II- Les défis de la SONEB dans le domaine de
l'assainissement des eaux usées aux Bénin
L'alimentation en eau potable et l'assainissement des eaux
usées sont des domaines assez interdépendants qui poursuivent le
même but de prévention pour un mieux être de l'Homme.
L'axe de l'alimentation en eau potable est souvent
prépondérant dans les interventions et presque tous les autres
axes dont celui de l'assainissement font souvent l'objet de timides
attentions.
Il n'est point un secret pour personne que, plus de 40% des
eaux servies ou prélevées pour la consommation en eau potable
d'une part, celles utilisées dans les petites et moyennes entreprises
d'autre part retournent dans la nature, chargées, souillées sous
forme d'eau usée.
La Décennie Internationale pour l'Eau Potable et
l'Assainissement (DIEPA 1981-1990) a suscité un regain
d'intérêt aux questions de l'approvisionnement en eau potable. De
même les Objectifs du Millénaire pour le Développement
(OMD) consacrent une place de choix au secteur de l'eau :
«Réduire de moitié d'ici à 2015, le
pourcentage de la population qui n'a pas accès de façon durable
à un approvisionnement en eau potable». Malheureusement la gestion
des eaux usées n'est pas intimement liée à
l'approvisionnement en eau potable dans les pays en voie de
développement. Mieux pour atteindre l'objectif précité, le
taux de couverture du service d'approvisionnement en eau potable devrait
doubler alors que celui relatif à l'assainissement doit tripler.
Les perceptions, les représentations sur la gestion des
eaux varient d'un milieu à un autre et sont fonctions de
paramètres aussi variés. En effet, chaque groupe social a sa
propre culture, sa psychologie, ses sources de motivation, ses croyances, ses
perceptions, ses pratiques liées à la gestion des ressources en
eau et c'est ici la responsabilité de la SONEB d'aider ces groupes
sociaux à rester dans la droite ligne des objectifs du millénaire
pour le développement.
A- Typologie des eaux usées et
réalités socioculturelles
On distingue :
- Les eaux de W-C (eaux brunes)
- Les eaux de vaisselle, de lavage, de bain et de douche (eaux
grises)
- Les eaux jaunes (urines)
- Les eaux usées de la cour et eaux pluviales
- Les eaux usées industrielles.
Lorsqu'on fait un classement classique par groupe de polluants
des eaux usées, on a :
1- La pollution physique ou pollution primaire : cet
aspect est représenté par un excès de particules en
suspension dans l'eau. Les matières en suspension ou MES
entraînent la turbidité des eaux : elles sont
troublées.
2- La pollution organique ou pollution secondaire :
cette catégorie regroupe l'ensemble des matières organiques
rejetées dans les eaux naturelles. Ces déchets proviennent
surtout du sanitaire et de la cuisine. Le déséquilibre du milieu
aquatique provoqué par l'excès des matières organiques est
énorme, et par la consommation d'oxygène qu'elle entraîne,
peut conduire à la destruction totale de l'écosystème. La
pollution organique est évaluée :
ü Par la demande chimique en oxygène (DCO)
(destruction de matière organique non biodégradable)
ü Par la demande biologique en oxygène (DBO) (plus
il y a de matière organique utilisable par les bactéries, on
parle de demande biologique en oxygène qui n'est autre chose que la
destruction de molécules biodégradables)
3- La pollution minérale ou pollution tertiaire :
elle est provoquée par les eaux urbaines qui sont riches en
composés minéraux, de l'azote et du phosphore. Ces
composés analogues aux engrais utilisés en agriculture, jouent le
même rôle dans le milieu aquatique naturel. Ils entraînent un
développement massif des végétaux et en particulier celui
du phytoplancton. Il s'agit du phénomène d'eutrophisation qui,
souvent, provoque des mortalités précoces massives et
entraîne une chute vertigineuse de la biodiversité.
4- La pollution biologique ou pollution quaternaire :
cette dernière catégorie regroupe l'ensemble des germes
pathogènes véhiculés par les eaux usées. Ils sont
responsables de nombreuses maladies à caractère endémique
ou épidémique et affectent particulièrement les
populations situées dans les quartiers périphériques de la
ville de Cotonou (Agla, Vossa, Akpakpa). Hépatite, poliomyélite,
typhus, choléra, la plupart des gastro-entérites sont
véhiculés par les eaux usées urbaines entraînant une
mortalité infantile des suites de contacts directs ou indirects avec des
eaux non ou mal désinfectées. Les croyances et les perceptions
selon le genre, la pauvreté et les structures sociales de ces
populations se rapportent à :
ü L'attitude d'esprit et aux habitudes en matière
de prévention des maladies particulières liées à la
gestion des eaux usées ;
ü Les pesanteurs socioculturelles relatives aux
croyances, aux us et coutumes, aux tabous, aux rites, aux formes de
représentation sur la santé.
ü L'analphabétisme
ü L'élimination sans précaution et sans
hygiène des eaux usées.
ü La pauvreté
ü Le manque ou le peu d'intérêt
accordé à l'hygiène et l'assainissement
ü Les structures de pouvoirs officiels et puissances
officieuses dans la collectivité, les groupes sociaux en présence
de leurs influences réciproques.
ü Les services de développement sanitaires
existants, les données épidémiologiques courantes, le
degré de coopération, la communication.
ü L'attitude des populations vis à vis d'une
éventuelle participation à des travaux de gestion des eaux
usées.
Il ressort de ce qui précède que dans le domaine
de l'assainissement, il reste du chemin. La SONEB dans ses dispositions doit
tenir compte de ces réalités socioculturelles pour arriver
à prendre en compte les connaissances et perceptions endogènes en
vue d'une modification de comportement des populations.
S'il existe des mécanismes sociaux de stabilité
et de conformité, il existe également des mécanismes
d'innovation, car toute vie se développe et se transforme en s'adaptant
aux conditions dans lesquelles elle est placée pour que les
améliorations en matière d'assainissement soient largement
acceptées en milieu rural ou périurbain, il faut lors de
l'identification, de la planification et de la mise en oeuvre des projets de ce
secteur par la SONEB qu'un certain nombre de facteurs socioculturels soient
dûment prises en compte.
Dans la tradition béninoise, il existe des pratiques
connues à risque mais banalisées depuis la nuit des temps. Voici
quelques exemples de ces pratiques.
ü Quand bien même on connaît les causes
physiques et les responsabilités des germes pathogènes
liés aux eaux usées dans les cas d'épidémie de
diarrhée par exemple, il reste ancrer dans nombre de cultures que cette
maladie peut être d'origine spirituelle sans aucun contact avec des
aliments altérés ou eaux usées.
ü La présence des eaux usées dans la cour
témoigne de la présence de la femme dans les ménages.
Des pratiques rituelles utilisant les eaux, on
pourrait distinguer celles susceptibles de conduire à une bonne
hygiène et celles qu'il est nécessaire de modifier. Il s'agit
dans ce dernier cas des eaux prélevées dans les sources d'eau
(rivière, marigot...) et ayant séjourné dans les jarres et
qui sont consommées pour la purification d'un malade ou de quelqu'un qui
a transgressé un interdit.
L'assainissement en général et en particulier,
la gestion des eaux usées est très mal comprise par les
populations comme un luxe. En effet, il n'est pas rare de les entendre
évoquer d'autres priorités comme :
Comment avoir à manger ?
Comment payer la scolarité des enfants ?
Comment payer les produits pharmaceutiques pour les personnes
malades ?
Malheureusement, ils ne voient pas toujours la relation entre
l'assainissement et les divers problèmes qu'ils évoquent et plus
particulièrement avec la santé. Autrement dit, l'assainissement
ne fait pas leur préoccupation.
Face à toutes ces réalités, les
défis de la SONEB sont énormes.
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