Section 2 : Comparaison des services de
transferts
Bien que ces services soient plus ou moins similaires,ils
présentent parfois de grandes différences qui résident
souvent dans la qualité et lamanière dont ces services sont
proposés.Notre analyse portera d'abord sur leur différence par
rapport à la rapidité et la fiabilité, ensuite sur leur
accessibilité, des services offerts et des coûts.
2.1 Selon la rapidité, la
sécurité et la fiabilité des services
Des avis que nous avons recueillis auprès des
utilisateurs (bénéficiaires et expéditeurs locaux) de
transferts, il est ressorti sans équivoque que les produits WU et MG
sont incontestablement les plus rapides, les plus sûrs et les plus
fiables. En effet, il est possible d'obtenir un transfert de l'étranger
aussi loin que les Etats Unis ou le Canada en 10 minutes, le temps que durent
les formalités d'envoi, de transmission de l'information aux ordinateurs
et de contact par téléphone du bénéficiaire par
l'expéditeur. Les bénéficiaires perçoivent les
fonds presque immédiatement, dès que l'expéditeur effectue
le dépôt au guichet et leur communique les détails de
l'opération. Il n'a nullement besoin d'avoir un compte bancaire et le
service est facile à utiliser. En cela, le système est
imbattable. Par ailleurs, il est possible de percevoir les fonds dans n'importe
quel guichet quelque soit l'endroit où l'on se trouve, la compensation
s'effectuant automatiquement.
De plus, les bénéficiaires perçoivent
exactement le montant annoncé par l'expéditeur, quelque soit la
monnaie en cours dans le pays de résidence de celui-ci (USD, Euro, Franc
Suisse, etc.).
Enfin, les utilisateurs n'ont pas manqué de souligner
globalement leur confiance par rapport à ces produits. Cette confiance
vient du fait que les opérations s'effectuent par et dans des banques
comme la SGBS, CBAO, BST et qui sont suffisamment liquides pour faire face aux
flux de retrait.
Les produits Money Express (avec BHS et CNCAS) donne
également des gages de sécurité, de rapidité et de
fiabilité, mais sont moins connus du grand public.
La Poste dispose de certains produits assez rapides
également, tels que le mandat fax sur le plan intérieur. Mais
pour la plupart, ses produits sont moins rapides que ceux des opérateurs
tels que WU et MG. Par ailleurs, et malgré la confiance dont jouit la
Poste du fait de son appartenance à l'Etat, il y a souvent un
inconvénient majeur : certains bureaux de Poste ont du mal à
honorer les paiements des envois, à cause du manque de
liquidités, ce qui oblige les bénéficiaires à faire
de nombreux « va-et-vient » pour retirer leur argent , cette
situation a beaucoup terni la fiabilité de la Poste.
Les IMF possèdent quelques atouts, mais aussi une
faiblesse de taille, à savoir leur impossibilité parfois
d'effectuer les paiements des transferts lorsque la compensation avec
l'institution partenaire extérieure n'intervient pas suffisamment
tôt ou lorsqu'elles ont peu de liquidités disponibles pour ce type
d'opérations (par exemple pendant les périodes de forte demande
decrédits des membres). Par ailleurs, elles ne disposent pas de
réseau au plan international, à moins qu'elles soient des sous
agents des banques.
Mais c'est surtout avec les opérateurs informels que
les utilisateurs rencontrent des difficultés, non pas au niveau de la
rapidité (l'information arrive généralement assez vite),
mais au niveau de la sécurité et de la fiabilité. En
effet, ces opérateurs sont souvent installés dans leur boutique
au marché, avec tout juste un téléphone, un fax et un
cahier dans lequel ils notent les informations avec parfois des risques
d'erreurs.Ces techniques sont très rudimentaires devant les instruments
sophistiqués utilisés par les opérateurs formels. Les
bénéficiaires sont très exposés et, dans certains
cas, ils ont du mal à retirer leur argent. Par ailleurs, les
bénéficiaires ont parfois du mal à les localiser les
clients se plaignent souvent du fait que les informels sont très mobiles
; ils peuvent changer d'endroit à tout moment, ce qui nous amène
parfois à les rechercher pendant longtemps avant de les retrouver
». Leur souci de discrétion compte tenu de
l'illégalité dans laquelle ils exercent leur service est
sûrement une des causes de cette mobilité.
2.2Selonl'accessibilité
La Poste possède certainement le meilleur avantage
concurrentiel dans ce domaine. Ses produits sont accessibles à la
plupart des sénégalais compte tenu de leur présence
très étendue et depuis longtemps dans toutes les localités
significatives du pays. Ils sont également très variés,
notamment au plan intérieur et chacun peut utiliser le service qu'il
préfère en fonction de ses impératifs (rapidité,
coût).
Les procédures de réception sont
simplifiées, mais ils sont parfois complexes à utiliser pour les
envois, notamment par les personnes analphabètes. Il faut dire que cette
difficulté est levée grâce à l'assistance des agents
des guichets qui aident les utilisateurs à remplir les formulaires. La
Poste fait ainsi preuve d'une grande compréhension pour aider les
bénéficiaires non instruits : on peut
bénéficier de conseil et d'assistance auprès des receveurs
de la Poste pour téléphoner gratuitement à
l'expéditeur des fonds afin par exemple d'élucider des erreurs
qui pourraient se glisser dans la transcription des numéros
d'identification des transferts.
La Poste préserve également la discrétion
des opérations : lorsqu'on entre dans un bureau de poste, personne ne
sait a priori pourquoi on y va, ce qui n'est pas le cas lorsqu'on entre dans un
guichet de banque ou de WU. La Poste a aussi l'avantage d'être bien
intégrée dans la communauté, ce qui constitue un avantage
certain.
La poste est fortement concurrencée par les
opérateurs informels qui possèdent aussi l'avantage de la
proximité et de la facilitéd'utilisation (peu de bureaucratie).
Ils sont de ce fait accessibles et on peut envoyer lesmontants que l'on
souhaite, sans plafond, ce qui n'est pas le cas pour les opérateurs
formels.
Les produits des opérateurs formels sont disponibles
surtout dans certains centres urbains. Etmême dans ces centres, leur
implantation n'est pas très étendue. Ceci est dû au fait
que lesbanques elles-mêmes, qui en sont les fournisseurs, ont un faible
taux d'implantation. Uneffort est en train d'être fait pour
étendre l'accessibilité, à travers des partenariats
avecd'autres structures qui permettent ainsi de multiplier les points de
services. Le recours auxproduits des opérateurs formels comporte une
contrainte significative : le plafonnement desmontants que l'on peut envoyer en
fonction des zones monétaires de destination. Cettecontrainte ne peut
être levée, à l'état actuel de la
réglementation, qu'au détriment du coûtpour
l'expéditeur qui devra ainsi fractionner son envoi en plusieurs envois
selon l'importancedes sommes à envoyer.
Sur ce chapitre, les quelques rares institutions de
microfinance qui interviennent possèdentsans doute le meilleur avantage
concurrentiel, compte tenu surtout de leur forte implantationaussi bien dans
les centres urbains que dans les villages. C'est donc un marché
très porteurpour ces IMF si la réglementation leur donne plus de
possibilités pour y entrer ce qui n'estpas encore le cas.
2.3 Selon la diversité des services
offerts
A ce niveau, les opérateurs informels disposent d'une
large gamme de services non financiers à côté des
transferts d'argent. En effet, ils proposent parfois des denrées
alimentaires, des matériaux de construction aux expéditeurs comme
aux bénéficiaires. Mais ils ne proposent pas d'autres services
financiers.
Dans ce domaine, c'est plutôt la Poste qui est
l'opérateur qui offre le plus de possibilités, avec une large
gamme de produits financiers, notamment au plan intérieur. En effet, les
utilisateurs ont la possibilité d'ouvrir des comptes sur livret ou des
comptes CCP (Centre des ChèquesPostaux).
Les services des opérateurs formels se limitent
strictement au transfert d'argent ; ils ne proposent aucun autre produit. En
particulier, les fournisseurs de ce service (pour la plupart les banques)
n'offrent pas de services d'épargne. Ceci trouve une explication dans le
fait que les services de transferts comme WU par exemple sont offerts sous le
couvert de la rapidité etque le fait d'offrir d'autres services pourrait
ralentir les opérations .De plus, lesbanques ne sont
généralement pas très intéressées par la
clientèle des bénéficiaires destransferts (ce sont souvent
des gens ayant peu de moyens ne leur permettant pas de répondreaux
critères d'ouverture de comptes bancaires ou n'ayant pas suffisamment de
moyensfinanciers pouvant intéresser les banques).Potentiellement, ce
sont les IMF qui pourraient avoir le meilleur avantage concurrentiel
enmatière d'offre de produits financiers aux utilisateurs des services
de transfert d'argent,compte tenu de la proximité, de l'adaptation des
conditions d'accès aux populations même pauvres, etc. Etant
donné qu'elles peuvent également offrir des
servicesd'épargne, cela témoigne d'un service attractif de
base.
2.4 Selon les coûts
Il y a comme une sorte de corrélation directe entre,
d'une part, la sécurité, la rapidité et lafiabilité
et, d'autre part, le coût. Cette corrélation est évidente
surtout en ce qui concerne lestransferts internationaux. En effet, les
opérateurs formels tels que WU, MG, etc. ont des coûtsplus
élevés que les opérateurs informels. A cet effet, les
entretiens que nous avons eus auniveau de certainsutilisateurs à
Thiès indiquent clairement que les opérateurs informels sont
moins chers.
C'est ce qui explique la préférence que leur
accordent certains expéditeurs, quand bien même
lesbénéficiaires ont largement exprimé leur
désapprobation pour les informels et leur préférencepour
les opérateurs formels.
En somme, les acteurs spécialisés du transfert
de fonds de type Western Union ou Money Gram, offrent un service souvent plus
adapté. Le destinataire du transfert peut récupérer
l'argent très rapidement, directement en liquide, sans avoir à
ouvrir un compte. Ces services sont néanmoins assez chers et sont
difficilement accessible pour les clients des réseaux d'agences des
partenaires avec lesquels ils s'associent (en général des
réseaux bancaires ou postaux).Les transferts de fonds à
l'intérieur du pays utilisent les modes de transferts informels. C'est
en général le seul mode de transfert d'argent en dehors des
grosses villes, et pour cette raison ils représentent encore l'essentiel
des transferts. Les modes de fonctionnement sont très variables,
s'appuyant souvent sur des réseaux de solidarité entre les villes
et les villages et impliquant souvent le transport effectif en liquide des
sommes transférées. Ils sont néanmoins souvent peu
efficaces et les risques de fraudes sont importants.
Chapitre 3 : Circuit informel, concurrence
et menace sur le système formel
Bien que le milieu soit formalisé, le secteur informel
occupe une part de marché assez importante dans le domaine du transfert
d'argent. Le grand défi pour les acteurs de ce milieu consiste à
savoir comment faciliter ces mouvements de l'argent et rendre les transferts
moins onéreux. Les frais imputés à ces opérations
à destination de pays en développementreprésentent en
moyenne 13%, et dépassent fréquemment 20% du montant
envoyé. Un tel niveaude frais incite les migrants à confier leur
argent à des réseaux informels et moins fiables. Ainsi nous nous
proposons d'aborder la concurrence qu'il y a dans ce secteur après avoir
analysé le secteur dit « informel ».
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