Politique monétaire et bulles spéculatives( Télécharger le fichier original )par Nesrine Ressaissi Faculté des sciences économiques et de gestion de Tunis - Mastère 2010 |
A u cours de ces quinze dernières années, nous avons connu plusieurs crises financières et des phénomènes de contagion, pour en citer quelques-uns, la crise mexicaine en 1994-1995, celle du Long Term Capital Management (LTCM) en 1998, la bulle des valeurs technologiques qui a éclaté à partir en 2000 et enfin la crise financière actuelle qui a été causée par l'éclatement de la bulle immobilière en 2008. En effet, Le concept de bulle spéculative est intégré depuis très longtemps à la théorie des marchés financiers. La crise des bulbes de tulipe en Hollande, la spéculation sur la South Sea Company à Londres ou le krach de Law en France constituent des exemples classiques de cette interprétation traditionnelle de la notion de bulle. La théorie des bulles spéculatives se trouve souvent fortement liée à la théorie de l'efficience des marchés financiers. Cette dernière est née à la seconde moitié du vingtième siècle et qui découle de la théorie financière moderne de l'évaluation des actifs. Mais, et d'après la définition d'un marché financier efficient, l'existence des bulles spéculatives sur un marché est une signe d'inefficience. Le gouverneur de la banque centrale des Etats de l'Afrique de l'ouest, Philippe-Henri Dacoury-Tabley1(*), a expliqué que « La stabilité financière est désormais une des conditions sine qua non de la conduite d'une politique monétaire efficace.» Le marché boursier étant extérieur au cadre usuel de la politique monétaire. Toutefois, les banques centrales ne peuvent s`en désintéresser d'abord parce qu'elles sont une source d'information économique importante et ensuite parce que le marché boursier est un élément essentiel pour la stabilité financière. Au vu de l'importance de l'objectif de stabilité financière considéré et de ses enjeux, il convient de se demander dans quelle mesure les prix des actifs et leurs évolutions temporelles sont incorporées dans la formulation des objectifs des autorités monétaires. Le comportement des autorités monétaires à l'égard des prix des actifs a, en réalité, une importance primordiale dans un environnement au sein duquel les conséquences sur l'activité économique des variations injustifiées des prix des actifs ont été reconnues par bien des économistes. Les économistes s'accordent à reconnaître sur ce point l'existence de quatre canaux : les effets de richesse, le ratio Q de Tobin, l'accélérateur financier et le capital bancaire. Alchian et Klein2(*) sont les premiers qui ont argumenté l'idée de créer un nouvel indice des prix qui incorpore les prix des actifs. Durré 3(*) montre que les autorités monétaires ne doivent pas réagir de la même manière à toutes les variations des prix des actifs mais L'analyse de la nature des chocs refluant la variation des prix des actifs est primordiale. Bernanke et Gertler 4(*) contredisent les résultats de Durré et soutiennent que les banques centrales n'ont pas besoin de se préoccuper de détecter la nature des chocs mais d'intégrer automatiquement les prix des actifs dans la fonction de réaction de la banque centrale. Un bon nombre d'économistes s'interrogent sur la façon de réaction de la politique monétaire lorsqu'elle détecte la présence d'une bulle sur le marché, c'est-à-dire est ce qu'elle doit agir à l'avance ou bien attendre après l'éclatement de celle ci. Kent et Lowe 5(*) défendent la thèse d'une réaction préventive pour éviter des ruptures dans le système financier et pour ne pas reporter l'action à un moment où les outils monétaires seraient moins efficaces (taux proches de zéro au moment où une relance s'imposerait). En revanche, Bernanke et Gertler 6(*) préfèrent ne pas agir à l'avance, mais infléchir la politique monétaire quand la bulle a éclaté. Mais, chacune de ces deux propositions présente des limites, et c'est pour faire face à ces limites, Palley 7(*) a proposé une autre manière de réagir face à l'évolution des prix des actifs, sa proposition revient à exiger que l'ensemble des intermédiaires financiers garde auprès de la banque centrale des réserves obligatoires basées sur leurs actifs. Ce mémoire se propose alors de mener le débat sur la manière que doit adopter la politique monétaire pour diminuer les fluctuations des prix des actifs et empêcher l'émergence des bulles spéculatives. Que peut faire alors la politique monétaire pour faire face aux bulles spéculatives ? Quelle est la réponse appropriée par celle ci en cas d'éclatement de la bulle ? Et qu'en est t-il de l'efficacité de la réaction de la politique monétaire ? Pour atteindre ainsi les objectifs escomptés et répondre à notre problématique, ce travail va être divisé en trois chapitres. Le premier chapitre étudiera la théorie des bulles spéculative, cette théorie se trouve fortement liée avec la théorie de l'efficience des marchés financiers. Après avoir présenté les différentes définitions d'un marché financier efficient, nous allons démontrer comment la présence des bulles spéculatives sur un marché présente un signe d'inefficience. Ensuite, l'étude sera consacrée à la relation entre l'apparition et l'éclatement des bulles spéculatives et les crises, en particulier les crises immobilières et nous prenons comme exemple la crise actuelle des subprimes. Dans une deuxième section, nous allons examiner le nouvel environnement de la politique monétaire ainsi que ses nouvelles responsabilités. Le deuxième chapitre va être divisé en trois sections : dans une première section, d'abord, nous allons présenter les différents arguments de la prise en compte des prix des actifs dans la conduite de la politique monétaire. Ensuite, nous présenterons un survol de la littérature sur la manière de prendre en compte les prix des actifs. La deuxième section va mener le débat sur le chois d'une réaction préventive ou bien une réaction tardive, ces deux propositions vont être accompagnés des limites de chacune. La troisième section présente, d'une part, la proposition de Palley 8(*), et d'autre part, elle étudie une autre façon de réagir avec le recours à la politique monétaire non conventionnelle. Après avoir étudié la relation théorique entre la politique monétaire et les bulles spéculatives, le troisième chapitre est consacré à la validation empirique. Cette étude empirique prendra deux formes : la première forme consiste à étudier quelques expériences vécues, à savoir, la bulle japonaise, la bulle internet et la bulle immobilière. La deuxième forme est une étude économétrique, selon laquelle nous allons vérifier la relation entre la politique monétaire et les cours boursiers.
Bulles spéculatives et mutations de la politique monétaire* 1 PHILIPPE-HENRI DACOURY-TABLEY, « RÔLE DES BANQUES CENTRALES DANS LA REGULATION ET LA STABILITE DU SYSTEME FINANCIER », SYMPOSIUM DE L'ASSOCIATION DES BANQUES CENTRALES AFRICAINES POUR L'ANNEE 2010 * 2 Alchian A. e B. Klein (1973), On a correct measure of inflation, in «Journal of Money,Credit and Banking», 5 febbraio, pp.173-191. * 3 Durré, A. (2001) «Would it be optimal for central banks to include asset prices in their loss function?» Université Catholique de Louvain IRES Discussion Paper, No. 13. * 4Bernanke B., et M. GERTLER, 1999 : Monetary Policy and Asset Price Volatility, in « New Challenges for Monetary Policy », Federal Reserve Bank of Kansas City, Jackson Hole. * 5 KENT C., et P. LOWE, 1997 : « Asset Price Bubbles and Monetary Policy », Reserve Bank of Australia Research Discussion Paper * 6 ibid * 7 Palley, T. (2004) «Asset-based reserve requirements: reasserting domestic monetary control in an era of financial innovation and instability», Review of Political Economy, Vol. 16, No. 1, pp. 43-58. * 8 ibid |
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