A. Les terrains de l'affrontement concurrentiel
Les entreprises en concurrence peuvent s'affronter
sur différents terrains ; ces terrains correspondent à ce
que Michael PORTER considère comme les grandes catégories de
stratégie face à la concurrence. Il s'agit de : la
domination globale au niveau des coûts, la différenciation et
la concentration de l'activité.
1) La domination globale par les
coûts
Traditionnellement, l'affrontement concurrentiel se
situait au niveau des prix de vente pour les entreprises. Être
compétitif c'était alors et surtout être capable de
produire des biens et des services à un coût de revient tel que le
prix de vente permette à l'entreprise de rentrer dans ses fonds. Pour
ce, certaines entreprises ont adopté la stratégie de domination
globale par les coûts de PORTER. En effet, pour cet auteur, lorsqu'une
firme parvient à une situation de domination par les coûts, elle
réalise des profits supérieurs à la moyenne du secteur. En
outre, elle est à l'abri de l'agression de ses concurrents parce que la
faiblesse relative de ses coûts signifie qu'elle peut continuer à
faire des profits après que ses concurrents aient épuisé
les leurs dans le conflit. Aussi, une situation favorable au niveau des
coûts défend la firme contre les clients qui ne pourront exercer
leur pouvoir pour amener l'entreprise à baisser ses prix jusqu'au niveau
des concurrents les plus efficaces.
Toutefois, même si la compétitivité prix
reste un impératif fondamental de gestion pour bon nombre d'entreprises,
il ne conserve son caractère absolu que lorsque la concurrence porte sur
des produits homogènes. En effet, il n'y a que dans cette optique que le
prix peut influencer la décision d'achat, puisque l'acheteur n'aura
aucune raison rationnelle d'éviter un producteur pour se procurer un
article banalisé plus cher chez un autre producteur.
Cependant, dès lors qu'il existe une quelconque
différenciation entre les produits, la compétitivité prix
devient moins contraignante.
2) La différenciation
La différenciation du produit ou du
service vise à le rendre unique, sinon, à le démarquer des
autres produits ou services de sa catégorie. La démarche de
différenciation peut prendre diverses formes : conception ou
présentation du produit, performance, etc. Dans ce cas, les
caractéristiques objectives ou subjectives du produit empêchent la
comparaison avec d'autres produits et peuvent amener les acheteurs à
accepter un prix plus élevé.
En effet, comme le souligne PORTER, lorsque la
différenciation est réussie, la firme peut obtenir des profits
supérieurs à la moyenne du secteur. De plus c'est un moyen de
fidéliser la clientèle et de faire face aux produits de
remplacement.
Ainsi, avec la différenciation des produits,
l'affrontement concurrentiel est déplacé sur le terrain du
qualitatif. Pour cause, seul, le prix ne suffit plus pour conquérir de
nouveaux clients. C'est pour cette raison, que les entreprises
s'intéressent aux caractéristiques du produit telles que ses
caractéristiques d'usage (durabilité, confort, commodité,
puissance, fiabilité), son statut social (prestige, séduction) ou
son esthétique.
3) La concentration de l'activité
Si habituellement les entreprises s'affrontent sur le prix des
produits ou sur leur « personnalisation », il arrive
souvent que celles-ci se battent également pour un groupe de clients
particuliers, pour un segment de la gamme des produits ou sur un marché
géographique. Cet affrontement est à l'origine des
stratégies de concentration.
Contrairement aux stratégies de domination globale et
de différenciation qui visent à atteindre des objectifs au niveau
de l'ensemble du secteur, la stratégie de concentration s'organise
autour d'une cible particulière. C'est un concept qui repose sur
l'idée que la cible stratégique de l'entreprise peut lui
permettre d'être plus rentable que les concurrents qui luttent dans un
domaine plus large. Il en résulte que la firme parvient soit à
une différenciation, parce qu'elle satisfait mieux les besoins de la
cible particulière, soit à des coûts plus faibles pour
desservir cette cible, soit aux deux à la fois.
Enfin, selon Elie COHEN, de nos jours la
compétitivité tient aussi compte des conditions dans lesquelles
l'entreprise assure sa production de biens ou de services en réponse
à la demande. L'entreprise peut ainsi valoir d'autres arguments dans le
jeu concurrentiel :
Ø Capacité d'adaptation à
l'évolution de la demande en termes quantitatifs (accroissement ou
diminution des volumes commandés) ou qualitatifs;
Ø Ponctualité des livraisons ;
Ø Homogénéité des
produits ;
Ø Rigueur des contrôles de
qualité ;
Ø Services annexes : formation des distributeurs,
information pour le consommateur, service après vente, etc.
La compétitivité est donc un impératif
pour l'entreprise qui peut se manifester à différents
niveaux : prix, qualité du produit, organisation et fonctionnement
de l'entreprise, etc. Cependant, pour atteindre cet objectif, l'entreprise doit
maîtriser les facteurs sur lesquels elle peut agir.
Outre, l'analyse des indicateurs d'une entreprise devra
être soutenue par l'examen de ratios plus précis concernant sa
rentabilité, sa productivité et sa profitabilité. Par
exemple comme indicateurs, les taux de marges permettent de mesurer : la
capacité de l'entreprise à contrôler ses coûts et
à fixer ses prix, l'excellence de ses processus de production
(qualité, fiabilité, sécurité, etc.) et ses
compétences en matière de gestion des ressources humaines. La
rentabilité financière constitue un autre indicateur de
compétitivité qui mesure le rendement du capital investi par
l'actionnaire majoritaire (Mucchielli, 2002). Outre les indicateurs financiers
tels que ROI (return on investments) et ROA (return on assets), il existe des
«proxies» conventionnels de la compétitivité et des
indicateurs non financiers qui sont aussi importants, ces indicateurs incluent
la satisfaction des clients, la part du marché, le volume des ventes et
la productivité, ...etc. (Sharma et Fisher, 1997). Dans l'étude
de Little (2004), on a extrait cinq indicateurs de la
compétitivité : - La vitesse : Comment l'entreprise
répond rapidement aux besoins de ses clients. Cela ne couvre pas
seulement la vitesse de livraison, mais aussi comment cette entreprise peut
donner des réponses aux questions des consommateurs dans les
délais les plus courts. - La fiabilité : Comment
l'entreprise tient ses promesses. - La flexibilité : Comment
l'organisation réagit convenablement vis-à-vis les changements
environnementaux. - La qualité : Comment les produits ou les
services de l'organisation répondent aux besoins des clients en termes
de qualité, et comment elle assure la livraison d'une façon
régulière. - Les prix : Comment l'entreprise contrôle
sa politique des prix envers ses clients et ses fournisseurs.
2.2.2 : Facteurs de
compétitivité :
Si les terrains de l'affrontement concurrentiel sont
variés, il en est de même pour les sources d'avantage
concurrentiel. Ceux-ci doivent être recherchés à la fois
dans la gestion des entreprises elles mêmes et dans certaines
caractéristiques de leur environnement.
1) Les facteurs internes
Comme facteurs de compétitivité internes, Sylvie
De COUSSERGUES3 distingue les avantages concurrentiels liées à
l'organisation, ceux liés à la production, les avantages
concurrentiels liés à la vente et ceux liés à la
taille et à la croissance.
a- Les avantages concurrentiels liés à
l'organisation
Pour Sylvie De COUSSEGUES, « les modes
d'organisation constituent une source importante d'avantages
concurrentiels ». Au niveau global, il s'agit de s'assurer, de la
façon la plus efficiente possible de la coordination de toutes ses
composantes. D'un point de vue pratique, on peut considérer que peuvent
procurer un avantage concurrentiel :
Le statut juridique de l'établissement de
crédit, car la pression exercée par les actionnaires, la
réglementation et les marchés est fonction de catégorie
d'entreprise ;
La culture d'analyse de risque et de contrôle
développée dans l'établissement ;
La flexibilité organisationnelle et l'aptitude
à s'adapter à un environnement changeant.
A cet effet, Sylvie De COUSSERGUES souligne que les grandes
fonctions de l'entreprise sont exercées dans les entités
autonomes, notamment la fonction commerciale et la fonction financière.
C'est donc sur ces fonctions que l'entreprise peut s'appuyer pour cerner son
environnement puis agir ;
La qualité du management, c'est-à-dire son
aptitude à concevoir et mettre en oeuvre une stratégie gagnante.
On rejoint ici le talent entrepreneurial de Michael PORTER. En effet, pour cet
auteur, l'entrepreneur talentueux est celui qui sait innover, prendre les
bonnes décisions dans son environnement et les mettre en oeuvre,
grâce à sa capacité à planifier, contrôler,
coordonner et animer. L'entrepreneur talentueux peut donc tirer davantage
d'outputs de la même quantité d'inputs.
b- Les avantages concurrentiels liés à
la production
La réalisation d'avantages concurrentiels au niveau de
la production se fait essentiellement à travers la minimisation des
coûts. Les coûts concernés sont principalement le coût
des ressources clientèle pour la banque de détail, et le
coût d'accès aux marchés des capitaux. Ce coût
dépend de la note décernée à la banque par les
agences de notation ou alors de la réputation et de l'image de cette
banque dans son environnement.
c- Les avantages concurrentiels liés à
la vente
Les avantages concurrentiels qu'une banque peut s'approprier
à ce niveau sont nombreux : gestion de la relation client, image et
réputation, tarification, réseau d'agences bien
dimensionné et bien implanté. Autrement dit, il s'agit de tout ce
qui se rapporte au marketing. Tous ces éléments peuvent
contribuer à rendre l'établissement de crédit plus
compétitif.
d- Les avantages concurrentiels liés à
la taille et à la croissance
La taille constitue selon Sylvie de COUSSERGUES l'une des
toutes premières sources d'avantage concurrentiel. D'une part, elle
confère des avantages en termes de coûts liés aux
économies d'échelle. En effet, seules les entreprises de grande
taille peuvent supporter les coûts élevés d'investissement
en informatique ou télématique.
D'autre part, la taille favorise aussi la domination des
marchés avec tous les avantages qui en découlent pour tenir
à distance les concurrents. Elle procure une grande
notoriété et donne une image de dynamisme et de
réussite ; ce qui est très gratifiant pour le personnel et
constitue un attrait pour le recrutement des meilleures équipes. Elle
représente également une bonne protection contre la faillite et
les Offre Publiques d'Achat (OPA), la prise de contrôle de la cible
nécessitant la mobilisation de capitaux considérables.
Pour ce qui est de la croissance, l'avantage concurrentiel
proviendra de l'aptitude à mettre en oeuvre un processus de croissance
externe. Car ce n'est qu'ainsi que l'on peut accéder rapidement à
la taille critique ou même prendre le contrôle d'un concurrent
dangereux, notamment lorsque le marché est saturé.
Même si les facteurs internes ont une grande importance,
seuls, ils ne suffisent pas à déterminer la
compétitivité d'une firme. Celle-ci peut aussi être
conditionnée par l'environnement dans lequel il évolue.
2) Les facteurs externes
L'environnement socioculturel, l'environnement
économique, l'environnement politique et juridique et le réseau
de relations dans lequel s'inscrit la firme constituent les facteurs externes,
sources d'avantage concurrentiel.
a- L'environnement économique
C'est celui sur lequel la plupart des entreprises se focalise.
Généralement, ils effectuent des analyses portant sur des
indicateurs tels que : le volume de la demande intérieure, la
quantité et qualité des facteurs de production disponibles, le
revenu moyen par habitant, les dépenses en consommation, le niveau de
l'épargne, la concurrence, etc. Avec la mondialisation, l'environnement
économique est devenu encore plus important pour les entreprises qui
n'hésitent plus à se rapprocher autant que possible des
conditions qu'ils estiment propices à leur croissance.
b- L'environnement politique et juridique
C'est un autre déterminant de l'investissement pour les
firmes. La stabilité politique ou encore la qualité des
institutions est autant d'éléments qui captent l'attention des
investisseurs. Bien entendu, ils s'intéressent aussi aux lois en vigueur
relatives à leurs activités en se demandant si dans l'ensemble
elles sont contraignantes ou si elles sont plutôt souples.
c- Le réseau de relations
La compétitivité des entreprises est
fréquemment influencée par le réseau de relations dans
lequel elles sont inscrites. Ainsi, le rattachement à un groupe, des
accords de partenariat, des contrats de fourniture exclusive, par exemple,
peuvent renforcer la position concurrentielle des unités qui en
bénéficient.
En effet, le concept de la compétitivité n'est
pas statique. C'est un concept relatif dont la perception change avec le niveau
d'analyse menée. Ainsi, une multitude de facteurs, aussi bien
domestiques qu'internationaux, peuvent avoir des effets profonds sur la
compétitivité d'une entité donnée (Lachaal.L,
2005). D'où vient le fait qu'une entreprise dispose à un moment
précis d'un avantage sur ses concurrents ? Dans des métiers, les
services, où l'immatérialité est le plus souvent, la
production finale, l'origine de l'avantage se trouve renfermé dans des
capitaux eux-mêmes immatériels qui forment au bout de la
chaîne la rente qui se matérialisera par un surprofit ou une
sur-rentabilité (Dhaoui. M.L, 1996). Ces capitaux immatériels
sont en nombre de cinq (5) : - Le capital humain est la donnée
essentielle dans des métiers où la relation expertise client est
la dimension majeure ; - La capitale innovation se caractérise par la
capacité d'une entreprise de services à sortir de nouvelles
prestations et d'être à l'origine de nouveaux concepts ; le
capital organisation exprime la possibilité d'une entreprise de services
à s'adapter en permanence aux aléas du marché, à
ses secousses et à ses besoins. - Le capital clients illustre l'attrait
qu'exerce une entreprise de services dans le fait d'attirer vers elles les
clients les plus stratégiques au plan régional, national ou
international ; et - Le capital apporteur de fonds est le reflet de la
fidélité et la confiance qu'accordent ceux qui accompagnent
l'entreprise dans le financement de sa stratégie. Ces cinq (5) facteurs
immatériels fondent l'avantage concurrentiel qui sera la manifestation
de la compétitivité de l'entreprise.
![](Lapport-des-nouvelles-technologies-dans-la-competitivite-de-lentreprise-cas-BGFI-Bank-Congo12.png)
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