2- 2. Déroulement de la parasitose chez
l'homme:
La trichinellose se caractérise par trois phases
évolutives chez l'homme ( Figure n°6).
Figure n°6: Déroulement de la
trichinellose chez l'Homme.
2- 2. 1. Phase d'infestation:
L'ingestion de viande trichinée (renfermant des larves
enkystées (encapsulées ou non selon l'espèce)) non ou mal
cuite, est suivie par la lyse de la coque des kystes par les sucs digestifs.
L'épicuticule est altérée par la lyse
alcaline et par l'action de la bile, des enzymes digestives et
pancréatiques (Stewart G.L. et al., 1987).
Les larves libérées immatures vont alors
pénétrer dans l'épithélium des villosités
intestinales.
Dans l'intestin gréle, les larves vivent au sein des
entérocytes qu'elles tunnelisent sous une forme sinusoïdale
créant des syncytiums.
Elles ne sont extracellulaires que de façon transitoire
lorsqu'elles se mobilisent pour passer d'une cellule à l'autre.
Au cours de leur migration à la recherche d'un
partenaire, elles sont nommées alors L1M, subissent 4 mues successives
dans le tube digestif durant les douze heures qui suivent l'ingestion de la
viande contaminée.
Dans l'épithélium intestinal, elles deviennent
adultes après 36 heures, et sont capables de s'accoupler en
sécrétant des facteurs chimiotactiques facilitant leur rencontre.
L'accouplement se fait dans la lumière intestinale, les mâles
meurent juste après, et les femelles fécondées continuent
seules leur cycle, en s'enfonçant dans la muqueuse intestinale par les
glandes de Lieberkuhn et les plaques de Peyer (voie lymphatique). Les oeufs
éclosent dans l'utérus de la femelle et sont expulsés sous
forme de larves L1NN (larves « nouveau-nées »).
La ponte commence deux jours après l'accouplement et peut
durer jusqu'à six semaines, selon la réponse immunitaire
développée par l'hôte (Ripert C., 2007 ; In : Poirrier M.,
2010).
2- 2. 2. Phase de dissémination:
Les larves L1NN migrent par voie lymphatique, puis sanguine,
(seul stade libre du cycle) passant par le coeur droit et les poumons.
Le coeur gauche, atteint le jour suivant l'expulsion des larves,
les disperse dans la circulation générale.
Les larves atteignent les muscles striés (site de
prédilection) où elles sont capables de s'enkyster. Les autres
sont détruites par les défenses immunitaires.
Enfin, il a été décrit des localisations
erratiques dans l'encéphale, le foie, les poumons et le coeur. (Ripert
C., 2007 ; In : Poirrier M., 2010).
2- 2. 3. Phase d'enkystement:
(Poirrier M., 2010)
Les larves quittent les vaisseaux sanguins pour se retrouver
dans les fibres musculaires où elles poursuivront leur
développement en larves L1M (Figure n°7).
Celles-ci s'enroulent très rapidement en spirale,
d'où le nom de spiralis donné à la
première espèce de trichine découverte.
Figure n°7: Schéma d'une larve
infestant une fibre musculaire.
Les larves L1NN se caractérisent par leur tropisme pour
les cellules musculaires striées squelettiques, elles y
pénètrent et subissent des modifications selon un ordre
chronologique précis au cours des heures et des jours suivant
l'invasion, ce qui aboutira à une perte totale de la
différenciation (dédifférenciation) de la cellule
musculaire striée.
Le programme de transformation de la cellule musculaire
(re-différenciation) en cellule nourricière est
déclenché spécifiquement par la trichine et la survie de
cette cellule nourricière devient étroitement dépendante
de celle du parasite (Despommier D.D., 1998).
Un véritable dialogue existe entre le parasite et la
cellule hôte.
Des médiateurs protéiques d'origine parasitaire
sont impliqués mais aucun n'a encore été identifié
avec certitude.
La cellule nourricière est une conséquence unique
et originale de l'association de la cellule hôte avec la larve L1
infestante des espèces encapsulées de Trichinella sp .
Elle fonctionne vraisemblablement pour la nourrir aussi bien que pour la
protéger des réactions immunitaires (Figure
n°8).
La fibre musculaire parasitée se trouve ainsi
profondément modifiée (Despommier D.D.,1990).
Figure n°8: Formation de la cellule
nourricière. Il y a au moins deux phases distinctes au
processus de formation de la cellule nourricière : une
dédifférenciation de la cellule musculaire et une autre de
re-différenciation de la cellule musculaire en cellule
nourricière.
L'élaboration de la cellule nourricière dure
environ 20 jours, on constate une disparition des myofilaments, un important
épaississement du sarcolemme et une augmentation des tubules
transverses. La larve L1 s'enroule sur elle-même dans une cavité
ovoïde circonscrite par une paroi composée de fibres de
collagène. Parallèlement, un réseau capillaire se met en
place, il sert à apporter les nutriments nécessaires à la
survie de la larve.
Figure n°9: Schéma d'une larve de
Trichinella spiralée dans la capsule de collagène et formation
du réseau capilaire.
Les larves L1M encapsulées dans les muscles peuvent
survivre des années (voir indéfiniment) après
l'infestation, (Figure n°9) mais peuvent
dégénérer suite à une synthèse abondante de
collagène étouffant la cellule nourricière qui se
calcifie.
Le processus d'enkystement des larves dans le muscle
strié, survient environ trois semaines après l'ingestion de
viande trichinée.
Le cycle de Trichinella est original, puisqu'il peut
se dérouler chez un seul et unique hôte, omnivore ou carnivore,
dont l'homme, et dans certaines situations particulières, il peut se
réaliser également chez les herbivores (le cheval !!).
On le qualifie de cycle auto-hétéroxène
(Ripert C., 1998).
Ce cycle converge étonnamment vers un cycle viral du fait
de la localisation intra cytoplasmique de Trichinella, d'une
spécificité tissulaire élective et de son amplification
chez un même hôte (Boireau P. et al., 2001).
L'hôte est à la fois (Ripert C., 1998) :
- Hôte définitif, hébergeant les formes
adultes du nématode.
- Hôte intermédiaire, où évoluent les
formes larvaires.
- Vecteur (statique): les tissus parasités doivent
être ingérés par un nouvel hôte pour assurer la
transmission du parasite.
- Réservoir : les larves enkystées peuvent vivre
des années hébergées dans les muscles de leur hôte,
en particulier, si ce dernier appartient à une espèce très
réceptive (carnivores).
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