PREMIERE PARTIE : LE PROCESSUS D'URBANISATION DANS LA
PROVINCE DE L'ESTUAIRE
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Processus d'urbanisation et aménagement de la
province de l'Estuaire.
D'une superficie totale de 20740 km2, soit 7,7% de la surface
totale du Gabon, la province de l'Estuaire est bordée au nord par la
Guinée Equatoriale, à l'est par le Woleu-Ntem, au sud par le
Moyen-Ogooué et l'Ogooué-Maritime, et à l'ouest par
l'Océan Atlantique. En 1960, date à laquelle le mouvement
d'urbanisation a vraiment commencé, le Gabon ne comptait qu'une seule
commune de plein exercice située dans l'Estuaire (Libreville).
Près de trente cinq (35) ans après, c'est-à-dire dans les
années 1990, la province a connu une dynamique communale qui a atteint
d'autres localités de la région, qui juste que là
étaient de simples relais d'administration coloniale. De ce fait,
comment s'est alors déroulé le processus d'urbanisation dans la
province de l'Estuaire ? Et quel diagnostic pouvons-nous faire de cette
urbanisation et surtout quelles ont été les différentes
politiques d'aménagement et études urbaines menées dans
cette province ? Ces deux grandes interrogations nous emmènent à
voir dans le chapitre 1, Historique de l'urbanisation et croissance
démographique des villes de la province de l'Estuaire et en
chapitre 2, le bilan de l'urbanisation et les différentes politiques
urbaines et d'aménagement de la dite province.
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Processus d'urbanisation et aménagement de la
province de l'Estuaire.
Chapitre 1 : Historique de l'urbanisation et croissance
démographique des villes de la province de l'Estuaire.
Dans ce chapitre, nous voulons mettre en lumière les
différentes étapes du processus d'urbanisation de la province de
l'Estuaire, depuis la période coloniale et ensuite d'évoquer la
question relative à l'accroissement démographique des villes de
la dite province.
I- Des villes de la colonisation aux communes de plein
exercice.
Comme pour de nombreuses villes africaines, le système
urbain Gabonais actuel est le résultat de l'action des pouvoirs
coloniaux, qui quadrillaient méthodiquement les territoires d'un
réseau de postes hiérarchisés, lesquels concentraient
toutes les fonctions politique et économique15. Ainsi,
l'organisation des communes du Gabon s'est réalisée
progressivement. Elle remonte à la fin de la période coloniale.
En 1955, Libreville et Port-Gentil étaient érigées en
commune de plein exercice, c'est-à-dire disposant d'un conseil et d'un
maire élu. Ce statut a été élargi en 1975 à
tous les chefs-lieux de province et à quelques autres villes, qui
n'étaient encore que des communes de moyen exercice. La politique de
décentralisation élaborée 1996 a conduit à
ériger tous les chefs lieux de département du statut de commune
de plein exercice16. Aujourd'hui, le Gabon compte 52 communes : les
49 chefs lieux de département auxquels s'ajoutent les communes de
Libreville, d'Owendo et de Mounana.
Dans la province de l'Estuaire plus particulièrement,
le développement des villes n'a pas échappé à ce
phénomène, car celles-ci sont des anciens postes coloniaux,
héritage de l'administration coloniale. Jusqu'à une date
récente, seule Libreville était une commune urbaine dans un vaste
« désert rural », alors que les autres villes n'étaient
encore que de simples relais de l'administration coloniale (Poste de
contrôle administratif, poste télégraphique...). Mais dans
les années 1990, l'armature urbaine s'est renforcée avec la vague
de nouvelles communes. En effet, il a fallu attendre près
15 Y. WGUERAT (Géographe ORSTOM), Note
sur l'urbanisation en Afrique Noire, E.R.S.S, 1977-1978, p.2
16R. M. NGUEMA. « Organisation administrative
» in Atlas de l'Afrique, Spécial Gabon, Editions J.A,
2004, p.23
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Processus d'urbanisation et aménagement de la
province de l'Estuaire.
de trente cinq ans, après la première
commune17, pour voir la dynamique communale atteindre d'autres
localités de la région. Malgré ce renouveau, l'armature
urbaine de la province de l'Estuaire reste encore embryonnaire
Ainsi, deux périodes majeures pourraient être
significatives pour caractériser la création des villes de la
province de l'Estuaire.
Jusqu'en mai 1957, il n'existait au Gabon que deux communes de
plein exercice, parmi lesquelles, la commune de Libreville qui fut la
première entité régionale du Gabon à
acquérir ce statut. Son statut privilégié peut trouver
l'origine dans la politique coloniale qui a favorisé l'essor
socio-économique et démographique des villes
côtières. En effet, la politique coloniale consistait au
développement des villes côtières. C'est ainsi que les
grandes villes africaines sont généralement situées sur
les côtes (Dakar, Douala, Libreville...), en situation de carrefour entre
une interface maritime et un ensemble continental, au débouché
d'une voie ferrée le plus souvent. Ces grandes villes jouent avec leur
port (port mole de Libreville et port d'Owendo), le rôle de tête de
pont sur tous les domaines.
Quant au statut des autres villes, avant l'accession de notre
pays à la souveraineté internationale, elles étaient soit
des postes de contrôle administratifs (Kango avait ce statut entre 1900
et 1957) ; soit des postes administratifs français (entre 1919 et 1960,
Cocobeach avait ce statut) ; soit encore des chefs-lieux du département
(Ntoum perdit ce statut en 1929 et le retrouva en 1982) et enfin d'anciens
villages de pêcheurs (Cap-Estérias et Owendo) et d'anciens
chantiers forestiers (Ndzomoé). Donc, avant l'indépendance de
notre pays, la province de l'Estuaire comptait qu'une seule commune de plein
exercice et les autres communes actuelles n'étaient rien que des
entités régionales sous tutelle coloniale.
Les villes gabonaises après l'indépendance sont
aussi le fait de l'administration. D'une certaine façon, la
République gabonaise apparaît comme la continuation du
système colonial dont les principes et pratique d'encadrement
territorial demeure aujourd'hui encore largement usitée.18
Ainsi, deux grandes phases caractérisent cette période.
17 Il faut retenir que la première commune de
la province de l'Estuaire a été érigée en 1955 et
que l'érection des autres communes se manifeste dans les années
1990.
18 R. POURTIER, 1989, Op cit.
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Processus d'urbanisation et aménagement de la
province de l'Estuaire.
Au courant des années 1990, Vu la loi n°41/93/PR
du 15 février 1993, le gouvernement ratifie selon l'ordonnance
N°010/93/PR du 4 octobre 1993 que certaines communes exercent les
fonctions de plein exercice, dont la commune d'Owendo, située dans le
département du Komo-Mondah dans la province de l'Estuaire.
En 1996, suivant la loi organique du 06 juin 1996, relative
à la décentralisation, le gouvernement gabonais décide que
chaque chef-lieu de département soit érigé en commune de
plein exercice. Dans la province de l'Estuaire, les départements du
Komo-Kango, de la Noya et du Komo-Mondah ont été
érigés en commune de plein exercice.
Dans les années 2000, en application des dispositions
des articles 7 et 9 de la loi N° 14/95 du 15 Avril 1996 portant
réorganisation territoriale de la république gabonaise, le
gouvernement érige, dans la province de l'Estuaire, Ndzomoé en
district et le district du Cap en département. Ainsi, le
département de Komo-Océan a pour chef-lieu Ndzomoé et
celui du Cap a pour capitale le Cap-Estérias. Et selon le décret
N°1290/PR/MIDSM à 1314/PR/MIDSM du 5 Septembre 1996, les
chefs-lieux du Komo-Océan et du Cap-Estérias deviennent
automatiquement des communes de plein exercice en 2007, c'est-à-dire
disposant d'un maire élu et d'un conseil municipal.
Aujourd'hui, la province de l'Estuaire compte cinq (5)
départements (Komo-Mondah, Komo-Kango, Noya, Cap-Estérias et
Komo-Océan) et sept (7) communes de plein exercice (Libreville, Ntoum,
Owendo, Cocobeach, Kango, Cap-Estérias et Ndzomoé).
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Processus d'urbanisation et aménagement de la
province de l'Estuaire.
Tableau n° 1 : Les communes de la province de
l'Estuaire.
Départements
|
Communes de plein
exercice
|
Année d'érection
|
Komo-Mondah
|
Libreville, Ntoum, Owendo,
|
Respectivement (1957, 1993
et 1994)19
|
Komo-Kango
|
Kango
|
En 1996, par le décret n°
1290/PR/MIDSM à
1314/PR/MIDSM du 5 Septembre 1996
|
Noya
|
Cocobeach
|
En 1996, par le décret n°
1295/PR/MISDM/ du 05 septembre 1996.
|
Cap-Estérias
|
Cap-Estérias
|
Le 21 août 2007, par
ordonnance n° 0018/PR/2007.
|
Komo-Océan
|
Ndzomoé
|
Le 19 juillet 2007, par
ordonnance n° 017/PR/2007.
|
Source : multiples.
A travers ce tableau 1, nous constatons que la création
des villes de la province de l'Estuaire s'est faite de manière
progressive. La première commune a été instituée en
1957 et la dernière en 2007. De même, il apparaît que
certaines de ces communes ont été créées par
ordonnance, c'est-à-dire que leur érection n'a pas l'objet d'un
projet du gouvernement et d'autres par décret, c'est-à-dire, une
décision du pouvoir gouvernemental dont les effets sont semblables
à ceux des lois. Toutes ces manoeuvres montrent justement l'emprise de
l'Etat sur les décisions de la création ou non d'une ville. Par
ailleurs, c'est le département du Komo-Mondah qui abrite le plus grand
nombre de communes (trois sur les sept que compte la province). Les quatre
autres départements ont chacun une commune. Si le développement
des villes a été progressif dans cette région, mais
comment s'est effectuée alors la croissance démographique de ces
dernières ?
19 Libreville a été consacrée
commune de plein exercice par l'ordonnance municipale du 06 avril 1963 et a
été divisée en arrondissement depuis l'ordonnance n°
19 du 19 mars 1974. La commune d'Owendo, quant à elle, recouvre ce
même statut par la loi n° 14/93, du 15 février 1994. Enfin la
commune de Ntoum acquiert le statut de commune de plein exercice par
l'ordonnance n°14/93, du 14 octobre 1993.
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Processus d'urbanisation et aménagement de la
province de l'Estuaire.
Carte n° 2 : Carte représentant
l'évolution des communes urbaines de la province de
l'Estuaire.
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province de l'Estuaire.
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