5.2.3 Le domaine public
Le domaine public squatté à Niamey concerne les
rues et les espaces verts dont les stratégies et l'ampleur d'occupation
sont variables.
5.2.3.1 Les rues
L'occupation des rues est surtout perceptible dans les
nouveaux quartiers situés en zone péricentrale (carte n°3
p.63). A Niamey, la construction d'un bâtiment à usage
d'habitation est une opération qui prend généralement
plusieurs années du fait de la faiblesse des ressources
financières de la plupart des Niaméens. Pour éviter un
retrait de la parcelle par la municipalité pour défaut de mise en
valeur, certains acquéreurs préfèrent la faire occuper par
un démuni qui fait office de gardien en y construisant une paillote
avant ou après que le propriétaire eut construit le mur
d'enceinte. Le gardien y restera aussi longtemps que dureront les travaux de
construction. Durant ces années, il profite pour faire la connaissance
des voisins et participe généralement aux
cérémonies qu'ils organisent. Une fois les travaux
achevés, il déplace sa paillote de l'intérieur de la
parcelle à un angle d'une rue non bitumée, s'il n'a pas une autre
parcelle pour s'installer. Les voisins ne se montrent pas gênés et
la Municipalité qui doit le déguerpir ne réagit pas car
elle mettra des années pour bitumer la voie.
5.2.3.2 Les espaces verts
La ceinture verte est de loin l'espace le plus
célèbre par son étendue 2 500 ha (carte n°3 p.63).
Cet espace long de 25 km et large d'1km a été classé par
les autorités dans les années 1960. Des margousiers y avaient
été plantés pour servir de ceinture végétale
en arc de cercle autour de Niamey. Cette opération devrait
protéger la ville du vent sec du Nord (harmattan) et maintenir un grand
poumon vert à proximité de la capitale (Le Monde, du 2
février 2007). Lors du classement de cet espace, les
propriétaires coutumiers n'avaient pas été
dédommagés et ils continuaient à le cultiver chaque
année. A partir de 1984, peu à peu l'espace a commencé
à être squatté jusqu'au lotissement du quartier Banizoumbou
II (début des années 1990) où les squatters ont
été déguerpis. Ils ont alors occupé la ceinture
verte situé non loin et depuis lors cet espace est devenu la plus grande
concentration de paillotes de Niamey. Pour s'installer, il faut l'aval des
propriétaires coutumiers à qui il faut payer au moins 2 000 F CFA
par an et par case en guise de location de l'espace.
D'autres espaces verts sont également squattés
à l'intérieur de la ville. Il en est ainsi de 2ème Forage
situé au quartier Yantala ou du grillage Toumounani de Banifandou et de
bien d'autres. Contrairement à la ceinture verte convoitée
à la fois par la CUN et les squatters et qui soulève de
polémique entre la Municipalité et le Ministère de
l'environnement assurant la tutelle, les espaces verts du centre ville sont
progressivement morcelés et vendus. Depuis 2006, à la place des
paillotes de 2ème Forage, des immeubles de luxe ont
été bâtis. Le Grillage Toumounani (Figure n°5) a
été déguerpis en mars 2007. Dans ces espaces verts de la
ville, les squatters s'installent sans payer un sou à personne ce qui
facilite l'occupation. Toutefois, leur emplacement au coeur de la ville rend
l'occupation plus précaire car, ils peuvent être morcelés
à tout moment et les occupants déguerpis sans
ménagement.
Figure n°5 : Les squatters déguerpis pour une cause
illégale
La police de Niamey a procédé le mercredi
dernier au déguerpissement des habitants du « grillage Toumounani
» au quartier Banifandou. Accompagnée de
prisonniers, la police a d'abord détruit la case du chef avant de
l'embarquer et d'intimer aux femmes et enfants de détruire leurs cases
avant que les forces de l'ordre n'interviennent. Cette opération a fait
des nombreux sans abri ; les femmes et les enfants ont dormi à la belle
étoile sans savoir où aller. L'opération en tant que telle
est salutaire car la ville a besoin d'être assainie mais il aurait mieux
fallu chercher d'abord là où caser ces personnes avant d'engager
une telle action qui s'est déroulée sans aucun respect des droits
humains.
Les habitants du « grillage Toumounani »
déguerpis par la police, extrait du journal L'EVENEMENT
N°187 du 27 Mars 2007
Source :
http://www.nigerdiaspora.net/journaux/even.pdf,
[mars 2007]
En somme, les textes réglementant l'occupation de
l'espace s'ils étaient respectés par tous auraient permis un
aménagement tout au moins progressif de l'espace. Les ordonnances
59-113/PCN et 59-114/PCN du 11 juillet 1959 qui régissent les titres
d'occupation au Niger en général et à Niamey en
particulier avaient été conçues dans un contexte
d'encouragement de l'urbanisation en tenant compte du niveau de vie des
citadins. Mais la mise en avant des intérêts égoïstes
des uns et des autres a provoqué une sorte de confusion dans laquelle
les responsabilités se mêlent donnant l'impression d'un complot
dans lequel chacun trouve son compte.
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