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La construction identitaire d'une ONG par la communication: le cas de Médecins sans Frontières

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par Jessica Ellouk
Université de Montréal - Maitrise es sciences de la communication, option organisationnelle 2011
  

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Chapitre 1 : INTRODUCTION GENERALE

Ce mémoire a lÕhumble prétention de proposer une réflexion sur la construction de lÕidentité organisationnelle sous lÕangle des interactions du quotidien des acteurs de lÕorganisation. La recherche se situe à la croisée dÕune réflexion sur les questions de lÕidentité organisationnelle et de lÕhumanitaire. On peut dÕores et déjà dire que cette question allie et couvre des domaines scientifiques aussi différents que complémentaires que sont la communication, la linguistique, la psychologie et les sciences de la gestion. Mais avant dÕentrer dans le vif du sujet, permettez nous de faire un petit detour par lÕHistoire pour introduire cette recherche.

Le XIXeme siècle fut le des révolutions idées, le XX ème

siècle et des siècle celui,

paradoxalement, des démocraties, des regimes autoritaires et totalitaires, un siècle dÕexces, de ruptures et dÕaffrontements, ainsi que le siècle des pires folies comme des plus belles inventions, lÕhomme dans son pire comme dans son meilleur état. Aider lÕautre, lÕétranger, celui que lÕon ne conna»t pas, nÕest pas une conception moderne, le fruit du XXème siècle, en opposition ou reaction aux pires horreurs que ce siècle a effectivement connues. Cette idée a toujours été présente, que lÕon parle en termes de générosité, de don, de charité, de solidarité par opposition à lÕégo
·sme ou lÕégocentrisme. Cependant, ce qui est ne au siècle dernier, cÕest une institutionnalisation de cette aide à lÕautre, celui qui souffre, par des organisations dont la raison d'être est de fournir une telle aide. Dans le contexte trouble de lÕimmédiat aprés guerre, lÕhumanitaire appara»t alors comme une possibilité de redemption et cÕest ainsi que sont apparus dans le thé%otre mondial les organisations non gouvernementales ou ONG.

Apparaissant pour la première fois en 1945 dans le vocabulaire international à l'article 71 de la Charte des Nations Unies, le terme d'ONG ou organisation non gouvernementale, ne possède pas vraiment de définition légale et reconnue au niveau juridique, cependant le Conseil économique et social de l'O.N.U (Organisation des Nations Unies) définit une organisation non gouvernementale comme suit:

Sera considérée comme organisation non gouvernementale toute organisation dont la constitution ne résulte pas d'un accord intergouvernemental y compris les organisations qui acceptent des membres désignés par les autorités gouvernementales, pourvu que de tels membres ne nuisent pas à la libre expression.

Le respect des critères énoncés permet ainsi à une ONG d'être officiellement reconnue comme telle par l'O.N.U. Cependant d'autres organisations internationales intergouvernementales comme l'Union Européenne proposent leur propre liste d'ONG. La notion qui apparait le plus souvent lorsqu'il est question de définir une ONG c'est le but non lucratif de son action, c'est-à-dire qu'elle ne doit pas servir des intérêts financiers. Il existe différents types d'ONG, certaines d'entre elles ayant un caractère plus spécifiquement humanitaire, en ce qu'elles s'attellent en général à organiser des programmes d'aide envers des populations en danger.

Médecins Sans Frontières fait partie de cette classification à titre d'ONG humanitaire spécialisée dans l'aide médicale d'urgence. En s'intéressant à l'humanitaire et à son application dans le cadre de l'organisation Médecins Sans Frontières, on peut donc se poser des questions sur sa réalité institutionnelle, l'identité qu'elle s'attribue

ainsi que celle qu'on lui attribue et le rTMle que ses acteurs ont dans ce cheminement. Pour répondre à cette interrogation, il nous appara»t nécessaire, dans un premier temps, de comprendre les enjeux de l'identité organisationnelle et nous allons donc nous pencher sur la littérature qui traite de cette notion, une littérature qui peut para»tre relativement abstraite aux premiers abords. Mais laissons nous, dès maintenant et de facon générale, nous plonger dans cette question de l'identité.

D'un point de vue philosophique, la première idée qui apparait lorsque l'on décide de s'intéresser à la notion d'identité, c'est-à-dire d'un <<être È que l'on peut précisément identifier, circonscrire, voire repérer. On parle donc ici de quelque chose ou de quelqu'un (soi-même, un autre, quelque chose) qu'on peut identifier durant un laps de temps défini et malgré certains changements. Du latin idem, qui veut dire <<le même È, l'identité est ce par quoi des êtres ou des choses apparaissent semblables, ce qui nous permet ainsi de les comparer entre elles, affirmant qu'elles sont de l'ordre de l'identique et donc du même. L'identité peut exprimer ainsi ce que Derrida (1990) appellerait la restance (toujours relative) de ce qui semble caractériser quelqu'un, quelque chose, voire même un groupe, ce qui nous amène, au niveau de l'être humain, à l'idée de personnalité.

Selon Albert et Whetten (1985) qui ont grandement contribué à définir le concept d'identité organisationnelle, lorsque les membres d'une organisation s'intéressent à la question de l'identité, ils se retrouvent face à ce type d'interrogations : << Qui sommes - nous ? È, << Dans quel genre de travail sommes-nous actifs? È et <<Que voulons-nous être ? È. Les chercheurs Gioia, Schultz et Corley (2000) considèrent, quant à eux, que le concept d'identité est une clef essentielle pour comprendre les organisations modernes.

Il est à noter que lorsque lÕon dit identité organisationnelle, on peut entendre deux choses. En effet, ce terme peut etre utilisé soit pour parler de lÕidentité dÕune organisation, soit pour parler dÕun individu en tant quÕil parle au nom dÕune organisation et sÕidentifie avec elle. Notre intérêt se portera plus précisément sur la première definition, cÕest -à-dire sur la question de lÕidentité de lÕorganisation. Cependant, nous serons amenés, dans cette recherche, à souvent mobiliser et faire référence à la littérature traitant de lÕidentité individuelle, lorsque celle-ci semble faire sens quant à la question de la construction de lÕidentité organisationnelle. Il appara»t en effet que les processus de (re-)production de lÕidentité individuelle et de lÕidentité organisationnelle sont souvent intimement lies (Chaput et al., sous presse) dans la mesure oil sÕidentifier à une organisation revient à sÕidentifier aux valeurs, missions et autres raisons d'être de lÕentreprise ou institution, ce qui revient à identifier cette derniére, au moins implicitement . Nous ferons donc appel aux écrits dÕauteurs ayant traité la question de lÕidentité individuelle tout en traduisant leur propos en les recadrant à lÕintérieur de la question de lÕidentité organisationnelle.

Aprés avoir exposé une partie de la somme des connaissances sur les questions de lÕidentité et de lÕimage organisationnelle dans la revue de la littérature, nous amorcerons une discussion critique qui déterminera les manques à combler pour aboutir à notre problématique. Puis nous présenterons le cadre théorique dans lequel se place cette recherche, cÕest-à-dire dans lÕesprit de lÕethnométhodologie, en mettant lÕemphase sur les concepts de ventriloquie et de présentification organisationnelle au sein des écrits de lÕEcole de Montréal. Par la suite, nous exposerons le cas sur lequel cette analyse repose, soit lÕorganisation Médecins Sans Frontiéres et son action sur le terrain du Nord-

Kivu en Republique Démocratique du Congo. Nous ferons ensuite une presentation du cadre methodologique de cette recherche qualitative réalisée, pour lÕenregistrement des données, par le biais dÕune démarche dÕinspiration ethnographique, et pour lÕanalyse des données sélectionnées, par le truchement dÕune approche inspirée de lÕanalyse de conversation. Nous reviendrons également sur la collecte des données faite dÕobservations directes à travers la méthode du shadowing et nous expliquerons le choix des sequences et le traitement qui en a été fait.

Aprés nous etre ainsi clairement positionnée, nous aborderons le chapitre dÕanalyses de données, lequel présente, dans un premiers temps, le contexte général des sequences sélectionnées, pour dans un deuxieme temps, nous permettre de nous plonger dans les données à travers quatre sequences analysées. Enfin, nous dévoilerons les résultats de ces analyses et discuterons dÕun certain nombre de points qui en sont ressortis et qui méritaient, selon nous, d'être développés plus en profondeur. Pour finir, le chapitre de conclusion fera part des implications pratiques que les réflexions qui ont eu lieu dans ce present mémoire peuvent offrir. Nous verrons aussi les limites de notre etude et nous proposerons des pistes de réflexion à exploiter ou à approfondir pour la recherche future.

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984