Vie pénitentiaire, liens sociaux et affectivité. Comment les personnes vivent- elles leur vie affective dans un milieu carcéral fermé( Télécharger le fichier original )par Rachel Roseline Boulé Schmid Briachetti Haute école de travail social de Genève - Bachelor 2012 |
5.4. FrustrationDans ce travail, nous n'envisageons pas la frustration comme une pulsion absolument nécessaire à combler comme théorisé dans l'approche psychanalytique, (2005) 70 mais plutôt comme le décrit Chartrand St-Louis : <<Généralement, nous avons en vue certaines fins personnelles et nous aimons
à nous considérer comme le <<centre de l'expérience
È (à ne pas confondre avec l'égo Dans un cas comme dans l'autre, cette situation engendre un déséquilibre et un mécontentement. << Lorsque notre présence au monde ne correspond pas à ce que nous envisageons ou à ce que nous idéalisons comme mode d'<< être au monde, nous nous sentons trahis et nous ne sommes plus prêts à accueillir les expériences qui s'offrent à nous. Il en résulte des refus et des résistances qui nourrissent la frustration È71. La frustration est confrontée à la réalité et à l'espace thymique de Binswanger comme espace intérieur personnel. << La personne frustrée se refuse à admettre que vivre ne se réduit pas à sa seule disposition à vouloir et à agir È72, ce qui peut engendrer de la colère, etc. La colère est considérée comme une émotion qui permet de s'exprimer contre entre autres l'injustice, l'indignation. Souvent, elle découle par exemple d'une frustration, d'une souffrance. Elle peut être parfois incontrôlable. 5.5. ColèreCependant, au départ, la colère permet de préparer le corps au mouvement, à la réaction. Des changements physiologiques peuvent se faire sentir. Les battements du cÏur peuvent augmenter pour concentrer le sang vers les organes dit vitaux. La respiration s'accélère. Le ton de la parole se hausse, etc. La colère augmente le besoin d'agir. Ainsi, la colère peut être saine, elle permet de se mettre en action. Elle permet d'affirmer sa personne et de maintenir son intégrité physique ou psychique. Elle sert aussi à l'affirmation d'une volonté personnelle. 70Chartrand, S-L., (2005), Récupéré le 14.01.2012 de http://albertportail.info/spip.php?article209 71Ibid. Chartrand, S.-L. 72Ibid. Chartrand S.-L. Parfois, les personnes qui ont enduré un « mal » sont en colere et réagissent en rendant « les coups » en faisant dix fois pire. C'est la réprobation de la colere qui peut parasiter la relation à soi-même et aux autres. Elle peut confiner les personnes dans des états de non-dits. De cette maniere, celui qui est en colere peut souffrir de cet état. Ainsi, nous en revenons à la notion de souffrance, de frustration et nous pouvons comprendre en explicitant ces phénomenes vécus en prison qu'ils sont étroitement liés, imbriqués. De plus, la notion de colere peut également nous renvoyer au besoin de justice qui est aussi une des valeurs mise en avant par les personnes que nous avons « interviewées». Nous aimons reprendre la constatation de Lytta Basset73 : « l'injustice est un des mobiles de la colere et "une personne en colere est une personne qui n'a pas renoncé à la justice »74. En effet, en prison le besoin de justice est tres présent puisque les détenus ont à faire à elle tous les jours avec les juges, l'application des lois, la venue des avocats, etc. Comme nous le verrons plus loin, les détenus sont souvent mécontents du traitement infligé par le monde pénal. Lorsque la colere « gronde », il n'existe parfois pour certaines personnes pas d'autres solutions pour s'exprimer que d'être violent. La violence peut être exercée, verbalement, physiquement, psychologiquement ou sexuellement. Elle est ainsi souvent opposée à une application contrôlée, légitimée et tempérée de la force. |
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