1- INTRODUCTION
La loi Huriet- Serusclat [3] définit la recherche
biomédicale comme étant « des essais ou
expérimentations organisés et pratiqués sur l'être
humain en vue du développement des connaissances biologiques et
médicales qu'ils soient ou non menées dans un but
thérapeutique ».
Cette définition fait ressortir le caractère
indispensable de la recherche biomédicale face à l'apparition des
nouvelles maladies, au développement de la résistance aux
antibiotiques, à la persistance des maladies non guérissables ou
à la nécessité d'améliorer les techniques
d'explorations et de soins.
Cette recherche va s'appliquer d'abord à des
modèles animaux, puis à l'être humain sain et enfin
à l'être humain malade.
Cependant la réalisation des recherches
biomédicales quoique indispensable est source de problèmes
majeurs, en l'occurrence lorsqu'elles portent sur les êtres humains car
la soif de savoir ou de développer les connaissances ne doit pas
pourtant s'exercer sans limites, ni précautions. Les règles de
validation scientifique d'une expérimentation doivent être
strictement respectées ainsi que l'indépendance et la
sécurité des patients inclus dans les études.
Ces règles sont tantôt inscrites dans les
recommandations internationales, des normes consensuelles, ou des textes
légaux et réglementaires [21].
1-1 Généralités et
problématique
Le mot éthique du grec [19] (êthicos
« qui concerne les moeurs, moral ») est la science de la
morale. Elle désigne l'ensemble des principes moraux à la base de
la conduite d'une personne.
La bioéthique vient du mot grec Bios (vie),
êthicos (moral) a donné lieu à plusieurs
définitions :
· Pour les anglo-saxons, elle est l'ensemble des
problèmes moraux soulevés par la protection de la vie. Cette
vision est celle qu'a retenue Van Ressenlar Potter [20] dans ses
écrits.
· Pour le Larousse, la bioéthique est un ensemble
des principes moraux et de règles déontologiques appliqués
à la recherche biomédicale et à la pratique de la
médecine.
· Pour le groupe de rédaction de la
déclaration [18] relative à des normes universelles en
matière de bioéthique on entend par bioéthique, un champ
d'étude systématique, pluraliste et interdisciplinaire qui aborde
les questions morales, théoriques et pratiques, que posent la
médecine et les sciences de la vie appliquées aux êtres
humains et au rapport de l'humanité à la biosphère.
Les questions d'éthique étaient au centre de la
pratique médicale déjà avec Hippocrate [5] il y a plus de
deux mille ans.
Mais la bioéthique en tant que domaine de
réflexion est née en 1945 lors du procès de
Nuremberg [22] chargé de juger les
expérimentations médicales perpétrées par les
nazies.
Ainsi, les grandes étapes qui ont progressivement
défini un cadre de recommandations pour l'organisation des recherches
biomédicales sont apparues après la seconde guerre
mondiale :
· Le Code de Nuremberg [6], élaboré en 1947
qui est le texte fondateur de la bioéthique, énonce le principe
du consentement volontaire des participants avant toute
expérimentation.
· La Déclaration universelle des droits de l'homme
[7] adoptée par l'assemblée générale des nations
unies le 10 décembre 1948 à Paris, stipule en son article 5
« Nul ne sera soumis à la torture, ni à des peines ou
traitements cruels, inhumains ou dégradants »
· La Déclaration d'Helsinki [8] qui regroupe les
principes éthiques dont les objectifs sont de fournir des
recommandations et de guider les médecins dans les recherches
biomédicales. Adoptée en 1964 elle a été
révisée sept fois (Tokyo, 1975 ; Venise, 1983 ;
Hong-Kong, 1989 ; Somerset West, 1996 ; Edimbourg, 2000 ;
Washington, 2002 ; Tokyo, 2004).
· Le Pacte international relatif aux droits civil et
politique [9] : adopté par l'assemblée
générale des nations unies en 1966, il stipule en son article 7
que « Nul ne sera soumis à la torture, ni à des peines
ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, en particulier il est
interdit de soumettre une personne sans son libre consentement à une
expérimentation médicale ou scientifique »
Ce pacte énonce la valeur humaine fondamentale devant
régir toutes les recherches impliquant les sujets humains.
· Le Rapport Belmont [10] adopté en 1976 qui est
une déclaration des principes éthiques fondamentaux et des
directives qui devraient aider à résoudre les problèmes
éthiques liés à la conduite de la recherche avec les
sujets humains.
· Les Principes directeurs internationaux
d'éthiques de la recherche biomédicale concernant les sujets
humains (C.I.O.M.S) [11] adoptés en 1982, révisés en 1983
et 2002, comportent les dispositions détaillées sur le
consentement exigé dans le domaine de la recherche
· La Convention sur les droits de l'homme et la
biomédecine du conseil de l'Europe [14] adoptée en 1997 et ses
protocoles consacrent plusieurs articles à la question du consentement
libre et éclairé.
· Enfin la Déclaration universelle sur la
bioéthique et les droits de l'homme [12] adoptée en 2005 par
l'UNESCO qui consacre deux articles à la question du consentement :
l'article 6, traite du principe du consentement et l'article 7 couvre le cas
des personnes n'ayant pas la capacité de consentir.
· A l'échelle africaine nous avons la charte
africaine des droits de l'homme et des peuples [13] adoptés en 1981
à Nairobi qui stipule en son article 5 « tout individu a droit
au respect de la dignité inhérente à la personne humaine
et à la reconnaissance de sa personnalité juridique. Toutes
formes d'exploitation et d'avilissement de l'homme notamment l'esclavage, la
traite des personnes, la torture physique ou morale et les peines ou les
traitements cruels ou dégradants sont interdites »
Ainsi ces différents textes s'articulent autour de 3
principes fondamentaux d'éthique :
· Le respect de la personne : ce principe regroupe
deux convictions éthiques: premièrement les personnes doivent
être traitées comme des agents autonomes, deuxièmement les
personnes avec une autonomie diminuée ont droit à une
protection.
La conformité à ce principe passe par
l'obtention par l'investigateur du consentement libre, éclairé et
exprès [3] de tout sujet pressenti pour participer à une
recherche biomédicale impliquant les êtres humains. Le
consentement éclairé qui est le libre choix fait par un sujet
volontaire de participer à une recherche biomédicale après
en avoir été informé des objectif, de la
méthodologie, des contraintes, des bénéfices et des
risques éventuels
· La bienfaisance : La maxime d'Hippocrate [5] "ne
faite pas de tort" constitue le socle du principe de bienfaisance qui suppose
l'obligation éthique faite aux chercheurs dans une étude
biomédicale impliquant les êtres humains, d'apporter le plus grand
bien possible et de réduire au maximum ce qui peut porter
préjudice. Dans le même ordre d'idée, il est aussi admis
que les intérêts de la science et de la société ne
prévalent jamais sur le bien être du sujet. De ce principe,
proviennent les normes éthiques en matière de recherche
biomédicale portant sur les êtres humains qui recommandent une
validité scientifique et une justification éthique des recherches
biomédicales impliquant les êtres humains.
· La justice : Ce principe signifie l'obligation
éthique de traiter chacun conformément à ce qui est
moralement équitable et approprié, de donner à chacun ce
qui lui est dû. C'est de ce principe que découle la norme suivant
laquelle une recherche parrainée de l'extérieur doit en effet
correspondre aux besoins et priorités du pays hôte dans lequel est
envisagée son exécution ; elle doit en plus être
conforme aux exigences éthiques tant du pays ou de l'organisme de
provenance de la promotion que du pays hôte.
Ces textes en général, et la Déclaration
universelle sur la bioéthique et les droits de l'homme en particulier
devant servir de guide à l'élaboration des législations
et réglementations nationales en matière de recherches
biomédicales, nous amènent à nous interroger sur la mise
en application de ces principes fondamentaux d'éthiques depuis la
conception, jusqu'à la publication des résultats des
recherches biomédicales portant sur les êtres humains.
C'est pour répondre à cette question que
nous avons intitulé notre travail « Ethique de la
recherche biomédicale au Gabon »
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