit toute révision constitutionnelle pendant : l'état de guerre, l'état d'urgence ou l'état de siège, pendant l'intérim à la présidence de la république, pendant que l'assemblée nationale et le sénat se trouvent être empêchés de se réunir librement.

La constitution française du 4 octobre 1958 interdit dans ses articles 89 alinéa 4 et 7 alinéa 1, toute procédure de révision constitutionnelle lorsqu'il est porté atteinte à l'intégrité du territoire et pendant l'intérim à la présidence.

Apres une lecture à la loupe de ces deux dispositions constitutionnelles, nous constatons que les deux constituant originaires évoluent dans la même logique sur cette question.ils n'ont pas voulu à ce que la révision constitutionnelle se déroule sous pression ou d'une façon hâtive.ils ont tous deux exprimés la même idée bien qu'en des termes différents.

SECTION III : CONSIDERATIONS COMPARATIVES AU NIVEAU DU CONTROLE DE LA CONSTITUTIONNALITE DE LA LOI DE REVISION

Il sied tout de même de rappeler que, le contrôle de la constitutionnalité d'une loi de révision constitutionnelle ou loi constitutionnelle par une juridiction constitutionnelle, est l'un de ces mécanismes efficaces permettant de prévenir et de sanctionner tout abus pouvant subvenir à la suite d'une procédure de révision constitutionnelle.

Après avoir lu de fond en comble la constitution congolaise du 18 février 2006, nous n'avions pas pu remarquer une seule disposition constitutionnelle attribuant ce pouvoir du contrôle de la constitutionnalité de la loi constitutionnelle à la cour constitutionnelle. L'article 160 alinéa 1 de la constitution sous examen  se contente à disposer que : « la cour constitutionnelle est chargée du contrôle de la constitutionnalité des lois et des actes ayant force de loi ».

Jusque là également, la cour constitutionnelle congolaise ne s'est pas encore prononcée sur cette question.

Cela étant, nous ne pouvons pas aussi pour autant affirmer que cette dernière est incompétente pour connaitre de cette question. Encore qu'aucune disposition constitutionnelle ne lui rende incompétente d'une façon explicite là-dessus.

De même lorsque nous lisons la constitution française du 4 octobre 1958, nous remarquons, comme le constituant originaire congolais, le constituant originaire français est aussi caractérisé par un mutisme sur cette question. Mais par contre en France, le conseil constitutionnel a eu déjà à se prononcer sur cette question. Saisi sur demande du président du sénat Gaston MONNERVILLE pour statuer sur la constitutionnalité de la révision constitutionnelle du 6 novembre 1962 instituant l'élection du chef de l'Etat français au suffrage universel direct, le conseil constitutionnel français va se déclarer incompétent au motif que cette révision constitutionnelle était approuvée par le souverain primaire au referendum. Les actes posés par le souverain primaire ne peuvent donc faire objet d'aucune limitation ou contrôle.

De ce qui précède, nous pouvons en déduire que contrairement à la RDC où le juge constitutionnel ne s'est pas encore prononcé sur la question du contrôle de la constitutionnalité de la loi constitutionnelle, en France plutôt, le juge constitutionnel à eu déjà à se prononcer là-dessus. Il s'est donc déclaré incompétent pour statuer sur la constitutionnalité d'une loi de révision constitutionnelle approuvée par le souverain primaire au referendum.

SECTION IV : CONSIDERATIONS COMPARATIVES AU NIVEAU DE LA PRATIQUE DE LA REVISION CONSTITUTIONNELLE

Sur cette question, il faudra souligner que comparativement à la constitution française du 4 octobre 1958, celle du 18 février 2006 est encore trop jeune en termes d'âge. Celle de 2006 depuis sa mise en vigueur jusqu'à ces jours, compte 7 ans d'existence .alors que la constitution française, depuis sa mise en application jusqu'à ces jours, en compte 54.c'est ce qui explique aussi son effectif élevé de révision constitutionnelle par rapport à la constitution congolaise.

Jean GICQUEL nous renseigne que la constitution française du 4 octobre 1958 à connue jusqu'à ces jours 24 révision constitutionnelle dont la dernière en date est celle de 2008.la constitution congolaise du 18 février 2006 a dans son compteur qu'une seule révision constitutionnelle. À savoir, celle intervenue en date du 20 janvier 2011.

CONCLUSION

Placé au sommet de la hiérarchie des normes, la constitution est incontestablement l'assise fondamentale d'un Etat et le symbole d'une gestion rationnelle de la res publicae. Mais cette dernière, pour conserver ces caractéristiques, doit aussi être capable de s'adapter aux nouvelles mentalités et aux transformations sociopolitiques que subissent la société. Et le procédé par lequel la constitution s'adapte aux nouvelles mentalités, c'est ce que l'on appel révision constitutionnelle.

Mais cette révision ne s'opère pas dans l'imbroglio ou d'une façon abracadabrantesque de peur de se retrouver face à une situation de la masturbation constitutionnelle. C'est ainsi que le constituant originaire a toujours pris le soin au moment de l'élaboration de la constitution, de prévoir des procédures à suivre et des limites à respecter. La procédure d'une révision constitutionnelle passe généralement par trois étapes, à savoir : l'initiative, l'élaboration et enfin l'adoption ou la ratification. Pour ce qui est de limites à la révision, elles sont généralement de deux ordres, à savoir : les limites matérielles qui sont liées à la matière constitutionnelle non susceptible de révision et les limites temporelles qui sont elles, liées au temps pendant lequel une révision constitutionnelle ne peut s'opérer. Il existe également certaines limites qui ne sont pas inscrites explicitement dans la constitution. La doctrine qualifie ces dernières de limites supra-constitutionnelles ou extraconstitutionnelles.

Les constitutions française du 4 octobre 1958 et congolaise du 18 février 2006, contiennent elles aussi des procédures ainsi que de limites à la révision, C'est ce qui explique d'ailleurs leur rigidité. En confrontant les procédures et limites à la révision contenues dans ces deux constitutions, certes nous avions remarqué de ressemblances. Mais il faudra aussi et surtout souligner que nous avions relevé quelques dissemblances. Nous avions donc remarqué que sur cette question de la procédure et des limites à la révision, la constitution congolaise du 18 février 2006 est théoriquement plus démocratique que la constitution française du 4 octobre 1958.Car, non seulement qu'elle est prolifique en terme d'énumération de limites à la révision constitutionnelle en rendant même intangible la mandature et la durée de la présidence de la république ;ce qui est difficilement et rarement lisible dans bon nombre de constitutions, elle confie en outre le pouvoir d'initiative d'une révision constitutionnelle au souverain primaire ;ce qui n'est pas aussi l'habitude de bon nombre des constituants originaire de part la planète. Pendant que la constitution française se contente, elle, à rendre intangible que la seule forme républicaine du gouvernement et à interdire toute révision lorsqu'il est porté atteinte à l'intégrité du territoire ou encore pendant l'intérim à la présidence de la république. En sus, elle se limite à confier le pouvoir d'initiative d'une révision constitutionnelle au chef de l'Etat et aux membres du parlement. Elle écarte donc le souverain primaire dans cette phase.

Mais à la question du contrôle de la constitutionnalité de la loi de révision constitutionnelle ou la loi constitutionnelle, nous avions remarqué que, contrairement à la république française où le conseil constitutionnel à eu déjà à se prononcer sur cette question, en République Démocratique du Congo, non seulement que la constitution est muette là-dessus, mais aussi la cour constitutionnelle ne s'est pas encore jusqu'ici prononcée sur cette question.

C'est la raison pour laquelle, à la suite d'autres auteurs, nous plaidons en faveur de la constitutionnalisation du contrôle de la constitutionnalité formelle et matérielle de la loi de révision constitutionnelle ou loi constitutionnelle. Considéré comme une caractéristique du constitutionnalisme moderne, le contrôle de la constitutionnalité est sans aucun doute un de ces mécanismes efficaces contre les éventuels abus de l'autorité de révision. D'une manière explicite et claire, nous suggérons à ce que la solution française puisse être transposée dans le contexte congolais, bien sur avec quelques nuances. C'est-à-dire, que la cour constitutionnelle soit déclarée incompétente pour statuer sur la révision constitutionnelle émanant du souverain primaire. Car, la démocratie veut aussi que les actes du souverain primaire ne soient limités et soumis à un contrôle quelconque. Le respect de la voix du souverain primaire est donc la véritable expression de la démocratie. Par contre, les révisions constitutionnelles émanant du chef de l'Etat, du gouvernement et du parlement doivent obligatoirement passer par un contrôle de la constitutionnalité au niveau de la cour constitutionnelle. Car, ces autorités ne sont dotées que d'un pouvoir constitué et non constituant comme c'est le cas avec le souverain primaire. De part ce point de vue, elles sont donc limitées et leurs actes sont susceptibles d'être soumis à un contrôle.

BIBLIOGRAPHIE

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11. MPONGO BOKAKO BAUTOLINGA (E.), Institutions politiques et Droit Constitutionnel, Kinshasa, EUA., 2010

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3. FAVOREU (L.), Les Cours Constitutionnelles, Paris, PUF., 1986

4. LABOULAYE (E.), Questions Constitutionnelles, Paris, charpentier, 2ieme éd., 1873

5. RIGAUX (M.F.), La théorie des limites matérielles à l'exercice de la fonction constituante, Bruxelles, larcier, 1985

6. ROUSSILLON (H.), Le Conseil Constitutionnel, Paris, Dalloz, 2ieme éd., 1994

7. SEGUR (P.), La Cinquième République, Paris, ellipse, 1999

III. THESES ET COURS

1. DJOLI ESENG'EKELI (J.), Droit constitutionnel congolais, 2ieme graduat, faculté de Droit, Unikin, 2008-2009

2. ESAMBO KANGASHE (J.L.), La constitution congolaise du 18 février 2006 à l'épreuve du constitutionnalisme. Contraintes et perspectives, Thèse de doctorat en Droit, Paris I panthéon-Sorbonne, 2009

3. KALUBA DIBWA (D.), Du contentieux constitutionnel en République Démocratique du Congo .contribution à l'étude des fondements et des modalités d'exercice de la justice constitutionnelle, Thèse de doctorat en Droit, Unikin., 2010

4. KAMUKUNY MUKINAY (A.), Contribution à la notion de fraude en Droit Constitutionnel Congolais, Thèse de doctorat en Droit, Unikin, 2007

5. MPONGO BOKAKO BAUTOLINGA (E.), Droit Constitutionnel, 1iere année de graduat, Faculté de Droit, Unikin., 2007-2008

6. NGONDANKOY NKOY ea LOONGYA (P.G.), Le contrôle de la constitutionnalité en République Démocratique du Congo. Étude critique d'un système de justice constitutionnelle dans un Etat à forte tradition autocratique, Thèse de doctorat en droit, UCL., 2008

IV. ARTICLES DES REVUES

1. BAKANDEJA WA MPUNGU (G.), « Institutions de l'Etat de droit et de la démocratie en Afrique : l'expérience Congolaise »in BULA BULA SAYEMAN (dir.), pour l'épanouissement de la pensée juridique congolaise, Bruxelles, bruylant, presses universitaires de Kinshasa, Kinshasa.

2. BAKANDEJA WA MPUNGU, « La nouvelle Constitution de la République Démocratique du Congo : sources et innovations » in annales de la faculté de droit de l'Unikin, presses universitaires de Kinshasa, édition spéciale, décembre 2007.

3. BALANDA MIKUIN LELIEL (G.), « Les constitutions africaines : esquisses d'une étude comparative »in BULALA BULA SAYEMAN (dir.), pour l'épanouissement de la pensée juridique congolaise, Bruxelles, Bruylant, presses universitaires de Kinshasa, Kinshasa, 2006.

4. KAZADI MPIANA (J.), «  La révision Constitutionnelle du 20 janvier 2011 : considérations critiques d'un citoyen (juriste) »in WWW.la-constitution-en-afrique.org

5. MAMPUYA KANUNK'A TSHIABO (A.), « Constitution : la révision n'est pas une urgence » in WWW.la-constitution-en-afrique.org

V. TEXTES OFFICIELS

1. Constitution de la République Démocratique du Congo, JORDC., 47 ieme année, numéro spécial, Kinshasa, 18 février 2006

2. LOI numéro 11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février 2006 in JORDC.,52ieme année, première partie, numéro 3,Kinshasa,1 février 2011

3. Constitution Française du 4 octobre 1958 in WWW.conseil-constitutionnel.fr

* 1 DJOLI ESENG'EKELI, Droit Constitutionnel. Principes structuraux, tome1, Kinshasa, E.U.A, 2010, p.172

* 2 J.GICQUEL et J.E. GICQUEL, Droit Constitutionnel et Institutions politiques, 25 ieme éd., Paris, Montchrestien, 2011, p.185

* 3 Intervention du professeur Francis DELPEREE lors de trois journées de réflexion organisées dans la salle de promotion de l'Université de Kinshasa du 24 juin au 26 juin 2010 sur le thème : « 50 ans de constitutionnalisme en RDC »

* 4 KALUBA DIBWA, du contentieux constitutionnel en République Démocratique du Congo. Contribution à l'étude des fondements et des modalités d'exercice de la justice constitutionnelle, Thèse de doctorat en droit, Kinshasa, UNIKIN, 2010, p.16 in www.memoireonline.com

* 5 DJOLI ESENG'EKELI, op.cit., p.184

* 6 J.GICQUEL et J.E. GICQUEL, Droit constitutionnel et Institution Politique, Paris, Montchrestien, 25 ieme édition, 2011, p.189

* 7 P.SEGUR, la cinquième République, Paris, Ellipses, 1999, p.41

* 8 KAZADI MPIANA, « la révision constitutionnelle congolaise du 20 janvier 2011 : considérations critiques d'un citoyen (juriste) »in www.la-constitution-en-afrique.org consulté le 09 mai 2012,p.3

* 9 M.KAMTO, « les conférences nationales africaines ou la création révolutionnaire des constitutions »in DARBON et DU BOIS DE GADUSSON, la création du droit en Afrique, Paris, ed.Karthala, 1997, pp.177-195 cité par KAZADI MPIANA, op.cit., p.5

* 10 P.SEGUR,op.cit.,p.43

* 11 MAMPUYA, « au feu, l'article 220 »in WWW.la-constitution-en-afrique.org

* 12 Décision numéro 92-312DC du 22 septembre 1992 in www.conseil-constitutionnel.fr consulté le 15 mai 20112.

* 13 La décision de la cour constitutionnelle du Benin DCC 06-074 du 08 juillet 2006 reproduite par L.SINDJOUN cité par KAZADI MPIANA, op.cit., p.4

* 14 KALUBA DIBWA, op.cit., p.38

* 15 MBOKO DJ'ANDIMA, Principes et usages en matière de rédaction d'un travail universitaire, Kinshasa, CADICEC, 2004, p.21

* 16 KALUBA DIBWA,op.cit.,p.41

* 17 V.MENSBRUGGHE, l'utilisation de la méthode comparative en droit européen, Namur, PUN., 2003, p.27

* 18 F.DELPEREE,  le droit constitutionnel de la Belgique, Bruxelles, Paris, bruylant, LGDJ, 2000, p.40

* 19 S.SHOMBA et G.TSHUND'OLELA, Méthodologie de la recherche scientifique. Étapes, contraintes et perspectives, Kinshasa, MES., p.29

* 20 DJOLI ESENG'EKELI, op.cit., P.171

* 21 MPONGO BOKAKO BAUTOLINGA, Institutions politiques et Droit constitutionnel. Tome1 : théorie générale des institutions politiques de l'Etat., Kinshasa, EUA, 2001, p.76

* 22 DMITRI GEORGES LAVROFF, le droit constitutionnel de la Vieme République, Paris, Dalloz, 1995, p.79

* 23 DJOLI ESENG'EKELI, op.cit, p.172

* 24 MPONGO BOKAKO BAUTOLINGA,op.cit.,p.76

* 25 PIERRE PACTET, Institutions politiques-Droit constitutionnel, Paris, Masson,13ieme édition,1994,p.69 ;DOMINIQUE TURPIN, Droit Constitutionnel, Paris,P.U.F.,2ieme édition,1994,p.83

* 26 DJOLI ESENG'EKELI, op.cit., p.172

* 27 BERNARD CHANTEBOUT, Droit Constitutionnel, Paris, Dalloz, 2ieme édition, 2004, p.25

* 28 DJOLI ESENG'EKELI, op.cit, p.183

* 29 Idem

* 30 DJOLI ESENG'EKELI, op.cit, p.184

* 31 Idem

* 32 GEORGES VEDEL, Manuel élémentaire de Droit Constitutionnel, paris, Dalloz, 2002, p.115

* 33 GERARD CORNU, Droit constitutionnel, paris, economica, 1993, p.134

* 34 OLIVIER BEAUD, « les mutations de la VIème République ou comment se modifie une constitution écrite »in www.revue pouvoir .fr numéro 99, 2001, p.21

* 35 SERGE GUINCHARD et GABRIEL MONTAGNIER, lexique des termes juridiques, Paris, Dalloz, 16 ieme édition, 2007, p.583

* 36 Tel est le cas de la Constitution luxembourgeoise 17 octobre 1868

* 37 C'est le cas ici des constitutions française du 4 octobre 1958 et allemande du 23 mai 1949

* 38 L'Italie applique aussi cette procédure

* 39 KEMAL GOZLER, le pouvoir de révision constitutionnelle, Villeneuve d'asq, Presse Universitaire du septentrion, 1997, p.8

* 40 DEBBASCH, Droit constitutionnel, Paris, Seuil, 1998, p.111

* 41 KEMAL GOZLER,op.cit.,p.10

* 42 Idem

* 43 GEORGES BURDEAU, op.cit. p.11.

* 44 KEMAL GOZLER, op.cit.,p.11

* 45 GEORGES BURDEAU, Droit constitutionnel, 21 eme édition par Francis Hamon et Michel troper, paris, LGDJ., 1988, p.81

* 46 DEBBASCH, op.cit., p.92

* 47 Lire avec intérêt KEMAL GOZLER, op.cit., p.47

* 48 SERGE ARNE « existe -t-il des normes supra-constitutionnelles ?contribution à l'étude des droits fondamentaux et de la constitutionnalité »in revue de droit public, 1993, p.474 in KEMAL GOZLER, op.cit., p.8.

* 49 SERGE ARNE, op.cit., pp.474-475

* 50 STEPHANE RIALS, « supra-constitutionnalité et systématicité du droit », archives de philosophie du droit, 1986, p.64 in KEMAL GOZLER, op.cit., p.10

* 51 LAFFERIERE,op.cit.,p.288

* 52 GEORGES VEDEL,op.cit.,p.117

* 53 KEMAL GOZLER,op.cit.,p.8

* 54 Idem, p.17

* 55 MAURICE DUVERGER, Manuel de Droit Constitutionnel et de Science Politique, paris, P.U.F., 5ieme édition, 1948, p.195

* 56 K.WANDJI, « le contrôle de la constitutionnalité au Cameroun et le modèle africain francophone de justice constitutionnelle »in revue juridique et politique, 2007, numéro 4, édition jus africa 2008, p.436

* 57 MCHEL TROPER, « séparation des pouvoirs »in ANDRIANTSIMBAZOVINA, H.GAUDIN et alii, dictionnaire des droits de l'homme, PUF., 2008, p.899-901

* 58 J.CHAVALIER, Etat de droit, paris, Montchrestien, 4ieme édition, 2003, p.134

* 59 JULIEN LAFFERIERE, op.cit., p.288

* 60 Idem

* 61 JOSEPH BARTHELEMY et PAUL DUEZ, Traité de Droit Constitutionnel, Paris, LGDJ., réimpression édition panthéon-Assas, 2004,236

* 62 Idem

* 63 ESAMBO KANGASHE, la constitution congolaise du 18 février 2006 à l'épreuve du constitutionnalisme, Louvain-la-Neuve, académie bruylant, 2010, p.51

* 64 Lire l'article 218 de la constitution du 18 février 2006 in JORDC, 47 ieme années, op. cit., p.74

* 65 Lire l'article 218 alinéa 2 de la constitution du 18 février 2006 in JORDC, 47ieme année, op.cit., p.74

* 66 Lire l'article 218 dans ses alinéas 3 et 4 de la constitution du 18 février 2006,47ieme année, op.cit., p74

* 67 L'article 218 in la loi numéro 11 /002 du 20 janvier 2011 portant révision de certains articles de la constitution du 18 février 2008, JORDC, 52ieme année, le 20 janvier 2011.

* 68 Article 220 de la constitution du 18 février 2006 in JORDC, 47ieme année, op.cit., p.75

* 69 Article 219 de la constitution, op.cit., p.74

* 70 C'est le cas de la France, l'Italie, l'Allemagne, la Grèce, le Portugal, le Gabon, le Burkina-Faso, la république du Congo.

* 71 BRUNO GENEVOIS, « les limites d'ordre juridique à l'intervention du pouvoir constituant » in revue française de doit administratif(RFDA), vol.14, septembre-octobre 1998, pp.909-921

* 72 Décision de la cour constitutionnelle du Bénin DCC 06-074 du 08 juillet 2006 reproduit par LUC SINDJOUN, les grandes décisions de la justice constitutionnelle africaine, Bruxelles, bruylant, 2009, pp.311-337

* 73 ESAMBO KANGASHE, op.cit.,pp.64-67

* 74 ESAMBO KANGASHE, op.cit., p97

* 75 KAZADI MPIANA,op.cit.,p.11

* 76 idem

* 77 KALUBA DIBWA,op.cit.,p.255

* 78 VUNDWAWE té PEMAKO, Traité de droit administratif, Bruxelles, larcier, édition Afrique, 2007, p.862

* 79 La loi numéro 11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de certains articles de la constitution de la république démocratique du Congo du 18 février 2006, JORDC, 52 ieme année, 20 janvier 2011

* 80 MAMPUYA KANUNK'A TSHIABO, « la panique, le mensonge et la tricherie »in WWW.lephareonline.net consulté le 20 février 2011

* 81 C'est le cas ici du juge constitutionnel béninois, op.cit.

* 82 JEAN GICQUEL et JEAN ERIC GICQUEL, op.cit., p.493

* 83 Idem

* 84 « Quels ont été les temps forts de l'élaboration de la constitution ?, pourquoi une nouvelle constitution en 1958 ?»In www.vie-publique.fr consulté le 10 octobre 2012

* 85 « Quels ont été les temps fort de l'élaboration de la constitution ?pourquoi une nouvelle constitution en 1958 ? »Op.cit.

* 86 « Quels ont été les temps forts de l'élaboration de la constitution ?pourquoi une nouvelle constitution en 1958 ? »Op.cit.

* 87 « texte intégral de la constitution française du 4 octobre 1958  telle que révisée à ces jours »in www.conseilconstitutionnel.fr 

* 88 DMITTRI GEORGES LAVROFF,op.cit.,p.103

* 89 PHILIPPE SEGUR ?op.cit., p.42

* 90 DMITRI GEORGES LAVROFF,op.cit.,p.105

* 91 KEMAL GOZLER,op.cit.,p.79

* 92 Idem

* 93 ibidem

* 94 « Conseil constitutionnel, décision numéro 62-20 du 6 novembre 1962 » cité par KEMAL GOZLER, op.cit, p78

* 95 « Conseil constitutionnel, décision numéro 62-20 du 6 novembre 1962, p.27 »cité par KEMAL GOZLER, op.cit., p.80

* 96 V.MENSBRUGGHE,op.cit.,p.27

* 97 F.DELPEREE,op.cit.,p.41

* 98 Lire à ce sujet l'article 220 de la constitution du 18 février 2006, op.cit.

* 99 Lire à ce sujet l'alinéa 5 de l'article 89 de la constitution du 4 octobre 1958, op.cit.






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