2- Sexisme et homophobie
Parce que cette identité genrée se construit
justement sur la naturalisation des différences et la
hiérarchisation des sexes, elle ne peut qu'être à l'origine
de stéréotypes et de comportements tels que le sexisme et
l'homophobie. En effet, ces identités font partie de ce que Bourdieu
appelle la violence symbolique liée à la domination masculine.
« Alors que, loin d'affirmer que les structures de dominations sont
anhistoriques, j'essaierai d'établir qu'elles sont le produit d'un
travail incessant (donc historique) de reproduction auquel contribuent des
agents singuliers (dont les hommes, avec des armes comme la violence physique
et la violence symbolique) et des institutions, familles, Eglise, Ecole,
Etat » (Bourdieu, 1998).
Si le sexisme est le fait de considérer qu'hommes et
femmes sont différents par nature et de ce fait de leur accorder un
traitement différencié, l'homophobie s'inscrit dans la même
économie de la domination masculine puisqu'elle remet en cause les
attributions de genre. Ainsi, l'école et les lieux de loisirs, en
produisant des filles et des garçons genré.e.s,
encouragent les attitudes de défiance vis-à-vis
de ceux.celles qui sont assigné.e.s à être
dominé.e.s, les individu.e.s vu.e.s comme femmes, et de ceux.celles qui
subvertissent les normes du genre, les individu.e.s vu.e.s comme
homosexuel.le.s, entre autres.
La participation de ces institutions à la socialisation
genrée des garçons a une place importante dans ce
phénomène. En effet, comme il a été souligné
plus haut, l'apprentissage de la masculinité se construit par le rejet
de tout ce qui n'est pas viril : femmes, homosexuel.le.s, hommes pas assez
masculins.
3- Un destin sexué
Si les filles réussissent généralement
mieux à l'école, elles n'accèdent pas à tous les
domaines du savoir et rentabilisent moins bien leur bagage scolaire que les
garçons. Marie Duru-Bellat (2008) souligne le handicap appris des
filles, celui de développer une plus grande dépendance
vis-à-vis des adultes. « Le ver de la confiance en soi
(inégale) est donc dans le fruit, et même si, à court
terme, les filles réussissent mieux à l'école, on peut
estimer que les inégalités ne sont que différées
[...] ».
Ainsi, les différences de socialisation entrainent des
différences de volonté d'orientation et de degrés
d'ambition, ou d'objectif à atteindre pour les filles et pour les
garçons. Il en découle une reproduction des positions
sexuées, l'école étant « l' "agence
d'orientation" qui fabrique des itinéraires masculins et
féminins » (Duru-Bellat, 2008). Bien sûr, ce n'est pas
l'école qui décide que certains métiers ou secteurs sont
difficilement accessibles pour une fille, ni même que les professions les
plus valorisées sont généralement réservées
aux hommes, mais le marché du travail.
Dans une autre mesure, Sylvie Ayral montre que, parce que les
sanctions scolaires sont des rites différenciateurs de sexe qui
consacrent la virilité, elles ont pour effet d'encourager les
garçons dans « une identité masculine caricaturale qui
s'exprime par le défi, la transgression, les conduites sexistes,
homophobes et violentes » (Ayral, 2011), ce qui a
nécessairement des conséquences au-delà de
l'école.
Finalement, si les stéréotypes
hétérosexistes sont reproduits par l'école et les lieux de
loisirs, cela encourage les représentations et les comportements
sexistes et homophobes dans ces institutions, mais aussi en dehors d'elles, et
a des implications tout au long de la vie des
individu.e.s qui y sont socialisé.e.s.
|