2.2-) Les PME multibanques victimes de hold-up et de
duplication de coût de transaction
L'interprétation des résultats sera faite en
s'intéressant tout d'abord aux variables de contrôle puis aux
variables relationnelles et enfin aux variables de
multilatéralisation.
Concernant les variables de contrôle, l'âge, la
taille et liquidité de l'entreprise ne présente pas de
coefficients significatifs. Ces variables ne semblent pas avoir
d'intérêt dans la facturation des services financiers par les
créanciers de l'entreprise. Cette absence de liaison
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significative ne rejoint pas la conception selon laquelle le
degré d'opacité de l'entreprise (mesuré par l'âge et
la taille) serait inversement au rationnement de crédit et donc au
coût de l'endettement.
Les garanties sont considérées comme une Proxy
inverse des coûts d'agence. La variable garantie potentielle
présente un signe significatif et négatif. Cette relation entre
la propension à présenter des garanties sous forme d'actifs
tangibles et le coût du crédit bancaire confirme les idées
des théories de l'agence et du signal. La théorie de l'agence
considère que les garanties ont un impact positif sur la dette
puisqu'elles contribuent à réduire les coûts d'agence
dirigeants-créanciers Le monitoring de la PME multibanque est moins
fréquent et génère des économies de coûts qui
son répercutés sur la tarification de ses services financiers..
Les garanties sous forme d'immobilisations corporelles sont donc un
critère important conditionnant le coût d'endettement des PME.
Lehmann et Neuberger (2001) trouvent également en Allemagne que le
niveau de garantie offert par les PME pour une demande de prêts influence
négativement sur le taux d'intérêt bancaire.
La variable performance présente également un
coefficient négatif et significatif. Plus les PME génèrent
suffisamment de profits leurs permettant éventuellement de couvrir leurs
charges financières, moins le coût d'endettement est
élevé.
Le niveau d'endettement de l'entreprise,
représenté par la variable solvabilité de l'entreprise,
à une influence positive et significative sur le coût du
crédit. Contrairement à l'argument de Ross (1977), l'augmentation
du niveau d'endettement de l'entreprise multibanque serait plus perçue
par les banques comme une source supplémentaire de risque et non comme
un signal de qualité. Un résultat similaire est trouvé par
Ziane (2003), sur des données françaises.
La régression du coût d'endettement des PME
montre que parmi les variables relationnels (X1, X2 et X3.1) seule
l'étendue des services financiers offerts par la banque principale (X2)
de l'entreprise est significative. Le signe positif de son coefficient peut
trouver justification dans l'hypothèse du hold-up informationnel de
Sharpe (1990). Les BP, opportunistes, utiliseraient l'avantage informationnel
issu de la fréquence des contacts avec les PME pour satisfaire
uniquement leurs intérêts. Weinstein et Yafeh (1998), dans le
contexte japonais, trouvent également qu'en dépit du fait que
l'étendue de la relation avec la banque
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crédit et coût de l'endettement : le cas des PME
camerounaises
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principale est source de disponibilité de
crédit, celle-ci s'accompagne d'un coût élevé et
d'un faible niveau de croissance de l'entreprise74.
Les variables de multibancarisation (X4 et X5.1)
sont tous positivement liées au coût d'endettement. Cependant,
seule la variable nombre créanciers financiers a un coefficient
significatif. Contrairement aux arguments de Fall et Diagne (2009), les EMF ne
joueraient pas un rôle de certification de la qualité de
l'emprunteur auprès des banques. Le signe positif de la variable
dualisme banque-EMF tend plutôt à corroborer la thèse selon
laquelle étant donné que les EMF se refinancent auprès des
banques commerciales, les taux d'intérêt appliqués sur les
crédits par ceux-ci seraient nécessairement supérieurs
à ceux de la banque. La combinaison banque-EMF n'aurait donc pour
conséquence qu'une augmentation du coût de la dette.
Les résultats obtenus sur la variable nombre de
créanciers financiers sont similaires à ceux de Petersen et Rajan
(1994) aux États-Unis, de Cánovas et Solano (2003) en Espagne, et
de Shikimi (2005) au Japon. Ils corroborent la thèse de Diamond (1984)
selon laquelle plus le nombre de créanciers est élevé,
plus les coûts des transaction sont dupliqués et
répercutés dans les conditions de financement de l'entreprise.
L'argument selon lequel la multiplication des interlocuteurs financiers
permettrait à la PME d'arbitrer sur les conditions de crédit
proposées par chacun d'eux et d'en choisir la meilleure offre est
infirmée en référence au coût du crédit.
La deuxième partie de ce travail avait pour
finalité l'analyse de l'incidence de la multibancarisation sur le
coût de l'endettement des PME camerounaises. Un parcours de la
littérature théorique et empirique sur le sujet à permis
de recenser un ensemble de variables caractérisant principalement ce
régime de financement (Nombre de créanciers financiers, Dualisme
banque-EMF, Durée et Étendue de la relation avec la banque
principale). L'analyse basée sur un échantillon de 98 PME
multibanques montre que, malgré le lien positif constaté entre
ces variables et le coût de l'endettement, seules les variables Nombre de
créanciers et Durée de la relation présentent des
coefficients significatifs. La seconde hypothèse de la
74 Précisons que les auteurs justifient le
faible niveau de croissance par le fait que les banque s'approprieraient les
bénéfices de la relation de clientèle et, par un
comportement opportuniste, dissuaderaient les entreprises à investir
dans les projets innovants et risqués comme les investissements en
immatériels.
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camerounaises
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recherche selon laquelle le régime multibancaire de
financement est lié positivement au coût de l'endettement n'a donc
été que partiellement validée.
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