Conclusion de la Première Partie
Tout au long de cette première partie de notre
étude, il a été question pour nous d'évoquer tout
d'abord la création, l'organisation et le positionnement concurrentiel
de la MUCECO. Avant de décrire son fonctionnement à travers les
activités que nous avons effectuées pendant la durée de
notre stage. Nous retiendrons que notre structure d'accueil est un jeune EMF
qui se doit d'optimiser la qualité et la rentabilité de ses
activités afin de faire face à une concurrence grandissante.
En prélude à une éventuelle
amélioration de la gestion des crédits à la MUCECO, il
faudrait d'abord diagnostiquer les carences et les déficiences de
l'établissement dans ce domaine précis, avant de proposer des
mesures correctrices. Ces deux préoccupations feront l'objet de la
deuxième partie de notre travail.
Deuxième Partie :
Evaluation de la gestion des micros crédits
à La MUCECO
Introduction de la Deuxième Partie
Un stage académique est essentiellement, un canal de
contact avec le monde professionnel. Par le biais de cette activité,
l'étudiant se doit d'observer, d'étudier et de rendre compte du
fonctionnement d'un système ou d'une organisation. Cette
préoccupation nous a guidé non seulement pendant notre
séjour à la MUCECO, mais aussi pendant la rédaction de ce
rapport.
Cela nous amène dans le premier chapitre de cette
partie, à faire apparaître à la lumière d'une
analyse théorique, les difficultés et les carences
observées lors l'octroi des crédits à la MUCECO, notamment
celles relatives à la maîtrise des risques. Le second chapitre
quant à lui, sera consacré aux solutions permettant d'optimiser
non seulement l'analyse, mais également le suivi et le recouvrement des
crédits octroyés par l'Etablissement.
Chapitre 3 : Analyses théorique et critique
de l'octroi des micros crédits
D'après QUIVY et VAN
CAMPENHOUDJ, « Il ne peut y avoir en sciences sociales de
constatations fructueuses sans construction d'un cadre théorique de
référence ». Aussi, avant de critiquer l'octroi des
crédits à la MUCECO, nous commencerons par mener une
analyse théorique sur ce sujet. Ces deux articulations, constitueront
les sections du présent chapitre.
Section 1 : Théories relatives à
l'octroi des crédits
La littérature qui nous permettra de mener cette
analyse théorique sera entre autres constituée du
Recueil des textes relatifs à l'exercice des
activités de micro finance élaboré par la COBAC, des
ouvrages tel que Le système bancaire et financier du Cameroun
écrit par le Dr TANGAKOU, des différents
enseignements que nous avons reçus à l'Université,
notamment les cours de Théories financières et de
Gestion de la banque, etc...
-1- L'évaluation et la couverture des risques
L'intermédiation financière permet aux
Etablissements de crédit de collecter l'épargne des agents
à excédent de financement et d'utiliser ces ressources pour
octroyer des crédits aux agents à déficit de financement.
Dans ce processus, l'octroi des crédits apparaît comme une
activité à risque, puisque l'Etablissement est tenu de rembourser
à tout moment, tous les déposants qui le souhaitent.
Pour ce qui est des risques, Eric Manchon (1994) distingue un
risque «majeur» qui est le risque de non remboursement encore
appelé risque de crédit et trois risques «mineurs»
à savoir les risques d'immobilisation, de taux et de change, qu'il
convient de gérer avec une extrême prudence. (2) Le
Comité de Bâle II a quant à lui introduit le risque de
marché et le risque opérationnel.
Le risque de crédit est le risque de
pertes consécutives au défaut d'un emprunteur face à ses
obligations, ou à la détérioration de sa solidité
financière ou de sa situation économique au point de
dévaluer la créance que l'établissement de crédit
détient sur lui.
On comprend clairement qu'il existe donc deux types de risque
de crédit :
- Un risque de défaut : C'est le
risque qu'un emprunteur ne soit pas en mesure de faire face à ses
engagements de paiement (incapacité d'honorer ses obligations de
paiement des intérêts et/ou du principal d'une créance) ;
- Un risque de dépréciation de la
qualité de crédit : Ce risque est dû à la
détérioration de la solidité financière de la
contrepartie et par conséquent de la qualité de la signature.
(3)
Le risque d'immobilisation est le risque
encouru dans l'hypothèse où le recouvrement final des
crédits d'un Etablissement, sans être compromis, ne peut
être effectué immédiatement puisque l'Etablissement fait
face à une ou à plusieurs échéances
impayées.
Le risque de taux «correspond toujours
à une variation potentielle du prix actuel ou futur d'un
élément d'actif ou de passif ou d'engagement hors bilan».
(4)
Le risque de change est un risque financier
lié à l'évolution défavorable des taux de
change.
Le risque de marché est un risque de
perte non diversifiable, lié à la santé de l'environnement
financier global. Il désigne alors les déviations
défavorables de la valeur de marché des positions pendant la
durée minimale requise pour liquider ces positions.
Le risque opérationnel est le risque
de perte résultant de l'inadéquation ou de la défaillance
des procédures, des personnes, des systèmes ou
d'évènements extérieurs.
A ces différents risques, nous pouvons
ajouter :
Le risque de Liquidité : Le
risque de liquidité intervient quand la banque ne dispose pas de
liquidités suffisantes pour couvrir les besoins inattendus comme par
exemple les retraits massifs des dépôts ou de l'épargne des
clients. C'est donc l'absence d'un matelas de sécurité qui fait
courir à la banque ce risque. (5)
Le risque de solvabilité : Il
s'agit du risque encouru par une institution financière lorsque ses
fonds propres sont insuffisants pour absorber ses pertes.
La prise en compte de ces différents amène le
financier à se poser deux questions fondamentales avant l'octroi de
chaque crédit. Ce dernier doit d'abord se demander quels sont les moyens
qui permettront au client de rembourser le crédit ? Ensuite, en
avançant l'hypothèse d'évènements imprévus
empêchant le remboursement, le financier doit se demander comment
recouvrer les sommes prêtées ? (6)
Il s'agit donc pour le financier d'évaluer et de se
couvrir contre les risques que son Etablissement encourt lorsqu'il accorde un
crédit.
-A- L'évaluation des risques
Le risque de contrepartie étant le «risque
majeur» de l'activité de crédit, nous nous appesantirons
uniquement sur son évaluation. Cette évaluation consistera
essentiellement à analyser les aptitudes de remboursement du
client :
* Lorsqu'il s'agit de personnes physiques, la
détermination de sa capacité de remboursement s'effectue à
travers la confrontation des revenus et des charges de l'emprunteur afin de
calculer son taux d'endettement à partir duquel on jugera s'il dispose
d'une marge d'endettement, étant entendu que la loi limite à 33%
la quotité maximale de remboursement (rapport des charges sur les
ressources).
Dans les revenus, on retiendra essentiellement, le salaire
domicilié, les revenus fonciers ou sur valeurs mobilières, etc...
Il ne faudra pas intégrer des revenus aléatoires tels que les
heures supplémentaires, les frais de déplacement, les pensions
alimentaires, etc...
Parmi les charges à retenir, on peut citer celles qui
sont régulièrement payées au cours de l'année
soit : Les frais de loyer, les mensualités de crédits
antérieurs, les primes d'assurance, etc...
* Lorsqu'on a plutôt affaire à
des personnes morales, l'appréciation du risque passe par une analyse
dynamique qui se fonde d'abord sur une comparaison entre divers
éléments dans le temps (en général 3 ans), afin de
comprendre le vécu de l'entreprise. L'analyse doit non seulement
être synthétique, mais elle doit aussi être
réalisée en valeurs relatives et non absolues, afin de faciliter
les comparaisons instructives entre les grandeurs.
Le diagnostic s'effectue selon quatre grands pôles qui
conduisent logiquement à une conclusion devant guider la décision
d'octroi de crédits. Il s'agit de :
Le diagnostic opérationnel :
Ici, on s'intéresse à l'activité et à la
rentabilité de l'entreprise à travers les soldes
intermédiaires de gestion tels que la valeur ajoutée,
l'excédent brut d'exploitation, le revenu d'exploitation, la
capacité d'autofinancement, etc...
Le diagnostic financier : Il s'effectue
à l'aide du ratio de solvabilité (ressources propres/total du
bilan), les capacités d'endettement et de remboursement, les fonds de
roulement, le besoin en fonds de roulement, etc...
Le diagnostic stratégique : Il
s'effectue notamment par quatre points d'analyse, à savoir les
hommes et l'actionnariat, la production, la commercialisation et le
financement.
Le diagnostic prévisionnel : Sur
la base des documents prévisionnels fournis par l'entreprise (compte
d'exploitation, plan de trésorerie et financement prévisionnels),
le financier doit d'une part analyser et valider les prévisions et
d'autre part, projeter l'impact de ces prévisions sur la
liquidité et la solvabilité de l'entreprise. (7)
Nous devons noter qu'il existe d'autres méthodes
d'évaluation des risques telles que le scoring ou le recourt au service
d'une agence de notation.
Nous devons également noter que l'octroi de
crédit peut être assimilé à un contrat d'agence tel
que développé par S. ROSS (1973) et par
JENSEN et MECKLING (1976). Dans ce contrat,
l'Etablissement de crédit joue le rôle du principal et
l'emprunteur joue celui de l'agent. L'évaluation des risques
inhérents à un tel contrat est biaisée par
l'asymétrie informationnelle (G. AKERLOF) qui
règne entre les deux parties. En effet, l'emprunteur est mieux
informé que l'EMF sur son aptitude à rembourser le crédit
qu'il sollicite et sur son caractère honnête ou malhonnête.
D'après les travaux de G. AKERLOF (1970)
menés sur le marché des voitures d'occasion (lemons),
l'asymétrie d'information peut conduire le principal à effectuer
une anti-sélection ou sélection adverse telle
que définie par CHAN et THAKOR dans leurs travaux de
1987. C'est par exemple le cas d'un EMF qui serait mal informé
sur l'aptitude de remboursement de ses clients et qui déciderait de
combler son déficit informationnel en révisant à la hausse
son taux d'intérêt débiteur. Cette hausse du taux
d'intérêt aura pour effet de sélectionner les emprunteurs
de manière à ne conserver que ceux d'entre eux qui ont des
projets hautement risqués.La seconde conséquence de
l'asymétrie d'information entre l'EMF et son client serait
l'aléa moral (STIGLITZ et WEISS en 1981) sur
la gestion des fonds prêtés. En effet, un client peut
bénéficier d'un financement pour un projet fondamentalement sain
et affecter ces fonds à la réalisation d'un projet plus
risqué.
En définitive, nous retenons que l'évaluation
des risques est un exercice délicat qui requiert rigueur et
professionnalisme et qui doit être suivi d'une couverture des risques.
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