Le travail de fin de formation à la Faculté des
Sciences Agronomiques (FSA) dans l'option Aménagement et Gestion des
Ressources Naturelles, sur le thème « Facteurs déterminants
pour le zonage de la zone cynégétique de la Pendjari comme base
de gestion intégrée » a été soutenu par Orou
Gandé GAOUE sous la supervision du Prof. Dr. Ir. Brice SINSIN en
Décembre 2000. Ce travail d'une valeur qui n'est plus à
démontrer, est écrit dans un document de cent-six (106) pages que
nous avons lu afin d'en produire une synthèse qui est la suivante :
Problématique
Le problème de conservation des ressources naturelles
en Afrique occidentale comme partout dans le monde se pose avec acuité.
Au Bénin, la Zone Cynégétique de la Pendjari (ZCP), une
des composantes de la réserve de biosphère de la Pendjari,
classé dans le patrimoine de l'UNESCO, fait l'objet d'énormes
pressions de la part des populations riveraines handicapées par leur
faible pouvoir d'achat. L'intérêt de la présente
étude est d'établir les bases techniques et
socio-économiques de l'aménagement et la gestion rationnelle de
la ZCP. Spécifiquement, cette étude vise à : (i)
identifier les cas de sur/sous exploitation des potentialités
alimentaires disponibles ; (ii) définir les différents types
d'aménagement convenables pour chaque type de pâturage (iii)
dégager les éléments de gestion différentielle
adéquates pour la strate ligneuse de chaque type de pâturage ;
(iv) se prononcer sur la validité du zonage et des ajustements
éventuels à apporter ; (v) relever les facteurs ethnique et
géographique ainsi que les implications pour une bonne gestion du
terroir.
Site
D'une superficie de 175.000 ha, la ZCP est localisée
au Nord-Bénin, dans le département de l'Atacora entre les
latitudes 10°40' et 11°15' Nord et les longitudes 1° et
1°35' Est. La ZCP est située dans le domaine soudanien
septentrional caractérisé par une saison de pluies avec une
température moyenne annuelle de 28,2°C et une humidité
relative variant entre 23 et 82%. Ce site a été choisi en
fonction de la topographie et des formations végétales
existantes. Il est relativement arrosé par la rivière Pendjari et
ses affluents : Magou, Bori et Yapipi. Dans la ZCP, deux grands types de sols
peuvent être distingués à savoir les sols peu
évolués, d'érosion ou d'apports et les sols de types
ferrugineux tropicaux lessivés. La végétation de la ZCP
présente un aspect savane arbustive/arborée avec çà
et là quelques faciès plus denses constitués de savanes
boisées, de forêts claires et rayées de quelques galeries
forestières le long des cours d'eau. On y retrouve autour une population
constituée majoritairement de trois groupes éthiques : les
berbas, les wama et les peuls qui s'adonnent aux activités comme
l'agriculture, l'élevage, la chasse, la pêche et le commerce.
Méthodes
Pour atteindre les objectifs, l'analyse des données de
densité, d'abondance et de distribution spatiale des espèces de
faune sauvage, a été faite en se basant sur les données de
dénombrement de la faune sauvage par la méthode du « line
transect » réalisé par Sinsin et al (2000) dans la zone
d'étude. Le logiciel distance a permis de calculer pour chacune des huit
(08) zones définies, les paramètres recherchés. Ensuite
les relevés phytosociologiques selon la méthode stigmatiste de
Braun Blanquet (1932), la typologie des pâturages et les coupes de
phytomasse ainsi que la détermination de la capacité de charge
ont permis de comprendre la structure et le fonctionnement des
phytocénoses de la ZCP. Aussi, la structure de la
végétation et des caractéristiques dendrométriques
les différents groupements étudiés par la technique de
l'inventaire forestier ont-il permis l'étude du milieu. Enfin,
grâce aux statistiques disponibles au projet Pendjari GTZ, au logiciel
Arc-view, à la technique d'enquête par entretiens semi
structurés sur un échantillon de 131 personnes, à la
technique d'analyse factorielle des correspondances, à l'analyse de
variance et de test de comparaison des moyennes, l'étude sur les
utilisations concurrentes de la ZCP a été faite.
Résultats
· Cinq (5) types de pâturage à
caractéristiques phytoécologiques et structurales
différentes ont été identifiés dans la ZCP. Ces
pâturages ont phytomasse moyenne de 5,16 t MS/ha. Production de
phytomasse qui varie de 3,8 tMS/ha dans les pâturages à
Hyparrhenia involucrata faciès à Loudetia togoensis et
Cochlospermum tinctorium à 6,8 tMS/ha dans les pâturages à
Hyparrhenia involucrata, faciès à Hyparrhenia smithiana et
Indigofera bracteolata. Les pâturages de la ZCP sont dominés par
les graminées annuelles, principalement l'espèce Hyparrhenia
involucrata.
· La ZCP a une capacité de charge
saisonnière de 0,13 UBT/ha soit 7,7 ha/UBT pour une population
d'espèces d'ongulées sauvages de 10.597 UBT sans
l'éléphant et le waterbuck qui ont régime fortement
composé par le fourrage ligneux, soit 47% d'exploitation des
potentialités pastorales. Cependant, des cas de surcharge ont
été décelés dans deux (2) zones (les Zones
Cynégétiques 7 et 3) caractérisées par une relative
bonne disponibilité en eau.
· La valeur moyenne de la surface terrière dans
la zone d'étude est de 4,4 m2/ha en considérant les
forêts claires et de 3,1#177;1,6 m2/ha dans le cas contraire.
Le groupement des forêts claires et savanes boisées a la surface
terrière la plus élevée (12,5 m2/ha) alors que
le groupement des savanes arbustives à Terminalia avicennioides et
Combretum glutinosum a la plus faible surface terrière (1,3
m2/ha). La moyenne pour la zone d'étude en densité de
tiges de diamètre < 5 cm, est de 1461#177;729 tiges/ha.
· L'autorisation à la chasse sportive est
subordonnée au paiement d'un permis de chasse. On distingue trois grands
types de permis qui varie selon la taille du gibier désiré : les
permis de grande chasse, les permis de moyenne chasse et ceux de petite chasse.
Aussi, chacune de ces catégories comporte-elle trois (3) variantes selon
l'origine du chasseur : les types A, B et C respectivement
réservés aux nationaux, aux expatriés non résidents
et aux expatriés non résidents.
· La chasse sportive dans le ZCP est surtout celle de
gros gibier. La forte proportion des chasseurs expatriés non
résidents (84,4%) principalement les français à
côté des nationaux
(6,3%) informe sur le fait que les expatriés non
résidents s'adonnent à une chasse aux espèces de grande
taille qui possèdent de gros et beaux trophées.
· La chasse sportive du point de vue quantitatif est
caractérisée par un faible taux de réalisation du plan de
tir (37%). Ce taux est plus faible dans la zone de chasse de Batia (31,2%) que
dans celle de Porga (42,6%). Batia, qui est la zone où l'on chasse moins
de cob de buffon et d'hippopotames est également par excellence une zone
de chasse au lion, au bubale et oureli. De l'autre côté, les
meilleurs effectifs de waterbuck, hippotrague, cob de biffon et
cynocéphale sont retrouvés dans la zone de chasse de Porga.
· La chasse traditionnelle illégale qui se
pratique en saison sèche où les traces des braconniers se
confondent avec ceux des chasseurs sportifs, est une chasse intensive (à
fréquence comprise entre 1 à 2 fois/semaine et 1 à 2
fois/mois). Cependant, il est pratiqué une chasse pendant la saison des
pluies, chasse essentiellement réservée aux spécialistes
(13%) qui ne vivent presque que de la chasse.
· Les préférences des chasseurs
illégaux et des chasseurs sportifs sont semblables et portent sur les
espèces comme l'hippotrague, le bubale, le cob de buffon et le
phacochère. Quant à la consommation de viande de brousse par les
populations riveraines, l'hippotrague, le cob de buffon et le petit gibier en
général sont des plus préférés. Le
waterbuck, le guib harnarché et le damalisque qui sont en faible
proportion et pour lesquels les populations lient des caractères
mystiques, ne sont préférés ni pour la chasse, ni pour la
consommation donc naturellement conservés.
· En pays Berba, l'utilisation des fusils de type
calibre 12 (50%) est dominante alors que chez les Goumantché et les
Wama, c'est respectivement les fusils de traite (57,1%) et les pièges
(50%) qui sont qui sont utilisés.
· Le parc arboré en pays Wama et
Goumantché est dominé par le Vitellaria paradoxa (60%) et Parkia
biglobosa (25,3%) tandis qu'en pays Berba, vitellaria paradoxa (19%), Lannae
microcarpa (15,2%), Ficus gnaphocarpa (15,2%) et Parkia biglobosa (10%)
codominent. L'étude révèle aussi que les espèces
sont épargnées dans les champs surtout pour leurs fruits (38,9%
des cas en pays Berba et 70,6% des cas en pays Wama et Gourmantché). En
pays Berba, ces espèces sont : Lannea microcarpa (19,1%), le
karité (17,6%), le néré (13,2%) et le baobab (10,3%)
tandis que chez les WAma et les Goumantché, c'est surtout le
Karité (14,19%), le néré (38,7%) et le baobab (9,7%).
L'écosystème de la Zone
Cynégétique de la Pendjari subit des menaces effectives dont
l'intensité varie suivant le degré de proximité des champs
des habitations situées autour de la réserve, les ethnies, la
distribution des points d'eau et suivant les facteurs pédologiques et
topographiques. Ces différents facteurs, sans oublier les types
biologiques et l'utilisation rationnelle du feu, constituent des
éléments déterminants à prendre en compte dans
l'aménagement et la gestion intégrée de la Zone
Cynégétique de la Pendjari.
Mots clés : Faune sauvage - pâturages -
préférences - zonage et gestion intégrée - feu -
zone cynégétique de la Pendjari - Nord Bénin.