La protection des droits de l'enfant dans les conflits armés internes en Afrique centrale: cas du Burundi( Télécharger le fichier original )par Eric Ngueto Nyatchoumou Université catholique de l'Afrique Centrale - Master droits de l'homme et action humanitaire 2010 |
PREMIERE PARTIE :UNE PROTECTION LACUNAIRE DES DROITS DE L'ENFANT DANS UN CONTEXTE DE CONFLIT ARMETant sur le plan national qu'international, cette partie permet de fait ressortir les limites que présente l'arsenal juridique en matière de protection de l'enfant dans le conflit armé (Chapitre I). Elle met également un accent sur le cadre politique et socio-économique non favorable aux enfants (Chapitre II). CHAPITRE I:Une protection juridique limitéeCe chapitre, pose un regard assez critique sur les instruments juridiques en rapport avec le sujet, tout en mettant un accent particulier sur la protection physique qui n'est rien d'autre que la résultante d'une limitation des instruments en rapport avec la protection des enfants en période de conflit armé. Il planche, en sa première section, sur les limites des instruments internationaux et en sa deuxième section, sur les limites des instruments nationaux. Section I : Les limites des instruments internationauxTous les instruments internationaux ratifiés par le Burundi ont une autorité supérieure à celle des lois. Cette section abordera d'abord les instruments généraux et ensuite, les instruments spécifiques. A- Les instruments généraux Dans ce sous titre, il est question, à travers les Conventions de Genève et ses protocoles additionnels et la Convention (n°29) sur le travail forcé ou obligatoire de 1930, d'analyser le contenu normatif et surtout d'en relever les limites. 1. Les conventions de Genève et ses protocoles additionnels Encore appelé droit de la guerre ou droit des conflits armés, le DIH fait ressortir un ensemble de règles en temps de guerre qui visent à protéger les personnes qui participent ou ne participent plus aux combats et à limiter les moyens et les méthodes de faire la guerre. Il se définit par les 4 conventions de Genève et ses 2 protocoles additionnels de 1977. En tant que personne civile, l'enfant est également protégé par ce droit, et dans le même sens il réglemente la participation de l'enfant aux combats. Par ailleurs, les législateurs de la convention de Genève et des deux protocoles additionnels ont fixé à 18 ans l'âge limite à la condamnation à mort : « Il s'agit d'une limite absolue qui s'oppose à l'exécution de la peine capitale, même si toutes les conditions qui rendent cette peine applicable se trouvent réunies. Elle correspond à des dispositions que l'on retrouve dans le code pénal de nombreux pays, et procède de l'idée qu'avant 18 ans l'individu n'est pas entièrement capable de discernement, qu'il ne mesure pas toujours la portée de ses actes et agit souvent sous l'influence d'autrui si ce n'est sous la contrainte 41(*)». Cependant, le DIH, dans un premier temps, ne donne pas une définition du terme « enfant ». Il a plutôt mis l'accent sur l'âge maximum auquel l'enfant peut bénéficier d'une protection particulière. Il manque également de rigueur dans la phrase « les parties aux conflits prendront toutes les mesures possibles dans la pratique (...)», qui favorise la participation volontaire aux conflits armés. Sur un autre front, parlant du déplacement forcé de la population civile, y compris les enfants, les rapporteurs ont tendance à le considérer comme une violation des normes internationales que lorsque le Protocole II est applicable. Le rapport sur le Burundi du représentant du secrétaire général sur les personnes déplacées dans leur propre pays est, à cet égard, un cas d'espèce. Les déplacements forcés sont un domaine où le droit international humanitaire pourrait être utilisé pour interpréter le droit international des droits de l'homme, les dispositions applicables étant les normes fondamentales contenues dans l'article 17 du Protocole II et les dispositions des droits de l'homme relatives à la liberté de circulation et la liberté du choix de la résidence42(*). En effet, les Principes directeurs relatifs au déplacement des personnes à l'intérieur de leur propre pays établissent qu'un déplacement qui n'est pas conforme à l'article 17, paragraphe 1, du Protocole II constitue une privation ou une restriction arbitraire de cette liberté. 2. La Convention (n°29) sur le travail forcé ou obligatoire, 1930 La Convention a été ratifiée par le Burundi le 11/03/1963. La Convention (n°29) donne une définition du travail forcé ou obligatoire et fait obligation aux Etats membres d'adopter les mesures. Le travail forcé ou obligatoire est : « Tout travail ou service exigé d'un individu sous la menace d'une peine quelconque et pour lequel ledit individu ne s'est pas offert de plein gré »43(*). La peine quelconque s'entend d'une sanction pénale, mais également la privation de quelques droits ou avantages. Les Etats parties prennent l'engagement fondamentale de mettre en place les mesures visant à « supprimer l'emploi du travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes, dans le plus bref délai »44(*). Cependant, il manque de rigueur dans les dispositions devant obliger les Etats à s'abstenir d'imposer du travail forcé ou obligatoire et ne pas tolérer son imposition par d'autres personnes. Ce qui suppose que des dispositions devraient amener les Etats à prendre des dispositions législatives, réglementaires et administratives pour abolir dans son droit interne le travail forcé ou obligatoire, de sorte que tout recours à un tel travail par des personnes publiques ou privées, s'avère fondamentalement illégal et proscrit par la loi pénale. Tel est le cas au Burundi où « le PALIPEHUTU-FNL a obligé les populations rurales, y compris les enfants, à transporter des vivres et des armes. L'âge minimum d'enrôlement à l'armée est fixé à 16 ans. On estime qu'il y aurait 7 000 enfants soldats, parmi lesquels 3 015 ont été démobilisés par un projet de l'UNICEF. Les forces de sécurité n'envoient plus les enfants au combat mais ceux ci servent d'espions et de porteurs. Le PALIPEHUTU-FNL continue d'utiliser et de recruter des enfants soldats. Les enfants de moins de 18 ans peuvent être mis au travail à condition que cela ne porte pas préjudice à leur scolarité. Dans la pratique, des enfants réalisent de lourds travaux manuels au cours de la journée pendant l'année scolaire. Selon la CISL, la grande majorité des enfants du pays travaillent. Le travail de nuit des enfants est interdit par la loi, bien que nombre d'entre eux l'effectuent dans le secteur informel et dans l'agriculture de subsistance. Le travail des enfants existe également dans le secteur minier et la fabrication de briques. La législation interdisant le travail des enfants est peu appliquée »45(*). B- Les instruments spécifiques A travers les différents instruments spécifiques, notamment les protocoles facultatifs se rapportant à la Convention relative aux droits de l'enfant et la Convention (n°138) sur l'âge minimum d'admission à l'emploi, 1973, ce titre procède à l'analyse du contenu normatif et en relève les limites.
1. Protocoles facultatifs se rapportant à la convention relative aux droits de l'enfant, concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants et l'implication des enfants dans les conflits armés Cette protection particulière, approuvée par l'Assemblée Nationale du Burundi le 28 janvier 2005, découle du principe général qui énonce que "les enfants doivent faire l'objet d'un respect particulier et doivent être protégés contre toute forme d'attentat à la pudeur" (article 77 du Protocole I), et qu'ils "recevront les soins et l'aide dont ils ont besoin" (article 4 du Protocole II). Les différents protocoles facultatifs susmentionnés visent à améliorer la protection reconnue aux enfants. Il interdit, non seulement, de recruter des enfants de moins de quinze ans dans les forces armées (article 77 du Protocole I; article 4 du Protocole II), mais il convient également de dire, de façon particulière, que les enfants doivent être évacués des zones assiégées ou encerclées (articles 14 et 17 de la Convention); qu'ils doivent avoir droit aux soins et à l'aide par l'envoi de médicaments, vivres et vêtements, leur est reconnu (articles 23, 50,81, 89 et 91 de la Convention; article 70 du Protocole I); qu'ils ont droit au maintien de leur environnement culturel, à l'éducation et à la préservation de l'unité de la famille (articles 24, 25, 26, 50, 51, 82 et 94 de la IVe Convention; articles 74 et 78 du Protocole I); qu'ils doivent être gardés dans des locaux séparés des adultes en cas d'internement ou de détention (article 77 du Protocole I); qu'il est interdit d'appliquer la peine de mort aux enfants de moins de dix-huit ans (article 68 de la Convention; article 77 du Protocole I); qu'il est interdit de recruter des enfants de moins de quinze ans dans les forces armées (article 77 du Protocole I; article 4 du Protocole II). Néanmoins, contrairement aux 4 conventions de Genève de 1949 et ses 2 protocoles additionnels de 1977, la Convention relative aux droits de l'enfant, en son article premier, apporte une définition au terme « enfant ». Par la suite, elle s'est contentée de reprendre les dispositions du Droit International Humanitaire (DIH) auxquelles elle se réfère en ses paragraphes 1 et 4. Par ailleurs, nous constatons une contradiction au sein de cette Convention. En effet, à l'article 1, un enfant s'entend comme « Tout être humain âgé de moins de 18 ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est applicable ». Pour être plus précis, l'enfant est un individu ayant un âge inférieur à 18 ans. 2. La convention (n°138) sur l'âge minimum d'admission à l'emploi, 1973 La convention (n°138), adoptée le 26 juin 1973 par l'OIT, a été ratifiée par le Burundi le 19/07/2000. Cette convention est plus générale que les conventions antérieures qui visaient des secteurs économiques bien ciblés ; l'âge minimum d'admission à l'emploi ne doit pas être inférieur à quinze ans, quelque soit le secteur d'activité. Mais, des dérogations sont prévues pour les pays en développement : l'âge peut être ramené temporairement à 14 ans. Jusqu'à l'âge de 18 ans, tout type d'emploi ou de travail qui par sa nature ou les conditions dans lesquelles il s'exerce, est susceptible de compromettre la santé, la sécurité et la moralité des enfants est interdit. Les types d'emploi ou de travail ainsi visés seront déterminés par l'Etat signataire. Cependant, la convention susmentionnée est restée assez souple pour faciliter son application par tous les Etats signataires. En effet, elle tient compte de la situation économique du pays et des difficultés d'exécution spéciales à certaines catégories d'emploi ou de travail. Mais, l'Etat qui invoque de telles dispositions (limitation du champ d'application, fixation de l'âge à 14 ans) doit déclarer à partir d'une date déterminée. Les moyens de contrôle de l'application de ces dispositions pertinentes sont : la tenue d'un registre employeur, l'inspection du travail, la répression, à travers des sanctions, des violations et la présentation d'un rapport national. * 41 Denise Plattner : la protection de l'enfant dans le droit international humanitaire. Extrait de la revue internationale de la croix rouge mai juin 1984, p11 * 42 Ibid * 43 Convention (n°29) sur le travail forcé ou obligatoire, 1930 * 44 Convention (n°29) sur le travail forcé ou obligatoire, article 1, paragraphe 1, 1930 * 45 http://www.ei-ie.org/barometer/fr/profiles_detail.php?country=burundi (consulté le 11/02/2010) |
|