UNIVERSITE NATIONALE DU RWANDA
FACULTE DE DROIT
B. P. 117 HUYE
LES CONSEQUENCES JURIDIQUES DE
L'ACQUITTEMENT DEVANT LE TRIBUNAL
PENAL INTERNATIONAL POUR LE RWANDA
(TPIR)
Mémoire présenté et défendu en vue
de l'obtention du Bachelor's degree en Droit
Par Jean Marie TWAGIRAYEZU
Directeur : Mr. Mandiaye NIANG (LL.M)
Huye, octobre 2007
DEDICACE
A toi Dieu Tout Puissant pour ton amour incomparable
tout au long de notre
chemin de vie;
A nos regrettés parents Déo TWAGIRAYEZU
et Virginie MUKASAMARI partis si tôt, en mémoire
fortunée de la culture que vous m'avez apprise et de vos efforts
investis dans mon éducation;
A nos regrettées grand-mère Bernadette
GASHIKAZI et tante Denise MUKARURANGWA, en mémoire de votre amour et
des moments supportants que vous pourriez avoir subi pour mon
éducation;
A notre frère Bosco, à nos soeurs
Jeannine et Jackie et à nos cousins éprouvés Eduije,
Fille et Olivier, en reconnaissance profonde de votre amour et de votre
encouragement constants;
A toute notre chère famille; Aux inoubliables
camarades partis pour l'amour de notre patrie; Aux victimes de
l'injustice; Et à nos amis;
Que vos Ames, vous tous qui êtes
déjà partis, reposent en paix dans l'espérance de
nous revoir au plus grand jour!
ii
REMERCIEMENTS
Aucun travail ne s'accomplit dans la solitude. Aussi est-il
normal que figurent, en début de ce travail, des remerciements
adressés à tous ceux qui ont aidé ou concouru d'une
façon ou d'une autre à sa réalisation. Nos sincères
remerciements s'adressent Ó
Plus particulièrement à notre Directeur de
mémoire, Mr. Mandiaye NIANG, pour sa patience, son dévouement et
sa rigueur dans le suivi du travail; qu'il trouve ici l'expression de notre
profonde gratitude pour ses inestimables conseils;
A tout le personnel des différents services et
bibliothèques du TPIR ainsi que de la bibliothèque de l'U.N.R.
qui nous a aidé à rassembler la documentation
nécessaire;
A tous les Professeurs de la Faculté de Droit pour leur
encadrement tout au long de notre formation à l'U.N.R, et
particulièrement à Providence UMURUNGI pour ses précieux
conseils prodigués pour la réalisation de ce travail;
A nos aînés, Théos BADEGE, Pascal
HABIMANA, Guillaume GASORE, Dieudonné RURANGIRWA, Jacques BURORA, J.M.V.
KAREKEZI, Claver NDAHAYO et Emmanuel TWAHIRWA pour leur soutien et leurs
conseils;
A tous nos camarades de promotion, vous êtes nombreux,
vous ne saurez tous figurer sur cette page; qu'il nous soit simplement permis
de rappeler les moments agréables et instructifs passés ensemble
qui ont facilité et permis notre séjour et notre formation
à l'U.N.R.; les années passées ensemble resteront toujours
gravées dans notre mémoire;
Et enfin à nos parents et à toute notre famille,
en reconnaissance profonde de leurs efforts consentis pour contribuer à
ce que nous sommes devenu aujourd'hui, plus particulièrement la famille
de notre oncle Charles KARAMBIZI, la famille d'Apollinaire AHIMANA, la famille
d'Alphonse NSABIMANA, la famille de Venant RUCYAHANA, la famille de Claver
MUTABAZI, la famille de Pierre KAREMERA, toute la famille de notre grand
père Christophe RWAGAJU et Abbé Evalde HODARI.
Que tous ceux qui, de près ou de loin, ont
contribué à la réalisation de ce travail, trouvent ici
l'expression de notre vive reconnaissance.
Jean Marie TWAGIRAYEZU
iii
LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS
al. : Alinéa
Art. : Article
B.O. : Bulletin officiel
C.A.D.H. : Convention américaine relative
aux droits de l'homme
C.A.D.H.P. : Charte africaine des droits de
l'homme et des peuples
CEDH : Cour européenne des droits de
l'homme
C.E.D.H. : Convention européenne des
droits de l'homme
CIADH : Cour interaméricaine des droits
de l'homme
C.I.C. Blg. : Code d'instruction criminel
belge
C.P.P. Fr. : Code de procédure
pénale français
C.E.D.H. : Commission européenne des
droits de l'homme
C.P.I. : Cour pénale internationale
Cass. Crim. : Cassation criminelle
Cfr. : Confer
C. : Contre
dir. : Sous la direction de
éd. : édition
et al. : et alii (et
autres)
etc. : et caetera (et
autres)
HCR : Haut commissariat des Nations unies aux
réfugiés
Hirondelle TPIR : Agence d'information, de
documentation et de formation auprès du
TPIR Hirondelle
I.C.T.R. : International criminal tribunal
for Rwanda
Ibid. : Ibidem (suppose la
proximité immédiate de la précédente citation
à
laquelle l'on entend renvoyer- même ouvrage et même
page)
Id. : Idem (le même
ouvrage)
Infra : Ci-dessous (plus bas, plus
loin, ci-après)
J.O.R.R. : Journal officiel de la
République du Rwanda
no : Numéro
N.U.R. : National university of
Rwanda
ONU : Organisation des nations unies
op. cit. : Opere citato
(renvoi à un ouvrage cité précédemment mais
la
iv
citation étant éloignée)
p. : Page ou pages quand un nombre est
placé devant
par. : Paragraphe
pars. : Paragraphes
P.F.D.D.R.R. : Principes fondamentaux relatifs
aux directives concernant le droit à
un recours et à réparation des victimes de
violations du droit interna- tional relatif aux droits de l'homme et du droit
international huma- nitaire
P.I.D.C.P. : Pacte international des droits
civils et politiques
pp. : Plusieurs pages
Supra : Ci-dessus (plus haut)
Règlement : Règlement de
procédure et de preuve du TPIR
R.D.P.J.A. : Règlement portant
régime de détention des personnes en attente de
jugement et d'appel
Q.P.N.U. : Quartier pénitentiaire des
Nations unies
T.P.I.R. : Tribunal pénal international
pour le Rwanda
T.P.I.Y. : Tribunal pénal international
pour l'ex-Yougoslavie
U.N.R. : Université nationale du
Rwanda
Vol. : Volume
Voy. : Voyez
V. : Versus (contre)
§ : Paragraphe ou Sous section
v
TABLE DES MATIERES
DEDICACE iREMERCIEMENTS iiLISTE DES SIGLES ET
ABREVIATIONS iiiTABLE DES MATIERES v
INTRODUCTION GENERALE 1
1. Problématique 1
2. Intérêt du sujet 2
3. Méthodologie de recherche 2
4. Délimitation du sujet 3
5. Structure du travail 3
CHAPITRE I. LE MAINTIEN EN DETENTION DE L'ACQUITTE
4
Section 1. La possibilité de principe de maintien en
détention 4
§.1. Fondement, procédure et effets de la mesure 4
A. Le fondement de la mesure 4
1. La nécessité de représentation de
l'acquitté en appel 4
2. La nécessité de préserver les preuves
5
3. La nécessité de sécurité 6
B. La procédure 7
1. Le moment 7
2. Les acteurs intervenant 7
3. Les formes de la mesure 9
C. Les effets de la mesure 9
1. L'exécution de la mesure 10
2. L'aboutissement du procès en appel 10
§.2. Les difficultés de la mesure 11
A. Une procédure trop simplifiée 11
1. L'absence de conditions matérielles 11
2. L'absence de garanties formelles 11
B. Une procedure qui met en cause les droits de l'accusé
13
1. Le droit à la présomption d'innocence 13
2. Le droit à la liberté 14
Section 2. La mesure du safe house comme alternative
à la détention 15
vi
§.1. Le régime juridique du safe house 15
A. Le fondement juridique du safe house 16
B. La nature juridique du safe house 17
§.2. Les effets du safe house 18
A. Les conditions de vie au safe house 18
B. La fin du séjour au safe house 19
CHAPITRE
II. LA REMISE EN
LIBERTE DE L'ACQUITTE 20
Section 1. Le principe de la remise en liberté 20
§.1. Le fondement de la mesure de remise en liberté
20
A. La condition préalable à la mise en
liberté 20
B. Les justifications de la mesure 20
1. Au point de vue textuel 21
2. Au point de vue idéologique 21
§.2. Le régime de l'exécution de la mesure
22
A. Le moment de l'exécution de la mesure 22
1. A la fin du procès 22
2. En cours de procès 23
B. Le rôle des organes d'exécution 23
Section 2. Les difficultés de mise en oeuvre de la remise
en liberté 25
§.1. L'état de la question 25
A. Le séjour limité en Tanzanie 25
B. L'identification du pays d'accueil 27
1. Les difficultés liées aux raisons propres de
l'acquitté 27
2. Les difficultés liées aux raisons
extérieures à la volonté de l'acquitté 28
§.2. Les solutions possibles 30
A. La protection temporaire par le TPIR 30
B. La recherche d'asile 31
C. Le rapatriement au pays d'origine, le Rwanda 33
CHAPITRE III. LE DROIT A REPARATION POUR
L'ACQUITTÉ 34
Section 1. La problématique de réparation pour
l'acquitté devant le TPIR 34
§.1. Un régime juridique qui fait abstraction du
droit à réparation
pour l'acquitté... 34
A. L'absence de l'action en réparation après
acquittement 34
vii
B. La portée de l'article 5 du Règlement 35
§. 2. Une pratique qui semble donner une place restreinte
à la réparation pour
l'acquitté 37
A. La réparation fondée sur l'article 5 du
Règlement 37
B. La réparation fondée sur d'autres instruments
des droits de l'homme 38 Section 2. La nécessité et les
promesses d'un véritable régime de réparation pour l'
acquitté devant les juridictions répressives
internationales 42
§.1. La nécessité d'un véritable
régime de réparation pour l'acquitté 42
A. Les fondements factuels de réparation pour
l'acquitté 42
1. La réparation pour violations des droits de
l'accusé 42
2. La réparation fondée uniquement sur la
détention 43
B. Le droit et l'obligation juridique de réparation pour
l'acquitté 43
1. La reconnaissance du droit à réparation pour
l'acquitté en droit
international 43
2. La reconnaissance du droit à réparation de
l'acquitté en droit interne 45
§.2. Les promesses d'un véritable régime de
réparation pour l'acquitté 46
A. La consécration du principe de réparation pour
l'acquitté par le Statut
de la C.P.I. 46
B. La mise en oeuvre du droit à réparation pour
l'acquitté devant la C.P.I 47
CONCLUSION GENERALE ET SUGGESTIONS 49
1. Conclusion générale 49
2. Suggestions 50
BIBLIOGRAPHIE 52
ANNEXES 64
INTRODUCTION GENERALE
1. Problématique
Dès sa création, le TPIR chargé de juger
les auteurs présumés des actes de génocide et d'autres
violations du droit international humanitaire perpétrés au Rwanda
en 19941 accomplit sa tâche de distribution de la justice en
veillant à ce que tous les principes universels du procès
équitable soient bien respectés.
Suivant ces garanties, le Procureur a, entre autres
obligations, celle de prouver la culpabilité de l'accusé
au-delà de tout doute raisonnable. Faute d'y satisfaire, le Tribunal
doit acquitter la personne poursuivie. C'est ainsi que depuis son premier
jugement rendu en 19982, le TPIR a prononcé cinq
acquittements dans quatre affaires sur les vingt sept procès
déjà terminés qui mettaient en cause trente trois
accusés3.
Le premier effet de l'acquittement doit être la remise
en liberté de l'accusé s'il était détenu. C'est
d'ailleurs ce qu'envisage sans ambages l'article 99 A) du Règlement qui
dispose qu'en cas d'acquittement, l'accusé doit être
immédiatement relâché4. Mais cet article
prévoit aussi la possibilité de maintien en détention de
la personne acquittée, à la demande du Procureur qui a
notifié son intention de faire appel du jugement
d'acquittement5.
A l'analyse, ce texte qui, à première vue semble
d'application simple, ne manque pas de soulever des problèmes
importants, inhérents au statut particulier du Tribunal, dont il
convient de prendre la mesure.
Ainsi, selon une réalité observable au TPIR, la
mesure de maintien de l'acquitté en détention pose des
difficultés relatives à la recherche de l'équilibre entre
les besoins
1 Créé suivant la Résolution
S/RES/955(1994) du 8 novembre 1994 du Conseil de sécurité des
Nations unies.
2 Le Procureur c. J. Paul AKAYESU, Affaire
no ICTR-96-4-T, Chambre de première instance I, Jugement, 2
sept. 1998.
3 Dans les affaires André NTAGERURA
(ICTR-96-10A) et Emmanuel BAGAMBIKI (ICTR-97-36), Ignace BAGILISHEMA
(ICTR-95-1), Jean MPAMBARA (ICTR-01-65), et André RWAMAKUBA
(ICTR-98-44C). Voy. TPIR, Etat des affaires, [en ligne sur]
httpÓ//
www.ictr.org/FRENCH/index.htm,
consulté le 29 juin 2007.
4 Cfr. art. 99 A) du Règlement tel
qu'adopté le 29 juin 1995 et modifié jusqu'à ce jour ainsi
libellé Ó« En cas d'acquittement, l'accusé est
immédiatement mis en liberté. ».
5 Cfr. art. 99 B) du Règlement
libellé comme suit Ó « Si, lors du prononcé du
jugement, le Procureur informe la Chambre de première instance, en
audience publique, de son intention d'interjeter appel conformément
à l'article 108, la Chambre peut, sur la demande du Procureur,
émettre contre l'accusé un mandat d'arrêt et de maintien en
détention avec effet immédiat. ».
d'efficacité d'une justice sans territoire et le
respect des droits individuels dont le TPIR, en tant qu'institution de justice
internationale, devrait être le garant. Et la mise en oeuvre de la mise
en liberté soulève des problèmes tout aussi épineux
quant à la destination de l'acquitté après son
relâchement.
Une autre réflexion particulière reste le droit
à réparation pour le préjudice résultant d'une
détention provisoire suivie d'acquittement. Les poursuites contre
l'acquitté ne peuvent passer sans préjudice, soit moral ou
matériel, lorsque l'on sait que tous les accusés au TPIR sont
systématiquement placés en détention dès leur
transfert au siège du Tribunal à Arusha. Le droit commun
reconnaît à toute personne qui a subi un préjudice d'en
demander réparation6. On peut se demander si, après
son acquittement, l'accusé aura le droit de demander réparation
pour le préjudice découlant de sa détention.
2. Intérêt du sujet
Il se pose actuellement dans la pratique du TPIR, des
difficultés liées à la gestion de la situation
d'après acquittement. Nous espérons, par ce travail, mettre
à la disposition des différents intervenants des pistes de
réflexion pour une réglementation appropriée. Nous
imaginons que ce travail pourra également apporter une modeste
contribution à d'autres tribunaux pénaux internationaux
opérant dans les mêmes conditions que le TPIR.
3. Méthodologie de recherche
Pour mener à bien cette étude, nous avons suivi
une méthodologie empruntant certaines techniques et méthodes.
Ainsi, la technique documentaire nous a permis d'avoir accès aux
différentes sources légales, doctrinales et jurisprudentielles.
La recherche documentaire a été, en tant que de besoin,
complétée par la technique d'interview des acteurs ou
témoins dans la gestion des situations résultant de
l'acquittement.
Nous nous sommes également servi de la méthode
exégétique pour analyser et interpréter les documents
consultés et de la méthode comparative pour confronter les textes
du TPIR avec d'autres normes tant nationales qu'internationales.
6 Cfr. arts. 258-259 du Décret du 30 juillet
1888 instituant le Code civil Livre IIIè sur des contrats ou
des obligations conventionnelles tel que modifié, in B.O.,
1888, p. 109 (ce décret fait partie de la législation
rwandaise).
4. Délimitation du sujet
Notre travail s'inscrit dans le cadre du droit de
procédure pénale internationale dont le champ d'application est
assez vaste pour embrasser l'activité de toutes les juridictions
répressives à caractère international. Notre ambition est
cependant limitée au champ de travail du TPIR.
Les effets possibles de l'acquittement sont nombreux. Mais,
nous nous sommes limités à certains effets jugés
importants. Dans ce travail, nous avons d'abord traité les effets qui
sont prévus dans les textes du Tribunal, notamment le maintien en
détention ou la remise en liberté de l'acquitté. Nous
avons ensuite vu ceux relevant de la jurisprudence dont le plus
intéressant reste le droit à réparation de
l'acquitté.
5. Structure du travail
Le présent travail est structuré en sorte de
traiter séparément les trois effets susmentionnés. Ainsi,
après la partie introductive, le premier chapitre analysera la question
du maintien en détention, le deuxième chapitre examinera la
question de remise en liberté. Le troisième chapitre
s'intéressera au problème de la réparation du
préjudice de la personne acquittée. La conclusion
générale comprendra nos suggestions ou recommandations.
CHAPITRE I. LE MAINTIEN EN DETENTION DE
L'ACQUITTE
Le Règlement consacre dans son article 99 B) la
possibilité de maintenir l'acquitté en détention, à
la demande du Procureur lorsque ce dernier veut interjeter appel du jugement
d'acquittement (Section 1). Animés par le souci de
surmonter les difficultés pratiques de cette disposition, les juges ont
inventé une alternative à la détention (Section
2).
Section 1. La possibilité de principe de
maintien en détention
Analysons d'abord le fondement, le mécanisme et les effets
de la mesure (§.1) qui en pratique, ne manque pas de
poser des difficultés dont il faudra prendre la mesure
(§.2).
§.1. Fondement, procédure et effets de la
mesure
Examinons ces trois aspects en commençant en premier lieu
par le fondement de la mesure de maintien en détention
(A), ensuite sa procédure (B) et enfin
ses effets (C).
A. Le fondement de la mesure
Le fondement de la mesure de maintien en détention
après acquittement en première instance n'est par clairement
défini par les textes; mais généralement une telle mesure
est ordonnée autour du triptyque suivant : les garanties de
représentation de l'accusé en justice, (1) de
préservation de preuves (2) et de
sécurité (3)7.
1. La nécessité de représentation de
l'acquitté en appel
Dans la première affaire où cette question s'est
posée, une mise en liberté de l'accusé était
envisagée entre l'acquittement et la considération de l'appel
interjeté par le Procureur. Ce dernier a fait valoir que la
libération de l'acquitté permettrait à ce dernier de
prendre la fuite au cours de la procédure en appel8 .
7 P. CHAMBON, Le juge d'instruction,
théorie et pratique de la procédure, 4è
éd., Paris, Dalloz, 1997, p. 250.
8 Le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA,
Affaire no ICTR-95-1A-T, Chambre de première instance I,
Décision sur la requête du Procureur sur le fondement de l'article
99 B), 8 juin 2001, par. 2 qui reproduit les termes de la requête orale
du Procureur sur le fondement de l'art. 99 B). Voy. aussi Le Procureur c.
Sefer HALILOVIC, Affaire no IT-01-48-I, Chambre de
première instance I, Décision relative à la demande de
mise en liberté provisoire, 1er sept. 2005, par. 13.
On serait tenté de penser que le contexte particulier
dans lequel opère le TPIR, c'està-dire sans force
policière autonome ni territoire sur lequel il exerce son
contrôle9, à la différence des juridictions
nationales qui peuvent s'appuyer sur la puissance étatique, justifie le
risque inhérent de fuite et légitimer par conséquent les
demandes de maintien en détention. En outre, les Etats dans le
territoire desquels se trouvent les accusés n'ont pas toujours fait
montre d'une volonté de coopération totale, laquelle est
indispensable pour assurer la représentation en justice des
accusés se trouvant dans leur territoire10.
Toutefois, une telle crainte, fondée
généralement sur une simple supposition, a été
jugée insuffisante par la jurisprudence du TPIR pour justifier le
maintien en détention. Suite à l'acquittement de Ignace
BAGILISHEMA, la Chambre de première instance I a décidé de
rejeter la requête du Procureur visant à son maintien en
détention en attendant qu'il soit statué sur l'appel, au motif
que l'accusé avait déjà montré sa
coopération au cours des procédures initiales11.
Partant de là, il appartient à l'accusation qui demande
l'application de la mesure, de démontrer par des moyens convaincants le
risque réel de fuite alléguée. Le risque devrait
être étayé par des éléments tirés des
faits de la cause et de la personnalité de l'acquitté.
2. La nécessité de préserver les
preuves
Le deuxième motif pouvant justifier le maintien en
détention réside dans le risque de voir l'acquitté remis
en liberté faire disparaître les preuves en intimidant les
témoins et les victimes12 ou même entrer en contact
avec d'autres personnes pour entraver la procédure d'appel. Le risque de
disparition de preuves vise tant les éléments matériels de
nature à contribuer à la manifestation de la vérité
que les déclarations des témoins (risque de
subornation)13.
La Chambre de première instance du TPIR a cependant
estimé que l'argument tiré du risque de disparition de preuves
par intimidation des témoins et des victimes n'était pas
fondé, car il est rare que les témoins soient entendus dans la
procédure d'appel qui est
9 A. M. LA ROSA, « Défi de taille pour
les Tribunaux pénaux internationaux Ó conciliation des exigences
du Droit international humanitaire et d'une procédure équitable
», in Revue internationale de la Croix Rouge, no 828,
Genève, 1997, pp. 693-707, p. 699.
10 G. GASORE, La coopération des Etats avec
le TPIR, mémoire de Licence, Huye, U.N.R., Faculté de Droit
2006, p. 2, non publié.
11 Le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA,
supra note 8, par. 11.
12 Id., par. 2 qui reproduit les moyens du
Procureur appuyant sa requête.
13 H. D. BOSLY et D. VANDERMEERSCH, Droit de
procédure pénale, 2e éd., Brugge, La
Charte, 2001, p. 619.
généralement une procédure sur
pièces. Si la situation se présentait, le Procureur pourrait
solliciter de la Chambre d'appel des mesures supplémentaires de
protection des témoins14.
S'agissant de la nécessité d'éviter le
risque pour l'acquitté de se rallier avec des tiers afin de faire
obstacle à la procédure d'appel, il semble que ce risque n'est
que très relativement évité par le maintien en
détention, en raison des possibilités offertes aux détenus
du TPIR de communiquer avec l'extérieur, en application du droit
à communiquer avec le monde extérieur garanti dans les
instruments internationaux15. Le détenu a droit aux
visites16 et peut communiquer avec sa famille et toute personne de
son choix par téléphone ou par lettre, sous réserves des
mesures d'inspection et de surveillance que peut lui imposer l'administration
du quartier pénitentiaire17. Si ces restrictions ne sont pas
bien assurées, les visiteurs pourraient coopérer pour entraver le
cours de la justice18.
3. La nécessité de
sécurité
Cette raison n'a pas été concrètement
développée par la jurisprudence des deux tribunaux pénaux
internationaux ad hoc (TPIR et TPIY) dans les procédures
d'appel. Il apparaît que la sécurité des témoins et
des victimes n'est pas leur première préoccupation à ce
stade de procédure.
Toutefois, la sécurité des témoins et des
victimes est intimement liée au deuxième motif puisque s'il est
admis que les témoins et les victimes peuvent être
intimidés par l'accusé une fois remis en liberté, il
s'entend que de tels agissements constituent également une menace
à leur sécurité. Le besoin de sécurité est
implicitement invoqué par le Procureur lorsqu'il soulève la
question de la protection des preuves. De surcroît, on a toujours
reproché à l'accusation de demander de maintenir l'accusé
en détention pour donner aussi
14 Le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA,
supra note 8, par. 9.
15 Voir à titre d'exemple par. 37 des
Règles minima pour le traitement des détenus adoptées par
le premier Congrès des Nations unies pour la prévention du crime
et le traitement des délinquants, tenu à Genève en 1955 et
approuvées par le Conseil économique et social dans ses
résolutions 663 C (XXIV) du 31 juillet 1957 et 2076 (LXII) du 13 mai
1977. Voy. également les Règles pénitentiaires
européennes de 1973 telles que révisées jusqu'à ce
jour, règle 24. 1.
16 Voir art. 61 du R.D.P.J.A. adopté le 9
jan. 1996 libellé comme suit Ó « Tout détenu a le
droit de recevoir à intervalles réguliers la visite de membres de
sa famille et de ses amis, sous réserve de l'article 64 ainsi que des
restrictions et des mesures de surveillance que peut imposer le Commandant en
consultation avec le Greffier.».
17 Voir art. 58 du R.D.P.J.A. ainsi libellé
Ó « Sous réserve de l'Article 64, tout détenu a le
droit, sous la surveillance et dans les limites de temps que le Commandant juge
nécessaires, de communiquer avec sa famille et toute autre personne avec
qui il est de son intérêt légitime de correspondre par
lettre et par téléphone, à ses propres frais. Dans le cas
des détenus indigents, le Greffier peut accepter que les dépenses
correspondantes soient prises en charge par le Tribunal, dans des limites
raisonnables. ».
18 M. BEN-BELLA, The Defense right to
communication of the accused versus the need protection for witnesses at the
ICTR, mémoire de Licence, Huye, N.U.R., Faculty of Law, 2006, p.
11, non publié.
satisfaction à la conscience publique émue,
troublée, ébranlée par le crime,19une situation
probable pour les cas de crimes graves reprochés aux personnes
poursuivies par les deux tribunaux pénaux internationaux ad
hoc. Ainsi, la sécurité est aussi envisagée au
bénéfice de la personne détenue notamment s'il y a des
risques de représailles.
B. La procédure
La procédure de maintien en détention de
l'acquitté en première instance peut être
appréhendée à travers trois indicateurs Ó le moment
(1), les acteurs intervenant (2) et les
formes de la mesure (3).
1. Le moment
La demande de maintien en détention est faite à
l'audience du prononcé du jugement d'acquittement20. Cette
procédure a pour but de faire obstacle à la mise en
liberté qui, en principe, doit intervenir immédiatement
après l'acquittement21.
Le Règlement est cependant resté muet quant au
moment de la décision de la chambre. Il semble que la chambre doit
statuer sans délai sur la requête, pour donner effet au souci du
Procureur de garder l'accusé sous le contrôle du Tribunal. Ceci
est d'ailleurs confirmé par la jurisprudence. Dans l'affaire
BAGILISHEMA22, la Chambre a immédiatement statué sur
la requête du Procureur le jour même du prononcé du jugement
d'acquittement, et dans l'affaire de BAGAMBIKI et al.23,
elle s'est donnée un peu plus de temps en réservant sa
décision jusqu'au lendemain de la décision d'acquittement.
2. Les acteurs intervenant
La procédure de maintien en détention met en jeu
trois acteurs : le Procureur, la Chambre de première instance et la
personne acquittée. Le texte de l'article 99 B) spécifie bien les
rôles respectifs du Procureur -demandeur du maintien en détention
et pourvoyeur d'informations quant à son intention de faire appel- et de
la Chambre de première instance - -destinataire de l'information soumise
par le Procureur et appelée à statuer sur la demande
19 P. CHAMBON, op. cit., note 7, p. 250.
20 Art. 99 B) du Règlement,
précité, note 5.
21 Art. 99 A) du Règlement,
précité, note 4.
22 Le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA,
supra note 8, pars. 1, 11.
23 Le Procureur c. André NTAGERURA,
Emmanuel BAGAMBIKI, et Samuel IMANISHIMWE, Affaire no ICTR-99-46-T,
Chambre de première instance III, Décision sur la requête
du Procureur sur le fondement de l'art. 99 B), 26 fév. 2004, par. 16.
de maintien en détention-. Il reste toutefois
étrangement muet sur le rôle de la personne acquittée,
comme si le sort de celle-ci pouvait se jouer sans qu'elle n'ait son mot
à dire. Il n'en est heureusement rien, puisque le silence du texte est
fort justement suppléé par les principes généraux
qui veulent que le respect du principe du contradictoire soit
total24. Ainsi une fois la notification de l'intention de faire
appel faite par le Procureur et sa demande de maintien en détention
formulée, et avant que la Chambre ne se prononce, la personne
acquittée a bien l'opportunité de présenter ses
conclusions orales ou écrites, selon le cas, pour contrer les
prétentions de la partie adverse25.
Il faut donc comprendre dans la formulation actuelle du texte
qui ne fait aucune référence au rôle de la personne
acquittée pendant cette phase de la procédure, le simple souci de
ne pas faire peser sur le défendeur quelque charge probatoire que ce
soit. Il appartient en effet au demandeur (au Procureur et au seul Procureur)
de prouver la substance et le bien-fondé de ses prétentions; et
cette preuve se doit d'être complète et convaincante même si
la partie défenderesse fait le choix du silence26.
Toutefois, la réalité du procès est telle
que les accusés comme la personne acquittée se contentent
rarement de laisser au Procureur la responsabilité entière de la
preuve. Le défendeur est toujours aussi actif que l'accusateur et
cherche constamment à prouver la fausseté des allégations
contre lui27.
Cette règle de conduite générale est
aussi applicable dans cette phase particulière du procès. Dans
les affaires Le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA28 et Le
Procureur c. André NTAGERURA, Emmanuel BAGAMBIKI et Samuel
IMANISHIMWE29, la défense s'est toujours fait
fort de contrer les arguments du Procureur en administrant des
éléments de nature à montrer qu'il ne serait pas
justifié de faire droit à la requête du Procureur visant le
maintien en détention de la personne acquittée, en attendant
qu'il soit statué sur l'appel.
24 Ce principe est directement relié au droit
de la défense. Voy. A. H. RENE KOERING-JOULIN, Droit pénal
international, Paris, Presses universitaires de France, 1994, p. 181.
25 Selon la pratique observée dans les
affaires BAGILISHEMA et NTAGERURA et autres. Cfr. Le Procureur c. Ignace
BAGILISHEMA, supra note 8, pars. 4-6; Le Procureur c.
André NTAGERURA, Emmanuel BAGAMBIKI, et Samuel IMANISHIMWE,
supra note 23, pars. 9-10.
26 B. BOULOC, R. REGINALD et P. LEGROS, Le droit
au silence et la détention provisoire, Bruxelles, Bruylant, 1997,
pp. 10-17.
27 A titre d'exemple, citons l'usage
déjà évoqué du TPIR (voir supra note
25).
28 Le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA,
supra note 8, pars. 4-6.
29 Le Procureur c. André NTAGERURA,
Emmanuel BAGAMBIKI, et Samuel IMANISHIMWE, supra note 23, pars.
9-10.
3. Les formes de la mesure
Les formes des actes requis dans la procédure de
maintien en détention ne sont pas bien précisées. Mais aux
termes de l'article 99 B), il est clair que la requête du Procureur doit
être expresse et précédée par une notification de
son intention d'interjeter en appel. Alors que la jurisprudence du TPIY est
restreinte en la matière30, le TPIR admet que la
requête peut être soit orale31 soit
écrite32.
En dépit du silence des textes33, la
jurisprudence a développé une pratique par laquelle la
requête du Procureur est examinée par la chambre en audience
publique. Ainsi, le maintien en détention ou le rejet est
décidé après avoir entendu chaque partie34.
Après son examen, si elle décide de faire droit à la
demande, la chambre doit émettre un nouveau mandat d'arrêt et de
maintien en détention par une décision ou une
ordonnance35.
C. Les effets de la mesure
Les effets du maintien en détention sont surtout
rattachés à son exécution (1) et à
l'aboutissement du procès en appel (2).
30 Puisque dans les trois cas d'acquittement
recensés dans la jurisprudence du TPIY (Cfr. The Prosecutor v. Sefer
HALILOVIC, Case no IT-01-48-T, Trial chamber I Section A,
Judgment, 16 nov. 2005; Le Procureur c. Zoran KUPRESKIC et al.,
Affaire no IT-95-16-I, Chambre de première instance,
Jugement, 14 jan. 2000; The Prosecutor v. Fatmir LIMAJ, Haradin BALA et
Isak MUSLIU, Case no IT-03-06-T, Trial chamber, Judgement,
30 nov. 2005), aucune demande de maintien en détention
après acquittement n'a été faite. Les accusés ont
plutôt l'habitude de demander la mise en liberté quelques jours
avant le prononcé du jugement. A cet effet, le Tribunal a
décidé la mise en liberté bien avant le prononcé du
jugement d'acquittement à deux reprises, car les Etats d'accueil de la
région restent toujours coopératifs pour toute comparution des
accusés en appel. Et dans l'autre cas, le TPIY a ordonné la
remise en liberté immédiate de l'acquitté et le Procureur
n'a pas demandé de le maintenir en détention (Cfr. Le
Procureur c. Zoran KUPRESKIC et al., Affaire no IT-95-16-I,
Chambre de première instance, Décision relative à la
demande de mise en liberté provisoire, 20 sept. 1999; Le Procureur
c. Sefer HALILOVIC, Affaire no IT-01-48-I, Chambre de
première instance I, Décision relative à la demande de
mise en liberté provisoire, 1er sept. 2000; Le Procureur
c. Fatmir LIMAJ, Haradin BALA et Isak MUSLIU, Affaire no
IT-03-06-T, Chambre de première instance II, Décision relative
à la demande de mise en liberté provisoire, 26 oct. 2005).
31 Dans l'affaire d'Ignace BAGILISHEMA, la
requête du Procureur a été faite oralement à
l'audience immédiatement après le prononcé du jugement
d'acquittement. Voy. Le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA,
supra note 8, par. 2.
32 Dans l'affaire d'Emmanuel BAGAMBIKI et autres,
le Procureur a fait sa requête par écrit. Voy. Le Procureur c.
Emmanuel BAGAMBIKI, André NTAGERURA et Samuel IMANISHIMWE,
supra note 23, par. 10.
33 L'art. 99 B) du Règlement,
précité, note 5, est muet quant à la procédure
suivie dans l'examen de la requête du Procureur.
34 La procédure se dégage dans les
décisions des chambres du TPIR prises dans les affaires d'Ignace
BAGILISHEMA (voir Le Procureur c. Ignace BAGIISHEMA, supra
note 8, pars. 1-6) et d'Emmanuel BAGAMBIKI, André NTAGERURA et
Samuel IMANISHIMWE (voir Le Procureur c. Emmanuel BAGAMBIKI,
André NTAGERURA et Samuel IMANISHIMWE, supra note 23,
pars. 4-5, 9-10).
35 Art. 99 B) du Règlement,
précité, note 5.
1. L'exécution de la mesure
Bien qu'a ce jour, aucun acquitté n'ait
été maintenu en détention par décision du juge au
TPIR comme au TPIY, le mandat d'arrêt et de maintien en détention
doit être immédiatement exécuté36 sous la
responsabilité du Greffier en tant qu'autorité chargée
d'exécution des décisions du Tribunal37.
Le nouveau mandat émis aura pour effet de prolonger la
détention initiale. Ainsi, l'accusé sera reconduit
immédiatement au Q.P.N.U.38 placé sous
l'autorité d'un Commandant qui est chargé du suivi quotidien de
la détention provisoire conformément aux dispositions du
R.D.P.J.A.39.
2. L'aboutissement du procès en appel
S'il est vrai que le maintien en détention permet
d'éviter la fuite de l'accusé, il permet aussi de le retenir pour
l'exécution ultérieure de la peine une fois le procès en
appel aboutit à la condamnation40. Dans ce cas, il
présentera cet autre avantage pour l'acquitté une fois
condamné en appel de voir sa peine réduite de la période
qu'il a passée pendant la détention41.
Toutefois, ces hypothèses qui sont de nature à
justifier la mesure cachent mal un certain embarras qui donne la mesure des
difficultés à rencontrer en voulant retenir en détention
une personne acquittée.
36 Ibid.
37 Cfr. art. 33 A) du Règlement
Ó« Le Greffier apporte son concours aux Chambres et lors des
réunions plénières du Tribunal, ainsi qu'aux juges et au
Procureur dans l'exercice de leurs fonctions. Sous l'autorité du
Président, il est responsable de l'administration et du service du
Tribunal et est chargé de toute communication émanant du Tribunal
ou adressée à celui-ci. B) Le Greffier peut, dans
l'exécution de ses fonctions, informer les Chambres oralement ou par
écrit de toute question relative à une affaire
particulière qui affecte ou risque d'affecter l'exécution de ses
fonctions, y compris l'exécution des décisions judiciaires, en
informant les parties lorsque cela est nécessaire. ».
38 Par analogie, l'art. 64 du Règlement
libellé comme suit Ó« Après son transfert au
Tribunal, l'accusé est détenu dans les locaux mis à
disposition par le pays hôte ou par un autre pays. Le Président
peut, à la requête d'une des parties, demander de revoir les
conditions de détention de l'accusé. » s'applique
mutatis mutandis à la situation de l'acquitté maintenu
en détention.
39 C'est spécialement l'art. 3 du R.D.P.J.A.
qui investit le commandant du pouvoir de l'administration quotidienne du
Q.P.N.U. L'
art. se lit comme suit Ó« (...)
Sous réserve de la compétence prééminente du
Tribunal, le Commandant assume l'entière responsabilité de
l'administration quotidienne du Quartier pénitentiaire, y compris en ce
qui concerne la sécurité et le maintien de l'ordre, et peut, sauf
disposition contraire du présent Règlement, prendre toute
décision y relative. ».
40 R. MERLE et A. VITU, Traité du droit de
criminel, 3e éd., Paris, Editions Cujas, 1979, p.
450-451.
41 Voir art. 101 D) du Règlement Ó
« La durée de la période pendant laquelle la personne
reconnue coupable a été placée en détention
provisoire à vue en attendant d'être remise au Tribunal ou en
attendant d'être jugée par une Chambre de première instance
ou par la Chambre d'appel est, le cas échéant, déduite de
la durée totale de sa peine. ».
§.2. Les difficultés de la mesure
Elles sont liées tantôt à la procédure
suivie (A), tantôt aux conséquences qui peuvent
en découler (B).
A. Une procédure trop simplifiée
La procédure est marquée par l'absence de
conditions matérielles exigées du Procureur (1)
et de garanties formelles indispensables au droit de la défense
(2).
E 11ENIXFeIIGeIFIKIGI7ZXs P
17+IIHNIs
A la lecture de l'article 99 B)42, il
apparaît que la simple intention d'interjeter appel exprimée par
le Procureur constitue la seule condition pour justifier de la requête en
maintien de l'acquitté en détention. Ceci semble d'ailleurs
confirmé par la jurisprudence. Après avoir examiné ce
texte, la Chambre de première instance du TPIR a affirmé que
cette disposition n'a pas pu établir les conditions matérielles
à satisfaire pour permettre à la Chambre de prendre une telle
ordonnance43.
Cependant, la jurisprudence en la matière a bien
développé certains critères - comme nous l'avons
déjà signalé- similaires à ceux de la
détention initiale44. A ce sujet, on constate
également quelques avancées au niveau du Statut de la C.P.I. qui,
en corrigeant ces lacunes susmentionnées, a établi certaines
conditions nécessaires au maintien en détention après
acquittement, notamment le risque d'évasion, la gravité de
l'infraction et les chances de voir l'appel aboutir45.
E F 9:Es1XFe IGeEFEUX7iEVIIIP Wes
L'examen de l'article 99 B) fait relever certaines lacunes
quant aux formalités. Tout d'abord, il exige une formalité
préalable à la requête du Procureur de notifier son
intention d'interjeter appel conformément à l'article
10846. Toutefois exprimer l'intention de faire
42 Cfr. art. 99 B) du Règlement,
précité, note 5.
43 Le Procureur c. Ignace
BAGILISHEMA, supra note 8, par. 8.
44 Voir supra (chapitre I, section 1,
§.1, A sur le fondement de la mesure de maintenir l'acquitté en
détention.
45 Art. 81. 3. c. i. du Statut de la C.P.I.
adopté le 17 juillet 1998.
46 L'art. 108 du Règlement est ainsi
libellé :« Une partie qui entend interjeter appel d'un jugement ou
d'une sentence doit, dans les trente jours de son prononcé,
déposer un acte d'appel exposant ses moyens d'appel. L'appelant
précise également l'ordonnance ou la décision
attaquée, la date de son dépôt et/ou la page du compte
rendu d'audience, la nature des erreurs relevées et la mesure
sollicitée. La Chambre d'appel peut, s'il est fait état dans la
requête de motifs valables, autoriser une modification des moyens
d'appel. ».
appel ne signifie pas que l'appel sera effectivement
interjeté. L'article 108 du Règlement ouvre les délais
d'appel pour trente jours à partir de la date du prononcé du
jugement. La question légitime qu'on peut se poser est quid si
le Procureur obtient le maintien en détention de l'accusé
à partir d'une simple notification d'une intention d'interjeter appel et
que cette intention formulée n'a jamais été suivie d'un
appel effectif 47? On voit bien se profiler le risque d'une
détention à posteriori indue.
Ensuite, l'examen de la requête du Procureur n'est
soumis à aucune formalité précise. Ainsi, dans le silence
des textes, on aurait pu imaginer une chambre examinant la requête du
Procureur sans entendre la défense. Une telle éventualité
nuirait au droit de la défense. Mais il est heureux que la jurisprudence
ait utilement suppléé à la carence des textes, en
développant un système d'instruction contradictoire « qui
constitue incontestablement une garantie très importante pour les droits
de la défense »48.
Enfin, à la lumière du principe universel du
droit aux voies de recours contre une décision judiciaire
entachée d'erreur ou d'injustice qui est indispensable pour garantir les
droits individuels49 et reconnu également par le TPIR en cas
de la détention provisoire initiale50, à la
différence du Statut de la C.P.I.51, les dispositions du TPIR
relatives au maintien en détention après acquittement semblent
être muettes à ce sujet; ce qui compromet les droits des parties
au procès. Et la jurisprudence du TPIR comme celle du TPIY n'y a
apporté aucune correction significative. Certes, un appel pourrait
être envisageable en même temps que le jugement sur le fond, mais
ce moment serait fort bien
tardif, surtout quand la Chambre d'appel confirme
l'acquittement prononcé. Ce quiconduirait à la mise en
cause des droits de l'accusé.
47 Puisque le Procureur comme toute partie au
procès, peut laisser s'écouler les délais d'appel sans
agir. Voy. P. CONTE et P. MAISTRE Du CHAMBON, Procédure
pénale, 2e éd., Paris, Dalloz, 1998, p. 320.
48 B. DEJEMEPPE (dir.), La détention
préventive, Bruxelles, Larcier, 1992, pp. 115-116.
49 R. MERLE, op. cit., note 40, p. 792.
50 Art. 65 D) du Règlement se lit comme suit
Ó« Toute décision rendue par une Chambre de première
instance aux termes de cet article sera susceptible d'appel. Sous
réserve du paragraphe F) ci-après, l'appel doit être
déposé dans les sept jours du dépôt de la
décision contestée. Lorsque cette décision est rendue
oralement, l'appel doit être déposé dans les sept jours de
ladite décision, à moins que (...) ».
51 Puisqu'il reconnaît expressément la
possibilité d'appel contre la décision de maintien en
détention après acquittement. Cfr. art. 81. 3. c. ii. du Statut
de la C.P.I. Ó« La décision rendue par la Chambre de
première instance en vertu du sous alinéa c i) est susceptible
d'appel conformément au Règlement de procédure et de
preuve. ». Rappelons que l'alinéa c i) se trouve à la note
45.
B. Une procédure qui met en cause les droits de
l'accusé
La possibilité de maintien en détention
après acquittement met en cause les droits fondamentaux de la personne
notamment le droit à la présomption d'innocence
(1) et le droit à la liberté
(2).
1. Le droit à la présomption
d'innocence
Le droit à la présomption d'innocence
consacré par de nombreux textes juridiques internationaux52
et codifié dans la plupart des législations
nationales53 constitue l'un des principes de base de droit
pénal moderne. Selon ce principe, toute personne poursuivie est
considérée comme innocente tant qu'elle n'a pas été
déclarée coupable par la juridiction
compétente54.
L'un des corollaires de la présomption d'innocence est
que la liberté est la règle et la détention reste
l'exception55. La détention ne devrait être
ordonnée que dans les conditions exceptionnelles et doit prendre fin
lorsqu'elle n'est plus justifiée, en raison de la décision
d'acquittement56 dont l'effet primordial est de lever la
culpabilité qui la justifierait. C'est d'ailleurs pour cette raison
qu'en France comme dans bien d'autres pays57, l'acquitté ne
peut pas être maintenu en détention, sauf s'il est retenu pour
d'autres causes58. De ce qui précède, il
apparaît que le maintien en détention de l'acquitté serait
en effet attentatoire à ce droit fondamental de la présomption
d'innocence.
52 Art. 11 de la D.U.D.H. du 10 nov. 1948; art. 14.
2 du P.I.D.C.P. du 23 mars 1976; art. 6. 2 de la C.E.D.H. du 4 novembre 1950;
art. 8. 2 de la C.A.D.H. adoptée par l'Organisation des Etats
américains à la Conférence spécialisée
interaméricaine sur les droits de l'homme du 22 nov. 1969 et
entrée en vigueur le 18 juillet 1978; art. 7. 1. b. de C.A.D.H.P.
adoptée par l'Organisation de l'unité africaine à sa
18e Conférence du 27 juin 1981 et entrée en vigueur le
21 octobre 1986.
53 A titre d'exemple, voy. art. 19 Constitution de
la République du Rwanda du 04/06/2003, telle que révisée
jusqu'à ce jour, J.O.R.R., n°spécial du 04 juin
2003, p. 1; art. 11. d) de la Charte canadienne des droits et libertés
telle comprise dans la Loi constitutionnelle canadienne de 1982 entrée
en vigueur le 17 avril 1982; art. 32. 1 de la Constitution
fédérale de la Confédération suisse du 29 mai 1843
telle que modifiée dernièrement le 18 avril 1999.
54 P. J. SCHWIKIKARD, Presumption of
innocence, Cape Town, Juta and Co Ltd, 1999, p. 36.
55 N. MWENE SONGA, Traité de droit
pénal général congolais, Kinshasa, Editions Droit et
société, 2001, p. 484.
56 B. DEJEMEPPE (dir.), op. cit., note 48, p.
283.
57 Art. 169 de la Loi no 13/2004 du
17/5/2004 portant code de procédure pénale du Rwanda, telle que
modifiée et complétée jusqu'à ce jour,
J.O.R.R., no 11 du 15 juin 2004; art. 33 §
1er al. 2 du C.P.P. Blg.
58 Arts. 367-368 du C.P.P. Fr.
Cependant, il faut signaler que ce principe de
présomption d'innocence n'est pas ignoré par le TPIR car il est
consacré par son Statut en son article 2059. Si le
rédacteur des textes du Tribunal a prévu la détention
provisoire et son maintien après acquittement, c'est pour des raisons
tenant au souci de doter l'institution de moyens efficaces nécessaires
à l'instruction du procès. Mais ces moyens devraient être
conçus de façon à atteindre l'objectif visé sans
enfreindre les droits de l'accusé.
2. Le droit à la liberté
Le droit à la liberté reconnu à tout
individu et en tout le temps60 vise essentiellement à le
protéger contre toute atteinte à sa liberté physique.
L'arrestation et la détention n'étant pratiquées
qu'à des occasions exceptionnelles. C'est cet esprit qui a d'ailleurs
inspiré le rédacteur de l'article 99 du Règlement qui a
consacré en principe la remise en liberté de l'acquitté et
exceptionnellement son maintien en détention.
En interprétation de cette disposition, la Chambre de
première instance a relevé qu'Ó« il convient
d'apprécier (...) au regard du fait qu'Ignace BAGILISHEMA a
été acquitté et qu'il jouit de son droit fondamental
à la liberté (..).»61. Ainsi, la Chambre s'est
montrée préoccupée au même titre que certains droits
nationaux62 par le maintien en détention après
acquittement. Ce dernier risquerait de voir enfreint son droit fondamental
à la liberté ainsi obtenu, lorsqu'il n'y a plus de soupçon
justifiant la détention en cas d'acquittement.
Cependant, il est vrai que le procès en première
instance ne met pas fin à la procédure. La Chambre d'appel peut
en effet bien revenir sur l'acquittement et il serait alors utile d'avoir
l'accusé disponible pour répondre des charges ou purger sa peine
si la Chambre d'appel a elle-méme évoqué l'affaire et
appliqué une peine. Toutefois, même si la mesure d'acquittement
peut revétir quelque précarité au regard des pouvoirs de
la Chambre d'appel de la remettre en cause, personne ne saurait dénier
à la Chambre de première instance le droit de tirer les
conséquences logiques de son propre jugement d'acquittement. A son
niveau, le soupçon n'existe plus. Dès lors, il serait très
malaisé pour elle de maintenir quelqu'un en détention juste
après l'avoir lavé de tout soupçon. Ceci est d'autant plus
vrai que la lenteur des procédures d'appel risquerait de prolonger une
détention indue pour une
59 L'art. 20 du Statut est libellé comme suit :
« Toute personne accusée est présumée innocente
jusqu'à ce que sa culpabilité ait été
établie conformément aux dispositions du présent statut.
».
60 Cfr. art. 8 de la D.U.D.H.; art. 9. 1 du
P.I.D.C.P.; art. 5. 1 de la C.E.D.H.; art. 7 de la C.A.D.H.; art. 6 de la
C.A.D.H.P.
61 Le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA,
supra note 8, par. 10.
62 Cfr. supra notes 57-58.
période déraisonnablement longue63.
La Chambre pourrait être tout aussi embarrassée si elle accordait
une mesure de mise en liberté immédiate avec la pleine conscience
que la personne ne justifie d'aucune garantie de représentation en
justice et s'évanouirait dans la nature dès la première
opportunité, compromettant ainsi toute possibilité de
procès contradictoire en appel.
C'est certainement ce double embarras qui a conduit le TPIR
à inventer une alternative à la détention, visant à
trouver un équilibre entre les intérêts de la justice et la
primauté de la liberté individuelle.
Section 2. La mesure du safe house comme alternative
à la détention
Le safe house est une résidence
sécurisée dans la ville d'Arusha où les conditions
d'entrée, de sortie et de séjour sont réglementées.
Il a été initialement mis en place pour abriter des
témoins protégés dont la préservation de l'anonymat
requiert qu'ils soient dans un régime d'isolation durant tout leur
séjour à Arusha64. C'est ce régime qui a
été étendu à certaines personnes acquittées
et en attente d'appel65. Analysons son régime juridique
(§1) avant de préciser ses effets
(§2).
§.1. Le régime juridique du safe house
Le safe house n'est prévu nulle part dans les
textes du TPIR. Le Règlement ne prévoit que deux optionsÓ
soit libérer la personne acquittée soit la maintenir en
détention. L'alternative du safe house est une innovation
sui generis dont il convient d'analyser le fondement
(A) et la nature juridiques (B).
63 A titre d'exemple, certains accusés
viennent de passer plus de dix ans en détention en attente de
l'aboutissement de leur procès. Il s'agit notamment de Elie NDAYAMBAJE
et Joseph KANYABASHI dont le transfert au Q.P.N.U. date du 29/11/1996. Et rien
ne donne espoir que même Calixte KALIMANZIRA, le dernier
transféré (08/11/2005) du Tribunal sera épargné de
la même situation d'autant plus que la date de la première
audience de son procès n'est jusqu'ici pas connue. Voy. TPIR, Situation
des détenus, [en ligne sur]
http://www.ictr.org/FRENCH/index.htm,
consulté le 21 juillet 2007.
64 Il s'agit de l'une des mesures pratiques prises
conformément aux dispositions des articles 14 et 21 du Statut et des
articles 34 et 75 du Règlement pour mettre en oeuvre la protection des
témoins (Selon les informations reçues auprès des services
du Greffe auquel est confié la gestion du safe house).
65 Le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA,
supra note 8, par. 11; Le Procureur c, André NTAGERURA,
Emmanuel BAGAMBIKI et Samuel IMANISHIMWE, supra note 23, par.
14.
A. Le fondement juridique du safe house
En application de l'article 99 du Règlement, le TPIR a
du mal à trouver une mesure qui pouvait rapprocher les deux
intérêts essentiels Ó le droit à la liberté
de l'accusé résultant incontestablement de la décision
d'acquittement et l'intérêt de la justice à assurer la
représentation de la personne acquittée devant les juges
d'appel66.
Dans la tentative de trouver une solution adéquate
à ce problème complexe67, les juges du Tribunal ont
décidé d'accorder une remise en liberté immédiate
assortie des conditions propres à assurer la disponibilité de la
personne acquittée pour faire face à la procédure d'appel.
Il s'agit de maintenir la personne acquittée dans un safe
house68. Dans l'esprit des juges, cette mesure concilie les
deux exigences apparemment contradictoires.
A l'analyse de la motivation des juges, aucune base juridique
de cette mesure n'a été invoquée. Mais les juges du TPIR
semblent s'être beaucoup inspirés du droit anglo-saxon (common
law )69, en se reconnaissant, dans le silence des textes, de
larges pouvoirs de création du droit par la technique dite des pouvoirs
tacites (inherent power)70. Les juges peuvent
reconnaître une règle ou un principe non prévu par le
Statut ou le Règlement, dès lors que cette règle ou ce
principe intègre les principes généraux de droit.
C'est ainsi que par analogie avec la mise en liberté
provisoire conditionnelle71, pour balancer les dispositions de
l'article 99 A) et B),72 la Chambre de première instance a
estimé que la remise en liberté consécutive à
l'acquittement en première instance, devrait être
66 Par interprétation des motifs de la
décision de la Chambre dans Le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA,
supra note 8, pars. 8-11.
67 Ibid.
68 Le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA,
supra note 8, par. 11; Le Procureur c, André NTAGERURA,
Emmanuel BAGAMBIKI et Samuel IMANISHIMWE, supra note 23, par.
14.
69 Selon le Juge Laity KAMA ex. Président du
TPIR cité par L. BURGORGUE-LARSEN, « De la difficulté de
réprimer le génocide rwandais. L'expérience du TPIR.
», in P. TAVERNIER et L. BURGORGUE-LARSEN (dir.), Un
siècle de droit international humanitaire, Bruxelles, Bruylant,
Collection du CREDHO, 2001, 151, p. 153.
70 Ces pouvoirs sont souvent invoqués par le
Tribunal. A titre d'exemple voir infra note 140.
71 Art. 65 C) du Règlement : « La
Chambre de première instance peut subordonner la mise en liberté
provisoire aux conditions qu'elle juge appropriées, y compris le
versement d'une caution et, le cas échéant, l'observation des
conditions nécessaires pour garantir la présence de
l'accusé au procès et la protection d'autrui. ».
72 The Prosecutor v. Ignace BAGILISHEMA, Case
no ICTR-95-IA-A, Appeal chamber, Appellant's response to
respondent's motion for variation of conditions of provisional release, 3 july
2002, par. 1.
également soumise aux conditions nécessaires pour
garantir la présence de l'accusé au procès en
appel73.
B. La nature juridique du safe house
La nature juridique de la mesure du safe house reste
controversée. D'une part, la position des juges a toujours
été claire. La mesure n'est qu'une simple condition ou
méme une modalité pratique dont est assortie la décision
de remise en liberté de l'acquitté pour assurer sa
représentation en appel74. Afin de soutenir cette
thèse, l'ordonnance du Président s'est exprimée en ces
termes Ó « Attendu qu'aucune des conditions- [dont fait partie le
safe house]- ne peut être interprétée comme
prolongeant son maintien en détention~»75. De là,
le safe house relève ipso facto du régime de
liberté.
Pourtant au regard des plaintes des personnes
acquittées, le safe house a été perçu
comme un régime restrictif de liberté76, d'ailleurs
pire dans certains de ses aspects que la détention provisoire initiale.
L'acquitté est en effet soumis à une détention arbitraire
et à un placement en isolement sans base légale, sous la
surveillance des agents de la sécurité des Nations unies qui
restreignent ses mouvements77.
L'interprétation de ce régime juridique a nourri
une certaine polémique entre le Greffier dont le personnel gère
le safe house et les acquittés pensionnaires desdits safe
houses. Les différentes entorses à la liberté d'aller
et venir de ces personnes et les restrictions imposées à leurs
visiteurs pour raison de sécurité78 ou pour limitation
budgétaire79 ont entre autres généré de
nombreuses plaintes devant le Président du Tribunal. Il a souvent
été demandé à ce dernier de déterminer si
les limitations imposées aux résidents des safe houses
étaient compatibles avec le statut d'homme libre conféré
par la décision
73 Le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA,
supra note 8, par. 11; Le Procureur c, André NTAGERURA,
Emmanuel BAGAMBIKI et Samuel IMANISHIMWE, supra note 23, par.
14.
74 Ibid.
75 Le Procureur c. André NTAGERURA,
Affaire no ICTR-99-46-T, Bureau du Président du tribunal,
Ordonnance portant rétablissement de Monsieur NTAGERURA dans les
conditions d'homme libre, 4 oct. 2004, par. 4.
76 F. ROUX, « De l'absence de
responsabilité en cas d'acquittement », in L.
BURGORGUE-LARSEN (dir.), La répression internationale du
génocide, Bruxelles, Bruylant, Collection du CREHO, 2003, 251, p.
255.
77 Le Procureur c. André NTAGERURA,
Affaire no ICTR-99-46-T, Chambre de première instance,
Requête en rétablissement des libertés d'une personne
acquittée, 4 oct. 2004, par. 14.
78 Le Procureur c. André NTAGERURA,
supra note 75, par. 9.
79 Le Greffe a par exemple refusé des
séjours illimités de membres de leur famille notamment quand ces
derniers devraient partager la ration de ces résidents fournie par le
Greffe. Voy. A. NTAGERURA et E. BAGAMBIKI, Le calvaire et la
détresse de deux acquittés oubliés du TPIR, [en ligne
sur]
http://www.grandslacs.net/doc/3767.pdf,
consulté le 29 juillet 2007 (Les acquittés concernés nous
ont confirmé d'avoir publié eux-mêmes ce document. Voy. le
document en annexe III).
d'acquittement80. Le Greffe a toujours
plaidé avec quelque succès que les restrictions trouvaient leur
base dans la décision même qui ordonnait le placement au safe
house, laquelle décision conférait au Greffier la
responsabilité de trouver aux acquittés un pays d'accueil tout en
veillant à ce qu'en attendant l'aboutissement de telles
démarches, les personnes acquittées puissent être
représentées chaque fois que de besoin81.
§.2. Les effets du safe house
La mesure de placement au safe house entraîne des
conditions de vie d'une personne en semi liberté (A) et
prend fin à certaines occasions (B).
A. Les conditions de vie au safe house
Contrairement à une personne libre capable de se
choisir sa propre résidence, l'acquitté du TPIR est maintenu dans
un bâtiment choisi par le Tribunal, mais ne relevant pas non plus de
l'établissement pénitentiaire82.
Dans le safe house, presque au méme titre que
le détenu, l'acquitté vit et n'est autorisé à
circuler qu'à des occasions limitées et autorisées et sous
escorte discrète des agents de sécurité des Nations
unies83. De même, son alimentation, son hébergement et
ses soins de santé et d'hygiène sont pris en charge par le
Tribunal sur le budget destiné au centre de détention à
l'exclusion de l'habillement qui reste assuré aux frais propres de
l'acquitté84.
Cependant, à la différence du détenu, il
bénéficie dans le cadre de sa communication avec
l'extérieur de certains avantages notamment de l'accès à
l'Internet. En plus de son droit habituel aux visites de son
choix85, y compris le droit à des visites conjugales mais
80 Voir à titre d'exemple, Le Procureur c.
André NTAGERURA, supra note 77, pars. 14-39.
81 Voy. Le Procureur c. Emmanuel BAGAMBIKI, A.
NTAGERURA et S. IMANISHIMWE, supra note 23, par. 15.
82 Le Procureur c. André NTAGERURA,
supra note 77, par. 12.
83 Le Procureur c. André NTAGERURA,
supra note 75, par. 9.
84 Voy. interview avec l'un des acquittés dont
le nom est gardé sous l'anonymat pour ses raisons propres, 23 juin
2007.
85 Il faut noter que le droit aux visites est
également reconnu aux détenus du TPIR mais à l'exclusion
des visites conjugales.
après avertissement des services de sécurité
du Tribunal86, il dispose d'une ligne téléphonique aux
frais du Tribunal dans les limites raisonnables87.
B. La fin du séjour au safe house
Selon la jurisprudence établie par TPIR, le
séjour au safe house prend fin lorsque le Tribunal est
convaincu que d'autres conditions exigées pour garantir la
présence de l'accusé en appel sont réunies pour lui
accorder la libération totale. La personne acquittée doit par
exemple fournir au Tribunal deux personnes de bonne moralité se portant
garantes de sa disposition à répondre à la justice
à tout moment. Elle doit signifier son adresse et s'engager à
informer le Tribunal et la Police la plus proche en cas de changement
d'adresse, se présenter à la Police la plus proche une fois par
mois, ne pas sortir du pays de résidence sans l'autorisation
écrite du Tribunal, remettre ses titres de voyage à la Police
locale, sauf indication contraire du Tribunal88. Ces mesures ne sont
ni plus ni moins qu'une mesure de contrôle judiciaire même si les
juges se gardent d'utiliser une telle terminologie.
Le séjour au safe house arrive
également à son terme à l'aboutissement du procès
en cas de confirmation de l'acquittement par la Chambre d'appel. Cette
décision aura pour effet d'anéantir toutes les conditions
auxquelles la remise en liberté de l'acquitté était
assujettie. Dans ce cas, l'accusé sera définitivement
relâché car il ne sera plus requis de comparaître devant le
Tribunal89.
Cependant, il est à noter que, dans la pratique du
TPIR, les personnes acquittées restent gardées dans le safe
house méme après l'acquittement définitif. Il en est
ainsi pour permettre de résoudre d'autres difficultés
soulevées par la mise en oeuvre de la remise en liberté de
l'acquitté90.
86 Voy. interview, supra note 84.
87 Le Procureur c. André NTAGERURA,
supra note 75, par. 9.
88 Voir Le Procureur c. Ignace
BAGILISHEMA, supra note 8, par. 11; Le Procureur c. Ignace
BAGILISHEMA, Affaire no ICTR-95-1A-T, Décision du
Greffier en application de la décision sur la requête du Procureur
sur le fondement de l'article 99 B), 8 octobre 2001, pars. 4-11. Signalons que
pour le cas de BAGILISHEMA, la France a promis au Tribunal de l'accueillir dans
les conditions fixées par le TPIR.
89 Voir Le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA,
Affaire no ICTR-95-1A-T, Chambre d'appel, Arrêt, 3 juillet
2002, par. 113.
90 Pour le moment, deux personnes
définitivement acquittées sont toujours placées au
safe house en attente de retrouver une autre destination. Il s'agit
d'André NTAGERURA et André RWAMAKUBA.
CHAPITRE
II. LA REMISE EN LIBERTE DE L'ACQUITTE
La remise en liberté est le corollaire naturel de
l'acquittement, d'où l'inscription de cette mesure au premier paragraphe
de l'article 99 du Règlement qui consacre un principe bien établi
(Section 1). Mais la mise en oeuvre de cette mesure pose des
difficultés pratiques qu'il importe de signaler (Section
2).
Section 1. Le principe de la remise en
liberté
Il serait aisé d'aborder la question de la mise en oeuvre
de la mesure de remise en liberté (§2)
après avoir précisé son fondement
(§1).
§.1. Le fondement de la mesure de remise en
liberté
L'examen du fondement de la remise en liberté qui
présuppose l'état de détention (A)
évoque l'idée de préciser ses justifications
(B).
A. La condition préalable à la mise en
liberté
La remise en liberté suppose que
l'intéressé était en état de détention. Il
s'agit de l'incarcération de l'accusé décidée par
la Chambre soit de première instance, soit d'appel à la demande
du Procureur et exécutée dans une maison d'arrêt du
Tribunal pendant une période indéterminée car aucune
disposition du Statut ou du Règlement du TPIR ne prévoit un
délai précis de la détention provisoire91.
Cette dernière n'est cependant pas une peine d'emprisonnement
anticipée. Elle est simplement une détention provisoire en
attente du jugement de condamnation ou d'acquittement. Comme déjà
évoqué, elle sert de moyen nécessaire à
l'instruction du procès92.
B. Les justifications de la mesure
Le fondement de la mise en liberté après
acquittement est à chercher parfois dans les conditions d'applications
des textes (1) et quelquefois dans les explications
idéologiques (2).
91 Cfr. les dispositions relatives à la
détention provisoire, arts. 54-64 et 99 du Règlement.
92 Voir supra sur le fondement de la mesure
de maintien en détention.
1. Au point de vue textuel
Dans les procédures du TPIR, il est très rare,
pour ne pas dire impossible, que l'accusé puisse plaider en
comparaissant libre. La gravité des crimes mis à la charge des
personnes poursuivies devant ce Tribunal et les circonstances uniques en
fonction desquelles il doit opérer- à défaut des moyens
coercitifs efficaces permettant de faire comparaître l'accusé
libre récalcitrant- sont telles que la détention est la
règle jusqu'ici applicable à tous les accusés qui passent
devant ce Tribunal.
Cependant comme le nom l'indique, il s'agit d'une
détention provisoire qui est appelée à prendre fin
lorsqu'elle n'est plus justifiée en raison de la décision
définitive du juge de fond93. Ainsi, lorsqu'à l'issue
du procès, l'accusé est condamné à une peine
d'emprisonnement, il sera soumis à l'exécution de sa
peine94. Mais au cas contraire, s'il est acquitté des faits
qui lui sont reprochés par une décision d'acquittement devenue
définitive, celle-ci s'oppose à toute nouvelle poursuite en
raison des mémes faits95, et il sera immédiatement
remis en liberté conformément à l'article 99 A) du
Règlement. En application de cette disposition, les Chambres du TPIR ont
expressément ordonné à plusieurs reprises la remise en
liberté de la personne acquittée96.
2. Au point de vue idéologique
Les meilleures justifications de la mise en liberté
après acquittement sont également tirées des
réflexions basées sur les droits fondamentaux de la personne
surtout le droit à la présomption d'innocence et le droit
à la liberté.
Bien que dans la pratique les indices de culpabilité
pèsent plus lourds97de telle sorte que la présomption
d'innocence soit mise à mal par la mise en examen98 et les
personnes
93 B. DEJEMEPPE, op. cit., note 48, p.
283.
94 Cfr. arts. 102 A) : « Sous réserve
des décisions arrêtées par la Chambre de première
instance conformément à l'Article 101, la sentence est
exécutoire dès son prononcé conformément au
paragraphe.» et 103 A) du Règlement : « La peine de prison est
exécutée au Rwanda ou dans un Etat désigné par le
Tribunal sur une liste d'Etats ayant indiqué leur volonté
d'accueillir des personnes condamnées pour l'exécution de leur
peine. Avant qu'une décision ne soit prise concernant le lieu de
l'emprisonnement, la chambre informe officiellement le Gouvernement rwandais.
».
95 G. STEFANI, G. LEVASSEUR et B. BOULOC,
Procédure pénale, 16è éd.,
Paris, Dalloz, 1996, p. 731.
96 A titre d'exemple, voy. Le Procureur c.
Ignace BAGILISHEMA, supra note 8, par. 11 ; Le Procureur c.
André NTAGERURA, Emmanuel BAGAMBIKI et Samuel IMANISHIMWE, Affaire
no ICTR-99-46-T, Chambre de première instance, Jugement et
sentence, 25 fév. 2004, par. 829.
97 L. MUGAMBIRA, De la détention provisoire
face au principe de la présomption d'innocence devant le TPIR,
mémoire de Licence, Butare, U.N.R., Faculté de Droit, 2004, p.
22, non publié.
98 J. R. FARTHOUAT, « La présomption
d'innocence », in Justices Revue Générale de Droit
Processuel, Paris, Dalloz, 1998, pp. 53-59, p. 54.
poursuivies soient généralement aussitôt
mises en détention99, la liberté et la
présomption d'innocence devraient toujours être
protégées. La détention est privative de liberté
sans pour autant que la culpabilité du prévenu ne soit
établie. Or être privé de liberté constitue en soi
une peine100, en ce qu'il s'agit souvent d'une proclamation
anticipée de la culpabilité, alors qu'il y a pourtant bien des
mis en examen dont l'innocence finit par s'établir par décision
d'acquittement101. Mais c'est souvent trop tard, puisque la presse
qui couvre souvent avec beaucoup de zèle les mises en examen, est
rarement aussi enthousiaste quand il s'agit d'annoncer un acquittement, suite
à un procès dont la longueur aura fini de lasser ceux qui le
suivaient.
Ainsi défendue par les philosophes des lumières,
quelle que soit son application, la détention provisoire ne serait plus
justifiée lorsque le soupçon de culpabilité qui avait
déterminé son existence n'existe plus en raison de l'intervention
de l'acquittement. Dans ce cas, la remise en liberté devrait intervenir
de plein droit après acquittement sans qu'elle ne soit
nécessairement ni consacrée par le texte ni stipulée par
la décision du juge.
§.2. Le régime de l'exécution de la
mesure
Sera d'abord discuté le moment de l'exécution de la
mesure (A) puis le rôle que doivent y jouer les
différents organes (B).
A. Le moment de l'exécution de la mesure
Puisque l'acquittement peut intervenir à deux moments
de la procédure, il s'en suit que la remise en liberté
résultant de l'acquittement peut s'opérer également
à deux étapes de procédure : soit à la fin du
procès (1), soit en cours de celui-ci
(2).
1. A la fin du procès
En principe, les règles de procédure fixent le
moment d'acquittement ou de la condamnation après la clôture des
débats102. Ainsi, c'est à l'issue du prononcé
de la décision d'acquittement par la chambre que l'accusé sera
immédiatement relâché103.
99 L. MUGAMBIRA, op. cit., note 97, p. 22.
100 J. PRADEL, Droit pénal compare, Paris,
Dalloz, 1995, p. 121.
101 J. R. FARTHOUAT, op. cit., note 98, p. 54.
102 Voy. en droit rwandais, art. 144 de la Loi no
13/2004, précitée, note 57; arts. 87 A) des Règlements
du TPIR et du TPIY libellés de la même façon comme suit
Ó« Après les réquisitions et les plaidoiries, le
Président
2. En cours de procès
C'est par exception qu'il peut etre permis à la
défense de présenter sa requête aux fins d'acquittement
avant la clôture des débats, juste après la
présentation par le Procureur de ses moyens de preuve104.
Suivant cette procédure, les décisions d'acquittement avant la
clôture des débats ont été rendues par le
TPIR105 et le TPIY106.
La procédure est fondée sur le fait qu'il peut
se révéler dans les débats que les moyens à charge
ne suffisent pas pour justifier la condamnation de l'accusé, notamment
lorsque le Procureur n'a pas présenté ses moyens de preuve ou
lorsqu'il les a présentés, ils sont si manifestement insuffisants
qu'ils ne méritent même pas une contre preuve de la
défense. Celle-ci n'intervient dans ce cas que pour présenter sa
requête en vue d'acquittement. Une fois l'acquittement
décidé, de la même sorte que la procédure
précédente, si l'accusé était en détention,
il doit être immédiatement mis en liberté. Mais puisque
généralement il s'agit d'acquittement partiel107, il
reste toujours des charges graves contre l'accusé et qui justifient son
maintien en détention.
°A TI eTIil CeTIISes TIEIMA
TIIS'eIpFutiEn
Il a déjà été indiqué que
la mise en liberté de l'acquitté peut soit résulter de la
décision expresse du juge (ordonnance, décision, jugement ou
arrêt), soit résulter de plein droit de la décision
d'acquittement.
de la chambre de première instance déclare clos
les débats et la chambre se retire pour délibérer à
huis clos. L'accusé n'est déclaré coupable que lorsque la
Chambre considère que la culpabilité a été
prouvée au delà de tout doute raisonnable. ».
103 Cfr. art. 99 A) du Règlement,
précité, note 4.
104
Voy. arts. 98 bis des Règlements du TPIR et du TPIY
libellé comme suit Ó« Si à l'issue de la
présentation par le Procureur de ses moyens de preuve, la chambre
conclut que ceux-ci ne suffisent pas à justifier une condamnation pour
un ou plusieurs chefs visés dans l'accusation, elle prononce, sur
requete de l'accusé déposée dans les sept jours suivant la
fin de la présentation des moyens à charge, à moins que la
Chambre n'en décide autrement, ou d'office, l'acquittement en ce qui
concerne lesdits chefs. ».
105 Cfr. par exemple The Prosecutor v. Samuel IMANISHIMWE,
André NTAGERURA et Emmanuel BAGAMBIKI., Case no
ICTR-99-46-T, Trial chamber III, Judgment on motion for judgment of acquittal
on count of conspiracy to commit genocide pursuant to Rule 98 bis, 6 march
2007, oral decision. Voy. aussi The Prosecutor v. Samuel
IMANISHIMWE, André NTAGERURA et Emmanuel BAGAMBIKI, Case
no ICTR-99-46- T, Trial chamber III, Separate and concurring
decision of Judge WILLIAMS on IMANISHIMWE motion for judgment of acquittal on
count of conspiracy to commit genocide pursuant to Rule 98 bis, 13 march 2007,
par. 9.
106 Voy. à titre d'exemple The Prosecutor v. Dusko
SIKIRICA, Damir DOSEN et Dragan KOLUNDZIJA., Chambre de première
instance, Jugement relative aux requetes d'acquittement
présentées par la défense, 3 sept. 2000, par. 172.
107 Selon les cas traités par le TPIR et le TPIY
déjà cités.
Cependant, quelles que soient les discussions ci-dessus
menées, il découle de l'article 65 du Règlement qu'au TPIR
comme au TPIY108, que les rédacteurs des textes de ces
tribunaux ont fait de la mise en liberté une mesure exceptionnelle qui
nécessite une décision expresse du juge car selon cette
disposition, une fois détenu, l'accusé ne peut être
libéré que sur ordonnance du juge. C'est pour cette raison que
les Chambres ont été amenées à prononcer l'ordre de
libérer l'acquitté intéressé soit par
décision d'acquittement, soit par toute autre décision y
relative109.
Aussitôt que la décision de remise en
liberté est ordonnée par la Chambre, le Greffier responsable du
service du Tribunal110 doit entamer la procédure et effectuer
les démarches pratiques nécessaires pour la libération de
l'acquitté. Concrètement, il instruit par une décision
expresse le Commandant du Q.P.N.U. de relâcher l'acquitté
concerné111 qui, s'il trouve facilement une destination,
devient automatiquement libre.
Cependant dans la pratique, la remise en liberté se
heurte à des difficultés qui font qu'au lieu d'être
libéré immédiatement, l'acquitté reste gardé
dans un safe house. Dans les cinq acquittements déjà
prononcés, tous les acquittés sont restés au moins
quelques mois dans un safe house après leur remise en
liberté112.
108 Les arts. 65 A) des Règlements du TPIR et TPIY sont
stipulés de la même façon comme suit: « Une fois
détenu, l'accusé ne peut être mis en liberté que sur
ordonnance d'une Chambre. ».
109 Voir supra note 82.
110 Cfr. art. 33 du Règlement, supra note 37.
111 A titre d'exemple, voy. Le Procureur c. Ignace
BAGILISHEMA, Affaire no ICTR-95-1A-T., Décision du
Greffier en application de la décision sur la requête du Procureur
sur le fondement de l'article 99 B), supra note 88, par. 10-11.
112 Ignace BAGILISHEMA a été
définitivement acquitté et libéré le 8 juin 2001
(Cfr. Le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA, Affaire no
ICTR-95-1A-T., supra note 8), mais ce n'est que le 8 octobre 2001
qu'il a pu sortir du safe house pour regagner le pays d'accueil, la
France (Cfr. Le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA, Affaire no
ICTR-95-1A-T, Décision du Greffier en application de la décision
sur la requête du Procureur sur le fondement de l'article 99 B),
supra note 88.). De même, Emmanuel BAGAMBIKI
définitivement acquitté et libéré le 7 juillet 2006
(Cfr. Le Procureur c. André NTAGERURA, Emmanuel BAGAMBIKI et Samuel
IMANISHIMWE, Affaire no ICTR-99-46-T, Chambre d'appel,
Arrêt, 7 juillet 2006) est resté dans le safe house pour
rejoindre sa famille en Belgique le 20 juillet 2007 (Cfr Hirondelle TPIR,
Informations du 27 juillet 2007, [en ligne sur]
http://www.hirondelle.org,
consulté le 26 juillet 2007. Egalement, Jean MPAMBARA
libéré le 11 septembre 2006 (Voy. The Prosecutor v. Jean
MPAMBARA, Case no ICTR-01-65-T, Trial chamber I, Judgement and
sentence, 11 sept. 2006) a quitté le safe house le 20
déc. 2006 pour aller en Belgique (Cfr. Hirondelle TPIR, Informations du
03 jan. 2007 [en ligne sur]
http://www.hirondelle.org,
consulté le 26 juillet 2007. Deux autres acquittés dont
André NTAGERURA et André RWAMAKUBA sont encore sous la protection
du TPIR au safe house.
Section 2. Les difficultés de mise en oeuvre de
la remise en liberté
Dans les poursuites pénales internationales, les
accusés sont souvent arrêtés dans un pays et
transférés pour être jugés dans une autre
juridiction territoriale113. Il s'ensuit que la juridiction
concernée aura sans doute des difficultés pour trouver à
l'acquitté libéré un territoire d'accueil, car des fois
l'accusé peut se trouver, par son arrestation et sa détention,
séparé ou méme coupé avec son pays d'origine ou sa
famille. Cette situation est très différente des poursuites
pénales nationales dans le cadre desquelles il est très facile
pour l'accusé acquitté de regagner sa résidence habituelle
après sa libération car dans la plupart des cas, il est poursuivi
et jugé par la juridiction du lieu de sa résidence. Il importe
alors de saisir ce phénomène (§.1) et les
solutions possibles au TPIR (§.2).
§.1. L'état de la question
La mise en oeuvre de la remise en liberté de
l'acquitté du TPIR se heurte à des obstacles liés d'abord
à son séjour limité sur le territoire du pays hôte
(A) ensuite à l'identification du pays d'accueil
(B).
A. Le séjour limité en Tanzanie
La personne poursuivie devant le TPIR dont le siège
principal est basé à Arusha ( en République unie de
Tanzanie) arrive dans ce territoire étranger à la faveur d'un
transfert au siège du Tribunal, suivant un mandat d'arrêt et de
dépôt délivré par le Tribunal114.
Lors de sa libération suite à l'acquittement,
son séjour sur le territoire étranger doit prendre fin car il ne
lui est accordé que quinze (15) jours à partir de sa remise en
liberté pour quitter le territoire tanzanien115.
113 Puisque les personnes poursuivies devant les tribunaux
pénaux internationaux (tels que le Tribunal Militaire de Nuremberg, le
Tribunal Militaire de Tokyo, TPIR, le TPIY et le Tribunal Spécial pour
le Sierra Leone) sont souvent arrêtées dans leurs pays de
résidence ou dans les différents pays où elles ont
trouvé l'asile et transférées dans les pays où ces
tribunaux ont leurs sièges pour y être jugées.
114 Cfr. art. 57 du Règlement : « Après
l'arrestation de l'accusé, l'Etat concerné détient
l'intéressé et en informe sans délai le Greffier. Le
transfert de l'accusé au siège du Tribunal ou vers tout autre
lieu que le Bureau peut fixer, après consultation du Procureur et du
Greffier, est organisé par les autorités nationales
intéressées en liaison avec les autorités du pays
hôte et le Greffier. ».
115 Cfr. art. XX. 2 de l'Accord du 31 aoüt 1995
signé entre les Nations unies et la République unie de Tanzanie
concernant le siège du TPIR : « L'immunité visée au
présent article cesse lorsque l'intéressé, ayant
été acquitté ou autrement relâché par le
Tribunal et ayant eu l'occasion de quitter le territoire du pays hôte
dans les quinze (15) jours de sa remise en liberté, y est
néanmoins demeuré, ou qui, l'ayant quitté, y est
revenu.
Or, dans la pratique, à la différence du
TPIY116, il a été remarqué qu'à chaque
acquittement, l'acquitté du TPIR n'est pas en mesure de quitter le pays
dans les délais qui lui sont impartis par l'Accord de siège liant
le Tribunal à la Tanzanie. Il a fallu attendre encore quatre mois
après sa libération pour que la France accepte de recevoir le
premier acquitté du Tribunal Ignace BAGILISHEMA117. Emmanuel
BAGAMBIKI118, le quatrième acquitté et Jean
MPAMBARA119, le cinquième acquitté, ont respectivement
passé douze et trois mois pour que la Belgique accepte de les accueillir
sur son territoire, alors que deux autres acquittés sont toujours au
siège du Tribunal en attente de trouver un pays
d'accueil120.
Alors, il se pose la question de savoir dans quelle mesure
l'acquitté libéré serait capable d'exercer son droit
à la liberté obtenue en raison de l'acquittement s'il lui est
impossible de quitter la Tanzanie dans les limites légales qui lui sont
accordées.
Deux éléments de référence
semblent être importants pour donner la réponse. Selon l'article
XX III de l'Accord de siège signé entre les Nations unies et la
Tanzanie en vue de régler les questions relatives au fonctionnement du
TPIR121 interprété avec l'article XX. 2 122 du
méme Accord, il s'avère qu'à l'exclusion du personnel du
Tribunal et les témoins, ni les accusés ni les acquittés
n'ont le droit de circuler librement sur le territoire de la Tanzanie.
De méme, d'après la législation
tanzanienne en matière d'immigration, l'acquitté
(considéré comme un étranger en Tanzanie) qui s'est
trouvé sur le territoire tanzanien sans possession de documents de
voyage légalement reconnus n'est pas seulement interdit d'y circuler
librement mais aussi d'y résider pour quelque période que ce
soit123.
116 Voir infra note 133.
117 Cfr. supra note 112. Voy. aussi Le Procureur c.
Ignace BAGILISHEMA, Affaire no ICTR-95-44C-T, Chambre de
première instance III, Requête en indemnité devant les
Nations unies, 28 jan. 2005, p. 25.
118 Voir supra note 112.
119 Ibid.
120 Ibid.
121 Cfr. art. XX III de l'Accord de siège,
précité, note 115 : « Toute personne visée aux
articles XIV, XV, XVII, XVIII et XIX du présent Accord dont le Greffier
a communiqué les noms et qualité au Gouvernement a le droit
d'entrer sur le territoire du pays hôte, d'en sortir et de s'y
déplacer en toute liberté, selon qu'il convient, aux fins du
Tribunal. Des facilités de voyage rapide lui sont accordées. Les
visas, autorisations d'entrée ou permis éventuellement
nécessaires sont délivrés gratuitement et aussi rapidement
que possible. Des facilités analogues sont accordées aux
personnes accompagnant les témoins dont le Greffier a communiqué
les noms et qualité au Gouvernement. » Précisons que les
articles ci dessus font exclusion des accusés et des
acquittés.
122 Voir supra note 115.
123 Cfr. arts. 15-27 de "The 1995 Tanzania immigration
act".
B. L'identification du pays d'accueil
Etant donné que l'installation des acquittés en
Tanzanie est légalement proscrite, l'identification d'un pays d'accueil
reste leur première préoccupation. Les difficultés
d'identification du pays d'accueil sont liées aux raisons propres des
acquittés (1) et aux raisons extérieures
à leur volonté (2).
1. Les difficultés liées aux raisons
propres de l'acquitté
Le TPIR souligne que les accusés ne veulent pas
retourner au Rwanda pour des raisons qui leur sont propres124. La
même réponse nous a été donnée dans une
interview avec l'un des acquittés, mais avec certaines précisions
sur quelques difficultés rencontrées.
C'est vrai que chaque acquitté a ses propres raisons,
mais d'une manière générale deux raisons semblent
justifier leur attitude commune. D'abord, arrétés tous en exil,
les acquittés ne veulent pas retourner au Rwanda pour des raisons de
sécurité. Suite aux événements qui se sont
déroulés au Rwanda et leur rôle allégué dans
ces évènements, ils ne se sentent pas à l'aise au
Rwanda125, car quand bien même ils ont été
acquittés par un Tribunal international, ils ne sont pas rassurés
de ne plus être recherchés par la justice rwandaise puisque
celle-ci s'est déjà déclarée sur son intention de
lancer de nouvelles poursuites contre l'un des acquittés du
TPIR126.
Cette information délivrée est d'autant plus
vraie que le Gouvernement rwandais a bien indiqué qu'il allait
poursuivre Emmanuel BAGAMBIKI acquitté par le TPIR pour des actes dont
il n'a pas répondu devant le TPIR et pour lesquels la justice rwandaise
détiendrait des éléments de preuve suffisants. Toutefois
l'intention n'est pas de s'en prendre systématiquement à toutes
les personnes acquittées par le TPIR127.
124 Selon le porte parole du TPIR lorsqu'il était
interrogé par les journalistes. Voy. Croix Rouge de Belgique,
Newsletter du DIH, no 78 du 16-31 août 2oo6, p. 6.
125 Cfr. interview, supra note 84. Voy.
également la déclaration de F. ROUX Avocat de BAGILISHEMA lors
d'une interview avec Hirondelle TPIR Ó « BAGILISHEMA se sent qu'il
ne serait pas en sécurité s'il retournait au Rwanda, il voudrait
résider dans un pays européen », cité par Hirondelle
TPIR, Informations du 24 juillet 2001, [en ligne sur]
http://www.hirondelle.org,
consulté le 26 juillet 2007.
126 Cfr. interview, supra note 84.
127 Voy. le communiqué du Ministère de la
Justice qui a catégoriquement dénoncé jeudi le 26
février 2004 la décision d'acquitter BAGAMBIKI et NTAGERURA (Cfr.
Hirondelle TPIR, informations du 29 février 2004, [en ligne sur]
http://www.
www.hirondelle.org, consulté le 26 juillet 2007). Voy.
aussi le communiqué oral du Représentant du Rwanda au TPIR du 8
mars 2006 suite à l'acquittement de BAGAMBIKI; Interview du
Représentant du Gouvernement rwandais auprès du TPIR avec le
journal Sunday Times, cité par J.
De plus, d'autres motifs basés notamment sur des
questions d'ordre social sont également invoqués par les
acquittés. Pour certains, le retour au Rwanda risquerait de les
séparer de leurs familles qui sont toujours en exil à
l'étranger. Ils hésitent aussi sur la réinsertion sociale
dont ils pourront bénéficier auprès de la
société rwandaise128 d'autant plus que la population
rwandaise se montre parfois insatisfaite des décisions d'acquittement du
TPIR129.
2. Les difficultés liées aux raisons
extérieures à la volonté de l'acquitté
Les acquittés ne peuvent pas regagner les pays
respectifs où ils ont été arrêtés. Certains
d'entre eux n'avaient pas de situation régularisée dans ces pays
méme antérieurement à leur arrestation130. Et
pour d'autres qui avaient méme un statut de réfugié
légalement reconnu, ils ont automatiquement perdu ce statut lors de leur
arrestation conformément aux dispositions de la Convention relative au
statut de réfugié car ils ont acquis une autre protection
juridique incompatible avec celle de réfugié131. Ils
ne peuvent donc pas se réclamer de leur statut antérieur de
réfugié, sauf s'ils entament de nouvelles procédures de
demande. Mais les Etats concernés ne sont pas obligés d'y
répondre positivement.
A part les pays où ils ont été
arrêtés, plusieurs autres pays contactés par le TPIR ont
refusé d'accueillir les acquittés. En raison de leur nature, il
se comprend que de tels arrangements entre le TPIR et les pays concernés
soient hautement confidentiels. De ce fait, on ne peut confirmer de
connaître tous les noms des pays qui ont été
réticents aux appels du Tribunal. A ce titre, pour ne citer que ceux qui
sont connus, pour le cas de NTAGERURA,
MUNYANEZA, Rwanda plots Bagambiki's re-arrest, in Rwanda
Development Gateway [en ligne sur]
http://rwanda.rw/article.php3?id_article=2215,
consulté le 26 juillet 2007.
128 Cfr. interview, supra note 84.
129 A titre d'exemple, environ 10 000 personnes ont envahi les
rues de Cyangugu (sud-ouest du Rwanda) jeudi le 26 février 2004 afin de
manifester contre l'acquittement des charges de génocide et crimes
contre l'humanité par le TPIR de deux anciennes personnalités
politiques de la province (Emmanuel BAGAMBIKI et André NTAGERURA). Cfr.
Hirondelle TPIR, informations du 29 février 2004, [en ligne sur]
http://www.
www.hirondelle.org,
consulté le 26 juillet 2007.
130 Interview, supra note 84.
131 Cfr. art. 1er D. de la Convention relative au
statut de réfugié telle qu'adoptée par l'Organisation des
nations unies le 28 juillet 1951 dans une conférence de
plénipotentiaires sur le statut des réfugiés et des
apatrides Ó« Cette Convention ne sera pas applicable aux personnes
qui bénéficient actuellement d'une protection ou d'une assistance
de la part d'un organisme ou d'une institution des Nations unies autre que le
Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés. ».
son avocat souligne que la France, la Belgique, les Etats
unis, la Suède et la Norvège ont été
approchés par le Greffier, mais ont répondu par la
négative132.
Mais à l'inverse, le TPIY n'a jamais eu les
mémes difficultés. Les Etats auxquels appartiennent les personnes
poursuivies par ce Tribunal ainsi que les Etats de la région restent
coopératifs pour tout accueil ou comparution nécessaire des
acquittés ou même des accusés mis en liberté. En
plus, les accusés n'hésitent pas à regagner leurs
résidences initiales puisqu'ils n'ont pas de relations
inquiétantes avec les administrations de leurs pays respectifs. Certains
parmi eux sont en fait accueillis en héros dans leur pays après
leur acquittement133.
Encore faut-il noter que les conditions imposées par le
TPIR à la remise en liberté de
l'acquitté134engageant l'Etat d'accueil de rester
coopératif à la comparution de l'acquitté en appel
constituent également en quelque sorte un obstacle à la
tâche de trouver un pays d'accueil. Par interprétation des propos
du Greffier du TPIR135 et de F. ROUX avocat de
BAGILISHEMA136, il a été difficile de trouver un pays
acceptant à la fois d'accueillir BAGILISHEMA, le premier
acquitté du TPIR, tout en garantissant sa comparution en temps utile en
procédure d'appel. Il s'agit d'une obligation que de nombreux pays se
sentent mal à l'aise d'endosser.
132 Cfr. le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA,
supra note 117, p. 18.
133 A titre indicatif de la coopération des Etats avec
le TPIY, ce dernier déclare avoir reçu « la garantie
écrite offerte par les autorités de la Fédération
de Bosnie-Herzégovine, datée du 25 août 2005 et
déposée le 29 août 2005 par la Défense, indiquant
que " les organes compétents de la Fédération de
Bosnie-Herzégovine veilleront à ce que Sefer HALILOVIC
réponde à toute convocation du Tribunal à La Haye ou en
tout autre lieu que la Chambre de première instance fixera, et qu'il se
conformera à toutes les mesures ordonnées par la Chambre dans sa
décision". ». Quant au comportement des acquittés, il est
illustré par le fait qu'ils ne s'opposent pas à leur retour aux
pays d'origine. Il s'agit d'une situation qui n'a jamais existé au TPIR.
Voy. Le Procureur c. Sefer HALILOVIC, supra note 8, par.
23.
134 Cfr. Le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA,
supra note 8, par. 11. Voy. aussi The Prosecutor v.
AndréNTAGERURA, Emmanuel BAGAMBIKI et Samuel
IMANISHIMWE, supra note 23, par. 12 où la Chambre
ordonne lesdites conditions en ces termes : « ORDERS that
André NTAGERURA and Emmanuel BAGAMBIKI be immediately released on
satisfaction of the following conditions:
i. that he provides an address where he will reside and
undertake to inform the Tribunal and the local police nearest his residence in
case of any change of address;
ii. that he reports on the first Monday of each month to the
nearest local police station;
iii. that he does not travel outside the country of his
residence without the written permission of the Tribunal;
iv. that his travel documents be retained by the local police,
unless directed otherwise by the Tribunal. ».
135 Cfr. Conférence de presse tenue par A. DIENG
Greffier du TPIR, le 26 juillet 2006 : « la France est le seul pays qui
puisse permettre à BAGILISHEMA de remplir les conditions posées
par le Tribunal, même si nous sommes aussi en train de chercher ailleurs.
», cité par Hirondelle TPIR, Informations du 26 juillet 2006, [en
ligne sur]
http://www.
www.hirondelle.org, consulté le 26 juillet 2007.
136 F. ROUX a indiqué, dans un interview avec
Hirondelle TPIR, que : « le seul pays où ces conditions peuvent
être remplies est la France, mais la France a refusé de le
recevoir. », cité par Hirondelle TPIR, Information du 24 juillet
2001, [en ligne sur]
http://www.hirondelle.org,
consulté le 26 juillet 2007.
En définitive, face à ces difficultés, il
s'avère nécessaire de proposer les solutions tout en signalant
qu'elles ne seront pas à l'abri des critiques que nous allons
également mentionner à chaque solution proposée.
§.2. Les solutions possibles
Trois solutions sont proposées, à savoir d'abord
la protection temporaire par le TPIR en attente de toute autre solution
définitive (A). Il s'entend que d'autres solutions
définitives ne pouvaient qu'envisager le départ du territoire
tanzanien soit par la recherche d'asile dans un autre pays
(B), soit par le rapatriement au Rwanda
(C).
A. La protection temporaire par le TPIR
Vu que le droit de l'acquitté de jouir de sa
liberté sur le territoire tanzanien est impossible et qu'il existe
d'autres obstacles à son départ dans les délais impartis
conformément aux dispositions régissant le fonctionnement du
Tribunal, il faudrait par tous moyens possibles forger une autre protection.
La protection temporaire par le TPIR ne pouvait qu'être
la seule solution possible dans l'immédiat en attente de toute autre
solution définitive. Point crucial qui tient au fondement de la
protection offerte par le TPIR est son obligation qui découle du fait
que c'est la méme institution qui avait amené l'acquitté
sur le territoire tanzanien137 et qui avait sous sa
responsabilité la protection de l'accusé tout au long de la
période de détention138. Ici, nous retiendrons la
même idée que F. ROUX139 que c'est le TPIR qui devrait
être en faute, laquelle faute entraîne son obligation de
réparation qui ne peut être, en l'espèce, qu'offrir la
protection utile à l'acquitté en attendant toute autre protection
légitime possible.
137 Suivant un transfert au siège du TPIR
exécuté conformément aux dispositions des arts. 54-61 du
Règlement.
138 Conformément à l'art. XX. 1 de l'Accord de
siège, précité, note 115 Ó « Le pays
hôte s'abstient d'exercer sur une personne se trouvant sur son territoire
qui a été ou doit être amenée en qualité de
suspect ou d'accusé dans les locaux du Tribunal en exécution d'un
mandat ou d'une demande du Tribunal, sa juridiction criminelle à
l'égard d'actes, omissions ou condamnations de cette personne
antérieurs à son entrée dans le pays hôte.
».
139 Qui, en réclamant contre les Nations unies les
dommages de son client Ignace BAGILISHEMA acquitté du TPIR, suppose sa
faute (Cfr. Le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA, supra note
117). S'il réclame l'indemnisation contre les Nations unies, ce n'est
pas parce qu'il a voulu ignorer la faute du TPIR. C'est plutôt parce
qu'il considère que c'est par les Nations unies que la communauté
internationale a confié au TPIR la mission de justice. De ce fait, elles
devaient en être responsables.
C'est ainsi qu'en vertu de ses pouvoirs propres en tant
qu'organe judiciaire140, le TPIR a estimé qu'au lieu
d'être livrés sans protection, les acquittés
libérés devaient être gardés dans l'entre temps au
safe house sous l'autorité du Tribunal en vue de leur accorder
la protection nécessaire en attente d'une autre
destination141.
Cependant, la solution reste loin d'assurer effectivement les
conditions d'un homme libre. Conformément aux dispositions
déjà invoquées régissant le Tribunal dans ses
relations avec l'Etat hôte, le TPIR n'est pas autorisé à
laisser les acquittés circuler librement sur le territoire de l'Etat
hôte142. Corrélativement, le droit de visites aux
acquittés est limité143. En plus, la prise en charge
au point de vue conditions matérielles de vie est restée, pendant
un certain temps, un défi pour le Tribunal comme pour les
acquittés, car comme l'indiquent les acquittés,144
leur prise en charge fait partie des prévisions budgétaires du
centre de détention du Tribunal qui est voté pour deux ans. Les
accusés acquittés après l'adoption du budget ont eu des
difficultés.
B. La recherche d'asile
La recherche d'asile est considérée par les
acquittés comme la meilleure solution car l'asile leur permettra
d'éviter toutes les conditions critiquables qu'ils subissent sous la
protection du TPIR au safe house et le risque
d'insécurité, si jamais ils retournaient au
Rwanda145.
140 Ces pouvoirs propres ("inherent powers") sont souvent
invoqués par les chambres du TPIR et TPIY comme des pouvoirs que
détient tout organe judiciaire nécessaire à
l'accomplissement de sa mission sans qu'ils soient nécessairement
stipulés par un texte. Cfr. Le Procureur c. André
RWAMAKUBA, Affaire no ICTR-95-1A-T, Chambre de première
instance III, Décision relative à la Requête de la
Défense en juste réparation, 31 jan. 2007, pars. 46-48; Le
Procureur c. Dusko TADI}, Affaire no IT-94-1-T, Chambre
d'appel, Arrêt relatif à l'appel de la Défense concernant
l'exception préjudicielle d'incompétence, 2 oct. 1995, par. 15.
Voy. aussi infra note 181.
141 Voy. Le Procureur c. Emmanuel BAGAMBIKI, André
NTAGERURA et Samuel IMANISHIMWE, supra note 23, par. 14.
142 Conformément aux arts. XX. 2 et XX III de l'Accord de
siège. Voir supra notes 115 et 121.
143 A. NTAGERURA et E. BAGAMBIKI, op. cit., note 79.
144 « ( · · ·) les services du
Greffier nous répondent systématiquement que nous coûtons
cher au TPIR, que les dépenses nous concernant n'ont pas
été prévues au budget (...). Certaines fournitures nous
ont été carrément supprimées notamment celles nous
permettant de continuer à préparer notre appel tel que
l'ordinateur et ses périphériques, le papier, les stylos, les
enveloppes, etc. Le matériel de nettoyage, d'hygiène et de
propreté est fourni de manière irrégulière. Aucun
employé chargé du nettoyage n'est affecté en permanence
à notre résidence, le temporaire est tellement irrégulier
qu'il a disparu depuis tout un mois sans préavis. Pourtant le budget du
Centre de Détention est voté pour deux ans, celui de l'exercice
en cours a été adopté avant notre acquittement. Nous
faisions donc bel et bien partie des prévisions budgétaires du
Centre de Détention qui, sur ce chapitre, continue à nous
gérer, cette fois dans le " Safe House"! ». Voy. Ibid.
145 Selon leurs doléances qu'ils expriment souvent dans
les requêtes adressées aux chambres et au Greffier. Voy.
à titre d'exemple les réquisitions de RWAMAKUBA dans The
Prosecutor v. André RWAMAKUBA, Case
C'est vrai que le droit d'asile est reconnu par les principes
du droit international146, mais les Etats n'ont aucune obligation de
l'accorder. Il s'agit là d'une conséquence de la
souveraineté de chaque Etat147. Il appartient aux
autorités nationales saisies d'en apprécier le motif qui est
généralement la crainte de persécution148.
S'appuyant sur ce pouvoir discrétionnaire d'appréciation,
plusieurs Etats approchés par le TPIR ont refusé d'accueillir les
acquittés. Il semble que les motifs avancés par les
acquittés ne conviennent pas aux Etats car les acquittés ne sont
apparemment pas persécutés au moment de la demande, mais sont
plutôt sous une autre protection du Tribunal.
Actuellement, le TPIR est en train de s'appuyer sur l'article
28 du Statut invoquant la coopération des Etats au
Tribunal149. La coopération ne doit pas se limiter uniquement
aux nécessités de poursuite mais aussi à toute demande
d'assistance requise par le Tribunal dans l'accomplissement de sa mission, y
compris l'octroi d'asile aux acquittés150 qui est un moyen de
mise en oeuvre de la décision d'acquittement151.
no ICTR-98-44C-1, Trial chamber III, Application for
appropriate remedy, 23 oct. 2006. Voy. aussi interview, op. cit., note
84.
146 Plusieurs conventions internationales consacrent
aujourd'hui le principe du droit d'asile, dont la D.U.D.H., art. 14. 1 : «
Devant la persécution, toute personne a le droit de chercher asile et de
bénéficier de l'asile en d'autres pays. », la Convention de
Genève relative au statut des réfugiés
précitée et le Protocole relatif au statut des
réfugiés adopté par le Conseil économique et social
des Nations unies dans sa résolution 1186 (XLI) du 18 novembre 1966,
communiqué à l'Assemble générale des Nations unies
dans sa résolution 2198 (XXI) du 16 décembre 1966 et
entrée en vigueur le 4 octobre 1967, etc. Il est également
proclamé par les textes régionaux. Voy. le traité
instituant la Communauté européenne tel qu'adopté par les
Etats signataires le 25 mars 1957, art. 63 ; la Charte des droits fondamentaux
de l'Union européenne proclamée solennellement par le Parlement,
le Conseil et la Commission européens le 17 déc. 2000, art. 18;
la C.A.D.H., art. 22. 7 ; la C.A.D.H.P., art. 12. 3.
147 Principe selon lequel l'Etat n'est obligé ou
déterminé par aucune autre force, mais plutôt n'agit que
par sa propre volonté dans les limites du principe supérieur du
droit et conformément au but collectif qu'il est appelé à
réaliser.
148 Voir supra note 146. Toutes les conventions
citées ne retiennent que la persécution comme le seul motif pour
obtention d'asile.
149 L'art. 28 est libellé comme suit Ó « 1.
Les États collaborent avec le Tribunal pénal international pour
le Rwanda à la recherche et au jugement des personnes accusées
d'avoir commis des violations graves du droit international humanitaire. 2. Les
États répondent sans retard à toute demande d'assistance
ou à toute ordonnance émanant d'une Chambre de première
instance et concernant, sans s'y limiter :a) L'identification et la recherche
des personnes ; b) La réunion des témoignages et la production
des preuves ; c) L'expédition des documents ; d) L'arrestation ou la
détention des personnes ; e) Le transfert ou la traduction de
l'accusé devant le Tribunal international pour le Rwanda. ».
150 Voy. Le Procureur c. André RWAMAKUBA,
Affaire no ICTR-98-44C-T, supra note 140, par. 78; Address
of the Judge Denis Byron President of the International criminal tribunal for
Rwanda to the United nations Security council 18 June 2007; Onzième
rapport annuel du TPIR à l'Assemblée générale du
Conseil de sécurité des Nations unies du 13 août 2006. .
151 Voy. Le Procureur c André RWAMAKUBA,
supra note 140, par. 77.
C. Le rapatriement au pays d'origine, le Rwand
Bien que le rapatriement au pays d'origine ne soit pas
préféré par les acquittés au motif de crainte
d'insécurité152, il semble que ce soit la solution qui
pose le moins de difficultés juridiques. Le Rwanda reconnaît que
les acquittés sont libres de retourner au Rwanda et qu'accueillir les
acquittés est un devoir de l'Etat rwandais à l'égard de
ses citoyens153. Les acquittés ont droit à
résider dans leur pays comme tout autre rwandais154.
Mais, par-delà les mots de bienséance officiels,
il importe de souligner que le motif d'insécurité argué
par les acquittés ne doit pas être totalement ignoré. Les
réactions du Gouvernement rwandais, voire l'exemple des
déclarations ci-haut citées annonçant une intention de
déclencher de nouvelles poursuites à l'encontre de
l'acquitté BAGAMBIKI n'ont pas manqué de semer un climat
d'inquiétude chez les acquittés. Le Gouvernement rwandais devrait
prendre une attitude active par son initiative dans le cadre de ses devoirs
à l'égard de ses citoyens comme il l'a invoqué, de faire
un appel aux acquittés de rentrer et de procéder à de tels
arrangements avec le Tribunal.
Ainsi une fois la liberté est obtenue, la seconde
préoccupation de l'acquitté reste la possibilité de
revendiquer la réparation des torts subis en raison de la
détention.
152 Cfr. interview, op. cit., note 84.
153 Cfr. interview avec Alloys MUTABINGWA, Représentant du
Gouvernement rwandais au TPIR, 24 juillet 2007.
154 Arts. 23 al. 2 Ó « Tout citoyen rwandais a le
droit de quitter librement son pays et d'y revenir. » et 24 de la
Constitution de la République du Rwanda du 4 juin 2003,
précitée Ó « Tout Rwandais a droit à sa
Patrie. ».
CHAPITRE III. LE DROIT A REPARATION POUR
L'ACQUITTÉ
Dans les poursuites pénales, il est souvent
reproché à la justice de recourir aux moyens
coercitifs155 nécessaires à l'instruction mais qui,
tel qu'argué par les personnes poursuivies, ne manquent pas de leur
porter préjudice pour lesquels une juste réparation est
accordée dans certains systèmes juridiques, surtout lorsque leur
innocence est prouvée par une décision d'acquittement. Cependant,
la réparation du préjudice des personnes acquittées devant
le TPIR reste problématique (Section 1), d'où la
nécessité d'un véritable régime de
réparation (Section 2).
Section 1. La problématique de réparation
pour l'acquitté devant le
TPIR
Le droit à la réparation de la personne
acquittée est presque inexistant dans les textes du TPIR
(§.1) mais la pratique semble lui reconnaître une
place limitée (§.2).
§.1. Un régime juridique qui fait abstraction
du droit à réparation
pour l'acquitté
L'analyse des textes du TPIR fait relever deux situations :
d'une part l'absence de l'action en réparation pour acquittement
(A) et d'autre part la possibilité de se
prévaloir l'application de l'article 5 du Règlement
(B).
A. L'absence de l'action en réparation apr~s
acquittement
Devant les juridictions répressives internationales, la
notion de réparation pour acquittement, s'est depuis longtemps
avérée inexistante, car les accusés étaient
toujours poursuivis par la justice avec priorité donnée à
l'établissement de leur culpabilité et par conséquent
à leur condamnation, sans toutefois se soucier du droit à
réparation pour l'accusé poursuivi sans succès.
C'est ainsi que pas plus qu'au Tribunal militaire
international de Nuremberg, au Tribunal militaire international de Tokyo qu'au
Tribunal spécial pour la Sierra Leone156, les
rédacteurs des textes du TPIR et du TPIY créé un an avant
par le Conseil de sécurité des Nations unies dans les mêmes
conditions, n'ont pas autorisé ces tribunaux à statuer sur
l'action en réparation de la personnes acquittée. Ni les Statuts
ni les Règlements de ces juridictions ne prévoient
l'indemnisation suite à un acquittement. Cela est d'ailleurs
affirmé par la jurisprudence bien que celle-ci se réfère
à d'autres instruments157.
L'absence de place du système permettant aux
acquittés d'être indemnisés dans les procédures des
juridictions pénales internationales semble résulter de deux
considérations. D'une part, les rédacteurs des textes de ces
tribunaux semblent s'inspirer de la philosophie procédurale
anglo-saxonne (Common law) qui pense que l'action pénale
portée devant un tribunal répressif a pour objectif primordial de
réprimer un acte attentatoire à l'ordre public et constitutif de
crime158 et doit donc écarter les questions de
réparation civile du procès pénal.
D'autre part, une certaine corrélation avec
l'indemnisation des victimes serait également à l'origine de
l'exclusion de réparation des personnes poursuivies. Les groupes des
victimes qui ont été privées du droit à
l'indemnisation devant le Tribunal auraient du mal à comprendre une
telle considération pour les personnes poursuivies159.
Selon C. JORDA, l'exclusion du traitement des dommages civils
devant les deux tribunaux pénaux internationaux ad hoc est
encore plus claire. Elle a fait l'objet de discussions entre les juges du TPIY
lors de l'établissement du premier règlement. La majorité
des juges estimaient que les discussions d'indemnisation risquaient de les
distraire de leur mission fondamentale qui leur avait été
confiée à savoir parvenir à arrêter et juger les
auteurs des crimes contre l'humanité160. Rappelons ici que le
Règlement du TPIR a été élaboré
d'après le modèle de celui du TPIY161.
156 Car les textes de ces tribunaux ne contiennent aucune
disposition relative à l'indemnisation en question.
157 Le Procureur c. André RWAMAKUBA,
supra note 140, par. 21.
158 A. MUBIHAME, La question d'indemnisation des victimes du
génocide devant le TPIR, mémoire de Licence, Huye, U.N.R.,
Faculté de Droit, 2006, p. 7, non publié.
159 The Prosecutor v. André RWAMAKUBA,
supra note 145, par. 16.
160 C. JORDA, cité par J. F. DUPAQUIER (dir.), La
justice internationale face au drame rwandais, Paris, Editions
KARTHALA,1996, p. 107.
161 Soulignons que c'est l'art. 14 du Statut du TPIR qui
renvoie à une telle élaboration. L'article se lit comme suit :
« Les juges du Tribunal international pour le Rwanda adopteront, aux fins
de la procédure du Tribunal international pour le Rwanda, le
règlement du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie
régissant la mise en accusation, les procès en première
instance et les recours, la recevabilité des preuves, la protection
des
36 B. La portée de l'article 5 du
Règlement
L'article 5 du Règlement prévoit que :
« Toute exception d'une partie à l'égard
d'un acte d'une autre partie, fondée sur une violation du
Règlement ou des règlements internes, doit être
soulevée dès que possible; la Chambre de première instance
accorde réparation si la preuve de la violation présumée
est rapportée et si celle-ci a effectivement fait subir un
préjudice substantiel à cette partie. ».
Mais la Chambre a relevé que la version
française diffère de la version anglaise162 en ce
qu'elle semble limiter la portée de la disposition aux atteintes au
Règlement et règlements internes imputables à une partie
au procès163. Toutefois, la question a été
résolue par l'article 7 du Règlement selon lequel le texte qui
reflète le plus fidèlement l'esprit du Statut et du
Règlement prévaut. A cet égard, la Chambre de
première instance III a considéré que l'esprit du
Règlement est d'offrir une protection contre toute violation du
Règlement et d'autres règlements internes sans toutefois se
limiter aux violations commises par les parties au procès164.
Ainsi, la violation peut être également imputable à une
autre personne ou autorité qui n'était pas partie au
procès165.
Il faut souligner que même si cette disposition ne
prévoit pas les cas de violation dans lesquels elle serait applicable ou
limitée, elle poursuit quand méme en précisant qu'une
réparation utile pourra cependant être ordonnée lorsqu'il
sera établi que la partie requérante a subi un préjudice
substantiel ici interprété par une autre Chambre de
première instance comme étant un préjudice grave et
irréparable166. Bien que cette disposition ne fasse aucune
référence à une réparation du préjudice de
la personne acquittée, rien n'empêche qu'un ancien accusé
acquitté puisse se prévaloir de son application.
victimes et des témoins et d'autres questions
appropriées, en y apportant les modifications qu'ils jugeront
nécessaires. ».
162 La version anglaise de l'art. 5 du Règlement est
ainsi libellé : « Where an objection on the ground of noncompliance
with the Rules or Regulations is raised by a party at the earliest opportunity,
the Trial Chamber shall grant relief, if it finds that the alleged
non-compliance is proved and that it has caused material prejudice to that
party. ».
163 Le Procureur c. André RWAMAKUBA, supra note
140, par. 36.
164 Ibid.
165 Voy. le cas du Greffier qui a été
condamné pour violation du droit de l'accusé à un conseil
de défense lui reconnu par le Règlement alors qu'il
n'était pas partie au procès bien que sa condamnation ne tombe
pas sous le coup de l'article 5 au seul motif de l'absence de
l'élément du préjudice matériel (Id.,
pars. 38-39, 79).
166 The Prosecutor v. Andre RWAMAKUBA, Case
no ICTR-98-44C-1, Trial chamber II, Decision on the Defense motion
concerning the illegal arrest and detention of the accused, 12 dec. 2000, par.
43.
§. 2. Une pratique qui semble donner une place
restreinte à la
réparation pour l'acquitté
Malgré le silence des textes au sujet de la
réparation du préjudice de l'acquitté, la pratique du TPIR
n'a pas toutefois cessé de confronter les questions relatives à
la réparation du préjudice des personnes poursuivies. Ainsi, des
réparations traitées étaient essentiellement
fondées sur des violations des droits de l'accusé avant ou en
cours de procès, en application d'une part de l'article 5 du
Règlement (A) et d'autre part, d'autres instruments de
droit de l'homme (B).
A. La réparation fondée sur l'article 5
du Rqglement
Sur la base de l'article 5 du Règlement dont la
porté a été déjà précisée, les
personnes poursuivies ont soulevé à plusieurs reprises les
violations du Statut, du Règlement et d'autres règlements
internes pour en réclamer la réparation. Il s'agissait notamment
de la violation du droit à être informé sans délai
des accusations formulées par le Procureur et dont la protection est
prévue par l'article 20. 4. a) du Statut167. Une telle
violation a été retenue dans trois affaires, notamment dans les
affaires de BARAYAGWIZA168, de SEMANZA169 et de
KAJELIJELI170. Aussi, au sens de la décision de la Chambre en
l'espèce, la violation du droit à un conseil de défense
prévu par l'article 44 bis du Règlement171
aurait pu constituer sans difficulté la base de l'indemnisation de
RWAMAKUBA si la condition du préjudice substantiel exigée par
l'article 5 du Règlement était remplie172.
Dans tous les cas, deux observations ne manquent pas d'attirer
l'attention au sujet de la réparation pour la personne acquittée.
L'interprétation de la jurisprudence ne pose aucun
167 Cfr. art. 20. 4 du Statut : « Toute personne contre
laquelle une accusation est portée en vertu du présent statut a
droit, en pleine égalité, au moins aux garanties suivantes : a)
À être informée, dans le plus court délai, dans une
langue qu'elle comprend et de façon détaillée, de la
nature et des motifs de l'accusation portée contre elle; ».
168 J. B. BARAYAGWIZA c. Le Procureur, Affaire
no ICTR-97-19-AR72, Chambre d'appel, Arrêt sur la demande en
révision, 31 mars 2000, par. 54-55.
169 L. SEMANZA c. Le Procureur, Affaire no
ICTR-97-20-A, Chambre d'appel, Arrêt sur l'appel de la décision
sur la requête en annulation de la procédure d'arrestation et de
détention illégales, 31 mai 2000, par. 127.
170 J. KAJELIJELI v. The Prosecutor, Case no
ICTR-98-44A-A, Appeal Chamber, Judgment on the appeal against the Judgment and
sentence in first instance, 23 may 2005, par. 251.
171 Le Procureur c. André RWAMAKUBA, supra
note 140, par. 38 Ó« Il est établi que le Greffier ne s'est
pas acquitté de l'obligation qui lui est faite à l'article 44
bis du Règlement de désigner un conseil de permanence
pour André RWAMAKUBA en attendant la désignation de son conseil
et que de ce fait, RWAMAKUBA n'a pas bénéficié de
l'assistance d'un défenseur pendant une période prolongée,
bien qu'accusé, ce qui a porte atteinte à ses droits fondamentaux
prévus à l'article 20. 4 c) du Statut. ».
172 Id., par. 39.
obstacle à ce qu'un ancien accusé
acquitté réclame une réparation découlant de la
violation de ses droits survenue avant ou en cours du
procès173. Cette jurisprudence fait dépendre la
détermination de la forme de réparation à une
décision définitive sur le fond et peut prendre la forme
d'indemnisation174. Cependant, comme dans tous ces cas, les
accusés ont été jugés coupables, aucune
indemnisation n'a été ordonnée à ce
jour175. Par contre dans l'affaire RWAMAKUBA où un
acquittement est également intervenu, l'indemnisation accordée se
fondait sur d'autres instruments internationaux et non pas sur les textes du
TPIR.
B. La reparation fondée sur d'autres instruments
des droits de l'homm
Dans les affaires précédemment citées, le
TPIR a traité également de cas de violation des droits de
l'homme, non pas sur la base des textes du Tribunal mais plutôt par
référence à d'autres instruments internationaux ou
régionaux. Ainsi, dans une affaire récente (RWAMAKUBA), vu que
l'article 5 du Règlement ne pouvait pas s'appliquer176, le
173 Comme il est le cas d'André RWAMAKUBA à qui la
Chambre de première instance a accordé après son
acquittement, l'indemnisation pour violation de son droit à un conseil
défense survenue au début du procès.
174 J. B. BARAYAGWIZA c. Le Procureur, supra
note 168, par. 75 : « Par ces motifs, LA CHAMBRE D'APPEL révise son
Arrêt du 3 novembre 1999 et remplace son dispositif par le suivant :
1. FAIT DROIT à l'Appel pour ce qui est de la violation
des droits de l'Appelant dans la mesure ci-dessus précisée;
2. REJETTE la demande de mis en liberté de l'Appelant;
3. DECIDE que pour la violation de ses droits l'Appelant a un
droit à réparation qui sera fixé au moment du jugement en
première instance, de la manière suivante :
a. Si l'Appelant est jugé non-coupable, une
réparation financière lui sera due ;
b. Si l'Appelant est jugé coupable, sa sentence sera
réduite pour tenir compte de la violation de
ses droits.» ; Voy. également Le Procureur c.
SEMANZA, supra note 169, par.129 : « (...) DECIDE que pour
la violation de ses droits, l'Appelant a droit à une réparation
qui sera donnée au moment du jugement de première instance de la
manière suivante :
a) S'il est trouvé non-coupable, l'Appelant a droit
à une réparation financière ;
b) S'il est trouvé coupable, la sentence de l'Appelant
sera réduite pour tenir compte de la violation de ses droits en
application de l'article 23 du Statut. ».
175 Dans l'affaire de BARAYAGWIZA, la Chambre a
décidé une réparation de la réduction de la peine
d'emprisonnement à perpétuité en une peine
d'emprisonnement de 35 ans (Cfr. The Prosectorat v. J. B. BARAYAGWIZA,
Case no ICTR-98-19-AR72, Trial chamber I, Judgment and sentence, 3
dec. 2003, par. 1107); Quant à SEMANZA, sa peine de 35 a
été réduite de six mois pour réparation de ses
droits violés (Cfr. L. SEMANZA v. The Prosecutor, Case
no ICTR-97-10-A, Appeal chamber, Judgment, 20 may 2005, par. 399);
Pour KAJELIJELI, la sanction de deux peines d'emprisonnement à
perpétuité et d'emprisonnement de 15 ans ordonnées par la
Chambre de première instance ont été réduites par
la Chambre d'appel en une seule peine d'emprisonnement de 45 ans pour tenir
compte de la réparation lui accordée (Cfr. J. KAJELIJELI c.
The Prosecutor, supra note 170, par. 325).
176 Le Procureur c. André RWAMAKUBA, supra
note 140, par. 39 : « Ayant jugé que l'article 5 ne
s'appliquait pas aux faits de la cause, faute de preuves d'établissement
qu'André RWAMAKUBA a subi un préjudice matériel, la
Chambre doit maintenant déterminer si la violation du droit à
l'assistance d'un défenseur peut être réparé sur la
base de tout autre droit. ». Voy. également André
RWAMAKUBA c. The Prosecutor, Case no ICTR-98-44C-A, Appeal chamber,
Decision on Appeal against Decision on appropriate remedy, 13 sept. 2007, par.
25.
Tribunal s'est appuyé sur d'autres normes relevant du
droit international coutumier qui ne font aucun doute sur les droits en
cause177.
De même, s'appuyant sur les mêmes instruments
internationaux relatifs aux droits de l'homme, les chambres du Tribunal ont
reconnu à plusieurs occasions le droit des accusés à un
recours utile dans d'autres cas. Dans l'affaire KAJELIJELI, la Chambre d'appel
a invoqué diverses sources du droit applicable par le Tribunal notamment
le droit international tel que consacré dans le P.I.D.C.P. et a
rappelé les traités régionaux relatifs aux droits de
l'homme qui sont révélateurs de la coutume internationale et qui
donnent des indications utiles sur les violations des droits à
être informé des accusations et à une assistance et la
détention arbitraire178.
La Chambre d'appel a aussi affirmé qu'en vertu des
textes internationaux le droit d'être informé des accusations,
d'être mis en accusation et de comparaître sans délai
après son transfert au tribunal dans l'affaire BARAYAGWIZA179
et le droit de contester la légalité de la détention dans
l'affaire SEMANZA ont été violés, et par conséquent
a ordonné des réparations appropriées180.
Dans tous les cas, comme le droit à une
réparation n'est prévu nulle part dans les textes du Tribunal,
les chambres devraient déterminer en particulier la source de ce pouvoir
d'ordonner la réparation. A ce propos, la jurisprudence du TPIR
s'inspirant d'autres jurisprudences, explique d'abord que ce pouvoir d'accorder
une juste réparation découle de l'effet combiné des
pouvoirs propres du Tribunal en tant qu'organe judiciaire181 et de
l'obligation qu'il a en tant qu'organe subsidiaire des Nations unies et sujet
du droit international, de respecter les normes internationales
généralement admises en matière de droits de
l'homme182.
177 Le Procureur c. André RWAMAKUBA, supra
note 140, par. 40. Dans ce paragraphe, la Chambre s'est notamment
référée aux dispositions de la D.U.D.H., du P.I.D.C.P., de
la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination
raciale, de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements
cruels, etc.
178 J. KAJELIJELI v. The Prosecutor, supra note 170,
pars. 251, 255 et 322.
179 j B. BARAYAGWIZA c. Le Procureur, supra note 168,
pars. 74-75.
180 Le Procureur c. SEMANZA, supra note 169,
pars. 78, 87, 112-113, 125-128.
181 La Chambre de première instance dans l'affaire
RWAMAKUBA évoque la doctrine des pouvoirs propres sous l'inspiration des
décisions de la Cour internationale de justice et du TPIY.
D'après cette doctrine des pouvoirs propres, toute juridiction est
implicitement investie de l'ensemble des pouvoirs nécessaires à
l'accomplissement de sa mission. Cfr. Le Procureur c. André
RWAMAKUBA, supra note 140, par. 46.
182 Cfr. Le Procureur c. André RWAMAKUBA,
supra note 140, par. 48. Sous l'inspiration des avis
consultatifs de la Cour internationale de justice qui affirment que les
Nations unies en tant que sujet de droit international sont tenues de
respecter et de faire respecter les normes généralement admises
en matière de droit de l'homme,
La même jurisprudence poursuit en soutenant que ce
pouvoir dérive également des dispositions de l'article 19 1) du
Statut du TPIR qui oblige le Tribunal d'assurer toutes les garanties
nécessaires d'un procès équitable et le respect des droits
de l'accusé. L'existence des garanties d'un procès
équitable suppose nécessairement leur mise en oeuvre qui doit
envisager la possibilité d'obtenir une juste réparation en cas de
violations desdits droits183.
La question de l'évaluation d'une juste
réparation est abordée différemment, au cas par cas, en
tenant compte des circonstances de l'espèce184 et de la
nature du droit qui aurait été violé185. La
détermination de la forme de réparation à ordonner restant
ainsi toujours guidée par le principe de satisfaction du
requérant. C'est ainsi que les chambres n'ont pas accordé les
mêmes réparations dans toutes les affaires. Dans certains cas,
elles ont décidé la réparation par réduction de la
peine pour les condamnés et dans un autre cas l'indemnisation
financière pour l'acquitté186.
Cependant, si la réparation par réduction de
peine est praticable sans difficulté, cela n'a pas été le
cas pour l'indemnisation financière. Il a été soutenu
à maintes reprises par les organes administratifs du TPIR et du TPIY
qu'il n'existe aucune base légale habilitant ces juridictions à
traiter toute question d'indemnisation pour violation des droits de la personne
poursuivie résultant des actes ou faits imputables à ces deux
tribunaux et par voie de conséquence aux Nations unies187,
faute de disposition y relative dans leurs textes fondamentaux.
et tout en invoquant les différentes normes de droit
international qui consacrent l'obligation de l'ONU de respecter les droits de
l'homme et des libertés fondamentales pour tous, la Chambre soutient que
le TPIR, en tant que organe subsidiaire du Conseil de sécurité,
est , par voix de conséquence, également tenu de respecter les
normes généralement admises en matière de droit de
l'homme.
183 Voy. André RWAMAKUBA v. The Prosecutor, supra
note 176, par. 26.
184 Dans l'affaire SEMANZA, la Chambre est d'avis que le
préjudice substantiel visé à l'article 5 du
Règlement doit s'apprécier, comme tout autre préjudice,
à la lumière des circonstances de l'espèce. Cfr. L.
SEMANZA c Le Procureur, supra note 169, par. 123.
185 Dans l'affaire RWAMAKUBA, la Chambre soutient que
la réparation efficace doit s'apprécier au cas par cas, en tenant
compte des faits de la cause et du droit violé. Cfr. Le Procureur c.
André RWAMAKUBA, supra note 140, par. 68.
186 Voir supra notes 173-175.
187 Letter dated 19 September 2000 from the President of the
ICTY addressed to the Secretary-General of the United nations organization
(ci-après Letter dated 19 September 2000 from the President of The
ICTY); Letter dated 26 September 2000 from the President of the ICTR addressed
to the Secretary-General of the United nations organization (ci-après
Letter dated 26 September 2000 from the President of The ICTR); Letter dated 11
mars 2004 of President of the ICTY to Mr Zejnil DALALIC in response to
Mr DELALIC's request for indemnity dated 3 march 2004; Letter dated 20 oct.
2005 of President of the ICTR, Judge Eric MOSE, to Maitre Francois ROUX, Legal
counsel for Ignace BAGILISHEMA, in response to the "Requête en
indemnité devant les Nations unies", filed on 28 jan. 2005; The
Prosecutor v. André RWAMAKUBA, Case no 98-44C-T, Trial
chamber III, Registrar's submission regarding André Rwamakuba's
request for an appropriate remedy, 2 nov. 2006, pars, 22-24; The Prosecutor
v. André RWAMAKUBA, Case no 98-44C-T, Trial chamber III,
Registrar's additional submission in regard to the Defense application for
remedy, 24 nov. 2006, pars. 4-6 ;
Toutefois, cette position a été
réfutée par les Chambres du TPIR qui estiment que les tribunaux
concernés sont habilités à accorder l'indemnisation en
vertu de leurs pouvoirs propres, pour donner effet au droit à une juste
réparation188. Selon la même jurisprudence, les
questions relatives aux mécanismes d'exécution d'une ordonnance
portant indemnisation, comme les questions budgétaires ou la
détermination de l'organe habilité à recevoir les demandes
d'indemnisation, relèvent de considérations extrajudiciaires qui
ne sauraient empêcher l'octroi d'une indemnisation par les tribunaux en
tant qu'organes judiciaires, quand elle apparaît comme la seule juste
réparation d'une violation des droit de l'homme189.
A l'instar de l'article 5 du Règlement, bien que la
réparation pour violations des droits survenues en cours du
procès se fonde sur d'autres instruments des droits de l'homme et semble
ne pas directement concerner l'acquitté, elle n'est pas non plus sans
intérêt. Elle peut lui bénéficier en tant qu'ancien
accusé acquitté qui peut s'en prévaloir même
après le jugement d'acquittement ; ce qui est le cas de l'indemnisation
accordée à RWAMAKUBA190. Il reste à voir si
l'indemnisation sera mise en oeuvre.
En définitive, la jurisprudence des réparations
pour l'acquitté établie par le TPIR est critiquée
d'être loin de couvrir tous les torts de la personne acquittée car
elle n'a jamais permis la réparation fondée uniquement sur le
simple acquittement en raison du préjudice subi résultant de la
détention. La jurisprudence souligne qu'il existe, ni dans les textes du
TPIR ni dans d'autres instruments de droit international applicable par le
Tribunal, aucune base qui permet de telles réparations191. La
situation est évidemment fort décourageante pour les
acquittés et on ne peut qu'espérer l'émergence d'un
véritable régime d'indemnisation en leur faveur.
The Prosecutor v. André RWAMAKUBA, Case
no 98-44C-T, Trial chamber III, Registrar's additional submission in
regard to the Defense application for remedy, 7 dec. 2006, pars. 4-11.
188 Le Procureur c. André RWAMAKUBA,
supra note 140, par. 59; André RWAMAKUBA c. The Prosecutor,
supra note 176, par. 26.
189 Id., par. 60; par. 30.
190 Id., par. 39; par. 31.
191 Id., pars.21-31; pars. 10-15.
Section 2. La nécessité et les promesses
d'un véritable régime de
réparation pour l'acquitté devant les
juridictions répressives internationales
Au vu des difficultés ci dessus exposées,
liées tantôt à l'absence de normes, tantôt à
l'interprétation équivoque de celles existantes, il s'ensuit
qu'un véritable régime de réparation appropriée
pour la personne acquittée devant les juridictions internationales
mérite d'être mis en place aussitôt que possible
(§.1). Les horizons d'espoir commencent certainement
à s'éclaircir (§.2).
§.1. La nécessité d'un véritable
régime de réparation pour l'acquitté
La nécessité d'un véritable régime de
réparation pour l'acquitté fait suite à des
précédents factuels (A) et découle d'une
certaine obligation juridique (B).
A. Les fondements factuels de réparation pour
l'acquitté
Les faits témoignent que l'appareil judiciaire peut
causer des torts à la personne acquittée dans deux situations
où une réparation appropriée pourrait être
sollicitée: réparation pour violation des droits de
l'accusé au cours de la procédure (1) et
réparation sur la base de la détention (2).
1. La réparation pour violations des droits de
l'accusé
Les cas de jurisprudence du TPIR ci dessus exposés ont
pu illustrer certains cas de violations de droits que peuvent commettre les
différents acteurs192 contre la personne
poursuivie193et que peut également invoquer
l'acquitté. Les cas les plus fréquents dans la pratique restent
l'arrestation et la détention illégales pour défaut de
respect des procédures
192 Rappelons que la Chambre a admis que même
les parties en dehors du procès peuvent violer les droits de
l'accusé. Voir supra note 165.
193 Rappelons les cas d'arrestation et
détention illégales, de violations du droit d'assistance et
à être informé des accusations dans l'affaire de
KAJELIJELI, de violations du droits à être informé
des accusations, de contester la légalité de la détention
dans la cas de SEMANZA, de violations des droits d'être informé
des accusations, d'être mis en accusation et de comparaître sans
délais dans BARAYAGWIZA et de violation du droit à un conseil de
défense dans RWAMAKUBA.
établies. Soulignons tout simplement que pour qu'un droit
soit considéré comme violé, il faut qu'il soit
juridiquement protégé194 par les normes auxquelles le
TPIR est soumis.
2. La réparation fondée uniquement sur la
détention
Les personnes poursuivies peuvent être victimes de la
privation de liberté en raison de poursuites non suivies de
condamnation195 ou de condamnation à tort196 et
subir de ce fait un préjudice moral notamment l'état de stress,
d'isolement et de détresse que peut entraîner la mesure de
détention provisoire subie ou l'exécution de la peine
déjà purgée, ou matériel à savoir les
diverses pertes économiques provoquées par la
détention.
A titre d'exemple, le TPIR a connu deux cas de poursuites qui
ont été abandonnées sans condamnation suite à un
retrait de l'acte d'accusation du Procureur, dans les affaires de Bernard
NTUYAHAGA197 et Léonidas RUSATIRA198, un
cas d'arrestation arbitraire suite à une erreur
d'identité199 et cinq cas qui ont abouti à un
acquittement. Tous les accusés concernés ont fait l'objet de
détention et auraient pu réclamer la réparation.
B. Le droit et l'obligation juridique de
réparation pour l'acquitté
Le droit et l'obligation juridique de réparation pour
la personne acquittée relèvent des principes
généralement admis en droit international (1).
Les juridictions répressives internationales devraient également
s'inspirer des droits nationaux (2).
1. La reconnaissance du droit à réparation
pour l'acquitté en droit international
Le droit à réparation pour l'acquitté n'est
pas une nouvelle construction. Il est déjà ancré dans le
droit à réparation reconnu à toute personne victime d'un
dommage. La
194 C'est-à-dire il faut que le droit soit
reconnu comme tel par un texte qui lie le Tribunal. Il s'agit d'un principe
général de droit.
195 Notamment en cas de classement sans suite, de
retrait d'accusation, de non-lieu, d'acquittement ou en de tout autre
aboutissement sans condamnation.
196 Une condamnation serait à tort lorsque
l'accusé a été condamné et que par la suite, on
découvre une erreur judiciaire qui entraîne l'annulation de la
condamnation, tel en cas de découverte d'un nouvel fait.
197 The Prosecutor v. Bernard NTUYAHAGA, Case
no ICTR-98-40-T, Trial chamber I, Decision on the Prosecutor's
motion to withdraw the indictment, 18 march 1999.
198 The Prosecutor v. Léonidas
RUSATIRA, Case no ICTR-2002-80-I, Trial chamber, Decisions on
the Prosecutor's ex parte application for leave to withdraw the indictment, 14
august 2002.
199 Letter dated 26 September 2000 from the President
of The ICTR.
réparation du tort est un principe fondamental qui
constitue à la fois un principe général de droit et une
règle de droit coutumier applicable dans tous les systèmes
juridiques200.
Ainsi, si on considère la première situation
où les droits de l'acquitté seraient violés, il ne devrait
en principe y avoir aucun obstacle juridique à la demande de
réparation. Il ne fait aucun doute que le droit à une juste
réparation en raison de la violation des droits de l'homme, fait partie
du droit international coutumier et qu'il est consacré dans plusieurs
textes internationaux et régionaux à savoir la
D.U.D.H.201, le P.I.D.C.P.202, la Convention sur
l'élimination de toutes les formes de discrimination
raciale203, la Convention contre la torture et autres peines ou
traitements cruels, inhumains ou dégradants204, la Convention
concernant les peuples indigènes et tribaux dans les pays
indépendants205, la Déclaration des principes
fondamentaux de justice relatifs aux victimes de la criminalité et aux
victimes d'abus de pouvoir206, la C.E.D.H.207, la
Déclaration américaine des droits de l'homme208 et la
C.A.D.H.209, la C.A.D.H.P.210 et les
P.F.D.D.R.R.211.
De surcroît, l'article 2. 3 du P.I.D.C.P. ainsi que les
paragraphes 1-3 des P.F.D.D.R.R. sont allés plus loin jusqu'à
imposer aux Etats une obligation d'adopter les mécanismes judiciaires
nécessaires de mise en oeuvre de telles
réparations212. La
200 C. BASSIOUNI, « International recognition of victims'
rights », in Human Rights Law Review, Vol. 6, no 2,
Oxford, Oxford University Press, 2006, pp. 203-279, p. 207. Voy. aussi A. BUTI
and M. P. BUS, « International law obligations to provide reparations for
human rights abuses », in Murdoch University Electronic Journal of
Law, Vol. 6, no 4, dec. 1999, pp. 1-28, p. 2.
201 Cfr. art. 8 de la D.U.D.H.
202 Cfr. art. 2. 3. du P.I.D.C.P.
203 Cfr. art. 6 de la Convention sur l'élimination de
toutes les formes de discriminations raciale adoptée par la
résolution 2106 A (XX) de l'Assemblée générale des
Nations unies en sa session du 21 décembre 1965 du 21 déc. 1965
et entrée en vigueur le 4 janv. 1969.
204 Cfr. art. 14 de la Convention contre la torture et autres
peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants adoptée par
la Résolution no 39/46 de l'Assemblée
générale des Nations unies en trente neuvième session du
10 décembre 1984 et entrée en vigueur le 26 juin 1987.
205 Arts. 15. 2, 16. 4 et 16. 5 de la Convention no
169 concernant les peuples indigènes et tribaux dans les pays
indépendants adoptée par la Conférence
générale de l'Organisation internationale du travail à sa
soixanteseizième session du 27 juin 1989 et entrée en vigueur le
5 septembre 1991.
206 Cfr. par. 4 de la Déclaration des principes
fondamentaux de justice relatifs aux victimes de la criminalité et aux
victimes d'abus de pouvoir adoptée par l'Assemblée
générale des Nations unies dans sa résolution
no 40/34 du 29 novembre 1985.
207 Arts. 13 et 41 de la C.E.D.H.
208 Art. XVIII de la Déclaration américaine des
droits et devoirs de l'homme adoptée par la Résolution XXX de
l'Organisation des Etats américains à la neuvième
Conférence internationale des États américains du 2 mai
1948.
209 Arts. 1. 1, 8, 10, 25 et 63. 1 de la C.A.D.H.
210 Art. 7. 1. a. de la C.A.D.H.P.
211 Cfr. pars 11-12 des P.F.D.D.R.R. adoptés par la
Résolution 1999/33 de la Commission des droits de l'homme du 26 avril
1999.
212 A titre d'exemple, cfr. art. 2. 3 du P.I.D.C.P. qui se lit
comme suit : « Les Etats parties au présent Pacte s'engagent
à: a) Garantir que toute personne dont les droits et libertés
reconnus dans le présent Pacte auront été violés
disposera d'un recours utile, alors même que la violation aurait
été commise par des personnes agissant
jurisprudence abondante et variée est indicative d'une
pratique affirmée de ne pas laisser lettre morte ces dispositions
indispensables pour la protection de la personne213.
En notant le principe invoqué par la Chambre du
TPIR214 selon lequel les Etats ne peuvent pas se soustraire à
leurs obligations internationales en créant une institution
internationale qui ne serait pas liée par les limites juridiques qui
s'imposent à eux, les Etats étant ainsi tenus de respecter leurs
obligations en matière de droits de l'homme lorsqu'ils exercent les
poursuites internes, ne sauraient créer un Tribunal pénal
international qui échapperait à ces mêmes obligations.
Dans la deuxième situation d'autre part, il faut
cependant rappeler qu'aucun instrument de droit international ne prévoit
l'indemnisation d'une personne acquittée au seul motif
d'acquittement215. Mais du même avis que les Présidents
du TPIR216 et du TPIY217 et de la Chambre du
TPIR218, à cause des circonstances particulières dans
lesquelles les deux tribunaux fonctionnent, y compris le fait que
l'accusé est retenu pendant une longue période au cours du
procès et que la détention entraîne plusieurs pertes
à l'accusé, il serait équitable d'accorder une telle
réparation aux personnes accusées qui sont acquittées ou
contre qui les procès sont terminés sans condamnation.
2. La reconnaissance du droit à réparation
de l'acquitté en droit interne
Le principe de réparation de la personne détenue
et par la suite acquittée est reconnu dans de nombreuses
législations nationales tant du système romano-germanique comme
en France219, en Espagne220, en Italie221 et
en Allemagne222 que du système de la common law tels
que le droit américain223, les droits britannique et
australien224.
dans l'exercice de leurs fonctions officielles; b) Garantir
que l'autorité compétente, judiciaire, administrative ou
législative, ou toute autre autorité compétente selon la
législation de l'Etat, statuera sur les droits de la personne qui forme
le recours et développer les possibilités de recours
juridictionnel; c) Garantir la bonne suite donnée par les
autorités compétentes à tout recours qui aura
été reconnu justifié. ».
213 Voy. à titre d'exemple SILVER c.
Royaume-Uni, Arrêt no 5947/72, CEDH 1983 ; HASSAN et
CHAUSH c. Bulgarie, Arrêt no 30985/96, CEDH 2000;
TWALIB c. Grèce, Arrêt no 24294, CEDH 1998;
Raquel MARTI DE MEJIA v. Peru, Arrêt no 10.970, CIADH
1996 ; CARRANZA v. Argentine, Arrêt no 10.8087, CIADH
1998.
214 Sous l'inspiration des observations de l'association du
droit international qui souligne les obligations conventionnelles des membres
du Conseil de Sécurité et de la jurisprudence de la Cour
européenne des droits de l'homme. Voy. Le Procureur c. André
RWAMAKUBA, supra note 140, par. 48.
215 Voir supra note 191.
216 Letter dated 19 September 2000 from the President of the
ICTY.
217 Letter dated 26 September 2000 from the President of the
ICTR.
218 Le Procureur c. André RWAMAKUBA, supra note
140, par. 30.
219 Cfr. art. 149, 371, 472, 516 et 800-2 du C.P.P. Fr. qui
reconnaissent l'indemnisation automatique dès lors qu'une
détention est suivie d'une décision de non-lieu, de relaxe ou
d'acquittement. Voy. aussi la jurisprudence (Cass. crim., 21 nov. 1991,
Bulletin criminel, no 243; Cass. crim., 26 février
1969, Bulletin
Selon les Etats considérés, il apparaît
qu'il existe un principe général de réparation pour
acquittement que les Etats appliquent selon leurs choix. Ce principe est
tantôt appliqué de façon inconditionnelle, l'acquittement
étant la seule condition pour l'obtention de l'indemnisation,
tantôt de manière restrictive, exigeant l'existence d'une erreur
ou d'un comportement fautif pour la mise en oeuvre de la
réparation225. Les juridictions répressives
internationales devraient également, dans l'intérêt d'une
bonne justice, s'inspirer de ces droits nationaux.
§.2. Les promesses d'un véritable régime
de réparation pour l'acquitté
Un véritable régime de réparation pour
l'acquitté semble se dessiner avec l'avènement de la C.P.I.
(A). Il importe ainsi d'analyser le mécanisme de mise
en oeuvre de ce droit envisagé (B).
A. La consécration du principe de
réparation pour l'acquitté par le Statut de la C.P.I.
L'article 85 du Statut de la C.P.I. consacre des principes de
base qui seront appliqués pour la réparation du préjudice
de la personne acquittée. Lorsqu'une personne a fait l'objet d'une
arrestation et/ou d'une détention illégales, en violation des
règles de la C.P.I. ou des
criminel, no 97 ; Cass. crim., 3
février 1976, Bulletin criminel, no 42) et la
doctrine françaises (P. LE TOURNEAU, Droit de la
responsabilité et des contrats, Paris, Dalloz, 2004, p. 182, par.
646) qui précisent, en plus, que l'indemnité accordée
à la personne acquittée peut être à la charge soit
de l'Etat soit de la partie civile si l'action publique a été
mise en mouvement par cette dernière.
220 Cfr. art. 294 de la Loi no 6/1985 du
1er juillet 1985 qui pose le principe de responsabilité de la
justice en cas de détention provisoire abusive, la réparation se
déduisant directement de cette responsabilité.
221 Cfr. art. 314-315 du Code de procédure
pénale qui consacrent un droit à la réparation pour
détention injuste en faveur de l'inculpé qui, après avoir
subi une période de privation de liberté, a été
acquitté parce que le fait qui lui était reproché n'existe
pas ou pour ne pas avoir commis le fait reproché.
222 Cfr. §. 7 de la Loi du 8 mars 1971 qui admet, en cas
d'acquittement, de classement de l'affaire ou de refus du tribunal d'ouvrir la
phase de jugement, la réparation de dommage matériel et le
versement d'une indemnité forfaitaire pour le préjudice moral.
223 Cfr. § 1346 (h) de l'USA Federal Torts Claim
Act (FTCA) en sa section sur base de laquelle une personne
innocentée peut exercer un recours contre l'Etat en cas de «
assault, battery, false imprisonment, false arrest, abuse of process or
malicious prosecution. ».
224 En droits britannique et australien, il n'existe pas de
système d'indemnisation automatique pour détention après
acquittement sauf la possibilité, en Australie, d'être
remboursé de ses frais légaux au titre du "Official
Prosecution (Defendants costs) Act 1973 et Suitors' Fund Act 1964 as
amended to date", mais en vertu du mécanisme de réparation
ex gratia (as of favor), une indemnisation peut être
néanmoins accordée pour détention en cas de faute lourde
du système répressif, d'acquittement, d'injustice grave et
manifeste ou de condamnation annulée pour une erreur judiciaire. Cfr.
The Western australia law reform commission, Working paper on compensation for
persons detained in custody, Project no 43, nov. 1976, [en
ligne sur]
http://www.austlii.edu.au/au/other/walrc/43/P43-WP.html,
consulté le 26 août 2007. Voy. aussi Le Procureur c.
André RWAMAKUBA, supra note 117, pp. 31-32.
225 Le Procureur c. André RWAMAKUBA,
supra note 117, p. 28.
règles de droits de l'homme internationalement
reconnues, elle pourra obtenir de la Cour la réparation
appropriée (art. 85. 1).
L'article 85. 2 du Statut reconnaît aussi que quand il y
a eu annulation d'une condamnation pénale en raison du fait qu'il y a eu
une erreur judiciaire, la personne concernée devrait avoir le droit
à l'indemnisation. De même, dans des situations autres que
l'arrestation et/ou la détention illégales ou l'erreur
judiciaire, l'article 85. 3 admet également qu'une personne pourrait
obtenir réparation, particulièrement au seul motif
d'acquittement.
Helen BRADY et Mark JENNINGS font observer dans leurs
commentaires sur le Statut de la C.P.I. que cette dernière disposition a
fait l'objet de longues discussions lors des travaux préparatoires de
l'assemblée des Etats parties. Certaines délégations
étaient contre la disposition, pensant qu'elle génerait
énormément la discrétion du Procureur de poursuivre, de
crainte que certaines poursuites pourraient aboutir à l'acquittement et
fonder par conséquent des représailles sous forme de demande de
réparation par l'accusé acquitté. Ces
délégations voulaient limiter aux seules poursuites malicieuses
les situations dans lesquelles une personne acquittée pourrait porter
une revendication en indemnisation. Cependant, d'autres
délégations, dont le système prévoit
déjà l'indemnisation en cas d'acquittement, voulaient maintenir
la disposition226.
B. La mise en oeuvre du droit à
réparation pour l'acquitté devant la C.P.I.
Les P.F.D.D.R.R. distinguent le droit à
réparation du préjudice subi comme un droit substantiel et le
droit à un recours comme un droit procédural. Le droit à
la réparation du préjudice subi signifie le droit qui rendra la
justice en enlevant ou réparant les conséquences des violations
des droits subies tandis que le droit à un recours désigne le
droit d'avoir accès aux procédures nationales et/ou
internationales pour la protection de droits de l'homme227.
Dans le premier cas, les deux premiers sous paragraphes de
l'article 85 reflètent, à notre avis, la loi actuelle des
traités codifiée notamment dans le P.I.D.C.P.228, mais
le
226 H. BRADY and M. JENNINGS, « Appeal and Revision
», in R. S. LEE, The international Criminal Court, The making
of the Rome Statute, Issues, negotiations and results, The Hague, Kluwer
Law International, 1999, 294, p. 303.
227 Cfr. P.F.D.D.R.R., supra note 211, 11. a) et b).
228 A titre de rappel, voy. notamment arts. 9. 5 Ó
« Tout individu victime d'arrestation ou de détention
illégale a droit à réparation. » et 14. 6 du
P.I.D.C.P. : « Lorsqu'une condamnation pénale définitive est
ultérieurement annulée ou lorsque la grâce est
accordée parce qu'un fait nouveau ou nouvellement
révélé prouve qu'il s'est produit une erreur judiciaire,
la personne qui a subi une peine en raison de cette condamnation sera
dernier sous paragraphe de l'article excède le droit
international conventionnel et coutumier actuel; ce qui indique l'avancement du
droit international dans le Statut de la C.P.I. mais avec le risque de ne pas
lier d'autres juridictions internationales, sauf si la disposition est
adoptée ultérieurement par une norme à caractère
général.
Néanmoins, la formulation des dispositions du dernier
paragraphe en ces termes : « Dans des circonstances exceptionnelles, si la
Cour constate, au vu de faits probants, qu'une erreur judiciaire manifeste et
grave (...) » s'avère avoir été utilisée pour
mettre en évidence que ce sera seulement dans des circonstances
exceptionnelles que la Cour pourra accorder la compensation à une
personne libérée, après une décision
d'acquittement, spécialement en limitant la portée de l'article
au comportement fautif inexcusable de la part du Procureur et
éventuellement des juges qui ont pris part à la procédure
préalable au procès.
Quant au droit de recours, contrairement au TPIY et au TPIR,
le Statut de la C.P.I. est clair à ce sujet. La C.P.I. est
habilitée à recevoir la requête qui lui est adressée
par la personne acquittée et à statuer dessus. Elle
détient également le pouvoir élargi d'apprécier
l'étendue de la réparation à accorder229.
Néanmoins, à la lecture de l'article 85, le Statut de la C.P.I.
semble limiter la réparation pour l'acquitté à
l'indemnisation. Mais la réparation intégrale devrait être
proportionnelle à la gravité des violations et des dommages en
résultant. Elle inclura, sans s'y limiter, la restitution (la
restauration de la liberté), l'indemnisation pour les dommages
pécuniaires (les dommages et intéréts, des occasions
perdues, les dépenses pour l'assistance légale ou les soins
médicaux) et moraux (atteinte à la réputation), la
réhabilitation ou la réadaptation (incluant l'aide, les soins
médicaux ou psychologiques, les services sociaux et légaux,
etc.), la satisfaction telles que les garanties de non répétition
des violations subies, etc230.
indemnisée, conformément à la loi,
à moins qu'il ne soit prouvé que la non révélation
en temps utile du fait inconnu lui est imputable en tout ou partie. ».
229 Cfr. art. 85. 3 du Statut de la C.P.I. : « (...) elle
peut, à sa discrétion, accorder une indemnité conforme aux
critères énoncés dans le Règlement de
procédure et de preuve à une personne qui avait été
placée en détention et a été libérée
à la suite d'un acquittement définitif ou parce qu'il a
été mis fin aux poursuites pour ce motif. ».
230 M. NOWARK, « The right of victims of gross human
rights violations to reparation », in F. COOMANS et al.,
Rendering Justice to the vulnerable, The Hague/London/Boston, Kluwer
Law International., 2000, 203, p. 204.
CONCLUSION GENERALE ET SUGGESTIONS
1. Conclusion générale
Ce travail avait pour but au départ d'analyser les
conséquences juridiques qu'emporte l'acquittement devant le TPIR. En
effet, la théorie générale sur l'acquittement fait relever
qu'il existe de nombreux effets de l'acquittement, mais l'auteur s'est
essentiellement limité à trois effets à savoir le maintien
en détention, la remise en liberté de l'acquitté ainsi que
le droit à réparation pour acquittement, le choix étant
inspiré par les textes et la pratique du Tribunal.
Le maintien en détention est un instrument mis en place
par les textes du Tribunal qui semble couvrir plusieurs fonctions, entre autres
garantir la présence de l'acquitté au cours de la
procédure d'appel, la préservation de la preuve et la
sécurité des témoins et des victimes, avec le risque
néanmoins de porter atteinte aux droits fondamentaux de
l'acquitté, notamment les droits à la liberté et à
la présomption d'innocence que devrait renforcer la décision
d'acquittement.
Pour remédier à ces difficultés tout en
permettant d'assurer les fonctions indispensables ci-dessus
énoncées, la jurisprudence a inventé une alternative
à la détention (le placement de l'acquitté au safe
house), mais qui ne manque pas toujours de souffrir certaines critiques.
Elle a été difficilement accueillie faute de fondement
légal. En outre, on a constaté que la mesure est loin d'atteindre
l'objectif visé, c'est-à-dire de ne pas compromettre la
liberté de la personne acquittée.
En matière de remise en liberté après
acquittement définitif, la pratique du TPIR diffère de celle du
TPIY alors que leurs textes sont similaires. Les textes de ces deux tribunaux
disposent clairement que la remise en liberté est obtenue de plein droit
immédiatement après acquittement, mais la mise en oeuvre au TPIR
connaît certaines difficultés pratiques.
Comme leur séjour en Tanzanie (le lieu du siège
du Tribunal) est limité après la sortie du centre de
détention, les acquittés du TPIR doivent avoir d'autres pays
d'accueil. Toutefois, contrairement au TPIY, les acquittés au TPIR
trouvent mal à regagner leurs pays d'origine, le Rwanda. En plus,
d'autres pays ne sont pas coopératifs pour les recevoir. Dans ce cas, la
protection temporaire par le Tribunal reste la seule solution possible. Mais
comme
nous l'avons évoqué plus haut, elle ne permet
pas les conditions de la liberté totale de l'acquitté.
Enfin, à l'instar des autres tribunaux
répressifs internationaux, notamment de Nuremberg, de Tokyo, du Tribunal
spécial pour la Sierra Léone à celui de l'ex Yougoslavie,
les textes du TPIR ne prévoient pas le droit pour les acquittés
de réclamer la réparation. Pourtant, le développement de
cette étude a montré les fondements factuels et légaux
possibles de ce droit en gestation. Saluons l'avènement de la C.P.I.
qui, en reconnaissant ce droit dans son Statut, va sans doute permettre la
cristallisation rapide de ce droit en devenir pour assurer la réparation
intégrale du préjudice souffert par la personne acquittée.
Ceci contribuera ainsi au progrès du droit international de la
réparation.
2. Suggestions
Des lacunes et imperfections ci-dessus exposées nous
poussent à reformuler les recommandations suivantes adressées aux
différents acteurs et bénéficiaires du système de
justice internationale, dans la perspective d'une bonne gestion des situations
d'après acquittement dans le cadre des présents et futurs
tribunaux pénaux internationaux.
> A l'ONU et à toute la communauté
internationale
Il s'est révélé que le bon fonctionnement
et l'accomplissement de la mission d'un tribunal répressif international
dépendent essentiellement de la coopération de celui-ci avec la
communauté internationale et surtout de sa coopération avec les
Etats. Ainsi, les Nations unies devraient veiller à ce qu'un bon
système de coopération soit mis en place, notamment pour
l'accueil des acquittés ; ce qui serait un moyen de mise en oeuvre de
leur liberté obtenue en vertu de la décision d'acquittement. Les
Etats devraient respecter leur obligation internationale de coopération
avec les tribunaux pénaux internationaux en répondant aux
demandes d'assistance formulées par ces tribunaux.
En attendant tout accueil par un Etat, les Nations unies
devraient accepter leur responsabilité de procurer à
l'acquitté la protection nécessaire et de procéder
à cet effet à l'établissement des conditions
nécessaires, en légalisant cette protection pour
l'élimination de toute équivoque arbitraire possible. Elles
doivent assurer la prise en charge appropriée des acquittés et
collaborer avec le Pays hôte pour permettre dans l'entre temps l'exercice
de la pleine liberté de l'acquitté protégé.
Les textes des tribunaux pénaux internationaux ad
hoc ne permettent pas d'ordonner la réparation du préjudice
souffert par les acquittés par suite de leur détention. Les
Nations unies, en tant qu'institution chargée de mettre en place les
instruments juridiques fondamentaux de référence pour le
fonctionnement de ces tribunaux, devraient adopter des principes
énoncés plus haut pour l'instauration d'un système de
réparation équitable pour cette catégorie de
justiciables.
> Au TPIR
Il est suggéré au TPIR d'user de ses
compétences en procédant aux révisions nécessaires
de son Règlement pour légaliser et adopter d'autres mesures
possibles, alternatives à la détention, susceptibles de concilier
les intérêts de la justice et ceux de l'acquitté,
permettant ainsi sa liberté tout en garantissant sa disponibilité
à répondre à la justice en appel, tels le safe
house, le système de surveillance
électronique231, et d'autres.
Le TPIR devrait continuer à établir un
système bien défini de coopération avec les États
pour l'accueil des acquittés, concrètement en envisageant des
dialogues réguliers y relatifs avec les Etats. Toutefois, sa bonne
collaboration avec le Rwanda et sa participation dans la sensibilisation des
acquittés faciliteraient sans doute leur rapatriement au Rwanda; ce qui
semble être plus simple et la meilleure solution.
Il est également recommandé au TPIR, en tant
qu'acteur bien placé pour connaître les difficultés de la
gestion des situations d'après acquittement de ne pas cesser de faire
pression sur les Nations unies et de proposer des solutions pour l'adoption de
règles permettant l'indemnisation des acquittés.
231 Il s'agit d'un système (utilisé par certains
pays développés tels que les Etats-Unis d'Amérique, le
Canada, l'Angleterre, la France, la Belgique, etc.) consistant à une
assignation de l'accusé à son domicile (évitant ainsi
l'incarcération) et la surveillance n'est assurée que par une
technique électronique qui suit et donne le compte rendu de la situation
de l'accusé. Soulignons que l'accusé a en effet le droit de
sortir de chez lui pour travailler ainsi que pour effectuer diverses
démarches visant sa réinsertion ou l'organisation de son
quotidien. Ils disposent également d'un horaire de liberté par
jour en semaine selon un horaire programmé. Voy. J. BERGERON,
Electronic monitoring of pretrial detainees of the ICTR, London,
England School of Law, Rwanda genocide prosecution projet, 7 may 2002, p. 1.
Cfr. aussi M-S. DEVRESSE, « Innovation pénale et surveillance
électronique : quelques réflexions sur une base empirique »,
in Champ Pénal, [en ligne sur]
http://champpenal.revues.org/document1641.html,
consulté le 26 août 2007.
> Au Gouvernement rwandais
L'Etat rwandais a une responsabilité essentielle dans
la protection de ses citoyens. De ce fait, le Gouvernement rwandais devrait
prendre un rôle actif dans le rapatriement au Rwanda des personnes
acquittées en exhortant ces dernières au retour et en leur
donnant au besoin toutes les garanties de sécurité. Il serait
souhaitable que des arrangements avec le TPIR soient organisés à
cette fin. En tant qu'Etat membre de l'ONU, le Rwanda devrait aussi se faire
porte-parole de ses citoyens pour exiger de l'Organisation l'adoption des
règles permettant la réparation du préjudice des
acquittés.
> Aux personnes acquittées par le
TPIR
Il est particulièrement suggéré aux
personnes acquittées par le TPIR de ne pas toujours s'inquiéter
et d'avoir le courage de retourner au Rwanda. Le Gouvernement rwandais a
déjà indubitablement fait montre de la volonté politique
d'accueillir tout rwandais de retour à son pays, y compris les
autorités du régime d'avant génocide et de sa
capacité de permettre leur réinsertion sociale
nécessaire232. C'est le cas pour la plupart des personnes
poursuivies par le TPIR. En plus, le principe de droit non bis in
idem233 leur offre en principe une protection essentielle
contre les nouvelles poursuites, sauf pour les actes non poursuivis par le
TPIR. A la fin du mandat du TPIR, lorsque les affaires encore pendantes devant
ce Tribunal seront transférées au Rwanda et que les procès
s'y dérouleront, il n'aura plus nécessité de chercher un
pays d'accueil pour l'acquitté car l'accusé serait
déjà familier au Rwanda et la réintégration sera
sans doute facile.
Enfin, ils ne doivent pas cesser de soulever leurs griefs
devant le Tribunal et de soutenir de telles revendications devant toute
instance habilitée à y faire suite, telles les Nations Unies. Ils
doivent plaider leur cause auprès des organismes oeuvrant pour le
respect des droits de l'homme et l'assistance humanitaire.
232 Le Gouvernement rwandais a mis en place les
mécanismes visant à permettre le rapatriement de tous les
rwandais en exil notamment en créant en application de la loi n°
34/2001 du 05/67/2001 sur les réfugiés telle que modifiée
et complétée à nos jours, le Conseil national
spécifiquement chargé du rapatriement des réfugiés
qui oeuvre en collaboration avec les différentes institutions ayant dans
leurs attributions cette tâche, tels les Ministères
concernés, les institutions de sécurité du pays et
certaines organisations internationales dont le HCR pour assurer ce
rapatriement. Le Rwanda a déjà rapatrié, après la
tragédie rwandaise de 1994 qui a provoqué l'exil massif
indésirable de rwandais, quelques 3. 5 millions de
réfugiés rwandais qui ont bénéficié avec
succès de la réinsertion sociale nécessaire (Voy. IDA EN
ACTION, RwandaÓ Redressement, Réhabilitation et espoir, mais
2005, [en ligne sur] http: //
www.banquemondiale.org/ida.,
consulté le 29 sept. 2007.
233 Formule latine qui exprime le principe selon lequel une
personne déjà jugée pour un fait délictueux, ne
peut être poursuivie à nouveau pour le même fait. Ce
principe est consacré par les articles 9 du Statut et 13 du
Règlement du TPIR.
BIBLIOGRAPHIE
I. TEXTES LEGAUX
A. Instruments nationaux rwandais
1. Constitution de la République du Rwanda du 04/06/2003
telle que révisée jusqu'à ce jour,
J.O.R.R., n° spécial du 04 juin
2003, p. 1.
2. Loi no 13/2004 du 17/5/2004 portant code de
procédure pénale telle que modifiée et
complétée jusqu'à ce jour, J.O.R.R.,
no 11 du 15 juin 2004, p. 1.
3. Décret du 30 juillet 1888 instituant le Code civil
Livre IIIè sur des contrats ou des obligations
conventionnelles tel que modifié, in B.O., 1888, p.
109.
B. Instruments nationaux étrangers
1. Charte canadienne des droits et libertés telle que
comprise dans la Loi constitutionnelle canadienne de 1982 entrée en
vigueur le 17 avril 1999.
2. Code de procédure pénale français de
1958 tel qu'entré en vigueur le 2 mars 1959 et modifié
jusqu'à ce jour.
3. Code de procédure pénale italien de 1930 dont
la dernière modification est entrée en vigueur le 24 octobre
1989.
4. Constitution fédérale de la
Confédération suisse du 29 mai 1843 telle que modifiée
dernièrement le 18 avril 1999.
5. Décret du 17 novembre 1808 portant code belge
d'instruction criminelle tel que modifié jusqu'à ce jour.
6. Loi allemande du 8 mars 1971.
7. Loi espagnole no 6/1985 du 1er juillet 1985.
8. The 1995 Tanzania immigration act.
9. USA Federal Torts Claim Act of august 2, 1946.
C. Instruments internationaux 1. Instruments du
TPIR
1. Accord du 31 août 1995 signé entre les Nations
unies et la République unie de Tanzanie concernant le siège du
TPIR.
2. Règlement portant régime de détention
des personnes en attente de jugement et d'appel devant le TPIR tel
qu'adopté le 9 jan. 1996.
3. Règlement de procédure et de preuve du Tribunal
pénal international pour le Rwanda tel qu'adopté le 29 juin 1995
et modifié jusqu'à ce jour.
4. Résolution S/RES/955(1994) du 8 novembre 1994 du
Conseil de sécurité des unies sur la création du Tribunal
pénal international pour le Rwanda.
5. Statut du Tribunal pénal international pour le
Rwanda tel qu'adopté par la Résolution S/RES/955(1994) du 8
novembre 1994 du Conseil de sécurité des Nations unies sur la
création du Tribunal pénal international pour le Rwanda et
modifié jusqu'à ce jour.
2. Instruments du TPIY
1. Règlement de procédure et de preuve du Tribunal
pénal international pour l'ex Yougoslavie tel qu'adopté le 11
février 1994 et modifié jusqu'à ce jour.
2. Statut du Tribunal pénal international pour l'ex
Yougoslavie tel qu'adopté par la Résolution S/RES/827(1994) du 25
mai 1993 du Conseil de sécurité des Nations unies sur la
création du Tribunal pénal international pour l'ex Yougoslavie et
modifié jusqu'àce jour.
3. Autres instruments internationaux
1. Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne
proclamée solennellement par le Parlement, le Conseil et la Commission
européens le 17 déc. 2000.
2. Charte africaine des droits de l'homme et des peuples
adoptée par l'Organisation de l'unité africaine à sa 18e
Conférence du 27 juin 1981 et entrée en vigueur le 21 octobre
1986.
3. Charte du Tribunal militaire international pour
l'extrême Orient (Tribunal militaire de Tokyo) adoptée le 19 jan.
1946 conformément à la Proclamation de Postdam du 24 juillet
1945.
4. Convention no169 concernant les peuples
indigènes et tribaux dans les pays indépendants adoptée
par la Conférence générale de l'Organisation
internationale du travail à sa soixante-seizième session du 27
juin 1989 et entrée en vigueur le 5 septembre 1991.
5. Convention contre la torture et autres peines ou
traitements cruels, inhumains ou dégradants adoptée par la
Résolution no 39/46 de l'Assemblée générale des
Nations
unies en trente neuvième session du 10 décembre
1984 et entrée en vigueur le 26 juin 1987, U.N. Doc. A/39/51,197.
6. Convention américaine relative aux droits de
l'homme adoptée par l'Organisation des Etats américaine à
la Conférence spécialisée interaméricaine sur les
droits de l'homme du 22 nov. 1969 et entrée en vigueur le 18 juillet
1978.
7. Convention sur l'élimination de toutes les formes
de discriminations raciale adoptée par la résolution 2106 A (XX)
de l'Assemblée générale des Nations unies en sa session du
21 déc. 1965 et entrée en vigueur le 4 janv. 1969.
8. Convention relative au statut de réfugié
telle qu'adoptée par l'Organisation des nations unies le 28 juillet 1951
dans une conférence de plénipotentiaires sur le statut des
réfugiés et des apatrides.
9. Convention européenne des droits de l'homme du 4
novembre 1950.
10. Déclaration universelle des droits de l'homme du
10 nov. 1948.
11. Déclaration américaine des droits et
devoirs de l'homme adoptée par la Résolution XXX de
l'Organisation des Etats américains à la neuvième
Conférence internationale des États américains du 2 mai
1948.
12. Pacte international sur les droits civils et politiques
du 23 mars 1976.
13. Principes fondamentaux relatifs aux directives concernant
le droit à un recours et à réparation des victimes de
violations du droit international relatif aux droits de l'homme et du droit
international humanitaire adoptés par la Résolution 1999/33 de la
Commission des droits de l'homme du 26 avril 1999.
14. Protocole relatif au statut des réfugiés
adopté par le Conseil économique et social des Nations unies dans
sa résolution 1186 (XLI) du 18 novembre 1966, communiqué à
l'Assemble générale des Nations unies dans sa résolution
2198 (XXI) du 16 décembre 1966 et entrée en vigueur le 4 octobre
1967.
15. Règles pénitentiaires européennes de
1973 telles que révisées jusqu'à ce jour.
16. Règles minima pour le traitement des
détenus adoptées par le premier Congrès des Nations unies
pour la prévention du crime et le traitement des délinquants,
tenu à Genève en 1955 et approuvées par le Conseil
économique et social dans ses résolutions 663 C (XXIV) du 31
juillet 1957 et 2076 (LXII) du 13 mai 1977.
17. Traité instituant la Communauté
européenne tel qu'adopté par les Etats signataires le 25 mars
1957.
18. Statut du Tribunal spécial pour le Sierra Leone
tel qu'adopté le 16 janvier 2002 et annexé à l'Accord du
16 janvier 2002 signé entre l'Organisation des nations unies et le
Gouvernement sierra léonais sur la création d'un Tribunal
spécial pour la Sierra Leone.
19. Statut de la Cour pénale internationale tel
qu'adopté le 17 juillet 1998.
20. Statut du Tribunal militaire international de Nuremberg
tel qu'adopté le 8 août 1945 et annexé à l'Accord de
Londres du 8 aoüt 1945 sur la création du Tribunal militaire
international de Nuremberg chargé de la poursuite et du châtiment
des grands criminels de guerre des Puissances européennes de l'Axe.
II. JURISPRUDENCE
A. Jurisprudence nationale étrangère
1. Cass. crim., 21 nov. 1991, Bulletin criminel,
no 243.
2. Cass. crim., 3 février 1976, Bulletin
criminel, no 42.
3. Cass. crim., 26 février 1969, Bulletin
criminel, no 97.
B. Jurisprudence internationale 1. Jurisprudence du
TPIR
1. André RWAMAKUBA v. The Prosecutor, Case
no ICTR-98-44C-A, Appeal chamber, Decision on Appeal against
Decision on appropriate remedy, 13 sept. 2007.
2. J. B. BARAYAGWIZA c. Le Procureur, Affaire
no ICTR-97-19-AR72, Chambre d'appel, Arrêt sur la demande en
révision, 31 mars 2000.
3. J. KAJELIJELI v. The Prosecutor, Case
no ICTR-98-44A-A, Appeal Chamber, Judgment on the appeal against the
Judgment and sentence in first instance, 23 may 2005.
4. L. SEMANZA c. Le Procureur, Affaire no
ICTR-97-20-A, Chambre d'appel, Arrét sur l'appel de la décision
sur la requête en annulation de la procédure d'arrestation et de
détention illégales, 31 mai 2000.
5. L. SEMANZA v. The Prosecutor, Case no
ICTR-97-10-A, Appeal chamber, Judgment, 20 may 2005.
6. Le Procureur c. André NTAGERURA, Emmanuel
BAGAMBIKI et Samuel IMANISHIMWE, Affaire no ICTR-99-46-T,
Chambre d'appel, Arrét, 7 juillet 2006.
7. Le Procureur c. André NTAGERURA, Affaire
no ICTR-99-46-T, Bureau du Président du tribunal, Ordonnance
portant rétablissement de Monsieur NTAGERURA dans les conditions d'homme
libre, 4 oct. 2004.
8. Le Procureur c. André NTAGERURA, Affaire
no ICTR-99-46-T, Chambre de première instance, Requête
en rétablissement des libertés d'une personne acquittée, 4
oct. 2004.
9. Le Procureur c. André NTAGERURA, Emmanuel
BAGAMBIKI et Samuel IMANISHIMWE, Affaire no ICTR-99-46-T,
Chambre de première instance, Jugement et sentence, 25 fév.
2004.
10. Le Procureur c. André RWAMAKUBA, Affaire
no ICTR-95-1A-T, Chambre de première instance III,
Décision relative à la Requête de la Défense en
juste réparation, 31 jan. 2007.
11. Le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA, Affaire
no ICTR-95-44C-T, Chambre de première instance III,
Requête en indemnité devant les Nations unies, 28 jan. 2005.
12. Le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA, Affaire
no ICTR-95-1A-T, Chambre d'appel, Arrêt, 3 juillet 2002.
13. Le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA, Affaire
no ICTR-95-1A-T., Décision du Greffier en application de la
décision sur la requête du Procureur sur le fondement de l'article
99 B), 8 octobre 2001.
14. Le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA, Affaire
no ICTR-95-1A-T, Chambre de première instance I,
Décision sur la requête du Procureur sur le fondement de l'article
99 B, 8 juin 2001.
15. Le Procureur c. J. Paul AKAYESU, Affaire
no ICTR-96-4-T, Chambre de première instance I, Jugement, 2
sept. 1998.
16. The Prosecutor v. André RWAMAKUBA, Case
no 98-44C-T, Trial chamber III, Registrar's additional submission in
regard to the Defense application for remedy, 7 dec. 2006.
17. The Prosecutor v. André RWAMAKUBA, Case
no 98-44C-T, Trial chamber III, Registrar's additional submission in
regard to the Defense application for remedy, 24 nov. 2006.
18. The Prosecutor v. André RWAMAKUBA, Case
no 98-44C-T, Trial chamber III, Registrar's submission regarding
André Rwamakuba's request for an appropriate remedy, 2 nov. 2006.
19. The Prosecutor v. André RWAMAKUBA, Case
no ICTR-98-44C-1, Trial chamber III, Application for appropriate
remedy, 23 oct. 2006.
20. The Prosecutor v. Andre RWAMAKUBA, Case
no ICTR-98-44C-1, Trial chamber II, Decision on the Defense motion
concerning the illegal arrest and detention of the accused, 12 dec. 2000.
21. The Prosecutor v. Bernard NTUYAHAGA, Case
no ICTR-98-40-T, Trial chamber I, Decision on the Prosecutor's
motion to withdraw the indictment, 18 march 1999.
22. The Prosecutor v. Ignace BAGILISHEMA, Case
no ICTR-95-IA-A, Appeal chamber, Appellant's response to
respondent's motion for variation of conditions of provisional release, 3 july
2002.
23. The Prosecutor v. J. B. BARAYAGWIZA, Case
no ICTR-98-19-AR72, Trial chamber I, Judgment and sentence, 3 dec.
2003.
24. The Prosecutor v. Jean MPAMBARA, Case no
ICTR-01-65-T, Trial chamber I, Judgment, 11 sept. 2006.
25. The Prosecutor v. Léonidas RUSATIRA, Case
no ICTR-2002-80-I, Trial chamber, Decisions on the Prosecutor's ex
parte application for leave to withdraw the indictment, 14 august 2002.
26. The Prosecutor v. Samuel IMANISHIMWE, André
NTAGERURA et Emmanuel BAGAMBIKI, Case no ICTR-99-46-T, Trial
chamber III, Separate and concurring decision of Judge WILLIAMS on IMANISHIMWE
motion for judgment of acquittal on count of conspiracy to commit genocide
pursuant to Rule 98 bis, 13 march 2007.
27. The Prosecutor v. Samuel IMANISHIMWE, André
NTAGERURA et Emmanuel BAGAMBIKI, Case no ICTR-99-46-T, Judgment
on motion for judgment of acquittal on count of conspiracy to commit genocide
pursuant to Rule 98 bis, Trial chamber III, 6 march 2007, oral
decision.
2. Jurisprudence du TPIY
1. Le Procureur c. Dusko TADI}, Affaire no
IT-94-1-, Chambre d'appel, Arrét relatif à l'appel de la
Défense concernant l'exception préjudicielle
d'incompétence, 2 oct. 1995.
2. Le Procureur c. Fatmir LIMAJ, Haradin BALA et Isak
MUSLIU, Affaire no IT-03-06-T, Chambre de première
instance II, Décision relative à la demande de mise en
liberté provisoire, 26 oct. 2005.
3. Le Procureur c. Sefer HALILOVIC, Affaire
no IT-01-48-I, Chambre de première instance I,
Décision relative à la demande de mise en liberté
provisoire. 1er sept. 2000.
4. Le Procureur c. Zoran KUPRESKIC et al., Affaire
no IT-95-16-I, Chambre de première instance, Jugement, 14
jan. 2000.
5. Le Procureur c. Zoran KUPRESKIC et al., Affaire
no IT-95-16-I, Chambre de première instance, Décision
relative à la demande de mise en liberté provisoire, 20 sept.
1999.
6. The Prosecutor v. Dusko SIKIRICA, Damir DOSEN et
Dragan KOLUNDZIJA., Chambre de première instance, Jugement relative
aux requêtes d'acquittement présentées par la
défense, 3 sept. 2000.
7. The Prosecutor v. Fatmir LIMAJ, Haradin BALA et Isak
MUSLIU, Case no IT-03-06-T, Trial chamber, Judgement, 30 nov.
2005.
8. The Prosecutor v. Sefer HALILOVIC, Case
no IT-01-48-T, Trial chamber I Section A, Judgment, 16 nov. 2005.
3. Autre jurisprudence internationale
1. CARRANZA v. Argentine, Arrêt no
10.8087, CIADH 1998.
2. HASSAN et CHAUSH c. Bulgarie, Arrêt
no 30985/96, CEDH 2000.
3. Raquel MARTI DE MEJIA c. Peru, Arrêt
no 10.970, CIADH 1996.
4. SILVER c. Royaume-Uni, Arrêt no
5947/72, CEDH 1983.
5. TWALIB c. Grèce, Arrêt no
24294, CEDH 1998.
III. DOCTRINE
A. Ouvrages et articles publiés dans des ouvrages
collectifs
1. BERGERON, J. , Electronic monitoring of pretrial
detainees of the ICTR, London, England School of Law, Rwanda genocide
prosecution project, 7 may 2002, 38 p.
2. BOSLY, H. D. et VANDERMEERSCH, D., Droit de
procédure pénale, 2è éd., Brugge,
La Charte, 2001, 1098 p.
3. BOULOC, B., REGINALD, R. et LEGROS, P., Le droit au
silence et la détention provisoire, Bruxelles, Bruylant, 1997, 134
p.
4. BRADY, H., and JENNINGS, M., « Appeal and Revision
», in LEE, R. S., The international Criminal Court, The
making of the Rome Statute, Issues, negotiations and results, The Hague,
Kluwer Law International, 1999, pp. 294-304.
5. BURGORGUE-LARSEN, L., « De la difficulté de
réprimer le génocide rwandais », in TAVERNIER, P.
et BURGORGUE-LARSEN, L. (dir.), Un siècle de droit international
humanitaire, Bruxelles, Bruylant, Collection du CREDHO, 2001,
pp.151-182.
6. CHAMBON, P., Le juge d'instruction, théorie et
pratique de la procédure, Paris, Dalloz, 1997, 464 p.
7. CONTE, P. et DU CHAMBON, P. M., Procédure
pénale, 2è éd., Paris, Dalloz, 1998, 370
p.
8. DEJEMEPPE, B. (dir.), La détention
préventive, Bruxelles, Larcier, 1992, 411 p.
9. DUPAQUIER, J. F. (dir.), La justice internationale face
au drame rwandais, Paris, Editions Karthala, 1996, 249 p.
10. LE TOURNEAU, P., Droit de la responsabilité et
des contrats, Paris, Dalloz, 2004, 1385 p.
11. MERLE, R. et VITU, A., Traite du droit de criminel,
3è éd., Paris, Editions Cujas, 1979, 1187 p.
12. MWENE SONGA, N., Traité de droit pénal
général congolais, Kinshasa, Editions Droit et
société, 2001, 789 p.
13. NOWARK, M., « The right of victims of gross human
rights violations to reparation", in COOMANS, F. et al.,
Rendering Justice to the vulnerable, The Hague/London/Boston, Kluwer
Law International, 2000, pp. 203-224.
14. PRADEL, J., Droit pénal comparé,
Paris, Dalloz, 1995, 733 p.
15. RENE KOERING-JOULIN, A. H., Droit pénal
international, Paris, Presses universitaires de France, 1994, 439 p.
16. ROUX, F., « De l'absence de responsabilité en
cas d'acquittement ", in L. BURGORGUE-LARSEN (dir.), La
répression internationale du génocide, Bruxelles, Bruylant,
Collection du CREHO, 2003, pp. 252-258.
17. SCHWIKIKARD, P. J., Presumption of innocence, Cape
Town, Juta and Co Ltd, 1999, 185 p.
18. STEFANI, G., LEVASSEUR, G. et BOULOC, B.,
Procédure pénale, 16è éd.,
Paris, Dalloz, 1996, 898 p.
B. Articles de revues ou de journaux
1. BASSIOUNI, C., « International recognition of victims'
rights », in Human Rights Law Review, Vol. 6, no 2,
Oxford, Oxford University Press, 2006, pp. 203-279.
2. BUTI, A. and BUS, M. P., « International law
obligations to provide reparations for human rights abuses ", in Murdoch
University Electronic Journal of Law, Vol. 6, no 4, dec. 1999,
pp. 1-28.
3. Croix Rouge de Belgique, Newsletter du DIH,
no 78 du 16-31 août 2oo6.
4. FARTHOUAT, J. R., « La présomption d'innocence
», in Justices Revue Générale de Droit Processuel,
Paris, Dalloz, 1998, pp. 53-59.
5. LA ROSA, A. M., « Défi de taille pour les
Tribunaux pénaux internationauxÓ conciliation des exigences du
Droit », in Revue internationale de la Croix Rouge, no 828,
Genève, 1997, pp. 693-707.
C. Mémoires
1. BEN-BELLA, M., The Defense right to communication of
the accused versus the need for protection of witnesses at the ICTR,
mémoire de Licence, Huye, N.U.R., Faculty of Law, 2006, 54 p, non
publié
2. GASORE, G., La coopération des Etats avec le
TPIR, mémoire de Licence, Huye, U.N.R., Faculté de Droit,
2006, 71 p, non publié.
3. MUBIHAME, A., La question d'indemnisation des victimes du
génocide devant le TPIR, mémoire de Licence, Huye, U.N.R.,
Faculté de Droit, 2006, 56 p, non publié.
4. MUGAMBIRA, L., De la détention provisoire face
au principe de la présomption d'innocence devant le TPIR,
mémoire de Licence, Butare, U.N.R., Faculté de Droit, 2004, 59 p,
non publié.
IV. INTERVIEWS
1. Interview avec l'un des acquittés dont le nom de
l'intéressé est gardé en anonymat pour ses raisons
propres, 23 juin 2007.
2. Interview avec Alloys MUTABINGWA, Représentant du
Gouvernement rwandais au TPIR, 24 juillet 2007.
V. AUTRES REFERENCES
1. Address of Judge Denis Byron President of the International
criminal tribunal for Rwanda to the United nations security council 18 June
2007.
2. Communiqué oral du Représentant du Gouvernement
rwandais auprès du TPIR du 8 mars 2006 suite à l'acquittement de
Bagambiki.
3. Conférence de presse tenue par Adama DIENG le Greffier
du TPIR, le 26 juillet 2006.
4. Letter dated 20 oct. 2005 of President of the ICTR to
Maitre Francois ROUX, Legal counsel for Ignace BAGILISHEMA, in response to the
"Requête en indemnité devant les Nations unies", filed on 28 jan.
2005.
5. Letter dated 11 mars 2004 of President of the ICTY to Mr
Zejnil DALALIC in response to Mr DELALIC's request for indemnity dated 3 march
2004.
6. Letter dated 26 September 2000 from the President of the ICTR
addressed to the Secretary-General of the United nations organization.
7. Letter dated 19 September 2000 from the President of the ICTY
addressed to the Secretary-General of the United nations organization.
8. Onzième Rapport annuel du TPIR à
l'Assemblée générale du Conseil de Sécurité
des Nations Unies du 13 août 2006.
VI. SOURCES ELECTRONIQUES
1. DEVRESSE, M-S. « Innovation pénale et
surveillance électronique : quelques réflexions sur une base
empirique », in Champ Pénal, [en ligne sur]
http://champpenal.revues.org/document1641.html,
consulté le 26 août 2007.
2. Hirondelle TPIR, Informations du 27 juillet 2007, [en ligne
sur]
http://www.hirondelle.org,
consulté le 26 juillet 2007.
3. Hirondelle TPIR, Informations du 03 jan. 2007 [en ligne
sur]
http://www.hirondelle.org,
consulté le 26 juillet 2007.
4. Hirondelle TPIR, Informations du 29 février 2004, [en
ligne sur] http://www.
www.hirondelle.org,
consulté le 26 juillet 2007.
5. Hirondelle TPIR, Informations du 24 juillet 2001, [en ligne
sur]
http://www.hirondelle.org,
consulté le 26 juillet 2007.
6. Hirondelle TPIR, Informations du 24 juillet 2001, [en ligne
sur]
http://www.hirondelle.org,
consulté le 26 juillet 2007.
7. IDA EN ACTION, Rwanda Ó Redressement,
réhabilitation et espoir, mais 2005, [en ligne sur] http : //
www.banquemondiale.org/ida,
consulté le 29 sept. 2007.
8. MUNYANEZA, J., Rwanda plots Bagambiki's re-arrest, in
Rwanda Development Gateway [en ligne sur]
http://rwanda.rw/article.php3?idarticle=2215,
consulté le 26 juillet 2007.
9. NTAGERURA, A et BAGAMBIKI, E., Le calvaire et la
détresse de deux acquittés oubliés du TPIR, [en ligne
sur]
http://www.grandslacs.net/doc/3767.pdf,
consulté le 29 juillet 2007 (en Annexe III).
10. The Western australia law reform commission, Working
paper on compensation for persons detained in custody, Project no
43, nov. 1976, [en ligne sur]
http://www.austlii.edu.au/au/other/walrc/43/P43-WP.html,
consulté le 26 août 2007.
11. TPIR, Etat des affaires, [en ligne sur]
http://www.ictr.org/FRENCH/index.htm,
consulté le 29 juin 2007.
12. TPIR, Situation des détenus, [en ligne sur]
http://www.ictr.org/FRENCH/index.htm,
consulté le 21 juillet 2007.
ANNEXES
ANNEXE I EXTRAIT DU GUIDE D'ENTRETIEN AVEC
LE REPRESENTANT DU GOUVERNEMENT RWANDAIS AUPRES DU TPIR
GUIDELINES OF THE INTERVIEW WITH THE
RWANDAN REPRESNTATIVE TO THE ICTR OF 24 JULY 2007
A. Identification of the interviewed person
1. Names
«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~
2. Post
B. Asked questions
1. Since its first judgment in 1998, the ICTR has so far
rendered five acquittal decisions. As a Rwandan official who has been closely
following the functioning of the ICTR, do you think that those acquittals were
fair to Rwandan people?
a)
Yes
No
b)Why?«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~.
2. Have you ever read those judgments of acquittal?
«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~
3. Should Rwanda welcome the acquitted persons?
4. Is there arrangement between Rwanda and the ICTR regarding the
return of the acquitted persons to Rwanda?
a) If yes, what was the outcome?
«~«~«~«~«~«~
«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~
b) If no, why?
«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~
5. What is Rwanda's reaction to the tribunal's efforts to
relocate the acquitted outside
Rwanda?
«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~«~
ANNEXE II EXTRAIT DU GUIDE D'ENTRETIEN AVEC L'UN DES
ACQUI TTES DU TPIR
GUIDE D'ENTRETIEN AVEC L'UN DES ACQUITTES DU TPIR
wi
DU 23 JUILLET 2007
A. Identification de la personne
interviewée
1. Nom ~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~.
2. Fonction d'avant génocide~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
3. Date et lieu d'arrestation~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
4. Date d'acquittement ~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~. B. Ligne
de dialogue
1. Ici au TPIR, quelle est la suite de la situation de
l'acquitté après la décision
d'acquittement ? ~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
2. Quelles sont les conditions de vie de l'acquitté au
safe house du TPIR ?
3. Comment appréciez-vous le rôle et les efforts du
Tribunal dans la gestion de vos Problèmes ?
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~.
4. Si on vous propose de rentrer au Rwanda ?
~~~~~~~~~~~~~~~~.
5. Pourquoi les acquittés, ne peuvent-ils pas retourner
dans les pays respectifs où ils étaient avant leur arrestation ?
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~.
6. Quelles solutions proposeriez-vous pour la bonne
résolution de vos problèmes ?
7. D'après les acquittés, quelle est la meilleure
solution préféreriez-vous pour votre réinstallation ?
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~...
ANNEXE III EXTRAIT DU DOCUMENT PUBLIE PAR LES
ACQUITTES
LE CALVAIRE ET LA DETRESSE DE DEUX ACQUITTES OUBLIES DU
TPIR !
Nous appelons respectivement André NTAGERURA et Emmanuel
BAGAMBIKI.
Le 25 février 2004, nous avons été
déclarés innocents et acquittés de toutes les charges
portées contre nous par le Tribunal Pénal International pour le
Rwanda (le TPIR) à Arusha. L'acquittement a été
prononcé à l'issue d'un procès qui avait duré trois
ans et après huit ans de détention pour André NTAGERURA et
six ans pour Emmanuel BAGAMBIKI. Nous sommes, à ce jour, dans le
dix-neuvième mois depuis que les Juges du TPIR ont reconnu notre
innocence et ont ordonné notre mise en liberté immédiate.
La Chambre a chargé le Greffier du TPIR de l'exécution de
l'Ordonnance d'acquittement. Nous estimons que le Greffier n'a pas fait les
démarches nécessaires pour compléter les efforts de nos
avocats pour nous trouver des pays d'accueil. Pendant ce temps et pour des
raisons qui nous échappent totalement, nous sommes maintenus dans une
prison qui ne dit pas son nom et où les conditions d'existence sont loin
de celles d'un homme libre. Les normes de détention en vigueur à
l'UNDF y ont été transférées. Pire elles y ont
été tellement durcies qu'elles deviennent de plus en plus
inhumaines et insupportables. De nombreux incidents ont jalonné notre
séjour dans cette résidence mise à notre disposition. Dans
cette annexe du Centre de Détention des Nations Unies à Arusha,
annexe que l'on appelle pudiquement " Safe House", c'est-à-dire "maison
sécurisée" les conditions de détention se sont
détériorées et sont durcies chaque jour davantage tant au
niveau du droit, qu'au niveau psychologique, matériel, culturel et
social. Le dernier incident survenu ce vendredi 02 septembre 2005 nous force
à rompre le silence que nous avons gardé jusqu'à ce jour.
En effet, nous sommes fortement inquiets pour notre sécurité et
notre état de sans statut.
· Au niveau du droit, aucun statut, aucune disposition
écrite, pas méme provisoire, ne régit notre situation
actuelle. Ni les obligations du TPIR à notre égard, ni nos droits
et nos devoirs ne sont définis nulle part. Nous n'avons donc
pratiquement aucune référence légale écrite pour
revendiquer nos droits même les plus élémentaires.
· Dès le premier jour de notre acquittement deux
agents de sécurité sélectionnés apparemment pour
leur méchanceté de geôlier nous ont surveillé jour
et nuit et ont tout fait pour créer et entretenir dans le "Safe House"
un climat d'humiliation et de stress permanent. Nous avons même dû
partager la résidence et toutes les installations de la maison avec eux!
Pendant une année ils ont suivi les rares communications
téléphoniques qu'ils nous autorisaient de faire, ils prenaient
note et faisaient rapport à leurs chefs.
· Dans le "Safe House" nous sommes privés de
moyens d'information et de ressourcement intellectuel: pas de journaux, pas
d'accès à l'internet, pas d'ordinateur. L'antenne parabolique de
T.V et la ligne téléphonique qui existaient dans la maison ont
été retirées le lendemain de notre arrivée au "safe
house". Tous ces moyens (excepté internet) existent pourtant au Centre
de détention officiel pour les autres détenus! Seule la ligne
téléphonique a été rétablie, il y a à
peine un mois.
· Au " Safe House" nous sommes pratiquement interdits de
visite. Des amis qui se déplacent expressément ou qui sont de
passage à Arusha et qui ont demandé l'autorisation de nous voir
ont reçu systématiquement une réponse négative,
sous prétexte que nous sommes gardés dans une maison
sécurisée dont les gens de l'extérieur ne doivent pas
connaître l'emplacement. Le dernier refus de visite remonte au 30
août la semaine passée. Seuls certains membres de l'équipe
de notre défense et de nos familles respectives sont autorisés
depuis récemment de nous voir. Là encore aucun texte ne
régit ces visites de telle sorte que, quand elles ont eu lieu, elles ont
parfois été interrompues intempestivement sans explication par
les fameux agents de sécurité qui étaient affectés
à nous épier.
· Nous ne sommes méme pas autorisés de
communiquer avec nos anciens codétenus. Les rares fois où nous
avons essayé de téléphoner à l'un ou l'autre parmi
eux, les services de l'UNDF nous répondaient laconiquement que nous ne
sommes pas autorisés. Sans aucune autre explication. Cette interdiction
semble levée depuis le mois passé mais depuis notre acquittement
les rares contraintes levées par une main sont immédiatement
rétablies par une autre.
· Le courrier qui nous est destiné, qu'il soit
confidentiel ou non, transite au Centre de Détention où il est
ouvert et enregistré par l'administration avant de nous le
transmettre.
· En cas de maladie ou lorsque, nous sommes dans
l'obligation de demander une petite amélioration des conditions
matérielles de notre détention par la fourniture de l'un ou
l'outre ustensile de première nécessité, les services du
Greffier nous répondent systématiquement que nous coûtons
cher au TPIR, que les dépenses nous concernant n'ont pas
été prévues au budget... Certaines fournitures nous ont
été carrément supprimées notamment celles nous
permettant de continuer à préparer notre Appel tel que
l'ordinateur et ses périphériques, le papier, les stylos, les
enveloppes etc... Le matériel de nettoyage, d'hygiène et de
propreté est fourni de manière irrégulière. Aucun
employé chargé du nettoyage n'est affecté en permanence
à notre résidence, le temporaire est tellement irrégulier
qu'il a disparu depuis tout un mois sans préavis. Pourtant le budget du
Centre de Détention est voté pour deux ans, celui de l'exercice
en cours a été adopté avant notre acquittement. Nous
faisions donc bel et bien partie des prévisions budgétaires du
Centre de Détention qui, sur ce chapitre, continue à nous
gérer, cette fois dans le " Safe House"!
· Nous avons enregistré de nombreuses visites
impromptues dans notre résidence par des personnes dont nous ignorons
l'identité, la provenance et la mission. Ces visites ont souvent
provoqué des incidents plus graves les uns que les autres entre ces
visiteurs et nous-mêmes. Le dernier incident qui nous fait sortir de
notre réserve s'est produit vendredi le 02 septembre 2005.Une
équipe de cinq personnes conduites par Monsieur Pierre DUCLOS
enquêteur du procureur dans notre procès, s'est introduite dans
notre résidence. Monsieur Pierre DUCLOS est basé à Kigali.
Son équipe était munie de cameras, d'appareils photos, de blocs
notes etc... Ils ont pris des vues de l'entrée de l'enceinte du Safe
House. Lorsqu'ils ont voulu filmer, photographier et visiter nos chambres et
l'intérieur du Safe House nous nous sommes opposés. Monsieur
Pierre DUCLOS a manifesté une insolence et une arrogance
indescriptibles. Il a même prétendu qu'il prendrait ces vues de
gré ou de force. Grâce à l'officier de
sécurité et à notre détermination, l'équipe
est partie. Elle est revenue dans l'après-midi. Nous avons opposé
la même résistance. Elle est repartie.
La situation, telle que brièvement décrite
ci-dessus, ne reflète que très partiellement les conditions dans
lesquelles nous sommes enfermés. Nous demandons simplement que la
décision de notre acquittement total par les Juges de la chambre III de
première instance du Tribunal Pénal International soit
concrétisée; nous demandons que le Greffier nous trouve un pays
d'accueil et que notre droit à la liberté soit rendu effectif. Ce
droit dont nous avons été privés depuis respectivement
neuf et sept ans de détention.
Fait à Arusha, le 05 septembre 2005. André
NTAGERURA Emmanuel BAGAMBIKI.
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