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Les déterminants du salaire au Maroc

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par Younès EL MENYARI
Université Mohamed V Rabat - Agdal - Maroc - Master en sciences économiques 2007
  

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UNIVERSITE MOHAMED V

FACULTE DES SCIENCES
JURIDIQUES, ECONOMIQUES
ET SOCIALES

RABAT - AGDAL.

MEMOIRE

En vue de l'obtention du Diplôme de Master Es - sciences économiques

Préparé par :

Younes El Menyari

Sous la direction de l'équipe pédagogique du Master Econométrie

ANNEE UNIVERSITAIRE

2007 - 2008

RESUME

Ce travail se propose une modélisation des déterminants du salaire pour l'économie marocaine. La méthode d'estimation consiste à utiliser plusieurs techniques économétriques compte tenu de degré d'intégration et de stationnarité des variables. En effet, l'équation du taux de salaire, retenue dans le cadre de cette étude, indique une sous-indexation des salaires sur les prix à la consommation de l'ordre de 0,72. Cette équation montre également que le taux de salaire moyen du secteur industriel dépend positivement de la productivité apparente du travail et négativement du taux de chômage.

Par ailleurs, nous avons montré, à l'aide d'une régression, qu'une augmentation du SMIG aura un effet positif et statistiquement significatif sur le salaire moyen du secteur industriel.

Mots-clés : formation des salaires, causalité, cointégration, indexation.

Table des matières

INTRODUCTION 3

I : LE CADRE THEORIQUE DE L'ETUDE 4

1. La courbe de Phillips originelle 4

2. L'explication de Lipsey 5

3. La critique de la courbe de Phillips 6

3.1 La vision des monétaristes 6

3.2 La nouvelle école classique (NEC) 8

4. La spécification de Wage Setting (WS) 8

II : EVOLUTION DES SALAIRES AU MAROC 9

III : ETUDE EMPIRIQUE 12

1. La spécification empirique des équations 12

2. Choix des variables et présentation des données 13

3. L'étude des propriétés statistiques des séries 15

4. Modélisation du salaire 17

4.1. Effet du SMIG 18

4.2. L'équation de salaire 19

4.2.1 La détermination du nombre de retard « p » 19

4.2.2 Résultats du test de cointégration 20

4.2.3 Estimation d'un VECM : résultats et interprétations 20

5. Analyse de causalité 23

CONCLUSION 24

BIBLIOGRAPHIE 26

ANNEXES 28

INTRODUCTION

La question de la détermination des salaires et de leur évolution au cours du temps est au centre de nombreuses théories macro-économiques. Cette détermination repose sur deux spécifications alternatives : une relation de Phillips augmentée, expliquant le taux de croissance des salaires par celui des prix et par le taux de chômage, ou bien une relation de WS (wage Setting), inspirée des modèles de négociation salariale, liant le niveau des salaires réels par le taux de chômage et éventuellement d'autres variables.

Notre étude constitue une tentative de réconciliation de ces deux approches. Elle sera appliquée à l'économie marocaine pour la période allant de 1980 à 2006.

En effet, La formulation de l'équation du salaire permet d'apporter des éléments d'explications à plusieurs questions pertinentes en termes de politique économique. Quel est le degré d'indexation des salaires sur les prix à la consommation ? Quel est l'impact des gains de productivité sur le niveau de rémunération et donc de l'emploi ? Et Quel est le rôle du taux de chômage dans la formation des salaires au Maroc ?.

Parallèlement à l'estimation de l'équation du salaire, nous allons essayer de répondre à la question suivante : Le salaire minimum contribue-t-il à relever d'une manière significative le niveau du salaire moyen dans le secteur industriel ?.

La méthode d'estimation consiste à utiliser plusieurs techniques économétriques compte tenu de l'ordre d'intégration et de stationnarité des variables. Si les séries sont cointégrées selon le test de Johansen, nous effectuerons un modèle vectoriel à correction d'erreurs (identifié par le sigle VECM, de l'expression Vector Error Correction Model) qui permet la prise à la fois du court et de long terme. L'avantage de ce modèle est de mettre en évidence les comportements de long terme qui gouvernent la dynamique des salaires en les différenciant des ajustements de court terme.

Enfin, nous appliquerons le test de Granger afin de répondre à la question cruciale : Existe-t-il une relation de causalité dans les deux sens entre les prix à la consommation et les salaires au Maroc ?.

Notre article s'articule autour de trois axes : Le premier passe en revue le cadre théorique de l'étude, le deuxième examine l'évolution des salaires au Maroc. Enfin, le troisième axe est réservé à l'analyse empirique de la formation des salaires au Maroc.

I. LE CADRE THEORIQUE DE L'ETUDE

1. LA COURBE DE PHILLIPS ORIGINELLE

Dans un article publié en 19581, A. W. Phillips établit une relation inverse et non linéaire entre la variation des taux de salaires nominaux et le taux de chômage. Cette relation s'est fondée sur un travail statistique portant sur l'économie anglaise pendant environ un siècle (1861- 1957). Phillips obtient une relation empirique de la forme suivante :

°

 

W

=

a b

+

u

-

c

 

°

W

w

 
 

(1)

W Le taux d'accroissement des salaires.

u Le taux de chômage exprimé en pourcentage.

Il est intéressant de noter que l'existence de la courbe de Phillips a été établie sans cadre théorique précis. Ce n'est que plus tard que des efforts ont été entrepris en vue de fournir une explication théorique au phénomène. Ceci est plutôt inhabituel en économie, car la démarche normale est de commencer par spécifier une théorie, puis d'utiliser les méthodes économétriques dans le but de la confronter à la réalité. La théorie sera alors peut être réfutée par le travail empirique. Dans le cas contraire, on ne pourra pas en conclure que la théorie est exacte, mais simplement qu'elle est conforme à la réalité. C'est le cheminement inverse qui a été suivi dans le cas de la découverte de la courbe de Phillips2.

1 A. w. Phillips, « The relation between Unemployment and the Rate of change of Money Wage Rates in the United Kingdom, 1861-1957 », Economica, 1958.

2 La courbe de Phillips est un bel exemple du succès de l'induction statistique, où l'observation précède la théorie.

2. L'EXPLICATION DE LIPSEY

La plus importante contribution à l'explication de la courbe de Phillips nous vient de Lipsey3(1960). La courbe de Phillips est déduite de l'analyse du marché du travail. Une variation en hausse ou en baisse des taux de salaire traduit un déséquilibre entre l'offre et la demande de travail : lorsque la demande excède l'offre, le taux de salaire augmente, à un rythme d'autant plus élevé que l'excédent de demande est grand. Inversement, dans le cas d'un excès de l'offre, le salaire diminue, et selon un rythme d'autant plus élevé que cet excès d'offre est grand. En première approximation, la mesure de l'excès de demande (ou d'offre) peut être donnée par le taux de chômage.

Appelons Nd la demande de travail qui comprend ceux qui sont déjà employés (L) et les postes susceptibles d'être vacants (V) : Nd = L + V (2)

Et No l'offre de travail, comprend donc ceux qui sont déjà employés (L) et ceux qui sont au chômage (U) : No = L + U (3)

Toutefois, l'équilibre signifie que le nombre de postes offerts est égal au nombre de chômeurs, mais il ne signifie pas que tout le monde sera employé.

On peut définir la demande de travail comme la différence entre V et U :

V - U = N d N o

-

(4)

En effet, Lipsey propose une première explication basée sur le fait que le salaire varie avec l'écart entre la demande de travail (les emplois nécessaires aux entreprises) et l'offre de travail (la population active se présentant sur le marché de travail), soit :

- °

N

N° )

avec (5)

f , ~ 0

°

W

d

f N

(

3 D. L. Phan « Un aperçu de la littérature théorique sur la courbe de Phillips » Revue économique, (1971).

On a :

Nd

- °

N

N°

= avec (6)

g , ~

g(U) 0

D'où la relation donnant la courbe de Phillips :

°

W = f[ g ( U ) ] = F(U )

avec (7 )

F , ~ 0

U est le chômage.

3. LA CRITIQUE DE LA COURBE DE PHILLIPS

3.1 La vision des monétaristes

Selon l'argument avancé par Friedman-Phelps (1968), on peut concevoir une courbe de Phillips à condition que les travailleurs s'attendent à un autre salaire réel que celui anticipé par les entrepreneurs, c'est-à-dire les anticipations des travailleurs à l'égard du niveau général des prix sont différentes de celles des entrepreneurs. Dans ce cas, on suppose généralement que les entrepreneurs ont des anticipations de prix plus justes et plus correctes puisque ce sont eux qui les fixent.

L'interprétation de la courbe de Phillips par Friedman et Phelps parvient donc à un résultat différent de l'interprétation faite par Lipsey. Dans ce dernier cas, nous obtenons le fondement théorique d'une seule courbe de Phillips qui n'est pourtant pas cohérente puisque les agents économiques effectuent leurs calculs sur la base du salaire nominal. Dans le premier cas, nous obtenons plusieurs courbes de Phillips (c'est-à-dire une relation de Phillips instable), mais qui, par contre, sont cohérentes avec la théorie économique puisque les agents économiques orientent leurs plans selon des variables réelles - à savoir le taux de salaire réel anticipé.

De ce fait, la (les) courbe (s) de Phillips selon la version de Friedman - Phelps4 s'écrit (s'écrivent) :

dp
dt

1dw 1

wdt

f

U ,

p

(8)

( )

U

a

W = +

Ð f

Ð Ð
=

t

a
t

+

f( U)

Où le terme de gauche représente le taux de variation soit des salaires, soit des prix.

La relation (8) représente ce qu'il convient d'appeler dans la littérature macroéconomique la courbe de Phillips augmentée des anticipations d'inflation. Cette formulation a deux principales implications :

· Première implication : La relation entre le taux de variation du salaire et le taux de chômage n'est pas stable à court terme. Cette relation dépend en effet de la formation des anticipations et pourrait correspondre à une famille de courbes « paramétrées » par des niveaux différents de l'inflation anticipée Ða t .

· Deuxième implication : A long terme, la position d'équilibre de la courbe de _

Phillips correspond à celle où U U

=

. Cela signifie qu'il n'existe pas de choix

 

possible entre la hausse des salaires (ou l'inflation) et le chômage. Le taux de

_

chômage serait égal au taux de chômage naturel5, soit U U

= et la courbe de

Phillips serait verticale.

4 M. Friedman « Prix et théorie économique », Economica., (1983).

5 Selon Friedman, Le taux de chômage naturel est « le taux qui découlerait du système Walrasien des équations d'équilibre général si y étaient intégrées les caractéristiques structurelles effectives des marchés des biens et du travail, y compris les imperfections de marché, la variable aléatoire des offres et des demandes, le coût de collecte de l'information sur les emplois vacants, les coûts de mobilité, etc. ».

3.2 La nouvelle école classique (NEC)

En 1981, Lucas remis en cause l'idée d'un arbitrage entre inflation et chômage même à court terme. En effet, si les anticipations sont rationnelles, alors les hausses des salaires reflètent à tout moment les hausses de prix, et la courbe de Phillips est verticale dès le court terme. Formellement, l'hypothèse d'anticipation rationnelle signifie que les agents ne commettent pas d'erreur systématique dans leurs prévisions, étant donné l'ensemble des informations It dont ils disposent. Si E(.) désigne l'opérateur de l'espérance mathématique, on aura ainsi :

(9)

(1 0)

E

a

pt

pt

It

La nouvelle relation de Phillips s'écrit alors :

Ä p

E I

t

t

+ f (U)

Ä wt

On retrouve une expression analogue à la relation (17) du modèle des monétaristes qui supposent des anticipations adaptatives. La différence provient de l'indexation du taux de croissance des salaires sur l'anticipation de l'inflation courante. Cette nouvelle formulation de la courbe de Phillips implique qu'il n'y a aucun délai d'ajustement du taux de croissance des salaires sur l'espérance conditionnelle du taux d'inflation.

4. LA SPÉCIFICATION DE WAGE SETTING (WS)

Dans les années quatre-vingt et au début des années quatre vingt-dix, les partisans des modèles dits Wage Setting / Price Setting (WS/PS), dont l'ouvrage de Layard, Nickell et Jackman (1991) est la référence, rejettent de façon plus radicale la courbe de Phillips principalement pour son manque de fondements théoriques et pour son incapacité à expliquer la persistance du chômage en Europe. Le cadre d'analyse est celui d'un modèle d'équilibre général avec imperfections des mécanismes concurrentiels sur les marchés du travail et des biens. Selon ces auteurs, la formation des salaires porterait sur le niveau du salaire réel et non sur le taux de croissance du salaire nominal. Ils proposent de remplacer la courbe de Phillips par la courbe WS qui établit un lien en niveau entre le salaire réel et le taux de chômage.

La détermination des salaires peut donc être représentée par l'équation suivante, notée (WS) pour « Wage Setting6 » :

(11)

Le coin fiscalo-social (cfs )7, les termes de l'échange intérieur(pc - p), la productivité (e) et le taux de chômage (u) exercent une pression sur les salaires à long terme.

En effet, la détermination des salaires induit une relation inverse entre le salaire réel, et le taux de chômage : plus le taux de chômage est élevé, plus le salaire réel choisi lors de la négociation est bas.8 L'intuition est simple : plus le chômage est fort, moins les travailleurs ont de pouvoir de négociation, et donc plus les salaires réels sont faibles.

II. EVOLUTION DES SALAIRES AU MAROC

La dynamique des salaires conditionne, en parallèle avec l'évolution des prix, le partage du résultat des activités productives et se répercute de façon directe sur le pouvoir d'achat et le niveau de vie. L'examen des tendances des revenus salariaux peuvent être approchées à travers les indicateurs de taux de salaire moyen déduits des données sur les frais de personnel dans le secteur industriel et des données de la masse salariale des entreprises affiliées à la CNSS. Ces deux indicateurs doivent être complétés par les tendances qui découlent des revalorisations successives du salaire minimum.

Le salaire moyen brut dans le secteur industriel (rapport entre le montant global des frais de personnel à l'effectif total des employés) a enregistré une progression assez régulière depuis les années quatre vingt jusqu'à l'année 2006 (graphique 1). Ce salaire a connu un accroissement au rythme de 5,2% en valeur nominale, contre 0,49% en terme réel au cours de ces vingt sept années.

6 L'équation de WS est déduite à partir de l'application du critère de Nash généralisé. Cette équation correspond au jeu de négociation salariale entre syndicat et entreprise. Voir, en plus de détails, Horty et Sobczak « Identification de la courbe de salaire et déterminants du chômage d'équilibre dans un modèle de négociation salariale », 1996.

7Le coin fiscalo-social caractérise l'écart entre le coût nominal du travail et le salaire nominal net de tout prélèvement. Il dépend du taux de cotisations sociales employeur, du taux de cotisations sociales salarié et du taux d'impôt sur le revenu.

8 Le salaire est choisi par les syndicats et les entreprises s'il y a négociation collective, par les travailleurs individuels et les entreprises s'il y a négociation bilatérale, ou par les entreprises seules dans le cas d'emplois « à prendre ou à laisser ».

Graphique 1 : le salaire moyen dans le secteur industriel

-10

-20

40

20

30

10

0

1980

1981

1982

1983

1984

1985

1986

1987

1988

salaire moyen nominal salaire moyen réel

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006

Le salaire moyen qui ressort des données de la CNSS (graphique 2) présente, quant à lui, des évolutions similaires mais avec des rythmes relativement plus marqués. Cet indicateur, qui concerne les salariés de plusieurs secteurs d'activités, est estimé au montant annuel moyen de 33362 DH en 2006 contre 13041 DH en 1980, soit un accroissement annuel moyen de 4%. Cette progression nominale implique une perte de pouvoir d'achat de 0,7% par an, compte tenu de l'évolution parallèle de l'indice du coût

de la vie.

Graphique 2 : Le salaire moyen des salariés affiliés à la CNSS

-10

-15

30

25

20

15

10

-5

5

0

salmcnss nominal salmcnss réel

En ce qui concerne, le salaire minimum (Graphique 3), on observe que l'évolution temporelle n'est pas régulière, certaines périodes n'enregistrent aucune augmentation, alors qu'à d'autres moments elles sont conséquentes.

Ainsi, le SMIG a enregistré un accroissement de 10,5% par an en valeur nominale et 3% en termes réels (déflaté par l'indice des prix à la consommation) durant la période de 1980 à 1990. Ce rythme devait connaître un net ralentissement entre 1990 à 2006 avec une hausse moyenne de 3,5% en valeur nominale et 0,5% en valeur réelle.

En effet, cette tendance irrégulière est la conséquence d'une détermination exogène du salaire minimum, au sens où les décisions de relèvement sont « administrées »9, discrétionnaires et effectuées de manière quasi-indépendante des conditions du marché du travail.10

Graphique 3 : SMIG, réel et nominal

-10

25

20

15

10

-5

5

0

SMIG, réel et nominal

SMIG nominal SMIG Réel

9 Au Maroc, une augmentation du salaire minimum doit intervenir lorsque la commission centrale des prix constate que l'inflation, telle qu'elle est mesurée par l'indice du coût de la vie (ICV), a subi une augmentation au moins égale à 5% par rapport à l'indice de référence.

10 D'après le travail de la direction de l'emploi « le salaire minimum au Maroc 2001 ».

III. ETUDE EMPIRIQUE

Nous commencerons notre étude empirique par la formulation des équations à tester, ses avantages et ses inconvénients. Un second point traitera du choix des différentes variables, tandis qu'un troisième point analysera les propriétés statistiques de ses variables. Un quatrième point présentera la modélisation de l'équation du salaire. Un dernier étudiera l'analyse de la causalité entre les prix à la consommation et les salaires au Maroc.

1. LA SPECIFICATION EMPIRIQUE DES EQUATIONS

Comme nous l'avons signalé dans le cadre théorique, la modélisation empirique des salaires repose sur deux spécifications alternatives : La spécification en taux de croissance (courbe de Phillips augmentée) et la spécification en niveau (courbe WS).

La courbe de Phillips augmentée est présente dans la plupart des modèles macroéconomiques, notamment de l'économie française11. Elle s'écrit sous la forme12 :

Ä = Ä + Ä +

smi ipc pdl tcho x

á â ë + ó Ä (12)

x : ce terme représente l'ensemble des variables susceptibles d'influencer les salaires (notamment le SMIG ou le taux de syndicalisation). Théoriquement, á >- 0,0 -< â -<1 (les salaires bénéficient d'une partie des gains de productivité) et ë -< 0 (l'effet de Phillips). Tandis que la spécification en niveau de l'équation de salaires, ou ce qu'on appelle la courbe WS, s'écrit comme suit :

smi = áipc+ âpdl+ ëtcho+ óx (13)

Le choix entre les deux approches (courbe de Phillips et Wage Setting) est important
pour l'évaluation d'un niveau mais aussi des déterminants d'un taux de chômage

11 Le modèle France de l'OFCE ,2002.

12 Nous considérons ici uniquement le long terme. Nous omettons les termes retardés, les indices temporels et les aléas économétriques.

d'équilibre, compatible avec une inflation stable. Néanmoins, l'objet de cet article n'est pas l'estimation d'un chômage d'équilibre via celle d'une boucle Prix-salaires mais celle de la seule formation des salaires.

La spécification retenue dans ce travail est très proche de celle estimée dans plusieurs travaux. Elle se présente comme suite :

Ä smi ipc pdl

= Ä + Ä

á â +

t t t

ë (

tcho smi ipc pdl tcho

+ ã - +

- ) å

+ +

ó

t t - 1 t - 1 t - 1 t - 1 t

 

(14)

L'équation (14) permet d'intégrer les deux approches de court et de long terme de l'équation de salaire. En effet, la relation de cointégration (entre parenthèses) représente le long terme « WS » et la courbe de Phillips augmentée représente, quant à elle, le court terme.

Le terme « ã » dans l'équation (14) est appelé la force de rappel vers la valeur cible de long terme donnée par la relation de cointégration. Ce terme doit avoir un signe négatif, sinon il n'existe pas de phénomène de retour à l'équilibre.

Toutefois, le choix de la spécification a été déterminé par des considérations économétriques, notamment la nature statistique des différentes séries utilisées.

2. CHOIX DES VARIABLES ET PRESENTATION DES DONNEES

L'ensemble des estimations est réalisé sur des données annuelles marocaines couvrant la période 1980 à 2006, soit 27 observations. Les sources principales de nos données sont «le Ministère de l'industrie », « la Direction de la Statistique » et « la Direction de l'emploi ».

Toutes les séries d'origine ont été transformées en logarithme népérien (sauf pour le cas du taux de chômage urbain). Cette spécification a l'avantage d'éviter les problèmes d'hétéroscédasticité. Ainsi, les notations des différentes données utilisées dans le cadre de cette étude sont les suivantes :

LN_SMI désigne le logarithme du taux de salaire moyen dans le secteur industriel : frais de personnel par employé dans le secteur industriel, (source : enquête annuelle sur la production, l'emploi et les frais personnel du Ministère de l'industrie).

LN_IAGR désigne le logarithme du taux de salaire moyen des industries agroalimentaires, (source : enquête annuelle sur la production, l'emploi et les frais personnel du Ministère de l'industrie).

LN_ITEX représente le logarithme du taux de salaire moyen des industries de textiles et du cuir, (source : enquête annuelle sur la production, l'emploi et les frais personnel du Ministère de l'industrie).

LN_ICHM représente le logarithme du taux de salaire moyen des industries chimiques et parachimiques, (source : enquête annuelle sur la production, l'emploi et les frais personnel du Ministère de l'industrie).

LN_IMEC représente le logarithme du taux de salaire moyen des industries métalliques et mécaniques, (source : enquête annuelle sur la production, l'emploi et les frais personnel du Ministère de l'industrie).

LN_IELT représente le logarithme du taux de salaire moyen des industries électriques et électroniques, (source : enquête annuelle sur la production, l'emploi et les frais personnel du Ministère de l'industrie).

LN_SMCNSS désigne le logarithme du taux de salaire moyen des salariés immatriculés à la CNSS : rapport masse salarial sur salariés déclarés, (source : CNSS).

LN_SMIG désigne le logarithme du salaire minimum garanti dans l'industrie (source : Direction de L'emploi).

TCHO représente le taux de chômage urbain : indicateur de tension sur le marché du travail, (source : enquête de l'emploi réalisée par la Direction de la Statistique).

LN_IPC est le logarithme de l'indice des prix à la consommation ou bien de l'indice du coût de la vie, (source : Direction de la Statistique).

Il convient de préciser que le choix de ces variables est justifié par deux considérations importantes : d'une part, la disponibilité des données du taux de salaire dans le secteur industriel, secteur qui se rapproche le plus des concepts de production et de productivité. Et d'autre part, l'existence d'un marché du travail segmenté13 dans un pays comme le Maroc nécessite d'étudier les spécificités de chaque secteur dans la formation des salaires.

En plus, le choix des variables mesurant l'inflation ou les tensions sur le marché du travail conditionne le type d'influences qui passent par son canal. Ainsi, par exemple pour le cas du Maroc, la prise en compte de l'indice de coût de la vie (ICV) comme indicateur de l'inflation est sujet à discussion en raison même de la nature du panier qu'il est censé mesurer. Ce panier qui comporte 385 articles comprenant 768 variétés de produits (en 1989) ne concerne que la population moyenne urbaine. Par conséquent, les points d'observation de l'indice du coût de la vie ont été choisis dans 11 grandes villes du Royaume. Les prix de 385 articles sont relevés à l'aide d'une enquête auprès d'un échantillon fixe de points de vente, par lecture directe des prix affichés sur les produits ou en interrogeant le vendeur lorsque les prix ne sont pas affichés. Sur le plan technique ICV est fréquemment révisé, ce qui introduit des ruptures au niveau des observations et rend, de ce fait, le travail de modélisation relativement difficile.

3. L'ETUDE DES PROPRIETES STATISTIQUES DES SERIES

Une bonne spécification des modèles de régression requiert que toutes les variables soient intégrées du même ordre afin d'éviter les problèmes de régression fallacieuse (dans l'optique d'une analyse de la cointégration, cette condition est indispensable). C'est pourquoi il convient d'effectuer des tests de stationnarité qui permettent de voir si une série temporelle est stable dans le temps, étant entendu qu'une série relativement invariante est utile à la prévision. Pour travailler avec des séries qui ne sont pas stationnaires, on recourt généralement à la différenciation ou à la régression sur trend, de manière à les rendre stationnaires. Il est donc important de déterminer la stationnarité ou non des séries avant d'appliquer une méthode d'estimation.

13 Agénor P. R. et K. El Aynaoui (2003). « Politiques du marché du travail et chômage au Maroc : une analyse quantitative » Banque Mondiale.

Tout d'abord, un simple examen graphique met clairement en évidence le fait que les séries étudiées sont a priori non stationnaires. Les processus générateurs correspondants ne semblent pas satisfaire, en effet, la condition d'invariance de l'espérance, et il en va de même pour la variance14.

La première étape de notre analyse consiste ainsi à tester si nos diverses séries contiennent ou non une racine unitaire. A cette fin, nous nous proposons d'appliquer les tests de Dickey-Fuller simples et augmentés (1979, 1981), Phillips-Perron (1988) sur les séries loglinéarisées (hormis le taux de chômage urbain). Les résultats figurent dans les tableaux 1 et 2 ci-après. Rappelons que le test de Phillips-Perron est une alternative au test de Dickey-Fuller au cas où les résidus ne présentent pas les « bonnes » propriétés statistiques. Phillips et Perron (1988) introduisent en effet une correction non paramétrique ayant pour objet de tenir compte d'une éventuelle autocorrélation et/ou hétéroscédasticité des résidus. Notons également que le test de Phillips-Perron requiert le choix du nombre de retards à prendre en compte dans le calcul de l'autocorrélation des résidus. Cependant, si les résultats des tests ADF et PP sont en opposition, nous adoptons le test de DF-GLS, généralement jugé plus puissant, comme confirmation ou infirmation des résultats obtenus.

On a les résultats15 suivants :

Tableau 1 : Les tests de Dickey et Fuller simples et augmentés

Variables

Test ADF en niveau

Test ADF en différence première

Retards
retenus

Résultats

 

Avec
constante
sans trend

sans
constante
ni trend

Avec
constante
et trend

Avec
constante
sans trend

sans
constante
ni trend

 

-2.306832

-0.212995

3.759735

-3.790456**

-3.943836***

-2.155121**

2

I(1)

ipc

-2.369853

-7.248069***

6.210014

-3.704058**

-2.757215*

-2.127870**

0

I(1)

tcho %

-2.872189

-2.848406*

-0.024312

-5.865041***

-5.730120***

-5.838012***

0

I(1)

pdl

-1.448253

-1.537480

3.975193

-4.482673***

-4.080962***

-1.962928**

3

I(1) +c

smig

-1.761866

-5.249729***

4.381362

-4.297095**

-3.051636**

-2.518675**

0

I(1)

smcnss

-1.969707

-2.605982

2.390856

-6.176255***

-5.640740***

-4.758877***

0

I(1)

 

Note : Dans cette étude, nous poserons un nombre de retard maximum de 3 périodes.

14 Voir l'évolution des principales variables en annexe 1.

15 Le logiciel que nous utilisons est E-views 5.

Tableau 2 : Le test de Phillips et Perron

Variables

Test PP en niveau

Test PP en différence première

Résultats

 

Avec
constante
sans trend

sans
constante
ni trend

Avec
constante
et trend

Avec
constante
sans trend

sans
constante
ni trend

 

-3.567719*

-1.443448

3.636336

-5.161148***

-5.180579***

-3.649280***

I (1)

ipc

-2.235142

-6.600323***

3.252002

-3.704058**

-2.730510*

-2.175039**

I (1) +t

tcho %

-2.872189

-2.848406*

0.061080

-5.910296***

-5.730120***

-5.838012***

I (1)

pdl

-6.285962***

-3.160655**

2.305190

-5.366679***

-5.911270***

-4.672915***

TS

smig

-1.754041

-5.030634***

2.865336

-4.297095**

-2.956311*

-2.441860**

I (1)

smcnss

-1.947017

-2.973156*

2.569517

-6.187104***

-5.642689***

-4.765218***

I(1)

 

Avec t : tendance c : constante

* : Significativité à 10% - ** : Significativité à 5% - *** : Significativité à 1%.

L'application des tests de Dickey-Fuller et de Phillips-Perron conduit à des résultats similaires. On constate que pour la majorité des séries sont non-stationnaires et intégrées d'ordre 1 « I(1) ». On notera cependant quelques exceptions, notamment en ce qui concerne (pdl, ipc,), les résultats donnés par les différents tests ne sont pas tous concordants et ne permettent pas de trancher entre un processus DS ou TS : ceux-ci divergent à la fois selon le nombre de retards introduits pour blanchir les résidus et selon le test de racine unitaire utilisé.

Afin d'affiner ces premiers résultats, nous avons re-tester les variables en utilisant les tests de Elliott - Rothenberg - Stock (DF-GLS). Il en ressort que les variables sont bien intégrées d'ordre 1.

Donc, ces résultats autorisent à tester le nombre de relations de cointégration dans l'équation de salaire, du fait que l'ensemble des variables ont le même ordre d'intégration (sont intégrées d'ordre un I(1))16.

4. MODELISATION DU SALAIRE

Dans ce qui suit, nous allons dans un premier temps étudier l'impact d'une hausse du SMIG sur le taux de salaire moyen avant de présenter dans une seconde étape les résultats d'estimation de notre équation de salaire.

16 Dans cette étude, toutes les séries différenciées seront précédées de la lettre D.

4.1. EFFET DU SMIG

Le salaire minimum est un élément important du marché du travail car il empêche de fixer les salaires en dessous d'un certain seuil. À ce titre, il a un impact sur la formation des salaires.

Les revalorisations du SMIG affectent la croissance des salaires au moins par deux canaux. Tout d'abord, elles augmentent mécaniquement le salaire de tous les salariés concernés par le SMIG. Cet effet dit « comptable » est d'autant plus important que les salariés rémunérés au SMIG sont nombreux. De plus, les revalorisations du SMIG augmentent les salaires par un effet de « diffusion », les hiérarchies et les grilles salariales étant en général respectées après la hausse du salaire minimum.

La présente section consiste à étudier l'effet d'une revalorisation du SMIG sur les salaires moyens dans plusieurs secteurs industriels de l'économie marocaine entre 1985 et 2006. En effet, la méthode économétrique consiste à étudier pour chaque secteur la relation entre le SMIG et le salaire moyen par la méthode des moindres carrées ordinaires après s'être assuré de la stationnarité de nos variables.

L'estimation17 fait apparaître, un impact significatif du SMIG sur le salaire moyen nominal. Une hausse de 5% du SMIG induit une hausse de 2,8 % du salaire moyen brut du secteur industriel, toutes choses égales par ailleurs. Le SMIG exerce donc une pression positive dans les secteurs structurés. Néanmoins, l'indexation du salaire moyen sur le SMIG est imparfaite.

Nous avons tenté de modéliser l'effet du SMIG sur le salaire à long terme notamment avec la méthode d'Engle et Granger. Toutefois, cet effet ne ressort pas économétriquement. De plus, les revalorisations du SMIG ont été fortes dans les années quatre vingt mais plus faibles par la suite. Leur effet à long terme est donc plus difficile à capter.

17 Voir annexe 2.

4.2. L'EQUATION DE SALAIRE

Nous allons présenter maintenant une estimation de l'équation de salaire intégrant à la fois des ajustements du court et du long terme. De ce fait, il convient d'examiner l'éventuelle existence de relations de cointégration entre les variables. La détermination de ces relations se fait dans le cadre d'un modèle VECM multivarié selon la procédure de Johansen.

L'estimation d'un modèle VECM nécessite une première étape essentielle qui est celle de la détermination du nombre de retard « p » du modèle (en niveau) selon les critères d'information. Ensuite, nous nous intéresserons à la détermination du nombre de relations de cointégration.

4.2.1. La détermination du nombre de retard « p »

L'estimation de notre équation de salaire passe en premier lieu, par la recherche d'un retard optimal entre les variables. Pour cela, on va retenir les critères d'information LR18, FPE19, AIC20, SC21 et HQ22 pour des retards allant de 1 à 4 - nous avons choisi cette fourchette de retards compte tenu du faible nombre d'observations -.

Nous avons obtenu pour chacun des critères la structure des retards récapitulée en annexe 3.

Il ressort de ce tableau que les résultats de l'analyse du nombre de retards maximum de la représentation VAR permettent de retenir un retard optimal de 4 en se basant sur le minimum des critères AIC, SC et HQ. Nous allons donc procéder au test de Johansen sur un modèle VAR(3).

18 LR: sequential modified LR test statistic (each test at 5% level)

19 FPE: Final prediction error

20 AIC: Akaike information criterion

21 SC: Schwarz information criterion

22 HQ: Hannan-Quinn information criterion.

4.2.2. Résultats du test de cointégration

Nous testons le nombre de relations de cointégration à l'aide des tests proposés par Johansen et Juselius (1990). Les résultats sont reportés en annexe 4. Ces tests analysent la possibilité qu'une ou plusieurs relations de cointégration existent entre le taux de salaire du secteur industriel, les prix à la consommation, la productivité apparente du travail et le taux de chômage urbain. Le test de la trace indique l'existence d'une relation de cointégration à un seuil de 1%. Le test de la valeur propre maximale indique le même résultat. On conclut donc naturellement à l'hypothèse de l'existence d'une seule relation de cointégration.

Ce résultat nous conduit à l'étape suivante de l'estimation des solutions de long et de court terme de l'équation de salaire dans le cadre d'un modèle vectoriel à correction d'erreur (VECM).

4.2.3. Estimation d'un VECM : résultats et interprétations

Bien que nous ayons trouvé trois spécifications de l'équation du salaire23, nous n'avons retenu que la relation qui semblait interprétable sur le plan économique et dont le coefficient de détermination est le plus élevé. En effet, la spécification retenue n'inclut pas une constante dans la relation de long terme.

L'estimation de la cible de long terme, s'écrit :

LN_SMI = 0,72LN_IPC + 0,62LN_PDL - 0,03TCHO

L'estimation d'un modèle à correction d'erreur fait apparaître un coefficient significativement différent de zéro et négatif pour la cible de long terme. A noter que ce coefficient est assez élevé (0,40), ce qui indique que l'ajustement vers l'équilibre se réalise assez rapidement.

L'étude des résidus estimés issus des relations vectorielles de ce modèle montre qu'ils
sont tous stationnaires (d'après la Q-statistique de Ljung-Box, voir annexe 6). Cette

23 Le tableau en annexe 5 représente l'ensemble des spécifications de l'équation du salaire.

constatation nous confirme donc la bonne spécification et la stationnarité de cette modélisation VECM.

De plus, les coefficients de détermination sont tous assez élevés. Ce résultat nous indique que le pouvoir explicatif du modèle est très fort.

En outre, la présence de la variable DUM dans ce modèle est justifiée par le test de Cusum qui indique les dates d'éventuelles ruptures de comportements. Cette variable est statistiquement significative pour l'année 2001 (Annexe 7).

A court terme les résultats ne sont pas conformes aux attentes. Le coefficient du taux de chômage est positif à court terme. Ceci trouve son explication dans l'analyse des imperfections du marché du travail et l'absence d'un système d'indemnisation du chômage pour le licenciement économique qui peuvent intervenir pour changer les résultats théoriques. En effet, le marché du travail urbain marocain connaît beaucoup d'imperfection. La présence du secteur informel rend la collecte de données statistiques très difficile.

Il convient de rappeler que le développement de l'emploi informel (constitue environ 17% du PIB marocain) peut lui seul expliquer le résultat de court terme que nous obtenons. Ainsi, lorsque des travailleurs sont licenciés ou lorsque des diplômés ne trouvent pas de poste à pourvoir, ils sont automatiquement orientés vers le secteur informel. Ce comportement automatique, d'aller vers le secteur informel, trompe les statistiques officielles concernant le nombre de chômeur dans le pays et baisse, à court terme, l'offre d'emploi dans le secteur formel.

En ce qui concerne la productivité du travail, le signe négatif à court terme est une nouveauté par rapport aux estimations antérieures du Maroc [notamment, CMC, 2001] où on observait un signe positif. L'interprétation du résultat à court terme reste difficile dans la mesure où la question de la place de la productivité dans une équation de salaire surtout à court terme reste assez controversée et n'est pas résolue à ce jour dans la littérature.

En revanche, l'équation du VECM confirme l'impact positif et significatif du SMIG sur le salaire moyen dans le secteur industriel, avec une élasticité de 0,44, toutes choses égales par ailleurs. On peut donc établir une fourchette allant de 0,44 à 0,56.

Globalement, la spécification de la dynamique de court terme de l'équation du salaire n'est pas satisfaisante. La majorité des coefficients n'ont pas le signe attendu et parfois ne sont pas significatifs. Cependant, l'estimation des relations de long terme entre les variables a été privilégiée au détriment de la spécification de la dynamique de court terme. En effet, les signes des coefficients de la relation de long terme sont conformes à la théorie et toutes les variables sont statistiquement très significatives.

Le degré d'indexation des salaires sur les prix à long terme est de l'ordre de 0,72. Donc, l'indexation des salaires sur les prix n'est pas unitaire, ce qui rend compte d'un arbitrage inflation/chômage à long terme. Par ailleurs, les prix à la consommation n'apparaissent pas avec le signe attendu à court terme dans le modèle du VECM (notamment pour le retard 3). En effet, pour mesurer plus précisément l'effet des prix à la consommation sur la dynamique des salaires, nous avons procédé à une estimation d'un modèle VAR d'ordre 1 [Voir Annexe 8] (l'ordre est retenu selon les critères de Akaike et de Schwarz pour des retards allant de 0 à 2). Ce modèle montre lui aussi une sous-indexation de l'ordre de 0,73 (significative au seuil de 10%). Toutefois, la désindexation estimée impliquerait clairement une plus grande rigidité à la hausse des salaires pris au sens du salaire moyen du secteur industriel. Les salaires réels peuvent en conséquence subir temporairement des pertes de pouvoir d'achat. De fait, la perte du pouvoir d'achat pourrait jouer en faveur d'une extension des conflits entre groupes sociaux.

A long terme, on constate aussi que le niveau du taux de chômage exerce une pression significative à la baisse sur la croissance des salaires. Une hausse d'un point du taux de chômage urbain diminue la croissance du salaire nominal de l'ordre 3,1%24, toutes choses égales par ailleurs. En effet, la hausse négociée des salaires est d'autant moins grande que la situation du marché du travail se dégrade et affaiblit le pouvoir de négociation des salariés. Il convient de noter, toutefois, que le coefficient relatif au taux de chômage urbain a une valeur plus faible que certaines estimations faites sur données françaises (Cotis, Méary et Sobczak indique une élasticité de 5,8%, Bonnet et Mahfouz ou L'Horty et Sobczak présente une élasticité de 5,5%). Dans le modèle MESANGE,

24 Dans l'estimation, le taux de chômage est exprimé en points de pourcentage. L'élasticité donnée se réfère à un taux de chômage exprimé en décimal.

l'estimation indique une élasticité de 4% qui n'est pas statistiquement très différente de notre estimation.

A long terme, une augmentation de la productivité permet une progression des salaires. L'élasticité des salaires par rapport à la productivité s'élève à 0,62 selon nos estimations, toutes choses égales par ailleurs. Notre estimation est assez proche de celle du CMC (2001) qui indique une élasticité de 0,68. Donc, l'indexation des salaires sur les gains de productivité n'est pas unitaire. Cela veut dire que l'entreprise dans le secteur industriel profite des gains de productivité et conserve le droit de gérer.

5. ANALYSE DE CAUSALITE25

Les résultats du test de Granger (schéma 1) indiquent qu'il existe une causalité unidirectionnelle de l'indice des prix à la consommation vers le salaire moyen du secteur industriel. Ainsi, l'hypothèse selon la quelle IPC ne cause pas le salaire moyen du secteur industriel est rejetée (le seuil de significativité est inférieur à 10%). Par ailleurs, le test de Granger montre bien l'absence de causalité de salaire moyen du secteur industriel vers les prix à la consommation.

En outre, on constate une absence de causalité entre le salaire moyen des salariés déclarés à la CNSS et l'indice des prix à la consommation.

En général, on peut dire qu'au Maroc, une hausse des prix (inflation) est répercutée en hausse de salaire moyen du secteur industriel par le jeu de négociations salariales alors qu'une hausse des salaires n'exerce pas une pression directe sur les prix à la consommation.

Cependant, on remarque l'existence d'une causalité bidirectionnelle entre le SMIG et IPC, on parle donc d'une boucle rétroactive (feedback effect) entre ces deux variables.

25 Voir annexe 9 le test de causalité. Sur le concept de causalité voir : Chamberlin (1982) et Bruno (1996).

SMI

IPC

SMIG

Schéma 1 : Le sens des causalités

CONCLUSION

Cette étude avait pour objectif de modéliser la formation des salaires pour l'économie marocaine. Ladite modélisation prend en considération à la fois des ajustements du court et du long terme. L'estimation a été faite principalement dans le cadre d'un modèle VECM multivarié selon la méthode de Johansen. Nos résultats empiriques indiquent une indexation partielle des salaires sur les prix à la consommation de l'ordre de 0,72. En effet, la connaissance du degré d'indexation permet d'orienter plus efficacement la politique économique. Ainsi, la désindexation des salaires sur les prix est confirmée par le test de causalité (causalité au sens de Granger) qui montre l'existence d'une causalité unidirectionnelle de l'indice des prix à la consommation vers le salaire moyen du secteur industriel. Donc, le rejet de l'indexation unitaire et l'existence d'une causalité dans un seul sens, semblent écarter le risque d'une spirale inflationniste ou d'effet de second tour.

De même, nos résultats montrent qu'à long terme le taux de salaire moyen du secteur industriel dépend positivement de la productivité apparente du travail et négativement du taux de chômage.

En parallèle de l'estimation de l'équation du salaire, nous avons également tenté d'estimer l'impact d'une revalorisation du SMIG sur le salaire moyen de toutes les branches du secteur industriel. Nos résultats empiriques indiquent que toute augmentation du SMIG a un effet positif et statistiquement significatif sur les salaires moyens.

En guise d'extension de ce travail, on peut recommander son application aux données trimestrielles offrant ainsi une taille d'échantillon plus grande et la possibilité de vérifier la robustesse des résultats. Une estimation du taux de chômage d'équilibre serait également intéressante. Ce taux de chômage constitue pour toute Banque centrale une information importante dans la conduite de la politique monétaire.

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Les déterminants du salaire au Maroc 28

Annexes

Annexe 1 : Evolution des principales variables

Indice des prix a la consommation La productivite apparente de travail

Le taux de salaire moyen dans l'industrie Taux de chômage urbain

SMIG

Annexe 2 : Effets du salaire minimum sur le salaire moyen (industrie de transformation)

secteur

ln_smig

t_stat

DW

R_squard

Dln_SMI

0.564058

3.216107

1.990122

0.352494

Dln_IAGR

0.552213

2.583877

1.824599

0.260021

Dln_ITEX

0.415990

2.368883

1.855152

0.228007

Dln_ICHM

0.464955

3.102307

2.228706

0.336229

Dln_IMEC

0.598035

2.712773

1.781426

0.290197

Dln_IELT

0.530224

3.177487

2.048474

0.346999

Annexe 3 : Détermination des retards selon les divers critères d'informations

Annexe 4 : Estimation du nombre de vecteurs de cointégration (*)

(*) Absence d'une tendance linéaire dans les séries et d'une constante dans les relations de cointégration.

Annexe 5: résultat de l'ensemble des estimations

DLN_SMI\Spécifications

(1)

(2)

(3)

 

Coefficients

T stat

Coefficients

T stat

Coefficients

T stat

LN_IPC (-1)

-0.727265

[-4.46727]

-1.081571

[-3.53145]

-0.887847

[-3.01701]

LN_PDL (-1)

-0.622562

[-8.80599]

-0.087953

[-0.26946]

-0.335361

[-1.06930]

TCHO (-1)

0.031188

[3.22578]

0.040607

[3.23460]

0.038987

[3.23204]

C

 
 

-4.446119

[-1.86808]

-2.403800

 

Relation de court terme

 
 
 

ã

-0.404358

[-4.52444]

-0.443522

[-7.87781]

-0.500315

[-4.84840]

D(LN_SMI(-1))

-0.642705

[-2.28547]

-0.833734

[-2.79885]

-0.783882

[-2.43298]

D(LN_SMI(-2))

0.450816

[3.01264]

0.437857

[2.77958]

0.477725

[2.38165]

D(LN_SMI(-3))

0.353954

[2.63947]

0.411005

[2.93309]

0.427407

[2.50328]

D(LN_IPC(-1))

-0.005941

[-0.01136]

-0.067638

[-0.12955]

-0.056648

[-0.09831]

D(LN_IPC(-2))

0.718613

[1.61118]

0.324230

[0.70212]

0.422056

[0.81927]

D(LN_IPC(-3))

-1.227461

[-2.07543]

-1.915716

[-3.08312]

-1.786339

[-2.66044]

D(LN_PDL(-1))

-0.060295

[-0.41262]

0.182564

[1.13188]

0.087224

[0.50463]

D(LN_PDL(-2))

-0.685362

[-5.08600]

-0.520051

[-3.86519]

-0.586822

[-3.61640]

D(LN_PDL(-3))

-0.090416

[-0.93723]

-0.034353

[-0.36540]

-0.063099

[-0.61183]

D(TCHO(-1))

0.014250

[3.14782]

0.019397

[4.13226]

0.020522

[3.68701]

D(TCHO(-2))

0.007184

[1.76260]

0.012661

[3.08413]

0.013476

[2.91051]

D(TCHO(-3))

0.009187

[2.36132]

0.013000

[3.07678]

0.013008

[2.80188]

C

 
 
 
 

0.101443

[6.35770]

DUM01

0.114869

[2.18391]

0.116423

[2.08654]

0.115798

[1.82089]

Dln_SMIG

0.449651

[2.51353]

 
 
 
 

R-squared

0.921815

 

0.901054

 

0.895394

 

Adj. R-squared

0.784991

 

0.758131

 

0.712333

 

(1) Absence d'une tendance linéaire dans les séries et d'une constante dans les relations de cointégration.

(2) Absence d'une tendance linéaire dans les séries mais présence d'une constante dans les relations de cointégration.

(3) Présence d'une tendance linéaire dans les séries et d'une constante dans les relations de cointégration.

Annexe 6: Etude de l'autocorrélation des résidus du modèle (Test de Ljung Box)

Annexe 7 : Test du CUSUM

Annexe 8 : Estimation de la relation entre le taux de salaire du secteur industriel et les prix
à la consommation

Annexe 9 : Test de causalité au sens de Granger entre les salaires et les prix à la consommation

Null hypothesis

DLN_SMI does not Granger Cause DLN_IPC

DLN_IPC does not Granger Cause DLN_SMI

DLN_SMI does not Granger Cause DLN_IPC

DLN_IPC does not Granger Cause DLN_SMI

DLN_SMCNSS does not Granger Cause DLN_IPC

DLN_IPC does not Granger Cause DLN_SMCNSS

DLN_SMIG does not Granger Cause DLN_IPC

DLN_IPC does not Granger Cause DLN_SMIG

Lags

Obs

F-statistic

Probability

1

25

3.0E-05

0.99571

 
 

3.29077

0.08333

2

24

0.29375

0.74879

 
 

2.66757

0.09527

1

25

1.21923

0.28144

 
 

1.14595

0.29600

1

25

8.75895

0.00724

 
 

3.31192

0.08241

Sample : 1980 2006






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