Les enjeux de l'implantation des médias en zone de crise. Cas de la fondation hirondelle( Télécharger le fichier original )par Lydie Muanji Kashala Université de Kinshasa - Licence 2012 |
1.4. Le rôle néfaste des médias en période criseCependant, il a été largement prouvé que les médias ne jouent pas simplement le rôle positif dans la vie d'une société. Notamment avec la question des effets des médias. A cette ère où le monde est médiatisé, le pouvoir des médias peut être difficilement contesté. Avec la démocratie, les médias offrent toutes sortes d'informations. L'on découvre alors le rôle néfaste que peuvent jouer les médias dès lors qu'ils sont utilisés à des fins partisanes par ceux qui veulent atteindre certains objectifs. Par les informations qu'ils diffusent, les médias enveniment parfois la situation de crise. Ils peuvent être vecteurs de guerre. Et, très souvent, la guerre médiatique précède la vraie guerre.( 39(*)) Véritables outils et moyens d'action au service des objectifs poursuivis par les Etas ou d'autres entités politiques, les médias sont au centre des enjeux politiques, idéologiques, tribaux ou religieux. Certains auteurs vont jusqu'à affirmer que les médias sont l'oxygène de la guerre et du terrorisme. Les assaillants comme l'armée régulière cherchent à tout prix à maitriser l'information, et très souvent, pour le cas des assaillants, le font dans le but d'attirer l'attention des masses populaires qu'ils ne pourraient atteindre si les médias ne relayaient leurs messages. Les événements du printemps arabe nous ont démontré que les médias peuvent manipuler, contrôler et abuser toute une population ou, au contraire, être au service des changements démocratiques. Malheureusement, l'influence négative des médias manipulés est plus visible que l'impact d'un média qui défend d'autres valeurs. L'histoire nous renseigne également qu'en 1994, le gouvernement de transition du Rwanda a utilisé la radio télévision libre des mille collines(RTLM) pour inciter au génocide et dont l'effet a été dévastateur. Le génocide rwandais a été question de préparation, perpétré par les médias. Ayant mesuré l'impact qu'ont les médias sur les individus, les auteurs du génocide rwandais avaient choisi cette radio comme principale « voix de son maître ». (40(*)) La radio a été créée une année avant le génocide, soit n 1993, pour servir d`un canal par lequel les génocidaires passeraient leurs messages. Le 11 mars 1994, le Président Grégoire KAYIBANDA menace d'exterminer les tutsis dans un discours à la radio. Il enseigne à ceux qui l'écoutent d'avoir une expérience négative, une haine et une hostilité irrationnelle devant un tutsi, petit ou grand, et à le massacrer comme un cafard. Une fiche signalétique, descriptive du corps des tutsis était diffusée à longueur des journées à travers les ondes des radios. Des détails corporels désignant les formes précises (nez fin, taille élancée...) qui devraient être détruites. L'histoire rapporte que les miliciens opéraient machette à droite, radio à gauche. Parce qu'à chaque fois, qu'ils menaient à bien une opération, le premier ministre de l'époque, Jean KAMBANDA, prodiguaient des encouragements ainsi qu'aux bourgmestres qui avaient collaboré avec les miliciens dans les tueries. Et ceux qui ne collaboraient pas étaient tout de suite exécutés, et ce, par voix des ondes. Tout ceci pour étendre leurs actions, car la RTLM émettait sur toute l'étendue du pays jusqu'au Nord du Burundi. Des journalistes y participaient aussi par manque de professionnalisme, d'éthique et déontologie et surtout pour leur engagement au service d'une idéologie ou d'une cause. Leur participation se fait sentir lors des animations libres à l'antenne où ils appelaient les génocidaires à remplir les fosses parce qu'ils étaient à moitié pleines. Le plus célèbre journaliste fut Kantano Habimana, animateur au talent diabolique qu'il avait cultivé en tant que commentateur sportif. Il n'y a pas eu que la RTLM, la radio officielle, radio Rwanda, la radio Rutomorangingo et le périodique Kangura ont également joué un grand rôle dans la propagande du génocide. Les médias ont donc été le fleuron de la politique d'exploitation de la liberté de la presse au profit d'une propagande à laquelle son caractère officieux devait permettre la plus grande violence de ton. (41(*)) Tous ces exemples permettent de mesurer les dégâts que peuvent causer les médias s'ils ne sont pas bien contrôlés. La nécessité d'utiliser donc les médias à des fins pacifiques s'impose. Toute cette analyse sera appuyée dans les lignes qui suivent par les résultats de nos entretiens. * 39 NACOS, B., Médias et terrorisme : du rôle central des médias dans le terrorisme et contre le terrorisme, Paris, Nouveaux Horizons, 2005. * 40 Halen, P., Le langage de la mémoire : (les) littérature, médias et génocide rwandais, Université Paul Verlaine, écriture, 2003. * 41 Reporter sans frontière, Les médias de la haine, Paris, Découvertes, 1995 |
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