La procédure officielle n'est jamais appliquée.
Selon SEYBOU I (2005) les lotissements sont ouverts souvent sans dossier et
donc sans autorisation et sont par conséquent illégaux c'est le
cas des lotissements tels que Cité des Députés ou Zam
Koira. La communauté urbaine régularisera la situation
après le lotissement mettant les instances réglementaires devant
le fait accompli. Pour rendre plus opaque la vente des parcelles, la commission
d'attribution a été dissoute en 1991. L'objectif visé
à travers cette dissolution est atteint parce qu'elle a permis
l'installation d'une véritable oligarchie dans la gestion
foncière à la Communauté urbaine de Niamey où les
parcelles sont vendues de gré à gré si bien que seules les
personnes ayant leurs entrées à la Communauté Urbaine de
Niamey sont mises au courant.
Face à ce népotisme et conscients des nombreuses
embûches, les personnes privées c'est-àdire les
propriétaires coutumiers ne se hasardent pas à lotir. Ils
préfèrent alors attendre que la Communauté urbaine engage
la procédure de lotissement pour revendiquer leurs droits. D'ailleurs,
les propriétaires coutumiers savent qu'ils ne pourront pas engager un
lotissement pour plusieurs raisons :
- la mairie ou du moins la CUN empêche ce rôle
même aux communes à plus forte raison à des particuliers
;
- Etant tous des agriculteurs, ils n'ont pas les moyens
financiers conséquents pour faire un lotissement ;
- Ils seront bloqués systématiquement par la
mairie dont l'avis favorable permet au dossier de parvenir à la
deuxième étape ;
- Le décret n°97/306/PRN/ME/I n'est toujours pas
appliqué et d'ailleurs comment peut-il l'être étant
étendu que les parcelles sont vendues le plus souvent pendant que le
dossier est en instruction. Ce sont les acquéreurs aisés qui
prennent à leur charge l'installation des réseaux (en particulier
électricité et eau potable) au niveau de leurs parcelles. Les
riverains qui s'y raccordent participent généralement aux frais
engagés. Cette pratique constitue un transfert des charges des communes
vers les propriétaires privés. Et c'est parce que le lotissement
n'est jamais respecté selon la procédure légale que
beaucoup de problèmes se posent aujourd'hui à la
Communauté Urbaine de Niamey qui assure par ailleurs la maîtrise
d'ouvrage des projets de développement urbain au détriment des
cinq communes. Elle procède le plus souvent aux lotissements dans le but
de s'assurer des ressources financières qui ne vont plus dans le fonds
d'édilité mais dans le fonctionnement de la
collectivité.
Des pratiques spéculatives sont courantes et
contrairement aux règles fixées par les textes, la
Communauté Urbaine de Niamey accorde plusieurs parcelles à un
seul demandeur moyennant le versement d'une somme supérieure au prix
officiel. La différence va à celui qui a mené la
transaction. Ces acquéreurs « en gros » spéculent ainsi
sur l'augmentation de la valeur foncière, sous l'effet de la
raréfaction de l'offre de parcelles disponibles à la construction
qu'ils espèrent ainsi provoquer en « gelant » ainsi leurs
biens19. Le lotissement ne repose sur aucune stratégie
de planification. Seuls les quartiers les plus anciens de Niamey sont
aujourd'hui entièrement occupés. La périphérie de
la ville est constituée de lotissements avec des parcelles encore vides
que l'on ne cherche pas nécessairement à combler avant de lancer
une nouvelle opération. Selon le PRI-U (2000), les quartiers de Koira
Kano initial, Koira Kano extension, puis Koira Kano Nord, ont été
successivement mis en oeuvre alors que le premier site n'était pas
encore saturé. Plusieurs raisons expliquent ce phénomène.
Le manque de moyens et sans doute de volonté de l'Etat pour assurer le
contrôle de légalité, tant auprès des
autorités locales (vérification de la viabilisation des terrains
avant d'engager la réalisation du lotissement, contrôle du respect
du plan de lotissement approuvé) que des usagers (vérification de
la conformité des travaux au permis de construire accordé),
tendant à faire perdurer ces pratiques dont les impacts sont visibles
sur le terrain.
Les terrains non mis en valeur sont occupés par les
gardiens qui s'y installent en attendant que
les propriétaires soient
en mesure de les mettre entièrement en valeur ce qui parfois
avoisine
la décennie. Lors de la vente d'une parcelle, le
propriétaire reçoit un acte de cession qui lui
19 PRI-U op. cit. p.47
précise qu'il a cinq ans pour sa mise en valeur.
Passé ce délai, la collectivité peut retirer la parcelle
au propriétaire et la revendre en réalisant ainsi une plus value.
C'est une pratique rare car les propriétaires ayant compris cette
disposition, érigent un mur d'enceinte pour matérialiser le
début de mise en valeur qui évite l'expropriation.
Le système foncier traditionnel qui a su
résisté au droit islamique (en empêchant l'accès de
la femme à la propriété foncière) introduit avant
la colonisation a connu une mutation profonde avec l'avènement du droit
Napoléonien. Avec la colonisation, émerge une nouvelle conception
du droit basée sur l'immatriculation et la propriété
privée. C'est surtout l'Administration qui a profité de ce
système en s'octroyant à travers les textes le droit d'exproprier
les terres pour cause d'utilité publique. La gestion foncière
fait intervenir des acteurs aussi bien publics que privés qui ne
soucient guère du respect des textes. La procédure de lotissement
est longue et compliquée et ne satisfait qu'une minorité de
demandeurs compliquant ainsi l'accès à l'habitat pour la
majorité des citadins.