Méthodes de lutte contre la piraterie des oeuvres musicales par les organismes de gestion collective dans l'espace communautaire ouest-africain(UEMOA): l'exemple du bureau burkinabé du droit d'auteur(BBDA)( Télécharger le fichier original )par Lanssa Moïse KOHOUN Ecole Nationale d'Administration et de Magistrature Ouaga - conseiller des affaires culturelles 2009 |
B. Les actes constitutifs de piraterieComme toute infraction, la contrefaçon est constituée de deux éléments : l'élément matériel et l'élément moral. L'élément matériel, selon NIKIEMA Kouliga, est « constitué par l'atteinte à l'une des prérogatives de l'auteur (...), les actes incriminés sont posés au mépris des lois et règlement.» (NIKIEMA Kouliga, Op.cit,) De ce fait, la reproduction intégrale ou partielle d'une oeuvre sans l'autorisation des ayants droit alors qu'elle est requise est un acte de piraterie. A cet effet, JONQUERES Pascale ajoute que « la reproduction illicite en un seul exemplaire suffit pour que soit constitué le délit de contrefaçon.» (JONQUERES Pascale, Les droits d'auteur, édition juris-service/AGEC, 1997, p.190.) Le nombre d'exemplaires reproduits dans ce cas n'a pas d'importance, dès lors que cette reproduction n'a pas été autorisée, sauf si cette reproduction est faite dans le cadre de l'usage privé et personnel telle que définie par la loi. De même, l'autorisation par l'auteur d'utiliser une oeuvre musicale à des fins autres que celles prévues par lui, constitue un délit. C'est le cas par exemple de l'utilisation de disques à la radio alors qu'ils étaient destinés à la vente. Il faut également noter que l'exploitation d'une oeuvre musicale par le producteur ou l'éditeur au- delà du contrat convenu avec le titulaire de ladite oeuvre est un délit. L'exploitation d'une oeuvre musicale sur un support CD et sur le territoire des pays voisins alors qu'il était prévu une exploitation sur support cassettes et sur le territoire burkinabè en est une illustration. De plus, le non-respect du nombre d'exemplaires autorisé pour la duplication et la durée de l'exploitation de l'oeuvre sont passibles de sanctions pénales. C'est ce qui est advenu à Bazar Music comme l'atteste les propos de son Directeur Général, Moussa KABORE : « Il est arrivé une fois que mon contrat avec un artiste était à terme mais celui-ci a vu une de ses cassettes avec moi. Je fus sanctionné par le BBDA.»16(*) Les actes en violation du droit de reproduction touchent également le droit de représentation et le droit à la paternité de l'oeuvre. Ainsi, toute personne qui se livre à une représentation ou une diffusion d'une oeuvre par quel que moyen que ce soit, sans l'autorisation préalable de l'auteur, s'adonne à des actes de piraterie. Il s'agit entre autres de la diffusion de phonogrammes par une discothèque, ou une radio sans l'autorisation de l'auteur ou du BBDA. Le non versement de la rémunération au titre de la copie privée ou de la rémunération équitable est pénalement sanctionné. Ce sont ces actes illicites et assimilés au délit de piraterie qu'énoncent les articles 107 et 108 de la loi burkinabè sur la propriété littéraire et artistique. L'appréciation du délit de piraterie se fonde également sur l'élément moral de l'infraction. L'élément moral de l'infraction, c'est le fait d'agir en sachant que l'on viole les droits d'auteur et les droits voisins : c'est l'intention coupable. L'intention coupable est la volonté manifeste de nuire ou la mauvaise foi du prévenu. Cette mauvaise foi est présumée, il revient à la personne poursuivie de prouver sa bonne foi. Il est pratiquement difficile pour elle d'apporter la preuve puisqu'en tant que professionnelle, elle est censée ne pas poser des actes illicites de reproduction et de représentation. Si toutefois la personne arrive à prouver sa bonne foi, l'auteur ne pourra plus engager à son encontre qu'une action en responsabilité civile. En définitive, l'analyse de la notion de piraterie, de ses formes et de ses éléments constitutifs a permis de montrer qu'elle renferme la même réalité que la contrefaçon. La piraterie revêt une dimension juridique. La violation des droits d'auteur et des droits voisins constitue le délit de piraterie qui cause d'énormes préjudices aux créateurs et aux auxiliaires de la création, et par conséquent affecte négativement le développement musical et l'économie nationale. Section II : Les effets néfastes de la piraterieLa piraterie est un fléau qui résulte d'une volonté délibérée de violer les droits reconnus aux auteurs et aux auxiliaires de la création. Ce faisant, FREÏTAS Denis qualifie les pirates « de criminels qui se livrent au vol des produits du talent, des compétences et des investissements d'autrui.» (FREÏTAS Denis, « La piraterie en matière de propriété intellectuelle et les mesures à prendre pour les réprimer », in Bulletin du droit d'auteur, volume XXVI n°3,1992, p.7). Le phénomène de la piraterie a pris une ampleur considérable dans le monde en général et au Burkina Faso en particulier. L'activité illicite des pirates a des conséquences sur les artistes, les producteurs, les entreprises culturelles et sur l'Etat. Elle constitue une entrave à l'éclosion des talents artistiques et à l'accroissement de l'économie burkinabè. * 16 Entretien réalisé le 20/08/2008 avec Moussa KABORE Directeur Général de Bazar Music |
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