Le malaise dans l'oeuvre de Ken Bugul: cas de "la folie et la mort " et "de l'autre côté du regard "( Télécharger le fichier original )par Kouessi Jacques Richard CODJO Université d'Abomey- Calavi Bénin - Maà®trise ès- lettres modernes 2004 |
2- L'appareil de propagande du régime.Si nous dissocions l'étude de l'appareil de propagande du régime en tant que source du malaise politique de l'étude du rôle du Timonier qui est supposé être le chef de cet appareil, c'est parce que ceux qui sont chargés de faire la propagande, loin d'appliquer les règles qui leur ont été dictées, s'appliquent à confectionner de nouvelles règles sous le couvert du Timonier. Nous étudierons cet appareil sous le double aspect de la police et de l'administration. a- La police.La police, comme dans tous les régimes dictatoriaux, participe activement à l'accroissement du malaise en semant la terreur impunément au sein de la population. Les policiers jouissent d'une crainte constante de la part de la population parce qu'ils sont pour cette population les garants de l'application des décrets du Timonier. Ils en profitent pour multiplier les exactions contre le peuple. Au nom du régime, ils procèdent à des arrestations fantaisistes en bafouant les droits élémentaires de la personne. « Un homme tout nu, pieds et mains liés, était dans un coin. Son corps semblait avoir reçu beaucoup de coups. Il avait des bosses partout et son visage était tuméfié »54(*). Il s'agit là d'un chauffeur de taxi accusé de faire le trafic du chanvre indien alors qu'il transportait des vivres. Sans même l'avoir écouté les policiers se sont rués sur lui parce que l'un d'entre eux l'avait ramené au poste pour s'emparer des vivres qu'il transportait. De plus, ces policiers ont instauré le rançonnement comme règle. Ils ne sont qu'à la recherche des missions qui sont susceptibles de leur rapporter de l'argent. En témoigne ce dialogue entre deux d'entre eux : « - Tu sais moi mon problème, c'est que je n'aime pas faire la ville. - Le contrôle sur les voies nationales, c'est mieux. - Là, tu te fais ta paie du mois chaque jour. »55(*) b- L'administration.A cette sombre performance de la police s'ajoutent les tares d'une administration remplie de cadres incompétents et lourdement gangrenée par la corruption à tous les niveaux. Pour se faire établir une carte d'identité, il faut attendre des mois au bout desquels on vient constater la disparition de son dossier. Pour ne pas connaître ce sort, il faut déposer quelque chose qui atteint le montant tacitement requis. Autrement, votre dossier vous était retourné avec dédain. Cette corruption se traduit au sommet de l'administration par la loi des dix pour cent : « Elle découvrit la pollution des âmes et de l'atmosphère, l'existence des honorables dix pour cent au plus haut niveau des institutions, des financements à quatre-vingts pour cent ingurgités par les experts, des réfugiés qui servaient de boucliers et de moyens de négociation »56(*). L'héroïne révèle à ce niveau que pour se voir attribuer un marché ou pour réaliser un projet à caractère public, il fallait graisser les pattes à tous les responsables administratifs à tous les niveaux, qui doivent viser le dossier. Cette administration et cette police contribuent par leur inefficacité et leur fort penchant à la corruption au développement du malaise politique sur le plan intérieur. Mais le malaise provient également de la situation du pays face à la puissance coloniale et aux pays riches. * 54 Idem, p.59 * 55 Ibidem. * 56 Idem, pp.27-28 |
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