La protection des droits de l'enfant dans les conflits armés internes en Afrique centrale: cas du Burundi( Télécharger le fichier original )par Eric Ngueto Nyatchoumou Université catholique de l'Afrique Centrale - Master droits de l'homme et action humanitaire 2010 |
Section II : Perspectives au plan internationalCette section les perspectives au plan international afin de viser à l'amélioration la situation de la protection des droits de l'enfant dans un contexte de conflit armé. C'est en sens que ce travail met un accent sur l'effectivité des mesures internationales et une action adéquate de la communauté internationale. A- L'effectivité des mesures internationales Le Rapport sur la situation des droits de l'homme au Burundi de Janvier à Juillet 200172(*), met un accent particulier sur la situation des enfants nécessitant une protection spéciale, notamment, les incarcérés qui sont victimes des pires formes de travail, malgré l'adoption par le Burundi d'une loi portant ratification de la convention de l'OIT n°182 sur les pires formes de travail des enfants et l'action immédiate en vue de son élimination. Ce rapport fait aussi ressortir une étude des statistiques issues des milieux carcéraux : sur un total de 119 mineurs incarcérés, 55,5 % sont accusés de vol qualifié, tandis que 17 mineurs soit 14 % sont accusés de vol simple. Trois quarts de ces enfants sont donc en prison pour vol. En 1998, ce taux était de 50 %. Le rapport montre que la paupérisation était à la base de cette situation. Les auteurs du rapport montrent également que 81 des 119 mineurs incarcérés se déclaraient cultivateurs, 7 d'entre eux seulement étaient des élèves et 4 étaient des militaires. Au regard de cette situation de violation des droits de l'homme, les auteurs ont recommandé au gouvernement burundais une législation spécifique relative à l'enfance délinquante, une juridiction pour mineurs ou, à défaut, des chambres spécialisées, la création de maisons de rééducation, la libération conditionnelle de tous les mineurs et mères incarcérés ayant purgé le quart de leur peine, la multiplication des inspections du ministère public par des magistrats affectés uniquement aux cas des mineurs, la séparation des mineurs avec les adultes incarcérés à défaut de prisons pour mineurs et accorder facilement des libertés provisoires aux mineurs élèves incarcérés et aux mères. Ce rapport, hormis le fait qu'il souligne uniquement le cas des enfants incarcérés (et pourtant nous savons que jusqu'ici le processus de DDR n'a pas atteint ses objectifs et nombreux sont aussi les enfants qui sont tués et subissent des sévices sexuels) est satisfaisant, car les faits sont évoqués, analysés et des recommandations faites dans le but d'améliorer la situation des enfants en période de conflit armé. B- Une action adéquate de la communauté internationale Face à la problématique de l'utilisation des enfants en période de conflit armé, la communauté internationale a agi. Des instruments juridiquement contraignants ont été adoptés par les Nations Unies. Un mécanisme de lutte inédit a été mis sur pied dans le cadre du Conseil de sécurité. L'Union européenne a fait de la lutte contre ce fléau l'une de ses priorités en matière de droits de l'homme. Une série de principes novateurs a été adoptée, qu'on appelle désormais les Engagements de Paris. Beaucoup d'actions ont été entreprises ces dernières années et des succès significatifs ont été enregistrés avec la libération et la réintégration de plusieurs milliers d'enfants soldats, notamment au Burundi. C'est grâce à la mobilisation du Conseil de Sécurité que ces avancées sont obtenues et l'illustration la plus récente en est l'adoption à l'unanimité de la Résolution 1882, qui constitue une avancée opérationnelle importante et un geste politique fort. En effet, par cette résolution, le Conseil de Sécurité a élargi le mandat du groupe de travail à la question des violences sexuelles et aux meurtres et mutilations commis à l'encontre des enfants, indépendamment de l'existence ou non d'enfants soldats sur le terrain. Cette avancée permettra, dans les faits, une attention et une réactivité accrues du Conseil et de la communauté internationale face aux crimes sexuels très souvent commis en période de conflit armé. Depuis sa création, il y a quatre ans, ce groupe de travail s'est concentré sur le recrutement et l'emploi des enfants soldats, et a obtenu des résultats, contribuant à la libération de dizaines de milliers d'enfants qui ont été démobilisés au cours de cette période. Cela a été rendu possible grâce à la mobilisation constante de tous les membres du Conseil de sécurité, mais aussi de la Représentante spéciale du Secrétaire Général, Mme Radhika Coomaraswamy, et de l'UNICEF au plus haut niveau, ainsi que grâce à l'engagement d'autres acteurs de terrain, en particulier les ONG. Il n'y a pas de dissuasion, ni de prévention efficace sans sanctions, d'où l'existence de la Cour Pénale Internationale et, au-delà, de la justice pénale internationale, qui ont démontré leur capacité à poursuivre ceux qui se rendent coupables de recrutement et d'utilisation d'enfants dans les conflits armés. La lutte contre l'impunité doit être plus que jamais une priorité. « La France mène depuis décembre 2008 un projet mis en oeuvre par des personnels spécialisés dans nos Ambassades de Khartoum et Kinshasa. Ce projet vise à améliorer la protection des enfants dans les conflits armés dans six pays, République centrafricaine, Soudan, Tchad, d'une part, Burundi, Ouganda, République démocratique du Congo, d'autre part. Les interventions sont articulées autour de trois axes : 1. la réinsertion durable des enfants victimes des
conflits armés ; Ces projets de coopération sont développés étroitement avec l'UNICEF et les ONG de protection de l'enfant. Ils tiennent compte des expériences antérieures et essayent de répondre à ce besoin de réinsertion. Ils visent à trouver des solutions qui peuvent servir de levier pour améliorer la situation de ces enfants »73(*) Toujours dans un souci de mieux protéger l'enfant dans un contexte de conflit armé, il important pour la communauté un certain nombre d'actions, notamment : · la mise en place d'une plate forme d'action inter-agences et nationale de lutte contre l'exploitation économique et sexuelle des enfants et les pires formes de travail ; · des études et recherches sur les impacts socioéconomiques de la crise armée sur les enfants et sur l'exploitation économique des enfants dans le conflit armé ; · des initiatives originales d'éducation alternative pour les enfants victimes d'exploitation ou d'abandon ; · le processus de réconciliation nationale et de relance économique. Conclusion de la deuxième partie Dans le contexte de conflit armé au Burundi, poser la problématique de l'exploitation et l'utilisation des enfants n'est pas une question bien accueillie. Elle semble heurter la conception de l'enfant et ses devoirs envers la famille et la communauté, qui trouvent qu'un enfant doit être utile à ses parents et à la communauté, quelque soit son âge. Ainsi, les enfants peuvent contribuer au revenu familial. Mais, en retour son avenir est hypothéqué car en dépit de la lutte que mènent les acteurs sociaux et gouvernementaux, les parents encouragent le travail des enfants et, de ce fait, sont conscients de l'exploitation et de la maltraitance des enfants. Ils se résignent et préfèrent que les autres interviennent à leur place. On ne peut pas donc affirmer que, dans le cadre du conflit armé, l'utilisation des enfants dans les groupes armés, la prostitution infantile avec tous ses risques, l'envahissement des rues et des marchés par les enfants, est une forme de socialisation. Cet état des faits est une réalité qu'il faut attaquer. * 72 ITEKA, CAFOB, AFJ, ADI, LIBEJEUN, Rapport sur la situation des droits de l'homme au Burundi, Juillet, 2001. * 73 Deuxième Forum ministériel sur le suivi des Engagements de Paris en vue de protéger les enfants contre une utilisation ou un recrutement illégaux par des groupes ou des forces armés, 29 septembre 2002, http://www.franceonu.org/spip.php?article4178 (consulté le 06/03/2010) |
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