DEDICACE
A :
- Mon père LEMOGE Jean, qui m'a appris
à semer et à récolter sans
attendre des autres
- Ma mère TOUMBOU Marie, qui m'a toujours
supporté en maux et en
bien
- Ma grand-mère AMINFACK Julienne, qui a
toujours été un guide
pour mes pas,
- Mes oncles FOUEFACK Thomas, TADONTSA Michel, LEMOGE
Etienne
- Mes frères AZONPI Arnaud, TAKAFO Léon,
TANGO Jordan, que ce devoir leur serve de guide et d'un exemple
à suivre.
- Mes soeurs DONGMO Anne, MAKEHOUNG
Pauline, MASSEMO Virginie
Ce travail est le fruit de tous vos sacrifices à mon
endroit. Qu'il fasse votre fierté
REMERCIEMENTS
Au moment où ce travail s'achève, il m'est
particulièrement agréable d'adresser mes remerciements à
certaines personnes qui ont contribué à sa réalisation.
Ma gratitude va tout d'abord à l'endroit de mon
directeur, le Professeur ANOUKAHA François, qui m'a
fait l'insigne honneur de diriger ce mémoire et a suivi sa
réalisation avec beaucoup d'intérêts et de
dévouement. Sa disponibilité, son dynamisme et ses judicieux
conseils m'ont été d'une estimable aide dans l'accomplissement de
ce travail.
Ma reconnaissance va également à l'endroit du
professeur KALIEU ELONGO Yvette Rachel, Vice- Doyen, qui s'est
investie pour parachever notre formation, faisant de la recherche, une
priorité.
Je remercie également le Docteur DJEUFACK
TEMGWA René et le Docteur NPONDO Guy pour
leurs judicieux conseils.
Je remercie également tous les enseignants pour la
formation qu'ils m'ont donnée et qui ont guidée mes premiers pas
dans la recherche scientifique et dont la rigueur et le travail ont
été pour eux une source d'encouragement.
Ma gratitude va également à l'endroit de
M. ASSONTSA Robert, KEMCHEKEM Bruno,
pour toutes leurs observations et conseils.
J'exprime ma gratitude à tous mes camarades de
promotion, notamment TCHOUPOU MEFACK Georges, NGUIFFEU Eddy, NGAPA
Théophile, TCHINDA MABONG Coretta, MAGNE FOSSO Viviane, NDIFFO Ludovic,
NGUENA Landry pour le climat qu'ils ont su maintenir tout au long de
notre formation ainsi que pour leur soutien indéfectible.
Mes remerciements vont à l'endroit de tous mes amis et
en particulier : FEUDJIO Mano, EKEME Erick, DOUNTIO Telesphore,
EWANE Herve, KENNE Yves, NGUEFFEU Augustin, PEASSO Bruno, NENOUH FOPA
Nadège, KAGOU KENNA Patrice, DOUNKEU Huguette, DJUNE
Yvette.
Enfin, je voudrais remercier du fond du coeur tous ceux qui,
de près ou de loin, ont contribué à la réalisation
de ce travail. Dans l'impossibilité de citer ici, nommément tous
les concernés, je prie tout un chacun de s'y reconnaître et de
trouver dans ce geste l'expression de ma profonde gratitude.
PRINCIPALES ABREVIATIONS
Al: Alinéa
Art : Article
AUSCGIE: Acte Uniforme sur le droit des sociétés
commerciales et du Groupement d'Intérêt Economique.
AUC : Acte Uniforme relatif à la
comptabilité des entreprises.
Bull.Joly: Bulletin Joly
Cass.com: Cour de cassation, chambre commerciale
Cass.civ : Cour de cassation, chambre civile
CEMAC : Communauté Economique et Monétaire de
l'Afrique Centrale
Cf : Confère
CNCC : Commission Nationale des
Commissaires aux Comptes
CPC : Code Pénal
Camerounais
CPCC : Code de Procédure Civile et Commerciale
CPF : Code Pénal
Français
Ed : Edition
Gaz. Pal Gazette du Palais
JCP : Jurisclasseur périodique
LGDJ : Librairie Générale de Droit et de
Jurisprudence
LITEC : Librairies Techniques
OHADA : Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du
Droit des Affaires
ONECCA Ordre National des Experts Comptables du Cameroun
Op.cit : Cité plus haut, comme déjà
cité
P : Page
P.U.A : Presses Universitaires d'Afrique
P.U.F : Presses Universitaires de France
Rev.Soc : Revue des Sociétés
S : Suivant
SA : Société Anonyme
SCS : Société en Commandite Simple
SNC : Société en Nom Collectif
SARL : Société à
Responsabilité Limitée
T : Tome
UDEAC : Union Douanière et Economique de l'Afrique
Centrale.
Vol Volume
SOMMAIRE
INTRODUCTION GENERALE
1
PREMIERE PARTIE : L'EFFICACITE
RECHERCHEE DU CONTROLE DES COMMISSAIRES AUX COMPTES DANS LA SOCIETE
ANONYME
9
CHAPITRE I : LES MESURES PREVENTIVES
11
Section I : L'AMENAGEMENT GRADUEL DU
STATUT DU COMMISSAIRE AUX COMPTES
11
Section II : L'HARMONISATION DU CADRE
D'EXERCICE DE LA MISSION DE CONTROLE
22
CHAPITRE II : LES MESURES CURATIVES
34
Section I : LES ACTIONS CONTRE LES
PERSONNES : LES RESPONSABILITES CONSECUTIVES AU CONTROLE
34
Section II : LES ACTIONS CONTRE LES
ACTES : LA NULLITE DES DELIBERATIONS.
64
DEUXIEME PARTIE : L'EFFICACITE LIMITEE DU
CONTROLE DES COMMISSAIRES AUX COMPTES DANS LA SOCIETE ANONYME
69
CHAPITRE I : LES LIMITES TIREES DU STATUT DES
COMMISSAIRES AUX COMPTES
71
Section I : L'INDEPENDANCE FACTICE DES
COMMISSAIRES AUX COMPTES
71
Section II : LES ENTRAVES AUX PREROGATIVES
DES COMMISSAIRES AUX COMPTES
78
CHAPITRE II : LES LIMITES TIREES DES MISSIONS
DU COMMISSAIRE AUX COMPTES
88
Section I: LA DEFINITION INCORRECTE DE
CERTAINES MISSIONS
88
Section II : LES DIFFICULTES D'EXECUTION
DES MISSIONS
93
CONCLUSION GENERALE
101
RESUME
Le contrôle des sociétés anonymes est un
problème récurent dans tout système économique.
Il est la condition de la sécurité des investisseurs. Dans
l'espace OHADA, il est confié au commissaire aux comptes,
professionnel chargé de contrôler la comptabilité de
la société, de la certifier et, plus généralement,
de vérifier que la vie sociale se déroule dans des conditions
régulières. Ses fonctions ont connu une
véritable mutation. De contrôleur des comptes, il est devenu le
gardien de la régularité dans les sociétés et
organismes assujettis. Pour les mener efficacement, le commissaire aux comptes
se doit d'être indépendant et disposer des compétences
requises : la qualification de ce professionnel et les moyens qui lui ont
été conférés le montrent. Il a en effet, un droit
d'information qui implique que lui soient communiqués divers documents,
ce droit étant assorti d'un large pouvoir d'investigation. A l'issue du
contrôle opéré, il doit informer les acteurs sociaux et
porter à la connaissance du Procureur de la République les faits
délictueux constatés. On peut malgré toutes ces
prescriptions déplorer l'absence d'une jurisprudence fournie en la
matière. A ce premier obstacle, il faut ajouter l'épineux
problème de leur indépendance qui subit aujourd'hui les
contrecoups des dirigeants véreux. Tous ces obstacles font que les
résultats restent très mitigés. Des innovations
législatives restent attendues surtout sur le plan de leur
indépendance réelle. A-t-on oublié que
l'indépendance est la première vertu de toute fonction de
contrôle ?
Abstract
The control of joint stock companies is a recurrent problem in
every economic system. It is the condition of the security of investors. Within
the OHADA sphere, this task is conferred to the statutory auditor,
professionally charged with the control of the accounting machinery of the
company, to certify and more generally to verify that the corporations life is
moving in favourable conditions. These functions have therefore undergone
remarkable transformation. To control of accounts, he has become the watchdog
of regulating in companies and others organs submitted to his control. Thus
effectively perform his duties, the statutory auditor is supposed to be
independent and to dispose of required competences. The qualification of this
professional and the means which have been conferred to him is thus
demonstrated. In effect, the right to information which indicates that he is to
be communicated diverse documents is a right coming from an extended power of
investigation. Thus, from the control undertaken, he is supposed to inform all
the social actors and to bring to the knowledge of the State Counsel all
incriminating facts discovered. But, we can discover that despite these
prescriptions, which have been put in place, there is inadequate case law in
this domain. From this first obstacle, it is necessary to add the striking
problem of their independence which today suffers from the domination of
malevolent directors. These obstacles therefore stand as a gateway for very
limited results. Thus legislative innovations remain awaited especially on the
issue of their real or actual independence. We should not therefore forget that
their independence is the first virtue of all the function of control.
INTRODUCTION GENERALE
Née de la volonté politique des Etats de la
zone franc à travers le Traité de Port-Louis le 17 octobre 1993
et précédée en cela d'un vieux rêve de grands
juristes africains de réaliser l'intégration juridique en Afrique
au lendemain des indépendances1(*), l'OHADA2(*) s'est donnée pour ambition de garantir la
sécurité juridique et judiciaire des opérateurs
économiques régionaux et étrangers en créant un
cadre moderne, adapté à la conduite des affaires, essentiel pour
le développement économique et social de tout le continent
africain dans son ensemble3(*).
Parmi les disciplines juridiques4(*), objet de l'importante oeuvre d'harmonisation
législative, figure en bonne place le droit des sociétés,
matière particulièrement importante en raison du rôle
prépondérant que jouent les sociétés commerciales
dans l'économie d'un pays. Elles sont la clé de voûte de
tout décollage économique. Ainsi « judicieusement
utilisée, la société peut se révéler
être un instrument précieux de développement
économique, mais encore faut-il que les règles juridiques qui
gouvernent sa création et sa vie soient établies en fonction des
objectifs de développement »5(*). Or, le développement de
celle-ci dépend largement de sa crédibilité, parce que sa
gestion est saine, transparente et responsable6(*), ce qui malheureusement était loin d'être
le cas dans de nombreux pays formant aujourd'hui l'espace OHADA.
En matière de droit des sociétés, dans
l'ensemble desdits Etats, la situation était en tout
cas « caractérisée par une certaine balkanisation
juridique doublée par endroits d'une obsolescence et d'une
vétusté des règles, ainsi que par une pauvreté
juridique contrastant .avec le rôle que jouent les groupements d'affaires
et, plus particulièrement les sociétés commerciales dans
le développement de nos pays »7(*). Ceci s'explique sans doute par le fait
que « la grande majorité des Etats africains en sont
demeurés aux textes hérités de la colonisation et qui sont
par voie de conséquence vétustes, désuets et
inadaptés à la situation actuelle »8(*) et dont la substance
était en grande partie constituée de la vieille loi
française du 24 juillet 1867 sur les sociétés qui avait
fait l'objet des mesures d'extension dans les colonies. Il devenait en tout cas
urgent de procéder aux utiles corrections et adaptations
nécessaires9(*).
On comprend dès lors le vif intérêt qui a
suscité les Etats africains de créer au sein de l'espace
OHADA « un droit unique pour l'ensemble des Etats membres ;
un droit adapté aux besoins réels de l'entreprise, en particulier
dans le domaine du financement et du management ; un droit adapté
au particularisme des économies africaines et enfin, un droit qui assure
la sécurité des créanciers, des tiers et des
investisseurs »10(*).
Conscient de ces enjeux, les auteurs de la réforme ont
adopté une conception assez moderne des sociétés
commerciales11(*) tout en
leur donnant une définition nouvelle12(*). Une attention toute particulière est
accordée à la SA13(*). Cela s'explique notamment par la multiplicité
des articles à elle consacrée. Un auteur14(*) faisait déjà
remarquer à cet effet que « la société
anonyme est le domaine par excellence des innovations les plus importantes et
les plus modernes de l'Acte sur les sociétés ». Au
menu des grandes innovations, s'inscrit l'organisation15(*) et le contrôle de la SA.
Dans le Petit Larousse Illustré16(*), le terme contrôle
a plusieurs sens. Outre celui de
« vérification », on peut en retenir
deux : « action de contrôler, de surveiller quelqu'un
ou quelque chose, examen minutieux » et « action
de faire contrôler quelque chose, un pays, un groupe, son comportement,
d'avoir sur eux un pouvoir, une maîtrise ». Il y a donc
deux grands sens du terme contrôle : le contrôle-surveillance
et le contrôle-maîtrise. Cette position a été
également adoptée dans le vocabulaire du Doyen CORNU17(*)où l'on peut lire :
« maîtrise, vérification et
surveillance », les deux dernières ayant des applications
particulières en droit des sociétés. Le terme
« contrôle » ici utilisé est donc
« synonyme de surveillance ou de
vérification »18(*), ce qui a sans doute une influence sur les
différentes formes de contrôle.
La loi française du 24 juillet 1867 organisait deux
types de contrôle des S.A : un contrôle interne et un
contrôle externe. Le premier était exercé personnellement
par les actionnaires et les dirigeants. Ce système a rapidement
montré son inefficacité pratique. Le professeur TUNC faisait
déjà remarquer l'inefficacité de l'assemblée
générale des actionnaires, la qualifiant d'organe presque fictif.
Selon lui, la majorité des actionnaires « abdique son
droit de vote, normalement entre les mains de la direction. Les pouvoirs de
décision et de contrôle de l'organe souverain sont
confisqués par les organes de direction, et cela suffirait à
fausser le mécanisme légal »19(*). De son côté, le
Doyen Ripert remettait en cause le caractère démocratique de la
SA au motif que « la décision de l'assemblée est
une approbation aveugle de la décision du conseil d'administration (...)
les actionnaires sont résignés à ne rien comprendre,
à ne rien savoir. Ils se fient aux administrateurs. Le régime
démocratique des sociétés aboutit au triomphe d'une petite
minorité de capitalistes »20(*).
Le contrôle externe exercé par le commissaire aux
comptes n'était non plus exempt de critiques pour des causes imputables
aux actionnaires et aux dirigeants sociaux.
En ce qui concerne les actionnaires, l'article 32 de la loi de
1867 disposait que « l'assemblée générale
des actionnaires désigne un ou plusieurs commissaires qui ont le mandat
de vérifier les livres, la caisse, le portefeuille et les valeurs
mobilières de la société, de contrôler la
régularité et la sincérité des inventaires et des
bilans ainsi que de l'exactitude des informations données dans le
rapport du conseil d'administration ». Tout se passe comme si le
commissaire aux comptes était le mandataire des actionnaires, parce que
nommé par eux, il doit garantir leurs intérêts
conformément aux règles du mandat. L'article 43 de ladite loi
énonçait clairement que « l'étendue et
les effets de la responsabilité des commissaires aux comptes sont
définis selon les règles du mandat ». Les
actionnaires avaient alors la possibilité de les révoquer
à tout moment comme ils l'entendaient surtout à une époque
où ils « n'admettaient pas qu'un contrôleur
externe puisse, même en leur nom et dans l'intérêt social,
donc par ricochet du leur, procéder à des vérifications
considérées comme attentatoires à leur
dignité »21(*).
De leur côté, « les dirigeants
acceptaient mal le principe même du contrôle. Ils
s'efforçaient de cantonner les commissaires aux comptes dans des
vérifications formelles et illusoires. Les commissaires étaient
nommés sans condition de compétence ou d'honorabilité. Ne
rapporte-t-on pas que certains d'entre eux étaient aveugles (au sens
physique du terme), que certains ne savaient ni lire, ni compter !
Désignés pour un an, mal rémunérés, ne
jouissant d'aucune indépendance, les commissaires se bornaient à
proposer l'approbation des comptes qu'ils n'avaient souvent pas
vérifiés »22(*).
Ce constat malheureux fait comprendre que les commissaires aux
comptes sous l'empire de la loi de 1867 restée applicable plus d'un
siècle en Afrique étaient pour la plupart « des
personnages sans pouvoir, sans prestige et sans
indépendance »23(*). Dés lors, le doute le plus grand ne pouvait
qu'exister sur le sérieux et le caractère approfondi de leur
contrôle.
Instruit des lacunes de la vieille législation, le
législateur OHADA reprend les formes classiques de contrôle de la
SA en les modernisant. La modernisation concerne particulièrement le
contrôle externe, le contrôle interne n'ayant pas connu de grands
bouleversements24(*). Le
législateur a renforcé le contrôle externe de la SA. Il
est exercé par des commissaires aux comptes. Si leur présence
reste en principe facultative dans certaines sociétés telles les
S.C.S, S.N.C et les S.A.R.L, le législateur institue leur
présence obligatoire dans cette dernière lorsque certains
critères sont remplis25(*). Leur présence a toujours été
obligatoire dans les SA. Le législateur leur fait obligation de
désigner un commissaire aux comptes et un suppléant26(*), d'en avoir aux moins deux
commissaires aux comptes et deux suppléants si la société
fait appel public à l'épargne27(*). Il attache ainsi une importance particulière
à leur présence dans la SA, d'où le choix de cette forme
sociétaire comme cadre de notre étude.
Forme sociétaire jouant un rôle économique
de premier plan28(*) dans
la mondialisation de l'économie, la SA constitue un
« merveilleux instrument du capitalisme
moderne »29(*). Mais seulement, pose des grandes inquiétudes
quant à la sécurisation des immenses capitaux qui y sont investis
d'où l'idée d'une protection de l'épargne. Le maniement
des capitaux d'autrui sans aucun contrôle sur les dirigeants sociaux est
normalement inadmissible. La volonté d'inciter les épargnants
à investir leurs capitaux dans les sociétés suppose la
mise en place des garanties de sécurité de ceux-ci, notamment
l'institution d'un contrôle efficace30(*). A cette fin, le législateur communautaire
africain a choisi le commissaire aux comptes31(*) d'où le choix du thème :
l'efficacité du contrôle des commissaires aux comptes dans
la société anonyme (OHADA).
La présence des commissaires aux comptes dans le
contrôle des SA apparaît ainsi comme un rempart contre l'arbitraire
des dirigeants, « un contrepoids au risque
d'absolutisme »32(*) que le pouvoir de gestion peut provoquer. Ce
dispositif vise à mettre en exergue dans le nouveau visage juridique
africain, le rôle moteur que doit jouer le commissaire aux comptes dans
la SA « devenue l'unique société de capitaux qui
puisse être constituée dans les Etats membres de
l'OHADA »33(*).
Le sujet ainsi précisé appelle des
interrogations majeures : comment l'institution du commissariat aux
comptes telle que réglementée et organisée par l'acte
uniforme contribue-t-elle à l'exercice d'un contrôle efficace dans
la SA ? Autrement dit, l'apport de l'acte uniforme est-il suffisant, pour
aider à un contrôle crédible des commissaires aux comptes
dans la SA ?
Une lecture approfondie de l'acte uniforme indique
l'immensité des innovations pour réaliser ce dessein. Du nouveau
régime, toutes les SA sont tenues d'avoir au moins un commissaire aux
comptes. Le niveau de compétence est accru et attesté par
l'inscription sur une liste ; leur indépendance est garantie
par de nombreuses incompatibilités et l'assurance d'une certaine
stabilité dans leurs fonctions ; leur domaine d'investigation va de
plus en plus grandissant en concomitance avec leur responsabilité
renforcée, et pour donner plus de vigueur à sa reforme, le
législateur prévoit des sanctions pénales et civiles
contre les dirigeants qui s'abstiendront ou feront obstacle à leurs
missions et contre les commissaires aux comptes malhonnêtes qui garderont
le silence sur les fautes des dirigeants ou se feront complices des
administrateurs qu'ils ont la charge de contrôler .
La SA étant le siège d'une multiplicité
d'intérêts parfois divergents qu'il importe de contrôler au
mieux pour un bon fonctionnement de l'entreprise, il est donc question
aujourd'hui pour le législateur africain, à travers un
contrôle des commissaires aux comptes de mettre la lumière
où règne l'opacité et l'obscurité, de
rééquilibrer les rapports de force, de libérer les talents
asphyxiés par la pesanteur et les dominations, « afin de
sauvegarder et de protéger l'intérêt
social »34(*). C'est dire tout l'intérêt que
présente une telle étude.
Sur le plan théorique, cette étude montre
l'importance de la bonne gouvernance et de la transparence des informations
financières dans la SA
Sur le plan pratique, elle répond à la
protection des divers intérêts en présence et antagonistes
dans la SA. Un contrôle minutieusement conduit intéresse au plus
haut niveau les investisseurs. Ces derniers recherchent davantage une structure
juridique qui assure la pérennité et la fiabilité de
l'entreprise, « un droit qui leur évite le dépaysement
juridique »35(*). En présence des comptes certifiés par
un professionnel en la matière, ils sont plus rassurés, ce qui
peut favoriser la création des nouvelles entreprises.
Il intéresse aussi les actionnaires, car, il est
d'ailleurs organisé dans leur intérêt. Il leur permet de
voter la résolution concernant l'approbation des comptes en toute
connaissance de cause. Il intéresse aussi les actionnaires minoritaires
facilement enclins à soupçonner les dirigeants de
méconnaître leurs intérêts au profit de la
majorité.
Il présente un intérêt tout aussi
particulier pour les dirigeants sociaux. Sans doute, le commissaire aux comptes
est amené à dénoncer les irrégularités ou
les inexactitudes constatées, ce qui n'est jamais du goût des
dirigeants. Cependant, une comptabilité bien faite devient un outil de
gestion. Le commissaire aux comptes est en mesure de conseiller les dirigeants
sur la meilleure manière de tenir les comptes afin de mieux
éclairer la bonne marche de l'entreprise. Son contrôle peut
même attirer leur attention sur des irrégularités d'ordre
juridique.
Enfin, le contrôle des comptes intéresse les
tiers qui envisagent ou qui ont déjà traité avec la
société. Le contrôle d'un spécialiste leur permet
d'avoir des informations précieuses sur la situation de leur
cocontractant36(*). A
l'inverse, un contrôle des comptes sérieux permet aux
sociétés de se procurer du crédit dans des conditions
avantageuses en prouvant sa solvabilité.
En définitive, compte tenu de la diversité des
intérêts qui se rencontrent dans la SA, il apparaît
à la lecture des dispositions relatives à l'AUSCGIE que le
législateur communautaire africain a voulu rendre plus efficace le
contrôle opéré par les commissaires aux comptes dans la SA.
Ainsi, l'efficacité dudit contrôle est manifestement
recherchée (première partie), mais n'est pas atteinte du fait de
certains obstacles qui font qu'elle reste toujours limitée
(deuxième partie).
PREMIERE PARTIE : L'EFFICACITE RECHERCHEE DU CONTROLE DES
COMMISSAIRES AUX COMPTES DANS LA SOCIETE ANONYME
« Un contrôle
des comptes qui serait laissé au gré des fantaisies des
associés ou des dirigeants ne serait qu'une leurre et risquerait de se
révéler inévitablement
déceptif »37(*). C'est la raison pour laquelle la loi du 24 juillet
1867 avait pensé l'institution du commissaire aux comptes. Cependant,
l'institution ne trouva pas un terrain favorable lui permettant de
s'épanouir à cause de la méfiance des dirigeants à
leur égard. Institué pour contrôler la gestion des
dirigeants, le système produisit de très mauvais résultats
du fait de leur dépendance excessive à l'égard des
dirigeants sociaux.
Conscient de cette situation et désireux de
rendre efficace leur contrôle, le législateur français
dans la loi du 24 juillet 196638(*) sur les sociétés commerciales et le
décret du 12 août 196939(*) annonce et réalise une organisation solide des
commissaires aux comptes, dans des conditions garantissant leur
moralité, leur indépendance et leur qualification technique
Le législateur OHADA n'est pas resté en
marge de cette évolution. C'est ainsi qu'il a fait sienne cette position
française du contrôle des sociétés dans l'acte
uniforme relatif aux sociétés commerciales et du groupement
d'intérêt économique. Pour le rendre plus efficace dans sa
sphère, il a jugé de la nécessité d'édicter
des mesures préventives (chapitre I) renforcées par des mesures
curatives (chapitre II).
CHAPITRE I : LES MESURES PREVENTIVES
Sous l'empire de la loi du 24 juillet 1867, restée
applicable dans plusieurs Etats africains jusqu'à l'avènement de
l'AUSCGIE, le commissaire aux comptes dans les SA n'était pas
entouré de toutes les garanties qu'on est en droit d'attendre d'un
organe compétent, d'un magistrat de chiffres. D'ailleurs, son article 43
était formel sur la question « l'étendue et
les effets de la responsabilité du commissaire aux comptes envers la
société sont définis selon les règles du
mandat ».
Avec l'AUSCGIE, s'arrête ce simulacre. Dans le
souci de rendre efficace le contrôle des commissaires aux comptes, le
législateur a prévu une liste de mesures préventives.
Elles vont de l'aménagement graduel du statut du commissaire aux comptes
(section I) à l'harmonisation du cadre d'exercice de la mission de
contrôle (section II).
Section I : L'AMENAGEMENT GRADUEL DU STATUT DU
COMMISSAIRE AUX COMPTES
Pour qu'un contrôle des SA soit
efficace, un statut professionnel adapté s'imposait40(*). Le législateur
africain l'a très tôt compris. La qualité du commissaire
aux comptes n'est plus attribuée comme par le passé à
toute personne sans condition de compétence et d'honorabilité.
L'AUSCGIE soumet le nouveau costume du contrôleur à des conditions
très rigoureuses.
Pour atteindre l'efficacité recherchée,
il exige que le candidat présente des garanties d'indépendance et
des compétences requises. Ainsi, il a sensiblement renforcé les
garanties d'indépendance des commissaires aux comptes (§I) et
rationalisé les conditions d'accès à la profession
(§II).
§I : Le
renforcement sensible de l'indépendance du commissaire aux comptes
L'indépendance est la qualité nécessaire
à tout contrôle, à tout jugement, à l'expression de
toute opinion significative en quelque domaine que ce soit41(*). L'indépendance du
commissaire aux comptes est une condition implicite mise sur pieds par
l'AUSCGIE pour l'exercice correct du contrôle légal. Son
application est assurée en premier lieu par des incompatibilités
(A) qui précédent d'autres mesures (B) ayant les mêmes
finalités.
A- Les incompatibilités :
garantie principale de l'indépendance
La fonction de régularité assumée par le
commissaire aux comptes dans la SA ne peut être que le fait d'un organe
indépendant. L'indépendance du commissaire aux comptes est en
premier lieu assurée par les incompatibilités42(*) dont le législateur a
prévu toute une diversité.
Si certaines situations empêchent en
général l'exercice du commissariat aux comptes, d'autres
empêchent qu'un commissaire aux comptes exerce la mission de
contrôle auprès d'une société
déterminée. D'autres enfin empêchent l'exercice de la
profession avant l'écoulement d'un certains temps. Dans le premier cas,
il s'agit des incompatibilités générales (1), dans le
second des incompatibilités relatives (2) et dans le
troisième des incompatibilités temporaires (3).
1. Les
incompatibilités générales
Réitérant sur ce point la
solution introduite par l'article 219-3 al 3 de la loi du 24 juillet 1966,
l'article 697 AUSCGIE dispose que les fonctions du commissaire aux comptes sont
incompatibles avec tout acte de nature à porter atteinte à son
indépendance ; avec toute activité commerciale qu'elle soit
exercée directement ou par personne interposée ; avec tout
emploi salarié.
Cependant, cette dernière incompatibilité fait
l'objet de dérogations, un commissaire aux comptes peut occuper un
emploi salarié rémunéré chez un
expert-comptable. Cet emploi doit respecter certaines conditions afin que
l'indépendance ne soit pas altérée. De ce fait,
l'expert-comptable qui rémunère le commissaire aux comptes ne
doit pas être le réviseur des comptes de la société
contrôlée par ce dernier.
Ces incompatibilités ont pour but d'éviter que
le contrôleur ne soit sur la dépendance du contrôlé.
Par conséquent, ne peuvent être nommés commissaires aux
comptes les personnes qui reçoivent de la société une
rémunération quelconque ou qui détiennent un
intérêt43(*)
dans celle-ci. On pourrait craindre que le commissaire aux comptes qui est
salarié de la société n'exerce son contrôle qu'avec
mollesse de peur que la dénonciation d'une irrégularité
n'entraîne son licenciement44(*). Il s'agit aussi d'interdire à
l'expert-comptable qui conseille la société ou qui assure la
révision des comptes d'acquérir ensuite la qualité de
contrôleur. L'article 697 apparaît ainsi comme le domaine des
incompatibilités générales puisqu'il ne traite aucunement
des incompatibilités spéciales.
2. Les
incompatibilités spéciales
Le siège en la matière est
l'article 698 AUSCGIE. Bien qu'il n'emploie nullement le
terme « incompatibilités »,
certains auteurs45(*)
pensent pourtant que cet article traite comme l'article 697 AUSCGIE des
incompatibilités, qui cette fois sont plutôt spéciales et
diffèrent selon qu'il y'a lien de parenté (a) ou des conflits
d'intérêt (b).
a. Les incompatibilités résultant des
liens de parenté
L'article 698 AUSCGIE a établi une
série d'incompatibilités à l'égard des commissaires
aux comptes qui ne peuvent pas contrôler un groupement dans lequel ils
ont des liens de parenté.
Ainsi ne peuvent être commissaires aux comptes d'une SA
les conjoints des fondateurs, apporteurs, bénéficiaires
d'avantages particuliers, dirigeants sociaux de la société ou de
ses filiales ; les parents jusqu'au quatrième degré
inclusivement, des personnes visées ci-dessus. Sont ainsi visés
tous les parents en ligne directe : parents, grands-parents,
arrière-grands-parents, enfants, petits-enfants,
arrière-petits-enfants.
En ligne collatérale, l'incompatibilité
s'applique aux frères et soeurs, oncles et tantes, grands-oncles et
grands-tantes, neveux et nièces, cousins germains; les
sociétés de commissaires aux comptes dont l'un des dirigeants,
soit l'associé ou l'actionnaire exerçant les fonctions de
commissaires aux comptes a son conjoint qui se trouve dans l'une des situations
prévues au paragraphe 5° du présent article. Le conjoint
doit être rémunéré à titre permanent par la
société contrôlée.
En principe, le lien de parenté n'est pas en
lui-même, révélateur d'un défaut
d'indépendance. Mais, parce que dans le monde des affaires, l'harmonie
entre l'affection familiale et l'obligation d'indépendance risque bien
souvent de s'établir aux dépens de cette dernière,
l'existence d'un lien de parenté est pris en compte dans tout son
ensemble, ce qui permet d'énumérer tous les cas de figure.
Si l'on veut bien que la SA soit « une maison de
verre »46(*), il
faut que l'organe de contrôle brille par sa limpidité. C'est la
raison pour laquelle à coté des incompatibilités
spéciales résultant des liens de parenté, la loi y enjoint
celles découlant des conflits d'intérêts.
b. Les incompatibilités spéciales
découlant des conflits d'intérêts
Prenant en compte l'importance des intérêts dans
la SA, l'article 698 précité dispose que ne peuvent être
nommés commissaires aux comptes les fondateurs, apporteurs,
bénéficiaires d'avantages particuliers, dirigeants sociaux de
sociétés ou de ses filiales, ainsi que leur conjoint ;
les dirigeants sociaux de sociétés possédant le
dixième du capital de la société ou dont celle-ci
possède le dixième du capital, ainsi que leur conjoint ; les
personnes qui, directement ou indirectement, ou par personne interposée,
reçoivent, soit des personnes figurant au paragraphe1°) du
présent article, soit de toute société visée au
paragraphe 3°) du présent article, un salaire ou une
rémunération quelconque en raison d'une activité
permanente autre que celle de commissaire aux comptes ; il en est de
même pour les conjoints de ces personnes ; les
sociétés de commissaires aux comptes dont l'un des
associés, actionnaires ou dirigeants se trouve dans l'une des situations
visées aux alinéas précédents.
L'article 698 est certes riche dans son
énumération, mais n'appréhende pas tous les cas
d'incompatibilités découlant des conflits
d'intérêts. Ainsi, le texte ne prévoit pas
l'incompatibilité entre la qualité d'actionnaires et la fonction
de commissaires aux comptes alors même qu'à notre sens, il est
difficile d'admettre qu'un associé majoritaire puisse se faire nommer
commissaire aux comptes sans rompre l'égalité entre les
actionnaires.
En outre, bien que le paragraphe 4°) du même
article dispose que la fonction de commissaire aux comptes est incompatible
avec les personnes qui directement ou par personnes interposées
reçoivent de la société une rémunération
quelconque à raison d'une activité autre que celle du commissaire
aux comptes, des exceptions sont faites en ce qui concerne les missions
particulières de révision effectuées par le commissaire
aux comptes pour le compte de la société47(*). Les commissaires aux comptes
peuvent même recevoir des rémunérations de la
société pour les missions temporaires d'objet limité, et
entrant dans le cadre de leurs fonctions, dès lors que ces misions leur
sont confiées par la société à la demande d'une
autorité publique48(*).
Mise à part ces deux exceptions, toute autre
situation contraire à l'esprit de l'article 698 serait constitutive
d'incompatibilités spéciales à moins que l'on se trouve
dans le domaine des incompatibilités temporaires.
3. Les
incompatibilités temporaires
Toujours motivé par le souci d'indépendance
garantissant un contrôle sérieux des comptes, le
législateur OHADA est allé au-delà des
incompatibilités générales et spéciales pour
consacrer une série d'interdictions aux articles 699 et 700 AUSCGIE.
Pour éviter les états d'âme ultérieurs, ceux qui ont
été « administrateurs généraux,
administrateurs généraux adjoints, directeurs
généraux adjoints, gérants ou salariés d'une
société ne peuvent pas être nommés commissaires aux
comptes de la société qu'ils contrôlent moins de cinq ans
après la cessation de leurs fonctions dans ladite
société.
Pendant le même délai, ils ne peuvent être
nommés commissaires aux comptes dans les sociétés
possédant 10% du capital de la société dans laquelle elles
exerçaient leurs fonctions ou dont celles-ci possédaient 10% du
capital lors de la cessation de leurs fonctions.
Inversement, les commissaires aux comptes ne peuvent devenir
administrateurs, directeurs généraux, directeurs
généraux adjoints des sociétés qu'ils
contrôlent moins de cinq ans après la cessation de leurs
fonctions. Pendant le même délai, ils ne peuvent exercer les
fonctions dirigeantes dans les sociétés possédant 10% du
capital de la société contrôlée par eux ou dont
celle-ci possède 10% du capital lors de la cessation des fonctions.
Rien n'empêche cependant le commissaire aux
comptes de devenir immédiatement salarié à la fin de ses
fonctions.
En définitive, le principe d'indépendance
trouve une véritable application avec les différents types
d'incompatibilités. La consécration et l'extension de ces
dernières apportées par l'AUSCGIE étaient souhaitables et
attendues. Elles sont utiles, mais insuffisantes pour assurer une
indépendance effective des commissaires aux comptes. C'est pourquoi le
principe d'indépendance appelle d'autres garanties plus larges à
la disposition des partenaires de la SA.
B. Les autres garanties de
l'indépendance du commissaire aux comptes
A coté des incompatibilités, la
récusation (1) et le droit d'expression du commissaire aux comptes non
renouvelé dans ses fonctions (2) constituent les autres garanties de
leur indépendance.
1. La récusation des
commissaires aux comptes
La récusation consiste à
éviter l'entrée en fonction d'un commissaire aux comptes qui ne
présente pas tous les caractères qu'exige le principe
d'indépendance dans sa formulation nouvelle.
En effet, un commissaire aux comptes suspecté
d'incompétence professionnelle, de partialité et de
dépendance à l'égard des dirigeants peut faire l'objet
d'une récusation. Elle est une mesure grave en raison du mauvais usage
dont peuvent en faire les actionnaires. Ainsi, peut-on craindre qu'une
majorité inquiétée des investigations du commissaire aux
comptes ne profite pour y mettre prématurément fin à ses
fonctions. C'est la raison pour laquelle le législateur l'entoure d'un
formalisme de rigueur (a) la procédure étant essentiellement
judiciaire (b)
a. Le formalisme de la récusation
L'assemblée des actionnaires nomme le
commissaire aux comptes, mais n'a plus en principe le pouvoir de mettre fin
à ses fonctions en cours de mandat. Cependant, il est des circonstances
exceptionnelles dans lesquelles il importe d'y mettre fin. Ce sont les cas de
récusation49(*).
En effet, l'article 730 al 1 AUSCGIE dispose : «
Un ou plusieurs actionnaires représentant au moins le dixième du
capital social de même que le ministère public, peuvent demander
en justice la récusation des commissaires aux comptes nommés par
l'assemblée générale ordinaire ». La
demande de récusation doit être fondée sur
« un juste motif » propre à mettre en doute
l'honorabilité, l'impartialité et l'indépendance du
commissaire aux comptes.
Le législateur n'a pas précisé les motifs
de la récusation, le juste motif est de ce fait laissé à
la charge du juge qui appréciera, en s'inspirant du droit
commun50(*) et de la
pertinence des raisons invoquées à l'appui de la demande. C'est
ainsi que dans une espèce51(*), le juge a considéré que les conditions
dans lesquelles un commissaire aux comptes avait exercé des fonctions
antérieures de conseiller de la société
contrôlée ne permettaient pas de retenir à son encontre des
reproches de partialité ou de dépendance justifiant sa
récusation.
La récusation représente une procédure
implicite de vérification, par chacun des partenaires de l'entreprise
sociale, que le commissaire aux comptes désigné présente
toute garantie d'indépendance à l'égard des autres
partenaires. La récusation de l'article 730 doit donc permettre aux
acteurs sociaux de corriger le choix d'un commissaire aux comptes qui
méconnaît les règles de sa profession, au premier rang
desquelles figure le principe d'indépendance. Cependant, l'actionnaire
doit respecter la procédure qui demeure judiciaire
b. La procédure judiciaire de la
récusation
La récusation est prononcée par le
président de la juridiction du lieu de situation de la
société contrôlée. L'action est intentée par
un ou plusieurs actionnaires détenant au moins 10% du capital ainsi que
le Ministère public, dans les trente jours de la désignation du
commissaire aux comptes52(*). S'il est fait droit à la demande, un nouveau
commissaire aux comptes est désigné en justice. Il demeure en
fonction jusqu'à l'entrée en fonction du commissaire aux comptes
désigné par l'assemblée générale53(*) apte à remplir la
mission de contrôle, en lieu et place de celui qui paraît inapte
à cet effet.
Doit donc être remplacé, à titre
préventif, tout commissaire aux comptes qui ne présente plus les
garanties que l'on attend « d'un organe de
régularité »54(*). Mais, parce que la mission de
contrôle oblige parfois le commissaire aux comptes à prendre des
positions qui déplaisent aux dirigeants véreux, ces derniers
peuvent à tout bout de chemin vouloir le récuser. Au cas
où ils n'auront pas réussi, ils essaieront de faire obstacle
à sa réélection. Pour garantir davantage son
indépendance, la loi lui reconnaît un droit d'expression devant
l'assemblée générale.
2. Le droit d'expression du
commissaire aux comptes
Elu pour deux exercices ou six exercices
selon le cas, le commissaire aux comptes est rééligible. Mais
encore faut-il que l'assemblée ordinaire vote son renouvellement
puisqu'il n'a en principe aucun droit à réélection. Reste
que s'il s'est montré vigilant envers les dirigeants peu scrupuleux, il
est à craindre que son renouvellement ne soit pas
proposé55(*). Le
commissaire aux comptes doit donc être protégé contre des
mesures de rétorsion des dirigeants consistant à le
révoquer, soit à mettre obstacle à sa
réélection56(*).
Pour garantir son indépendance face aux dirigeants de
mauvaise foi, l'article 707 AUSCGIE dispose que lorsque, à
l'expiration de ses fonctions, il est proposé à
l'assemblée de ne pas renouveler son mandat, le commissaire aux comptes
doit, s'il le demande être entendu par l'assemblée. Ce
système n'offre pas une garantie d'indépendance effective au
commissaire aux comptes puisque l'assemblée peut être
influencée par les mêmes dirigeants. A notre sens, une
intervention du juge judiciaire serait la bienvenue57(*).
En définitive, les incompatibilités et
récusation ainsi élucidées s'apparentent en des conditions
négatives parce qu'ils empêchent le candidat d'accéder
à la fonction des commissaires aux comptes. Elles sont cependant
complétées dans le cadre de l'efficacité du contrôle
par des conditions positives matérialisées par la rationalisation
des conditions d'accès à la dite fonction.
§II : La
rationalisation des conditions d'accès à la profession :
Les garanties de
moralité et de compétence
L'acte uniforme exige certaines qualités propres aux
personnes physiques pour devenir commissaire aux comptes. Le candidat doit
être de moralité suffisante (A) et disposer de l'aptitude et
compétence en matière comptable (B).
A. La moralité suffisante pour
exercer la fonction
Le degré de moralité est une exigence
réelle dans toute institution de contrôle, et plus
spécialement en matière de contrôle des
sociétés. Elle permet de se forger une idée sur
l'état d'esprit du candidat, bref d'éviter l'accès aux
fonctions des commissaires aux comptes aux personnes indignes ou
malhonnêtes.
Le degré de moralité est apprécié
soit par l'Ordre des experts comptables dans le cas où il en existe un
dans l'Etat partie ou à défaut en cas d'absence par la Commission
d'inscription auprès de la cour d'appel.
C'est au vu de bulletin N°3 du casier judiciaire du
candidat et, accessoirement, en prenant en considération toute autre
information tangible dès lors qu'elle a été soumise
à discussion avec le candidat et ses conseils que l'Ordre ou la
Commission l'évalue. Bref, le bulletin N°3 permet de savoir si le
prétendant a déjà fait l'objet des condamnations
antérieures.
L'appréciation de l'Ordre ou de la Commission est
souveraine en ce sens qu'elle est libre de décider si le candidat
réunit ou non les critères nécessaires. En fin de compte,
si l'Ordre ou la Commission conclut à une bonne moralité, le
candidat peut exercer la fonction s'il remplit les aptitudes professionnelles
et les compétences requises.
B. Les aptitudes professionnelles et
compétences requises
En plus de la moralité suffisante, l'AUSCGIE fait
obligation au candidat de disposer certaines aptitudes professionnelles. Ainsi
le candidat doit être titulaire d'un diplôme d'expertise (1) pour
pouvoir bénéficier de l'agrément de l'ordre des experts
comptables (2)
1. Le diplôme d'expertise
comptable
En droit français58(*), toute personne qui aspire à la fonction de
commissaire aux comptes doit être titulaire d'un diplôme
d'expertise comptable. Les professionnels se recrutent exclusivement parmi les
personnes titulaires dudit diplôme.
Le législateur communautaire africain semble adopter la
même vision lorsqu'il dispose que seuls les experts-comptables
agréés par l'Ordre des experts-comptables peuvent exercer les
fonctions de commissaires aux comptes59(*). Cette exigence de diplôme est très
logique. Le commissaire aux comptes a pour mission de vérifier des
comptes qui, le plus souvent sont déjà établis ou
révisés par un expert-comptable. Comment ce contrôle
serait-il efficace si lui-même ne possède pas une qualification
supérieure. Bien que l'AUSCGIE ne le dise pas expressément, il
semble que le diplôme obtenu dans un Etat de l'OHADA sera obligatoirement
reconnu et valable dans tous les autres Etats membres.
Disposant d'un diplôme d'expertise comptable
exigé et des aptitudes requises, le candidat peut se voir octroyer un
agrément de l'ordre des experts-comptables.
2. L'agrément de l'ordre des
experts-comptables
L'article 695 AUSCGIE dispose que lorsqu'il
existe un Ordre des experts-comptables dans l'Etat partie du siège de la
société, objet du contrôle, seuls les experts-comptables
agréés par l'ordre peuvent exercer les fonctions de commissaires
aux comptes.
Il s'ensuit qu'avec le législateur OHADA, il faut
nécessairement recevoir l'agrément60(*) de l'Ordre des
experts-comptables61(*)
pour être désigné commissaire aux comptes. Cette condition
existait déjà dans les Etats de la défunte UDEAC62(*) depuis plusieurs
décennies63(*). La
CEMAC64(*) l'a repris
à son compte. Ainsi, dans ses Etats membres, les experts-comptables
doivent être agréés par décision du comité
de direction de la CEMAC au vu d'un dossier comprenant notamment une demande
d'agrément, une copie du diplôme d'expertise comptable, un extrait
du casier judiciaire et une copie d'acte de naissance ou du jugement
supplétif tenant lieu. Même s'il n'existe pas un Ordre des experts
comptables, l'efficacité recherchée a amené le
législateur à instituer auprès des cours d'appel une
Commission d'inscription. Seuls peuvent ainsi exercer les fonctions de
commissaires aux comptes les experts-comptables préalablement inscrits
sur la liste établie par la Commission65(*).
Avec le statut du commissaire aux comptes bien
aménagé à travers les conditions positives et
négatives, il restait au législateur d'harmoniser le cadre
d'exercice de la mission de contrôle
Section II : L'HARMONISATION DU CADRE D'EXERCICE DE LA
MISSION DE CONTROLE
Le rôle que joue le commissaire aux
comptes dans la SA est indéniable. C'est en grande partie grâce
à son savoir-faire que la structure rayonne au point de s'identifier
à lui. Cependant, pendant longtemps, son cadre d'activité est
resté trop morose. Animé par le souci d'un contrôle
objectif des comptes, le législateur entend l'harmoniser en garantissant
au commissaire aux comptes régulièrement désigné
une stabilité fonctionnelle (§I) renforcée par de nombreuses
prérogatives (§II) lui permettant de réaliser sa mission
dans des meilleures conditions.
§ I. La stabilité
de la fonction des commissaires aux comptes
Un contrôle légal efficace des
comptes ne peut se concevoir que si son titulaire l'exerce en toute
indépendance, dans un environnement saint et stable. La stabilité
est une donnée réelle dans toute fonction de contrôle.
Consacrée avant tout en droit français, le législateur
OHADA l'a repris à son compte en l'entourant de deux garanties :
une garantie matérielle (A) et une garantie personnelle (B).
A. La garantie matérielle de
stabilité : la rémunération du commissaire aux
comptes
Le commissariat aux comptes n'est pas le lieu des prestations
philanthropiques. Pourtant, la question de leurs honoraires est toujours
délicate.
Le point de départ d'une rémunération
des commissaires aux comptes est l'article 232 de la loi du 24 juillet 1966 qui
précisait que « les honoraires du commissaire
aux comptes sont à la charge de la société
contrôlée ». Cette formulation, et plus
particulièrement l'emploi du terme
« honoraires » souligne que le commissaire aux
comptes exerce une profession libérale et non salariée. Plus
concrètement, le système de fixation de la
rémunération est envisagé dans le décret
français du 12 août 1969 qui institue un système de
barème devant guider les honoraires du commissaire aux comptes. Ce
système est progressivement abandonné avec le décret du 03
juillet 1985 66(*) qui
laisse le montant des honoraires des commissaires aux comptes à la
charge de la société.
Le législateur OHADA tranche sagement la question des
honoraires du commissaire aux comptes dans son article 723 AUSCGIE
quand il dispose que « les honoraires du commissaire
aux comptes sont à la charge de la société, le montant des
honoraires est fixé globalement quel que soit le nombre de commissaires
aux comptes qui se repartissent entre eux ».
Le deuxième paragraphe de ce texte mérite
qu'on s'y attarde parce que sa mise en oeuvre peut poser quelques
problèmes. On se pose la question de savoir sur quelles bases les
honoraires du commissaire aux comptes sont-ils fixés. Le
législateur OHADA ne répond pas à cette
préoccupation. Il faut en déduire certainement qu'ils sont
librement négociés avec les dirigeants sociaux67(*), c'est-à-dire l'objet
d'un marchandage entre les dirigeants et le commissaire aux comptes. Ce qui
relance le débat sur leur indépendance financière68(*).
Malgré toutes ces difficultés, la
rémunération est d'une importance capitale pour le commissaire
aux comptes. Car elle lui met à l'abri d'une certaine tentation et
pression des dirigeants. Dans le même sens, la loi met même
à la disposition de la société les frais de séjour
et de déplacement engagés par le commissaire aux comptes. Ils
peuvent même recevoir des rémunérations
exceptionnelles69(*)
lorsqu'ils exercent des missions particulières pouvant consister en une
activité professionnelle complémentaire pour le compte de la
société à l'étranger ; des missions
particulières de révision des comptes de sociétés
dans lesquelles la société contrôlée détient
une participation ou envisage de prendre une participation ; accomplit des
missions temporaires confiées par la société à la
demande d'une autorité publique.
Cette rémunération multiforme mise sur pied par
le législateur vise ainsi à stabiliser le commissaire aux comptes
en l'évitant de poursuivre certaines activités parallèles
qui lui détourneraient de sa mission. Mais la rémunération
n'est utile que lorsqu'elle ne contribue pas à endormir le commissaire
aux comptes puisqu'à coté de cette dernière, il dispose
aussi des garanties personnelles.
B. Les garanties personnelles de la
stabilité des fonctions
Sous l'empire de la vielle loi de 1867, il
n'existait aucune garantie de stabilité de la fonction des commissaires
aux comptes .Ces derniers étant nommés et révoqués
à tout moment par les dirigeants comme ils l'entendaient. L'acte
uniforme s'inscrit contre cette vision en prévoyant une longue
durée du mandat (1) et dans l'hypothèse où elle peut
être affectée, il entoure sa rupture des règles
d'interprétation strictes (2).
1. La durée du mandat des
commissaires aux comptes
Pour des raisons d'indépendance et de
stabilité, il fallait au commissaire aux comptes un mandat suffisamment
long pour accomplir un travail objectif. En effet, le contrôle et la
certification des comptes d'un exercice supposent des comparaisons avec les
résultats des exercices antérieurs. Celles-ci sont
facilitées si le même commissaire aux comptes reste en place
pendant un temps suffisant pour bien connaître la société,
sans pour autant, s'endormir dans la routine d'une mission qui dure trop
longtemps70(*). C'est
ainsi qu'au terme de l'article 224 de la loi du 24 juillet 1966, la
durée des fonctions des commissaires aux comptes en toute
hypothèse est de six exercices qu'il ait été nommé
par les statuts ou par l'assemblée.
Avec l'AUSCGIE, la durée des six exercices est aussi
proclamée, mais ne se pose pas en terme identique, car les six
années ne valent que pour les commissaires aux comptes nommés par
l'assemblée générale ordinaire. Ceux des commissaires aux
comptes nommés par les statuts ou par l'assemblée
générale constitutive restent soumis à un mandat de deux
ans.
Bien que les textes ne le disent pas expressément, le
mandat est même renouvelable par interprétation des articles 708
et 709 AUSCGIE, ce qui contribue à renforcer davantage leur
stabilité fonctionnelle. Ce renouvellement doit être limité
dans le temps afin d'éviter une éternisation du mandat. A
l'intérieur de cette durée, le contrôleur doit pouvoir
exercer ses missions en toute quiétude et sans entraves de la part des
actionnaires ou de quiconque.
Le commissaire aux comptes se présentant très
souvent comme un danger pour les acteurs sociaux, ces derniers peuvent
souhaiter y mettre fin par anticipation à son mandat. Fort heureusement,
la loi entoure la rupture du mandat des conditions très rigoureuses.
2. Les conditions strictes de la
rupture « anticipée » du mandat
Que le terme anticipé du mandat de
contrôle procède de l'initiative de la société
contrôlée ou de celle du commissaire aux comptes, le principe
d'efficacité et de la stabilité du contrôle
recherché contribue à définir les conditions de la
révocation (a) et de la démission (b) du commissaire aux comptes
a. Les conditions de la révocation des
commissaires aux comptes
Sous le régime de la loi de 1867,
l'assemblée générale des actionnaires qui avait
nommé le commissaire aux comptes pouvait à « tout
moment » le révoquer. Les lois françaises du 24
juillet 196671(*) et du
1er mars 198472(*) sont venues leur retirer cette prérogative,
estimant que permettre aux associés, de mettre fin
prématurément, serait-ce par caprice aux fonctions des
commissaire aux comptes compromettrait l'efficacité de leur
contrôle. Le législateur africain a suivi à son tour ce
raisonnement. Ainsi, l'article 730 AUSCGIE pose le principe selon lequel la
révocation du commissaire aux comptes ne peut être demandée
en justice qu'en cas de faute ou d'empêchement. Parce que la
procédure est essentiellement judiciaire, le juge se livrera à
une appréciation de la faute et de l'empêchement.
La faute s'entend généralement de
l'inexécution ou de la mauvaise exécution des missions qui
incombent au commissaire aux comptes pour une cause qui lui est
imputable73(*). Ainsi, le
commissaire aux comptes qui, ayant découvert les
irrégularités et inexactitudes comptables, ne saisit pas
l'assemblée générale en temps utile pour l'informer peut
voir sa révocation justifiée74(*). Il en est de même d'un commissaire
aux comptes qui dissimile les actes de nature à porter atteinte à
son indépendance75(*).
Quant à l'empêchement, il est constitué
de tout fait qui peut mettre obstacle à l'exécution de la mission
du commissaire aux comptes. Une conception traditionnelle vise la situation du
commissaire aux comptes qui ne peut, matériellement ou physiquement
s'acquitter de ses missions. On peut distinguer l'empêchement externe et
l'empêchement interne.
L'empêchement externe est propre au commissaire aux
comptes, indépendamment des conditions particulières d'un mandat
de contrôle. Il s'agit soit d'une absence prolongée ou d'un cas de
maladie. Dans ces cas, la révocation est possible et justifiée en
vertu de l'article 731 AUSCGIE.
L'empêchement interne à la société
contrôlée vise le commissaire aux comptes parfaitement apte
physiquement, intellectuellement et matériellement à l'exercice
de ses fonctions, mais qui, se trouve dans des circonstances
particulières, indépendantes de sa volonté, qui
l'empêchent d'assumer correctement sa mission. Il s'agira par exemple
d'un bouleversement des structures comptables ou juridiques de la
société contrôlée tels que les moyens des cabinets
du commissaire aux comptes cessent d'être adaptés76(*).
La procédure judiciaire de la révocation est
supposée exclusive de tout abus. Mais la révocation pour
empêchement « interne » n'est-elle pas
abusive ? Le commissaire aux comptes est révoqué pour des
raisons indépendantes de sa volonté. A notre sens, le juge ne
devrait pas admettre une telle révocation, tout au plus, il devrait
même permettre au commissaire aux comptes d'exercer une action en
dommage- intérêts contre la société.
Les conditions de mise en oeuvre de l'action en
révocation apparaissent très protectrices pour les
contrôleurs. L'idée du législateur était de mettre
fin non seulement à « la révocabilité ad
nutum », jugée incompatible avec
« l'indépendance de celui qui doit
parfois déplaire »77(*), mais aussi de renoncer au
parallélisme de forme: l'assemblée générale nomme
les commissaires aux comptes, mais ne peut plus procéder
elle-même à leur révocation. La préoccupation du
législateur était donc bien d'assurer la stabilité de la
fonction78(*).Le
même souci éclaire le contrôle de la démission
b. Le contrôle de la démission des
commissaires aux comptes
« Il est évidement
impossible de contraindre un commissaire aux comptes à exercer ses
fonctions, s'il s'y refuse »79(*). Le droit OHADA tout comme
le droit français ignore l'exécution forcée et directe de
l'obligation de faire ; il faut s'en féliciter du
point de vue des libertés individuelles. Libre de contracter un travail,
le commissaire aux comptes est aussi libre d'y mettre fin de son propre chef.
La jurisprudence80(*) lui
autorise même de démissionner pour convenance personnelle à
la seule condition de ne préjudicier à la société
par malice ou par simple légèreté blâmable.
Sous le couvert de la stabilité du contrôle, la
démission doit être subordonnée à l'existence d'un
motif légitime81(*). C'est la raison pour laquelle la démission
pour convenance personnelle n'empêche aucunement les tribunaux de
rechercher et de découvrir le véritable motif de la
démission, lorsque celle-ci est intempestive, c'est-à-dire
dictée par le désir de se soustraire à une obligation
légale, en particulier à celle de signifier au conseil
d'administration ou à l'assemblée les irrégularités
constatées et à celles de dénoncer au procureur de la
République les faits délictueux constatés.
Si après examen, le tribunal se rend compte qu'il a
démissionné de mauvaise foi ou à contretemps, le
commissaire aux comptes démissionnaire engage sa responsabilité
civile pour démission inopportune82(*) si un dommage en résulte. La subordination de
la démission à l'existence d'un motif légitime doit donc
permettre d'éviter qu'en présence des difficultés, le
commissaire aux comptes ne trouve dans la démission une forme
d'échappatoire.
A travers le contrôle de la révocation et de la
démission, le voeu du législateur communautaire était
d'assurer au commissaire aux comptes une meilleure stabilité, condition
essentielle pour mettre efficacement en valeur ses prérogatives.
§II : Les
prérogatives des commissaires aux comptes
Pour permettre aux commissaires aux comptes
d'exercer leurs missions dans des meilleures conditions, le législateur
leur a doté d'importantes prérogatives
matérialisées par un droit d'information (A) et un pouvoir
d'investigation (B).
A. Le droit d'information des commissaires
aux comptes
Le droit d'information des commissaires aux
comptes comprend deux variantes : le droit d'assister aux
assemblées (1) et le pouvoir exceptionnel de convoquer les
assemblées (2).
1. Le droit du commissaire aux comptes
d'assister aux assemblées
Compte tenu de sa place et de son rôle
privilégié dans la SA, il est normal que le commissaire aux
comptes ait accès à toutes les assemblées d'actionnaires.
Ainsi, l'article 722 al 1AUSCGIE prévoit leur convocation obligatoire
à toutes les assemblées d'actionnaires, le défaut de
convocation étant pénalement sanctionné par la loi
camerounaise du 10 juillet 200383(*).
Les commissaires aux comptes sont convoqués par lettre
recommandée avec demande d'avis de réception en même temps
que les actionnaires. Cette exigence de convocation s'accompagne pour la
société d'un devoir de communication des comptes annuels (bilan,
comptes de résultat, annexe), du rapport de gestion et
éventuellement des comptes consolidés avec le rapport sur la
gestion un mois avant la tenue de l'assemblée en question.
Leur convocation est également prévue aux
réunions du conseil d'administration qui arrête les comptes de
l'exercice écoulé84(*). Elle est faite par le même
procédé que celle de la convocation aux assemblées
d'actionnaires à la différence qu'à ce stade, le
défaut de convocation n'est pas pénalement sanctionné.
Le droit d'information des commissaires aux comptes se
manifeste donc traditionnellement de par leur présence obligatoire aux
assemblées. Mais, il peut aussi s'exercer de par le pouvoir exceptionnel
de convoquer ladite assemblée.
2. Le pouvoir exceptionnel de convoquer
les assemblées
Traditionnellement, les
commissaires aux comptes ont pour mission principale le contrôle des
comptes. Cette fonction qui s'exerce de façon permanente interdit toute
immixtion dans la gestion de la société. Malgré ce
caractère prohibitif, les occasions au cours desquelles ils
procèdent à l'accomplissement des actes de gestion ne manquent
pas. C'est le cas par exemple de la mission d'alerte.
Lorsque le commissaire aux comptes,
après le déclenchement de la procédure d'alerte constate
que la continuité de l'exploitation demeure compromise malgré la
réponse des dirigeants à ses explications, il peut par l'effet de
la loi accomplir un acte qui relève de la compétence du
président du conseil d'administration ou du directeur
général selon le cas85(*). Il s'agit de la convocation de l'assemblée
générale des actionnaires. Les seules conditions exigées
par les articles 156 et 516 AUSCGIE sont que le commissaire aux comptes ait
vainement requis cette convocation de ces organes par lettre
recommandée avec demande d'avis de réception et qu'il y'ait
urgence. En effet, il joue un rôle de prévention des
difficultés des entreprises. Ce n'est qu'à ce titre qu'il est
autorisé à convoquer l'assemblée des actionnaires.
Lorsqu'il procède à l'exécution de cette
mission, il doit s'assurer qu'il remplit les exigences légales et
statutaires relatives à la convocation des actionnaires86(*). En conséquence, si la
convocation est irrégulière, la nullité serait
prononcée conformément à l'article 519 al 4 AUSCGIE et, le
commissaire aux comptes engage sa responsabilité civile. Bien plus, il
fixe l'ordre du jour et peut, pour des motifs déterminants87(*) choisir un lieu de
réunion autre que celui éventuellement prévu par les
statuts88(*).
Ces prérogatives sont autant d'occasions
d'interventions directes dans la gestion des sociétés permettant
au contrôleur de combler les manquements et l'inertie des dirigeants dans
leur rôle afin d'accomplir efficacement ses missions.
Le droit d'information présente ainsi de multiples
facettes. Mais, reste insuffisant en raison de son caractère passif. Or,
un contrôle efficace suppose que le commissaire aux comptes jouisse d'une
autre prérogative qui, lui permette de vérifier les écrits
et documents comptables ou juridiques qui ne lui ont pas été
communiqués spontanément. Il se voit ainsi reconnaître par
la loi des larges pouvoirs d'investigation.
B. Les pouvoirs d'investigation du
commissaire aux comptes
En conformité avec la loi du 24 juillet 1966, le
législateur communautaire africain a conféré aux
commissaires aux comptes un pouvoir d'investigation. Il s'agit d'un pouvoir
tellement important que, ni les statuts de la société, ni les
dirigeants et les actionnaires peu scrupuleux ne peuvent restreindre, car il a
un caractère d'ordre public et s'exerce auprès des
sociétés (1) et des tiers (2).
1. L'investigation auprès des
sociétés
L'investigation auprès de la
société contrôlée (a) doit être
distinguée de celle pratiquée auprès des
sociétés du même groupe (b).
a. L'investigation auprès de la
société contrôlée
Le droit d'investigation des commissaires aux comptes
auprès de la société contrôlée est
défini à l'article 718 AUSCGIE. Ce texte précise tout
d'abord qu'il s'agit des prérogatives permanentes qui peuvent
s'exercer « A toute époque de
l'année ». Il est ensuite rappelé que
« le commissaire aux comptes opère toutes
vérifications et contrôles qu'il juge
opportuns ».
Dans cette optique, afin de ne pas entraver la bonne marche
de l'entreprise, ils peuvent se faire communiquer sur place, toutes
pièces qu'ils estiment utiles pour l'examen de leur mission
notamment « tous contrats, livres, documents comptables et
registres de procès
verbaux. »89(*). Les termes utilisés par l'AUSCGIE lui ouvrent
l'accès à l'ensemble des documents sociaux permettant de
vérifier les écritures comptables et les dirigeants qui
refuseraient de se prêter aux investigations aux vérifications
s'exposent à des sanctions pénales90(*) .
Une autre difficulté se présente, si le
commissaire aux comptes demande à consulter un document que les
dirigeants estiment inutile à l'accomplissement de sa mission. Un refus
pur et simple peut-il être constitutif d'entrave ? A notre sens, un
refus pur et simple de communiquer n'est pas recommandé, car il pourrait
constituer le délit d'entrave pénalement
répréhensible à moins que les dirigeants ne saisissent le
président du Tribunal de Grande Instance, afin de faire juger que la
demande du commissaire aux comptes est sans fondement.
Dans l'accomplissement de ces prérogatives, le
commissaire aux comptes peut se faire assister ou se faire représenter
par les experts ou collaborateurs de son choix qu'il fait connaître
à la société, ceux-ci ayant les mêmes droits
d'investigation.
Commencée au sein de la société
contrôlée, l'investigation peut étendre ses ramifications
à d'autres sociétés du même groupe.
b. L'investigation auprès des
sociétés du groupe
Les commissaires aux comptes jouissent aussi d'un pouvoir
d'investigation auprès des sociétés du même groupe,
c'est-à-dire auprès de la société mère et de
ses filiales. Cette précision donnée par l'article 718 al
3AUSCGIE est logique, compte tenu des liens étroits pouvant exister
entre les sociétés d'un groupe.
La société mère doit alors
détenir plus de la moitié du capital de la filiale91(*)pour que
les investigations soient possibles. Lorsque la société
établit des comptes consolidés92(*), les commissaires aux comptes peuvent étendre
leur prérogative à toutes les entreprises entrant dans le
périmètre de la consolidation.
Cette extension du pouvoir d'investigation à toutes
les entreprises du groupe est la garantie d'un contrôle efficace
permettant de déjouer les fraudes pouvant se réaliser sous le
couvert des groupes de sociétés93(*).
Mesurant aussi les connivences pouvant exister entre les
dirigeants et les tiers qui traitent ou qui ont traité avec la
société, la loi permet au commissaire aux comptes
d'étendre ses investigations à ces derniers.
2. L'investigation auprès des
tiers
Le fondement légal est l'article 720 AUSCGIE qui
précise les conditions dans lesquelles les commissaires aux comptes
peuvent recueillir des informations utiles à leur mission
« auprès des tiers qui ont accompli des opérations
pour le compte de la société ».
L'expression « tiers »
désigne les auxiliaires ou mandataires de la société tels
que les banques, les prestataires de service d'investissement, l'huissier, le
notaire de la société, non ses clients ou ses fournisseurs qui
n'agissent pas « pour le compte de la
société ».
Afin de ne pas nuire aux tiers, interdiction est faite aux
commissaires aux comptes de consulter directement leurs documents, sauf
autorisation donnée par le président du tribunal de la
juridiction compétente statuant à bref délai. En
contrepartie, les tiers ne pourront pas leur opposer le secret
professionnel.
En définitive, mises à part les
différentes limites dues au fait que le contrôle ne doit pas
gêner l'activité de la société, le commissaire aux
comptes possède un certains nombres de prérogatives susceptibles
de lui permettre de tenir efficacement son rôle de contrôleur.
Concrètement, l'exercice de ces pouvoirs doit s'effectuer dans un
environnement sain et exempt de vices. Mais, la réalité est toute
autre. Il n'est pas toujours évident qu'il puisse remplir sa mission
sans heurts provenant parfois des dirigeants, des tiers ou de lui-même.
C'est pour cette raison que des actions plus énergiques destinées
à vaincre ces obstacles ont été prévus : il
s'agit des mesures curatives.
CHAPITRE II : LES MESURES CURATIVES
Professionnel rémunéré
pour critiquer éventuellement ceux qui l'ont
désigné94(*), les commissaires aux comptes sont souvent
perçus aux yeux des dirigeants malhonnêtes comme des fauves qui
troublent la paix sociale. Ils peuvent ainsi s'engager à faire obstacle
à leurs missions.
Pour que le contrôle soit efficace, il doit pouvoir
donner lieu à des mesures de sanction. La peur de la sanction est un
moyen précieux de rendre un contrôle efficace. Le
législateur OHADA l'a compris en prévoyant une série
d'actions contre les personnes (section I) intervenant en matière de
contrôle et éventuellement contre leurs actes (section II).
Section I : LES ACTIONS CONTRE LES PERSONNES : LES
RESPONSABILITES CONSECUTIVES AU CONTROLE
Les responsabilités consécutives au
contrôle des sociétés visent le commissaire aux comptes et
les dirigeants sociaux. Le législateur a prévu des actions en
responsabilité contre tout dirigeant qui fait ou s'engage à faire
obstacle au contrôle des commissaires aux comptes (§I). Ce dernier,
parce qu'il peut aussi mal faire, se voit indubitablement soumis aux
mêmes actions (§II)
§1 : Les actions en
responsabilité contre les dirigeants sociaux
La responsabilité des dirigeants en matière de
contrôle des sociétés obéit au régime
classique de la responsabilité civile et pénale. Le dirigeant qui
commet une faute entravant le contrôle des commissaires aux comptes peut
être poursuivi aussi bien civilement (A) que pénalement (B).
A : Le sens de la
responsabilité civile des dirigeants sociaux
Aux termes de l'article 161
AUSCGIE, « sans préjudice, de la
responsabilité éventuelle de la société, chaque
dirigeant social est responsable individuellement envers les tiers des fautes
qu'il commet dans l'exercice de ses fonctions. »
Une lecture attentive de cet article montre que la faute est
le fondement de la responsabilité civile (1) des dirigeants. Une fois
constituée, elle permet de mettre en branle l'action en
responsabilité (2)
1. La faute, élément central
de la responsabilité civile des dirigeants
La faute95(*) est généralement définie comme
une attitude consistant en une imprudence, une négligence, un manquement
à une obligation de prudence, de sécurité prévue
par la loi ou les règlements.
Dans le cadre particulier du contrôle des SA, le
manquement ou la violation de la règle légale ou statutaire,
impérative, susceptible d'entraîner la responsabilité
civile des dirigeants sociaux peut consister dans l'absence de
désignation ou de convocation des commissaires aux comptes, dans
l'obstacle aux vérifications ou dans le refus de communication des
documents sociaux.
Le législateur a mieux organisé, au niveau des
entreprises d'une certaines tailles le contrôle des
sociétés en imposant la présence d'un expert
extérieur : le commissaire aux comptes. Ainsi, dans la SA, la
nomination du commissaire aux comptes est obligatoire. Chaque SA doit avoir au
moins un commissaire aux comptes titulaire et un suppléant 96(*), ce nombre étant
porté à deux si la société fait publiquement appel
à l'épargne 97(*). La même obligation est valable en ce qui
concerne leur convocation aux assemblées d'actionnaires et aux
réunions du conseil d'administration. La violation de cette
dernière obligation est tellement vraie que le législateur ne l'a
pas érigé en infraction pénale. On comprend directement
qu'il a voulu la laisser dans le giron de la responsabilité civile.
Les dirigeants des SA engagent ainsi leur
responsabilité civile en ne provoquant pas la désignation ou la
convocation des commissaires aux assemblées. Cette solution est logique,
car, il y a violation d'une règle impérative.
Commet également une faute pouvant s'analyser en
violation des statuts ou en faute de gestion, le dirigeant qui fait obstacle
aux vérifications des commissaires aux comptes ou refuse de les fournir
les documents comptables. Dans tous les cas, la faute est
caractérisée si le dirigeant a manqué
aux obligations découlant de sa fonction. Mais à elle seule,
la faute ne peut donner lieu à responsabilité, encore faut-il
qu'elle ait causé un préjudice à un tiers ou à un
associé.
Lorsqu'il est rapporté la preuve que la faute du
dirigeant est la cause d'un préjudice, il pourra à la demande de
la victime être condamné à l'indemnisation, ce qui ouvre le
droit à l'action en responsabilité civile.
2 : Le régime de
l'action en responsabilité civile des dirigeants
Le régime de l'action en responsabilité civile
contre les dirigeants sociaux est l'oeuvre du législateur
français de 1867 qui en son article 17, prévoyait une action
individuelle, une action sociale ouverte à la société et
une action sociale « ut singuli » ouverte à
un ou plusieurs actionnaires.
L'AUSCGIE s'inspirant de cette disposition qu'il traite
dans son livre III a le mérite de les avoir rationalisés en
distinguant simplement l'acte individuelle de l'action sociale. Ainsi,
même en matière de contrôle des sociétés,
toute faute des dirigeants donne à la victime selon le cas, la
possibilité d'exercer une action individuelle (a) ou une action sociale
(b).
a. L'action individuelle : l'action en
réparation du préjudice subi par un tiers ou un
actionnaire
L'action individuelle est définie
à l'article 162 AUSCGIE comme « l'action en
réparation du préjudice subi par un tiers ou par un
associé, lorsque celui-ci subit un dommage distinct du dommage que
pourrait subir la société, du fait de la faute commise
individuellement ou collectivement par les dirigeants sociaux dans l'exercice
de leurs fonctions ».
La qualité de la victime est essentielle pour le
succès de l'action, elle ne peut être qu'un tiers ou un
associé. Le tiers ou associé saisit le tribunal en charge des
affaires commerciales aux fins d'indemnisation. Si plusieurs dirigeants ont
participé aux mêmes faits, leur responsabilité est
solidaire et il appartient au tribunal de déterminer la part
contributive de chacun. La division non par part virile, mais à
proportion de la gravité de la faute est actuellement acquise en
jurisprudence98(*).
L'action est
dite « individuelle » parce qu'elle est
intentée par l'associé ou le tiers qui agit seul.
Néanmoins, au cas où ils sont nombreux à avoir subi le
préjudice, ils peuvent donner mandat à une seule personne d'agir
en leur nom. En cas de succès, les dommages-intérêts leur
sont alloués.
Parce que la faute du dirigeant en matière de
contrôle des sociétés ne cause pas seulement
préjudice aux tiers ou aux associés, mais aussi à la
société toute entière, le législateur a donc
prévu à coté de l'action individuelle une action sociale
au bénéfice de la société.
b. L'action sociale ; l'action en
réparation du préjudice subi par la
société.
« L'action sociale est l'action en
réparation du dommage subi par la société du fait de la
faute commise par le ou les dirigeants dans l'exercice de leurs
fonctions »99(*). Elle se prescrit par trois ans à
compter du fait dommageable ou s'il a été dissimulé de sa
révélation.
En principe, l'action est diligentée par le dirigeant
pour le compte de la société. C'est d'ailleurs la situation
normale puisqu'il représente la société. Cependant, la
réalité est loin d'être le cas. Les dirigeants
s'abstiennent bien évidemment de faire constater eux-mêmes leur
propre responsabilité par l'exercice de l'action sociale
« ut universi ». C'est dans le souci de vaincre
cette inaction des dirigeants et donner plus de poids à la
réparation du préjudice que le législateur a prévu
l'action sociale « ut singuli » exercée par
un ou plusieurs actionnaires en cas de préjudice subi par la
société.
Par exemple, si un défaut de désignation ou de
convocation des commissaires aux comptes aux réunions du conseil
d'administration a causé un préjudice à la
société du fait de l'absence des vérifications des comptes
sociaux ou de vérifications des opérations et conventions
passées entre les dirigeants, l'action sociale « ut
singuli » doit permettre de sanctionner l'inertie et la faute
des dirigeants.
Aucune clause des statuts ne peut subordonner l'exercice de
cette action à l'avis préalable ou à l'autorisation d'un
organe quel qu'il soit. Par ailleurs, une clause qui comporterait par avance
une renonciation à l'exercice de l'action est réputée non
écrite100(*) tout
comme la décision ayant pour effet d'éteindre une action en
responsabilité contre les dirigeants pour les fautes commises dans
l'exercice de leurs fonctions101(*).
Le succès de l'action ainsi intentée permet
à la société de voir son préjudice
réparé, mais encore faut-il que les dirigeants disposent d'une
solvabilité suffisante. Il est des préjudices tellement
importants qu'aucune fortune privée ne peut supporter le poids de la
réparation ordonnée102(*). Il est par conséquent nécessaire de
doubler leur responsabilité civile d'une responsabilité
pénale.
B : La
responsabilité pénale des dirigeants sociaux de
sociétés anonymes
Homme du chiffre mais aussi parfois du
droit103(*), les
commissaires aux comptes peuvent apparaître aux yeux des dirigeants
véreux comme des personnages gênants104(*). Désireux
d'écarter un contrôle gênant ou dangereux pour eux s'ils ont
commis des actes délictueux, les dirigeants sociaux peuvent y mettre
obstacle de manière plus ou moins directe à leur contrôle.
L'obstacle peut consister non seulement dans l'absence de désignation ou
de convocation desdits commissaires, mais aussi dans l'entrave aux
vérifications ou le refus de communiquer.
Pour permettre au commissaire aux comptes d'exercer
normalement ses missions, le législateur érige ces comportements
en infraction pénale qu'il s'agisse du défaut de
désignation ou de convocation (1) ou de l'obstacle aux
vérifications ou le refus de communiquer (2).
1. L'absence de désignation ou de
convocation des commissaires aux comptes
L'infraction présente deux facettes
alternatives : l'absence de désignation et l'absence de
convocation.
En principe, les commissaires aux comptes sont
désignés dans les statuts de la société ou lors de
la constitution de celle-ci, par l'assemblée constitutive, ou par
l'assemblée générale ordinaire au cours de la vie sociale.
Le législateur OHADA a permis à certaines de designer un ou
plusieurs commissaires aux comptes. Il en est ainsi de la SA par exemple.
Ainsi, il est fait obligation à tout dirigeant
d'une personne morale tenue d'avoir un commissaire aux comptes d'en designer ou
remplacer en cas de décès ou de démission. Chaque fois que
le nombre de commissaires aux comptes requis par la loi ou prévu par les
statuts ne se trouve pas en fonction, les dirigeants sociaux devront convoquer
l'assemblée ordinaire en vue de procéder à cette
désignation. Faute pour eux de procéder à cette
convocation, le délit sera constitué105(*). Le texte vise donc le fait
par les dirigeants de n'avoir pas
« provoqué » la désignation.
L'infraction est largement entendue. Il faut noter
qu'à coté du procédé qui consiste à ne pas
convoquer l'assemblée pour la nomination du commissaire aux comptes ou
à ne pas inscrire cette question à l'ordre du jour, tout
comportement similaire est également répréhensible.
Pour ce qui est du délit de non convocation des
commissaires aux comptes aux assemblées, l'article 722 AUSCGIE dispose
qu'ils doivent être « obligatoirement »
convoqués à toutes les assemblées d'actionnaires ainsi
qu'à la réunion du conseil d'administration, selon le cas qui
arrête les comptes de l'exercice écoulé.
L'obligation de convoquer aux réunions du conseil
d'administration ne fait pas l'objet de sanctions pénales. Par contre,
le délit est caractérisé lorsqu'ils n'auront pas
été convoqués à une assemblée quelconque
d'actionnaires.
Dans tous les deux infractions, l'élément
matériel du délit sera constitué lorsque les dirigeants ne
peuvent justifier de ces diligences.
L'élément moral n'est pas toujours
exigé, les dirigeants tombent sous le coup de la loi que l'obstacle
à la désignation ou à la convocation résulte de
leur pure volonté ou même de leur simple négligence. C'est
ainsi qu'engage sa responsabilité pénale un président
directeur général, qui, ayant pris ses fonctions pendant le
délai de convocation de l'assemblée générale
ordinaire s'abstient de nommer ou de convoquer un commissaire aux comptes
à cette assemblée invoquant la faute imputable à son
prédécesseur106(*).
Lorsque les éléments constitutifs de
l'infraction sont réunis, la loi n°2003/008 du 10 juillet 2003
à son article 15 punit d'un emprisonnement de deux (2) à cinq (5)
ans et d'une amende de 500.000 à 5.000.000 Fcfa ou de l'une des deux
peines seulement, les dirigeants sociaux qui n'ont pas provoqué la
désignation des commissaires aux comptes ou ne les ont pas
convoqués aux assemblées générales107(*).
L'infraction dans son ensemble se présente comme une
omission. Mais sous d'autres cieux, l'infraction s'analyse en des actes
positifs : c'est l'hypothèse de l'entrave aux contrôles du
commissaire aux comptes.
2. L'entrave aux contrôles des
commissaires aux comptes
Le délit est prévu par l'article 900 AUSCGIE.
En effet, le délit ne concerne pas seulement les dirigeants sociaux,
mais également tous ceux qui sont au service de la
société, notamment les salariés, experts-comptables, c'est
ce qui ressort dudit article qui dispose qu' encourent une sanction
pénale, les dirigeants sociaux ou toute personne au service de la
société qui, sciemment, auront mis obstacle aux
vérifications ou au contrôle des commissaires aux comptes ou qui
auront refusé la communication, sur place, de toutes pièces
utiles à l'exercice de leur mission et notamment de « tous
contrats, livres, documents comptables et registres de procès verbaux
». Dès lors, on remarque que l'infraction exige la
réunion de certains éléments pour être
réprimée.
Pour ce qui est de l'élément matériel,
l'article 900 AUSCGIE vise deux types de comportements à savoir
l'obstacle aux vérifications et le refus de communiquer.
L'obstacle aux vérifications est une entrave de nature
quelconque apportée par l'auteur du délit aux contrôles et
vérifications des commissaires aux comptes. Il peut résulter par
exemple dans le refus d'accès aux locaux, des tracasseries diverses dans
la mise à la disposition des moyens nécessaires à
l'investigation, des réticences à fournir des explications, la
non production ou la production partielle des documents, ou de l'opposition
à fournir des moyens matériels pour procéder à des
travaux108(*). Le
délit peut également être retenu si l'obstacle est fait aux
vérifications effectuées par les collaborateurs et les
assistants choisis par le commissaire aux comptes109(*).
Le refus de communiquer emporte résistance de
communiquer sur place toutes les pièces utiles à l'exercice de la
mission et notamment tous contrats, livres, documents comptables et registres
de procès verbaux, même si ce contrôle en définitive
réussit à s'opérer. Ainsi, pour que le délit soit
constitué, il faut une demande expresse et précise du
contrôleur ; la où les pièces demandées doivent
être utiles à l'exercice des fonctions. Un arrêt de la Cour
d'appel de Paris110(*)avait énoncé que l'infraction du refus
de communication des livres est supposée être commise la où
ils sont tenus, mais la Cour de cassation111(*) a jugé différemment en
énonçant que le refus de communication peut être commis par
« tous moyens » et notamment par le non envoi des
pièces demandées. Selon la jurisprudence112(*), l'entrave suppose donc que
le commissaire aux comptes se soit présenté effectivement dans
l'entreprise.
En plus de l'élément matériel,
l'intention est exigée pour que le délit soit consommé.
L'action en connaissance de cause est nécessaire à l'existence de
l'infraction, vu l'adverbe « sciemment ». Il faut que
les dirigeants aient volontairement fait obstacle au contrôle des
commissaires aux comptes, qu'ils aient eu conscience du refus
opposé113(*).
L'obstruction volontaire est également établie par des
réclamations verbales et écrites restées sans
réponses114(*).
Lorsque les éléments constitutifs sont réunis, les peines
de l'article 15 de la loi camerounaise du 10 juillet 2003
précitée sont prononcées.
Cependant, s'il y a des dirigeants coupables, désireux
d'éviter ce contrôle, il peut y avoir aussi des commissaires aux
comptes malhonnêtes, n'assurant pas sérieusement le contrôle
dont ils sont chargés. Alors, il faut protéger les dirigeants, la
société, les actionnaires et le public contre un contrôle
insuffisant mettant en péril de nombreux intérêts. C'est
ainsi que la loi reconnaît aussi à leur encontre, des actions en
responsabilité.
§II : les actions en
responsabilité contre les commissaires aux comptes
Les missions des commissaires aux comptes se sont
considérablement développées au fil du temps. Outre la
mission traditionnelle du contrôle des comptes et la vérification
des informations comptables et financières diffusées par la
société, ils se sont vus confier des missions nouvelles telles
que la mission d'alerte.
Cette évolution croissante des missions exigeait un
cadrage pour éviter un abus de pouvoir. C'est la raison pour laquelle en
contrepartie de leur mission élargie, le législateur a alourdi
leur responsabilité afin de permettre un contrôle efficace. La
sanction des contrôleurs est d'ailleurs perçue par le professeur
Paul Gérard POUGOUE115(*) comme « un surcroît de garantie
d'un bon contrôle ». En cas de mauvaise exécution
de sa mission, les commissaires aux comptes engagent leur responsabilité
civile, pénale et disciplinaire. Si le législateur communautaire
a réglementé les deux premières (A), il a renvoyé
aux Etats le soin de règlementer la responsabilité disciplinaire
(B)
A. Les actions en
responsabilité contre les commissaires aux comptes dans l'acte uniforme
sur les sociétés commerciales.
Pour assurer la pleine efficacité du contrôle
des commissaires aux comptes dans la SA, le législateur a pris le soin
de prévoir à leur encontre une responsabilité civile et
pénale en cas d'atteinte au contrôle de sociétés.
Dans l'acte uniforme sur les sociétés commerciales, cette
responsabilité est renforcée sur le plan civil (1) et
aggravée sur le plan pénal (2).
1 : Le renforcement
de la responsabilité civile des commissaires aux comptes
La responsabilité civile des commissaires aux comptes
implique une faute116(*). Le législateur communautaire africain le
confirme en énonçant que « le commissaire aux
comptes est responsable, tant à l'égard de la
société que des tiers, des conséquences dommageables, des
fautes et négligences qu'il commet dans l'exercice de ses
fonctions »117(*), des infractions commises par les membres du conseil
d'administration ou par l'administrateur général si, en ayant eu
connaissance, il ne les a pas révélées dans un rapport
à l'assemblée générale118(*).
Comme la responsabilité civile des dirigeants sociaux,
celle des commissaires aux comptes obéit au droit commun de la
responsabilité civile qui exige certaines conditions (a) à
remplir avant de mettre en oeuvre l'action en responsabilité (b).
a. Les causes de la responsabilité civile des
commissaires aux comptes
Les conditions dans lesquelles le commissaire aux comptes
engage sa responsabilité civile auprès de la personne morale
contrôlée, des actionnaires et des tiers répondent à
la division triptyque faute, dommage et lien de causalité. Si le dommage
est facile à établir, il n'en est pas de même de la faute
et du lien de causalité qui sont particulièrement
délicates à prouver du fait de la fonction particulière
des commissaires. Cette difficulté nous oblige donc à
s'appesantir en priorité sur la faute (á) et le lien de
causalité (â).
á La faute du commissaire aux comptes
La responsabilité civile des commissaires aux comptes
prend source dans la faute commise par lui dans l'exercice de ses fonctions.
Elle doit donc être une faute personnelle, constitutive de manquement
à ses obligations professionnelles.
Logiquement, le commissaire aux comptes ne saurait
être tenu d'une faute commise par des autres personnes. A ce propos, il
importe qu'il exerce à titre individuel au sein de la
société contrôlée. Malheureusement, la charge du
travail est souvent très lourde, l'obligeant ainsi à recourir
à l'assistance. En conséquence, il doit répondre des
fautes de ses collaborateurs au sens de l'article 718 al 2 AUSCGIE qui
dispose : « pour l'accomplissement de ces contrôles et
vérifications, le commissaire aux comptes peut, sous sa
responsabilité, se faire assister ou représenter par tels experts
ou collaborateurs de son choix...».
S'agissant de la faute commise par
lui-même, elle consistera de façon générale dans la
méconnaissance des diligences pesant normalement sur un tel
professionnel, de n'avoir pas accompli les obligations inhérentes
à sa mission119(*).
Si l'AUSCGIE se contente des formules très vagues de
la faute, la jurisprudence en est arrivée à lui façonner
un terrain somme toute large qui distingue les actes constitutifs de faute
selon que le commissaire aux comptes exerce ses missions traditionnelles ou
particulières.
Le contrôle des comptes étant la mission
traditionnelle ; ont été retenues comme actes fautifs les
comportements et faits suivants : le défaut de découverte
des malversations qu'un examen sérieux des comptes aurait permis de
mettre à jour120(*) ; l'absence de vérification effective
des comptes, le commissaire aux comptes s'étant borné à
entériner les chiffres qui lui ont été
présentés par les dirigeants121(*) ou s'étant laissé orienter dans
ses sondages de la comptabilité par les dirigeants122(*) ; la certification
erronée des comptes facilitant l'exercice d'une activité
déficitaire123(*)ou la certification hâtive des comptes n'ayant
pas permis de déceler les détournements des dirigeants ou d'un
comptable124(*).
Même si le commissaire aux comptes dont la
responsabilité civile est recherchée peut établir qu'il a
mené ses investigations et sondages dans les règles de l'art,
à l'image d'un « bon commissaire aux
comptes », sa responsabilité pourra cependant être
engagée s'il n'a pas tiré, volontairement ou par manque de
circonspection les conclusions qui, normalement auraient du en découler,
s'agissant de la certification des comptes. Un cas très flagrant est la
certification d'un bilan inexact125(*)ou la certification sans réserves alors que
celles-ci auraient pu lui apparaître indispensables pour informer les
actionnaires ou les membres du groupement126(*).
Dans l'accomplissement de ses missions particulières,
les cas de fautes sont aussi patents et la jurisprudence retient : la
passation sous silence par le commissaire aux comptes dans son rapport
général d'anomalies des écritures relatives relative aux
stocks, aux amortissements et à des livraisons à soi même
et l'insuffisance de la rigueur des méthodes comptables de la
société, et ce même s'il avait signalé ces
irrégularités au conseil d'administration127(*) ; l'absence des
mentions dans son rapport général de la perte des ¾ du
capital social de la société privant les associés d'une
information sur la situation de la société et commandant leur
décision128(*).
Le commissaire aux comptes a entre autres obligations la dénonciation
des faits délictueux dont il a eu connaissance dans l'exercice de ses
missions. Le défaut de mise en oeuvre de cette procédure de
révélation des faits délictueux est une faute qui engage
sa responsabilité civile si un dommage en résulte129(*), il en est de même en
cas d'information mensongère ayant causé un préjudice
à une banque qui octroie un prêt à une
société en se fiant aux informations mensongères
livrées par le commissaire aux comptes130(*).
Dans le cadre particulier de sa mission d'alerte, il doit
faire preuve d'une grande prudence, sinon, il engage sa responsabilité
civile en cas d'inaction ou de mauvaise exécution de la mission. Ainsi,
il a été décidé que commet une faute engageant sa
responsabilité le commissaire aux comptes qui déclenche une
alerte prématurée dans la seule intention de nuire à la
société et aux dirigeants131(*)ou en sachant que la continuité de
l'exploitation n'est pas menacée132(*).
Tous ces cas cités ne sont pas limitatifs, il en
résulte que toute faute du commissaire aux comptes dans
l'exécution de ses missions peut engager sa responsabilité au cas
où il en résulte un dommage.
Mais toute la difficulté résidera dans
l'appréciation de ladite faute. Comment doit-on
l'apprécier ? Est-elle présumée, ou le demandeur
doit-elle la prouver. Autrement dit, le commissaire aux comptes est-il tenu
d'une obligation moyens ou d'une obligation de résultat ? Le
législateur communautaire ne fournit aucune réponse à
cette préoccupation, il faut une fois de plus s'en remettre à la
jurisprudence qui essaie de donner quelques ébauches de solutions.
D'après elle, la faute doit être prouvée
parle demandeur, car, en principe, l'obligation du commissaire aux comptes est
une obligation de moyens133(*). D'après certains auteurs134(*), Il y'a obligation de moyens
chaque fois que la mission laisse place à l'incertitude, lorsque
l'aléa subsiste. C'est le cas de la vérification des comptes,
ainsi que de la certification de leur régularité et de leur
sincérité. Le simple défaut de sincérité ou
de régularité des comptes ne suffit pas à engager sa
responsabilité. Le demandeur doit donc établir un
défaut de diligences dans les moyens mis en oeuvre au cours du
contrôle135(*).
Ce n'est donc qu'exceptionnellement que le commissaire aux
comptes est tenu d'une obligation de résultat. En effet, certaines de
ses missions ne laissent aucune place à l'aléa et sont
génératrices d'obligations de résultat. Il en est ainsi
lorsqu'il doit certifier exactement le montant des rémunérations
versées aux personnels les mieux
rémunérés136(*) ; vérifier la régularité
des modifications statutaires ; vérifier les règles
relatives aux actions détenues par les administrateurs ;
convoquer les organes de direction et l'assemblée générale
en cas de carence ou lorsque la mission d'alerte l'implique ; de
même qu'établir un rapport sur les conventions
passées entre les dirigeants et la société.
Il ne parait ni illogique, ni exagérément
sévère de présumer la faute du commissaire aux comptes qui
omet de mentionner dans son rapport une convention qui lui a été
signalée ou celle du commissaire aux comptes qui n'a pas
certifié l'exactitude des montants versés aux personnes les mieux
rémunérées. Dans toutes ces hypothèses, les
diligences imposées au commissaire aux comptes sont suffisamment claires
et précises pour que leur inexécution soit présumée
fautive137(*). Telle est
la nouvelle logique obligation de moyens, obligation de résultat qui
doit désormais régir la faute du commissaire aux comptes,
laquelle faute doit s'apprécier « in
abstracto » c'est-à-dire par référence
à la conduite d'un commissaire diligent et actif placé dans la
même situation138(*). Cependant, la faute prise isolement ne saurait
engager la responsabilité du commissaire aux comptes, sauf s'il existe
une relation causale entre elle et le dommage.
â. La relation causale entre la faute et le
dommage
Le lien de causalité est une pièce capitale dans
la mise en jeu de la responsabilité civile des commissaires aux comptes.
Il ne suffit pas en effet, d'établir la faute du commissaire aux
comptes, de prouver l'existence d'un préjudice, encore faut-il les lier
de manière indéfectible139(*). La responsabilité du commissaire aux comptes
suppose donc que sa faute ait directement provoqué un préjudice
certain.
Le lien de causalité est jugé établi
lorsque la réalisation d'un dommage a pour cause l'absence de diligences
normales qui auraient permis de déceler les fraudes140(*). La faute du commissaire
aux comptes est à l'origine du dommage et en conséquence, il doit
y répondre. Un cas typique réside dans la non-dénonciation
des faits délictueux au procureur de la République au cas
où un préjudice survient du fait de ce manquement141(*). De manière
générale, chaque fois qu'il est constaté que le
préjudice subi découle de la faute du commissaire aux comptes, il
ne serait plus question de rechercher un éventuel lien de
causalité puisqu'il est déjà établi par les
faits.
En revanche, l'absence ou l'impossibilité
d'établir ce lien entraîne une irresponsabilité du
commissaire aux comptes ainsi qu'il a été décidé
dans certaines espèces : une caution qui s'était
engagée pour le compte d'une société n'avait pu
établir qu'elle n'avait fourni et maintenu sa garantie que sur la base
de bilan erroné certifié par le commissaire, le juges conclurent
à l'irresponsabilité du commissaire aux comptes142(*). Il en est de même
pour une autre société qui reprochait au commissaire aux comptes
des négligences sans lesquelles elle n'aurait pas acquis la
majorité du capital d'une filiale. Une fois de plus, le juge de
l'espèce débouta la société, motif pris de ce
que la négligence de la société elle-même dans la
conduite de cette opération était la cause directe de son
préjudice143(*).
Finalement, la responsabilité du commissaire aux
comptes ne peut être retenue que si le demandeur prouve l'existence d'un
lien de causalité entre la faute et le dommage. Cette preuve se heurte
cependant à certaines difficultés particulières, car le
commissaire aux comptes accomplit une mission de contrôle et
d'information, interdiction lui étant faite de s'immiscer dans la
gestion ou d'apprécier l'opportunité de celle-ci144(*) d'autant plus qu'il s'agit
d'un domaine réservé aux dirigeants. Ainsi, la faute du
commissaire aux comptes n'est à peu près jamais la seule cause du
dommage145(*) subi par
la société ou par les tiers. Il faut faire la part du dommage
causé par le commissaire aux comptes de celui provoqué par les
dirigeants. L'hypothèse la plus caractéristique est l'article 726
al 2 AUSCGIE qui dispose que « le commissaire aux comptes est
responsable des infractions commises par les dirigeants si en ayant eu
connaissance, il ne les a pas révélés dans son
rapport ».
A ce stade, comment apprécier le lien de
causalité ? Devant la difficulté d'appréciation du
lien de causalité et face au silence des textes, la jurisprudence adopte
des positions très nuancées. Parfois, elle admet une
responsabilité « in solidum » en cas
d'abstention des commissaires aux comptes de dénoncer la faute des
dirigeants alors qu'il avait pleinement connaissance, le motif étant que
chacun des responsables a concouru à la réalisation du dommage
tout entier146(*),
tantôt, elle opère un partage de responsabilité entre le
dommage causé par le dirigeant et celui du contrôleur147(*) ou nie même le lien de
causalité entre les deux fautes148(*).
A notre sens, et en conformité avec certains
auteurs149(*), cette
dernière tendance est salutaire. Il ne faudrait pas toujours voir dans
le commissaire aux comptes, le responsable de tous les dommages intervenus au
cours de la vie sociale. Il nous paraît bien dommage que le
commissaire aux comptes puisse être condamné
« in solidum » d'après la
jurisprudence alors même qu'il a bien accompli toutes les diligences
résultant de sa mission. Sa mission de contrôle suffirait-elle
pour contrer toutes les fautes de gestion des dirigeants, alors qu'il lui est
interdit de s'immiscer dans la gestion, ni d'en apprécier son
opportunité, encore moins de refaire la comptabilité de la
société.
Les conditions de la responsabilité civile des
commissaires aux comptes appellent le législateur OHADA à plus
d'éclaircissements150(*), ce qui permettra de mettre facilement en jeu
l'action en responsabilité.
b. Le régime de l'action en
responsabilité civile contre les commissaires aux comptes
Le régime de l'action en responsabilité civile
contre les commissaires aux comptes ne pose pas de difficultés
particulières. Lorsque les conditions sont réunies, la
responsabilité du commissaire aux comptes peut être facilement
mise en oeuvre par la personne morale soumise au contrôle, les
actionnaires ou les créanciers.
Pour la personne morale, l'action s'apparente à
l'action sociale et doit être exercée par les dirigeants. Une
question préoccupante reste posée à ce stade : celle
de savoir si l'actionnaire peut-il exercer l'action en lieu et place des
dirigeants pour pallier à leur inertie. En clair, les actionnaires
peuvent-ils exercer l'action sociale « ut
singuli » contre le commissaire aux comptes ? La
jurisprudence151(*)s'y
oppose ardemment au motif que l'exercice d'une telle action n'est pas de droit,
parce que non prévue par les textes. A notre sens, en se fondant sur la
protection de leurs intérêts152(*), une telle action parait possible, mais, Les
actionnaires et les tiers ne peuvent exercer que l'action individuelle contre
le commissaire aux comptes.
Le tribunal du lieu de situation de la société
est compétente pour recevoir l'action qui, se prescrit par trois ans
à compter du fait dommageable ou à compter de sa
révélation s'il a été dissimilé, elle se
prescrit exceptionnellement par dix ans lorsque le fait est qualifié de
crime.
Le quitus donné aux dirigeants ne profite pas au
commissaire aux comptes153(*). par contre, il faut admettre que le quitus
donné aux commissaires aux comptes, qui n'est pas d'ailleurs
obligatoire, ni prévu parles textes éteint l'action sociale
contre eux.
Le résultat recherché par les demandeurs est la
condamnation du commissaire aux comptes fautif au paiement des
dommages-intérêts. Inversement lorsque la demande n'aboutit pas,
le commissaire aux comptes peut à son tour faire valoir ses droits
à l'indemnisation.
En définitive, malgré les difficultés
qui planent sur l'appréciation de la faute d'une part et du lien de
causalité d'autre part, le renforcement de la responsabilité
civile du commissaire aux comptes constitue un élément
nécessaire à l'exercice correct du contrôle. Conscient du
moins de ce qu'une responsabilité encore trop lourde peut se retourner
contre un bon contrôle, il serait souhaitable à notre sens, sinon
de supprimer, du moins de redéfinir la responsabilité civile du
contrôleur dans les cas où il s'est montré diligent dans le
cadre de son obligation de moyens. Ce n'est qu'à ce titre que la
responsabilité civile renforcée garantirait davantage un
contrôle efficace des comptes au même titre que la
responsabilité pénale qui a été aggravée.
2 : L'aggravation de
la responsabilité pénale des commissaires aux comptes
La responsabilité pénale découle de
l'infraction commise par le commissaire aux comptes. Sa mise en oeuvre tend
intimider les commissaires aux comptes malhonnêtes et à les
inciter à plus de prudence. C'est ainsi que les infractions
spécifiques à leurs fonctions (a) font chemin commun avec celles
de droit commun (b).
a. Les infractions propres à la fonction des
commissaires aux comptes
L'application aux commissaires aux comptes d'un droit
pénal propre suppose qu'il ait failli à l'une de ses obligations
fondamentales par action ou par omission. La fonction de contrôle
nécessite compétence, intégrité et
indépendance. C'est pour atteindre cette fin que le législateur a
prévu de nombreuses incompatibilités pour leur exercice154(*). Le commissaire aux comptes
qui va à l'encontre de ces principes commet l'infraction pénale
d'atteinte aux incompatibilités légales (á). A l'issue du
contrôle, le législateur fait reposer sur lui un devoir
d'information et de dénonciation. L'information consiste
à porter à la connaissance des dirigeants et des actionnaires les
faits découverts au cours de ses investigations, encore faut-il qu'elle
soit juste. Commet ainsi le délit d'information mensongère le
commissaire aux comptes qui livre de fausses informations (â). La
dénonciation consiste à porter à la connaissance du
procureur de la République, les faits délictueux
découverts dans l'exercice de ses missions. En cas d'omission de cette
obligation, il commet le délit de non révélation des faits
délictueux (ë).
á. L'infraction d'atteinte aux
incompatibilités
Les articles 697 à 700 AUSCGIE exigent avec force la
nécessité pour le commissaire aux comptes d'exercer ses missions
en toute indépendance en énonçant une série
d'incompatibilités légales et spéciales renforcées
par des interdictions.
Pour assurer la pleine efficacité de ces
prohibitions, l'article 898 AUSCGIE dispose : « Encourt une
sanction pénale, toute personne qui, soit en son nom personnel, soit
à titre d'associé d'une société de commissaires aux
comptes aura sciemment accepté, exercé ou conservé les
fonctions de commissaires aux comptes nonobstant les incompatibilités
légales. » Puisque le législateur OHADA a
renvoyé aux Etats la charge d'édicter les sanctions
pénales155(*),
l'article 16 de la loi camerounaise du 10 Juillet 2003 en application de
l'article 898 précité punit d'un emprisonnement de 2 (deux)
à 5 (cinq) ans et d'un amende de 200.000 à 5 .000.000 Fcfa
ou de l'une de ces deux peines seulement, toute personne qui soit en son nom
personnel, soit à titre d'associé d'une société de
commissaire aux comptes a sciemment accepté, exercice ou conservé
les fonctions de commissaires aux comptes nonobstant les
incompatibilités.
L'art 898 utilise la formulation neutre « toute
personne ».Il en résulte que l'infraction peut être
cumulée avec celle de l'exerce illégal de la profession.
Cela signifie aussi que les dirigeants de la
société qui ont agi sciemment pour faire nommer un commissaire
aux comptes frappé d'une incompatibilité peuvent être
condamnés comme complices.
Matériellement, l'infraction existe dès qu'il
y'a eu soit acceptation même sans exercice concret des fonctions, soit
exercice en situation incompatible, soit poursuite des fonctions après
apparition des incompatibilités et ce, quelle que soit la durée
de cette infraction156(*)et/ou de l'importance de l'activité.
L'élément moral de l'infraction est
classiquement exigé. Il faut, prévoit l'article 898 que le
commissaire aux comptes ait agi « sciemment ». Le
procureur de la République doit donc prouver que, non seulement le
commissaire aux comptes a agi volontairement dans l'intention de nuire, mais
aussi qu'il connaissait la situation d'incompatibilité et n'en a pas
tenu compte. En règle générale, il faut que soit
établie la connaissance par le commissaire aux comptes de la situation
des incompatibilités pour être puni comme en cas d'infraction
d'informations mensongères.
â. Le délit d'informations
mensongères
Il s'agit là de ce que certains auteurs appellent
« le devoir de vérité »157(*) du commissaire aux comptes.
C'est le fait de donner ou confirmer des informations mensongères sur la
situation de la société. Selon l'article 899 AUSCGIE,
« encourt une sanction pénale, tout commissaire aux
comptes qui, soit en son nom personnel, soit à titre d'associé
d'une société de commissaires aux comptes, aura sciemment
donné ou confirmé des informations mensongères sur la
situation de la société... ».
L'objet du mensonge est largement compris, car le texte vise
tout mensonge sur la situation de la société. Le mensonge doit
porter sur les données précises apparaissant dans la
comptabilité que les commissaires aux comptes ont pour mission de
contrôler et non sur des pronostics vagues concernant par exemple
l'avenir économique de la société. L'acte uniforme n'est
pas précis sur le mode de transmission de l'information
mensongère, l'article 899 utilise seulement l'expression
« donné ou confirmé ». Il s'ensuit
que le mode de transmission est indifférent. L'information peut donc
être faite sous réserve d'en rapporter la preuve par voie
écrite ou orale, quelque soit le support de manière publique ou
privée158(*).
L'élément matériel ne suffit pas, il
doit être couplé avec l'élément moral. L'intention
de commettre l'infraction doit être requise avant toute condamnation.
L'article 899 exige que le commissaire ait agi
« sciemment ». La doctrine partage cette
vision159(*).
Il faut donc que soit établi la connaissance par le commissaire aux
comptes des malversations des dirigeants. La responsabilité ne peut
découler que lorsque le commissaire aux comptes a connaissance du
caractère mensonger de l'information.
Lorsque les conditions sont réunies, l'article17de la
loi camerounaise du10juillet 2003 en application de l'article 899 punit d'un
emprisonnement de (2) deux à (5) cinq ans et d'une amende de 500.000
à 5.000.000frs ou de l'une des deux peines seulement tout commissaire
aux comptes qui aurait diffusé des informations mensongères. Les
mêmes sanctions s'appliquent à la non révélation des
faits délictueux.
ë. Le délit de non
révélation des faits délictueux
Malgré le principe du secret
professionnel, la loi impose aux commissaires aux comptes l'obligation de
révéler au procureur de la République les faits
délictueux160(*)
dont ils ont eu connaissance au cours de leur mission sans que leur
responsabilité puisse être engagée par cette
révélation. La non exécution de cette obligation est
constitutive du délit de non révélation des faits
délictueux. Mais elle n'est punissable que si certaines conditions sont
réunies. Elles tiennent aux faits délictueux, à la non
révélation, à la connaissance des faits délictueux,
et à la mauvaise foi.
S'agissant des faits délictueux, si le commissaire
aux comptes constate l'existence de faits délictueux dans la gestion de
la société qu'il contrôle, il doit les
révéler au procureur de la République. Que doit
être le contenu de l'obligation de dénonciation? Le
législateur est muet sur la question. La jurisprudence décide
que l'obligation de dénonciation concerne tous les faits
délictueux qui sont en relation avec la mission de
contrôle161(*).
L'obligation est donc largement définie et englobe tous les faits
délictueux qui peuvent présenter un caractère suspect au
regard de la loi pénale162(*).
Bien plus, le commissaire aux comptes doit avoir eu
personnellement connaissance des faits délictueux. Les textes sont
précis, le commissaire révèle au procureur
« les faits délictueux dont il a eu connaissance à
l'occasion de sa mission ». A l'évidence qu'il ne peut
révéler que ce qu'il connaît, s'ajoute le principe logique
qu'il est condamnable de ne pas révéler ce qu'il connaît.
La lecture des textes enseigne par conséquent que le délit ne
peut exister sans la connaissance par le commissaire aux comptes du fait
délictueux. Il appartient au parquet de faire la preuve de cette
connaissance. C'est ainsi que dans une espèce163(*), le juge a relaxé un
commissaire aux comptes au motif qu'il n'a pas eu une connaissance
précise des délits de faux en écriture de commerce commis
alors qu'il s'était renseigné plusieurs fois auprès des
dirigeants.
La loi exige pour retenir définitivement la
culpabilité que la mauvaise foi du commissaire aux comptes164(*)soit établie. Elle
résulte inévitablement de l'inexécution consciente de
l'obligation. C'est la volonté de ce dernier de ne pas dénoncer
les faits délictueux au parquet.
La loi n'a cependant pas prévu le délai pour
porter à la justice la connaissance des faits délictueux. Il
faudra donc dire à chaque cas s'il s'agit d'une non-dénonciation
ou d'un simple retard dans la dénonciation165(*). Pourtant, la
détermination du moment où le commissaire aux comptes aura acquis
la connaissance est importante, car de cet instant, dépendra le point de
départ du délai de la prescription de l'action publique. A notre
avis, le point de départ de ce délai peut être fixé
à la date de la certification des comptes. Les sanctions pénales
de l'article17 de la loi camerounaise du 10 juillet 2003 s'appliquent quand
l'infraction est définitivement consommée.
Toujours, en vue de rendre efficace le contrôle des
sociétés, parce que le commissaire aux comptes est le gardien du
droit et doit donc connaître toutes les règles légales
qu'il a la mission de faire respecter par les dirigeants et les actionnaires,
le législateur favorise aussi l'engagement de sa responsabilité
pénale sur le fondement de toute infraction de droit commun commise dans
l'exercice de sa fonction.
b. La soumission du commissaire aux comptes aux
infractions de droit commun
Pour les inciter à plus de prudence,
le législateur a étendu la responsabilité pénale
du commissaire aux comptes à toutes les infractions de droit de commun
qu'il commettra dans l'exercice de ses fonctions. Ils peuvent ainsi être
poursuivis pour leur participation à des infractions autres que celles
relatives au contrôle des sociétés. Selon les
circonstances, ils peuvent être retenus comme auteur ou coauteur
(á), mais leur responsabilité pénale est le plus souvent
engagée au titre de la complicité (â).
á. Le commissaire aux comptes, auteur ou
coauteur d'une infraction de droit commun
Comme tout individu, le commissaire aux comptes peut
commettre une infraction pénale de droit commun dans l'exercice de ses
fonctions. Selon le cas, il peut donc être auteur ou coauteur.
L'auteur d'une infraction pénale est celui qui
accomplit personnellement les actes matériels de l'infraction avec
l'intention de réaliser la violation d'une disposition pénale.
Ainsi, s'il commet personnellement dans l'exercice de ses fonctions une
infraction de droit commun en sa qualité de professionnel
libéral, une infraction du droit des sociétés s'il est
associé, un abus de confiance, une escroquerie, un abus de biens
sociaux, un détournement des fonds, un faux et usage de faux, faux en
écriture de commerce, sa responsabilité pénale sera
engagée au même titre que celle d'un individu ordinaire. Cette
mise en jeu de la responsabilité pénale n'est pas propre à
leur profession166(*).
Elle est dictée par le souci de la transparence dans la vie sociale.
De même, s'il est reconnu coauteur d'une infraction
pénale de droit commun, c'est-à-dire participe ensemble avec
autrui et en accord avec lui à la commission de l'infraction167(*), sa responsabilité
pénale peut être engagée au même titre que celle de
l'auteur indépendamment de son degré de participation à
condition qu'il ait participé en connaissance de cause. La loi exige
pour retenir la culpabilité que la mauvaise foi du commissaire aux
comptes soit établie. Cette dernière résulte
inévitablement de sa participation consciente à l'infraction
comme en matière de complicité des délits commis par les
dirigeants.
â. Le commissaire aux comptes, complice des
délits commis par les dirigeants
L'article 97 CPC précise qu'est complice d'une
infraction qualifiée crime ou d'un délit : celui qui
provoque de quelque manière que ce soit l'infraction ou donne des
instructions pour la commettre, celui qui aide ou facilite, la
préparation ou la consommation de l'infraction.
Cet article met en exergue les éléments
constitutifs de la complicité distinguant l'élément
matériel de l'élément moral.
L'élément matériel met en exergue deux
cas de complicité : le premier cas étant la
complicité par instigation, consiste selon l'article 97 à la
provocation par dons, promesses, abus de pouvoir ou d'autorité,
machinations ou artifices coupables, les instructions données
à l'auteur en vue de commettre l'infraction. Point n'est besoin que ces
instructions s'accompagnent des moyens exigés pour la provocation,
seulement elles doivent être précises pour guider l'auteur
principal dans la commission de l'infraction. Le second cas est la
complicité par aide. La notion d'aide168(*) est largement entendue dans l'appréhension de
la complicité et souvent, elle suffit à elle seule pour
caractériser l'infraction une fois l'élément moral
requis.
L'élément moral de la complicité
réside dans l'intention de commettre les actes matériels de
l'infraction. Pour être punissable, le complice doit avoir eu
l'intention de participer à la réalisation de l'infraction
commise par autrui, il doit donc avoir agi en connaissance de cause169(*) c'est-à-dire sachant
consciemment que l'acte que l'on pose est une aide pour la commission d'une
infraction.
En application au droit commun de la complicité, le
commissaire aux comptes est considéré comme complice d'un
délit commis par les dirigeants lorsqu'il a posé des actes
matériels cités haut telles l'instigation, l'aide ou l'assistance
nécessaire à la réalisation de l'infraction. On citera
parmi les principales hypothèses, les délits concernant
l'établissement ou le défaut des comptes, l'escroquerie170(*), l'absence de convocation
des assemblées, l'abus des biens sociaux171(*), la publication des comptes
inexacts172(*), la
distribution des dividendes fictives et de manière
générale tous les délits des dirigeants dans lesquels
l'aide ou l'action du commissaire aux comptes sera établie.
A été ainsi condamné comme complice de
présentation d'un faux bilan un commissaire aux comptes qui avait
cautionné de son autorité, en assemblée
générale un faux bilan destiné à occulter des
prélèvements irréguliers d'un dirigeant173(*). Est également
punissable au titre de complicité du délit de présentation
d'un faux bilan, le commissaire aux comptes qui conseille activement au
dirigeant d'une société de décupler la valeur d'une
immobilisation inscrite au bilan174(*). C'est non seulement une instigation, mais une aide
et la fourniture des moyens permettant au dirigeant de réaliser
l'infraction.
La complicité du commissaire aux comptes a
été aussi retenue dans une tentative d'escroquerie commise par
les dirigeants sociaux avec leur connivence175(*), de même qu'un commissaire aux comptes livrant
des informations mensongères aux associés dans son rapport
général ou spécial. L'infraction exige en principe un
acte positif du commissaire aux comptes, rien n'empêche cependant de
reconnaître sa complicité même s'il est resté
seulement passif face à la commission du fait condamnable. Ainsi, a
été condamné pour complicité un commissaire aux
comptes qui avait gardé le silence sur la situation de la
société en laissant les dirigeants procéder à une
distribution des dividendes fictifs176(*).
De manière générale, tout fait ou
omission dans l'exécution de sa mission desquels il ressort le moindre
soutien illégal en faveur des dirigeants le rend complice des
manoeuvres frauduleuses causées par ces derniers à condition, que
soit prouvée son intention coupable.
L'élément moral de la complicité du
commissaire aux comptes est celui qu'on rencontre dans toutes les infractions
de droit commun conformément à l'article 74 al 2 CPC. Il s'agit
de la conscience chez le commissaire aux comptes, au moment de la
réalisation des actes matériels de complicité, du concours
apporté à la réalisation de l'infraction commise par les
dirigeants. Le commissaire aux comptes doit donc avoir accompli les actes
constitutifs de complicité en toute connaissance de cause. Faute de
preuve, il ne peut y avoir complicité.
C'est dire que lorsque tous les éléments sont
réunis, le code pénal camerounais punit en son article 98 le
complice des mêmes peines l'auteur principal sauf dans les cas où
la loi en dispose autrement177(*). C'est dire qu'en l'état actuel, le
commissaire aux comptes au Cameroun qui est reconnu complice des délits
commis par les dirigeants sociaux est sanctionné des mêmes peines
que ces derniers. Manifestation de la pratique, un commissaire aux comptes
jugé coupable de complicité de présentation de faux bilans
ou de distribution des dividendes fictifs des dirigeants sera puni des
mêmes peines des articles 7 et 8 178(*) de la loi du 10 juillet 2003.
La soumission du commissaire aux comptes au droit pénal
commun traduit le souci du législateur de saisir les formes les plus
cachées d'atteintes au contrôle des SA afin de le conférer
plus d'efficacité. Le même souci éclaire la
responsabilité disciplinaire des commissaires aux comptes qui ressort de
la compétence des Ordres professionnels nationaux.
B. La
responsabilité disciplinaire des commissaires aux comptes.
Le législateur communautaire renvoie à des
règles de droit national les points sur lesquels il est impossible de
réduire à l'uniformisation pour des raisons sociales ou
politiques. C'est le cas de la responsabilité disciplinaire des
commissaires aux comptes qu'il a laissée aux Ordres professionnels
nationaux de la comptabilité.
Dans le souci de rendre plus efficace le contrôle
externe des SA, ces Ordres professionnels organisent une responsabilité
disciplinaire de leurs membres. Cette responsabilité a une
finalité (1) et doit obéir à des règles
précises (2)
1. La finalité de la
responsabilité disciplinaire : l'amélioration de la
qualité du contrôle des commissaires aux comptes
Le contentieux disciplinaire est un révélateur
des exigences attendues d'une profession libérale, et notamment des
compétences et de la moralité de ses membres, par le public, mais
aussi par les confrères. Il trouve son fondement dans l'appartenance
à une profession organisée.
La responsabilité tend à assurer le respect de
la déontologie de la profession utile au contrôle. Les
commissaires aux comptes doivent respecter la loyauté
caractéristique de leur profession. Ce sont donc toutes les atteintes
à l'éthique, professionnellement ou publiquement perçues,
qui sont prises en considération du moment où elles peuvent avoir
une influence sur la profession ou sur le contrôle des
sociétés, c'est-à-dire « tout fait contraire
à la probité ou à l'honneur »179(*). Il importe peu dans ces
hypothèses, de savoir si le comportement incriminé est
extraprofessionnel dès lors qu'il est possible de desservir la
profession : fraude comptable, ignorance manifeste ou
« déviances » diverses, y compris
l'appât de gains dans la pratique d'honoraires prohibitifs.
D'autres fautes en revanche, se rattachent à l'exercice
même de l'activité de contrôle du commissaire aux comptes
qu'il s'agisse des irrégularités dans son installation ou dans
ses pratiques, et notamment les atteintes à la «
règle d'or » de l'indépendance.
Finalement, les responsabilités et les contrôles
diligentés par les ordres professionnels constituent le moyen naturel
d'assurer une police déontologique et d'améliorer la
qualité du contrôle opéré par les
spécialistes de la comptabilité. Cette mise en jeu de la
responsabilité est facilitée par l'obligation mise à leur
charge par l'ordre de constituer un dossier contenant tous les documents
reçus ou établis par eux à l'occasion de leurs fonctions.
Le contrôle de ces documents permettra le moment venu
de savoir si le commissaire aux comptes a commis une faute
disciplinaire180(*)
susceptible de mettre en branle le régime disciplinaire
2. Le régime des
poursuites disciplinaires
Le régime des poursuites tourne autour de la
procédure (a) et des sanctions pouvant être prononcées
(b).
a. La procédure disciplinaire.
Quand l'Ordre professionnel conclut à une faute
disciplinaire, les poursuites disciplinaires doivent être engagées
contre le mis en cause devant la chambre de discipline de l'Ordre. Au Cameroun,
l'ONECCA dispose depuis sa création d'un organisme chargé
d'assurer la discipline de ses membres. Il est composé de deux
instances : le Conseil de l'Ordre et la Chambre d'Appel
présidée par un magistrat de la Cour suprême
désigné par le Président de la Cour suprême.
Le Conseil de l'Ordre reçoit toutes les plaintes et
accusations formulées contre les commissaires aux comptes qu'elles
proviennent de l'Ordre, des tiers, des actionnaires ou des dirigeants sociaux.
Il est chargé entre autres de l'instruction du dossier et doit rendre
une décision sur le fond. Le principe du contradictoire est
respecté, le commissaire aux comptes accusé a le droit de se
défendre. Mais peut-il exiger le remplacement d'un membre du Conseil de
l'Ordre pour suspicion ? Les statuts de l'ONECCA sont muets. A notre sens,
pour les besoins d'une bonne justice, une telle action devrait être
admise. Le Conseil de l'Ordre joue le rôle d'une juridiction de
première instance, ses décisions sont susceptibles d'appel devant
la Chambre d'Appel de l'Ordre.
Cette dernière joue le rôle reconnu à
toute Cour d'appel. A cet effet, elle reçoit en appel toutes les
questions qui ont été soumises au Conseil de l'Ordre et doit
réexaminer le fond du litige. On se pose une question : les
décisions de la Chambre d'Appel sont-elles susceptibles de
recours ? Si oui, devant quelle Juridiction ? Les statuts de l'ONECCA
ne répondent pas à cette préoccupation. A notre sens, ses
décisions devraient être
« insusceptibles » de recours d'autant plus qu'on
note la présence des magistrats de la
« haute » juridiction. Cette solution
éviterait l'encombrement des prétoires.
Lorsque la chambre de discipline (via le Conseil de l'Ordre ou
la Chambre d'Appel) conclue à des actes constitutifs de fautes
disciplinaires contre le commissaire aux comptes, elle prononce des sanctions
disciplinaires.
b. Le prononcé des sanctions
disciplinaires
Un commissaire aux comptes reconnu coupable d'atteinte
à la probité ou à l'honneur de la profession sera
sanctionné par l'Ordre professionnel. Dans le cadre de l'ONECCA, la
Chambre de discipline peut prononcer l'une des sanctions suivantes :
l'avertissement, la réprimande, la suspension d'activité allant
de trois (3) mois à un (1) an et la radiation. Tandis que les deux
premières s'analysent en des sanctions de portée morale
(á), les deux dernières s'analysent plutôt
en sanctions privatives de droit (â).
á Les sanctions de portée morale :
l'avertissement et la réprimande
L'avertissement est la première sanction que peut
prononcer l'Ordre professionnel. Il s'agit d'un appel à l'intention,
d'un « rappel à l'ordre » fait à un
individu ou une autorité C'est donc la sonnette d'alarme faite au
commissaire aux comptes d'avoir à mieux se comporter et de respecter
l'éthique de la profession.
La réprimande est un blâme fait au commissaire
aux comptes en cas de manquements aux règles professionnelles dans
l'exécution de ses missions. Mais contrairement à
l'avertissement, elle suppose que le commissaire ait posé des atteintes
d'un certain degré. C'est ainsi qu'elle peut faire l'objet d'une
publicité auprès des sociétés
contrôlées par l'intéressé. Ce qui aura
inévitablement des effets néfastes sur la suite de sa
carrière.
Quoi qu'on puisse dire, l'avertissement et la
réprimande ne sont que des sanctions minables, car ne privant pas
l'intéressé de l'exercice de certains droits comme la suspension
et la radiation.
â. Les sanctions privatives de droit : la
suspension et la radiation
Si la suspension d'activité181(*) et la radiation sont des
sanctions qui se révèlent privatives de droit parce qu'elles
empêchent le commissaire aux comptes
« condamné » de continuer l'exercice de ses
fonctions, des différences notables sont à relever. La suspension
d'activité est juste « temporaire ». Le
droit français en fournit la précision utilisant le terme
« suspension à temps ». La radiation est
définitive, car elle emporte le retrait du nom de
l'intéressé de la liste.
Le commissaire aux comptes suspendu ne reprendra ses fonctions
qu'après l'assemblée générale appelée
à statuer sur les comptes de la société, qui suivra
l'expiration de la période de suspension.
La radiation est une sanction grave. Elle emporte
nécessairement l'interdiction d'exercer et de faire état de la
qualité de commissaire aux comptes. C'est une exclusion, en
théorie, définitive. Bien que les statuts de l'ONECCA
prévoient une possibilité de réinscription à
l'Ordre dans un délai de cinq ans à compter de la décision
de radiation, les chances de reprise du commissaire réinscrit par les
sociétés sont très faibles. Le commissaire
condamné à une radiation restituera aux sociétés
qu'il contrôlait toutes les sommes déjà perçues par
anticipation ne correspondant pas à un travail effectif.
C'est dire le caractère
« particulièrement infamant »182(*) de cette sanction. Elle
constitue une « mesure d'assainissement » de la
profession comptable et du contrôle des sociétés.
L'oeuvre des Ordres professionnels sur le sentier de la
recherche de l'efficacité du contrôle est salutaire vu
l'exemplarité des sanctions telle que la radiation. Un commissaire aux
comptes suspendu ou radié qui établit les comptes d'une
société voit sa responsabilité engagée et ses
délibérations annulées.
Section II : LES ACTIONS CONTRE LES ACTES : LA
NULLITE DES DELIBERATIONS.
Le législateur africain a
marqué très nettement toute l'importance qu'il attache au
rôle des commissaires aux comptes. Ainsi, il a non seulement rendu
obligatoire leur présence dans toutes les SA, mais aussi, a pris le soin
de dégager les règles régissant leur nomination. C'est la
raison pour laquelle il frappe de nullité toute
délibération prise à défaut de désignation
des commissaires aux comptes ou sur le rapport d'un commissaire titulaire
nommé ou demeuré en fonction en violation des règles
gouvernant cette nomination. Très souvent, il va jusqu'à annuler
les actes du commissaire aux comptes régulièrement
désigné, qui abuse de ses pouvoirs.
La sphère des nullités est très large:
elle vise l'omission de nommer le commissaire aux comptes, les
irrégularités de leur désignation et les abus de
pouvoirs. Tandis que la première hypothèse vise les actes des
acteurs sociaux (§I), les deux dernières visent les actes du
commissaire aux comptes (§II).
§I. La nullité des
délibérations pour défaut de désignation des
commissaires aux comptes
En mettant à la charge des dirigeants
de sociétés anonymes l'obligation de désigner les
commissaires aux comptes, le législateur voulait montrer toute
l'importance qu'ont ces derniers dans la vie de l'entreprise. C'est ainsi
qu'à coté des responsabilités civiles et pénales
contre les personnes, il a prévu la nullité des
délibérations. Est de ce fait nulle toute
délibération prise à défaut de désignation
des commissaires aux comptes dans lesdites sociétés.
Bien que le législateur ne le dise pas
expressément, cette nullité ne concerne que les seules
délibérations de l'assemblée générale et non
pas celles du conseil d'administration. Ce qui est regrettable. Il serait
souhaitable de l'étendre aux délibérations du conseil
d'administration. Il semble même que cette nullité aurait pu les
responsabiliser davantage. L'idée étant qu'on ne devrait pas
valider les délibérations du conseil d'administration quand la
société a un commissaire aux comptes.
Il y a également nullité des
délibérations lorsque l'assemblée
générale délibère sur le rapport d'un seul
commissaire aux comptes alors que la société en a plusieurs.
Parce que la sanction de la nullité peut être très lourde,
l'alinéa 2 du même article 700 admet que l'action en
nullité puisse être éteinte si les
délibérations sont expressément confirmées par une
assemblée générale statuant sur le rapport de commissaires
aux comptes régulièrement désignés. Encore faut-il
que la désignation intervienne avant l'assemblée de
certification.
Si cette désignation est postérieure, la
nullité des délibérations intervenue sera
définitive comme en cas de nullité des actes du commissaire aux
comptes.
§ II : La
nullité des délibérations du commissaire aux comptes
Les actes du commissaire aux comptes peuvent être
annulés dans deux hypothèses. La première hypothèse
vise les actes du commissaire aux comptes irrégulièrement
désigné (A), la seconde vise le commissaire aux comptes
convoquant irrégulièrement l'assemblée (B).
A. La nullité des
délibérations pour désignation
irrégulière
Le législateur africain est hostile à la
désignation irrégulière des contrôleurs. C'est ainsi
qu'il n'hésite pas à frapper de nullité183(*) les
délibérations prises sur le rapport des commissaires
irrégulièrement désignés ou sur ceux des titulaires
nommés ou demeurés en fonction contrairement aux
dispositions184(*)gouvernant cette nomination.
Comme la précédente, la nullité pour
désignation irrégulière ne vise que les
délibérations de l'assemblée générale.
L'extension aux délibérations du conseil d'administration devrait
être admise. Le législateur n'a pas précisé le champ
d'application de la nullité, on se demande sur quelle
délibérations portera-t-elle ? Les réactions sont
partagées. Selon une partie de la doctrine185(*), cette nullité
s'applique seulement aux délibérations qui supposent un rapport
préalable des commissaires aux comptes, c'est-à-dire
essentiellement les délibérations qui ont un objet comptable ou
financier. Elle se fonde sur l'idée que dans ces matières, la loi
requiert obligatoirement l'intervention d'un commissaire aux comptes.
Cependant, certains auteurs186(*) défendent une portée
générale de la nullité et donc son application à
des décisions relatives, par exemple à la nomination d'un
administrateur, à une modification de l'objet social, à une
augmentation de capital en numéraire sans suppression du droit
préférentiel de souscription . Nous ne sommes pas de ce dernier
avis. Nous nous rallions à la première te. Car les commissaires
aux comptes ont le contrôle comptable et financier de l'entreprise,
étendre la nullité à des aspects autres que comptables ou
financiers étrangers à son domaine de compétence peut se
révéler préjudiciable pour la société.
Le législateur n'a pas fait allusion à la
désignation irrégulière du commissaire suppléant,
on peut comprendre qu'il a voulu implicitement le soumettre au même
régime que le commissaire aux comptes titulaire.
B. La nullité de la
convocation irrégulière de l'assemblée.
En dotant les commissaires aux comptes de nombreux pouvoirs
dans l'exercice de leurs missions, l'idée du législateur
était qu'ils en fassent un bon usage. Lorsque le commissaire aux comptes
leur utilise de façon anormale, c'est-à-dire pour nuire à
la société, ses actes doivent être frappés de
nullité.
Le législateur consacre un exemple à l'article
519 al 4 AUSCGIE : il s'agit de la nullité de la convocation
irrégulière de l'assemblée. Sans doute, le commissaire aux
comptes a-t-il le pouvoir de convoquer l'assemblée en cas d'inertie des
dirigeants. Mais ils ne peuvent le faire qu'autant que la procédure de
convocation est régulière et les conditions d'urgence requises. A
contrario, si aucune des conditions exigées par la loi n'est remplie, la
convocation est dite « irrégulière »et doit
de ce fait être sanctionnée par la nullité.
La nullité de l'al 4 de l'article 519 obéit au
régime de la nullité de l'article 246 AUSCGIE. Il s'agit d'une
nullité absolue. Peu importe les délibérations qui
naissent de la convocation irrégulière. La nullité pour
convocation irrégulière de l'assemblée frappe tous les
actes. Bref, cette convocation est censée n'avoir jamais eu lieu et ses
délibérations resteront lettre morte.
L'in fine du même article apporte une exception notable
lorsqu'elle dispose que « Toutefois, l'action en nullité,
fixée dans les conditions prévues à l'article 246 du
présent acte uniforme, n'est pas recevable lorsque tous les actionnaires
étaient présents ou
représentés ».
Le commissaire aux comptes ne voit la convocation produire
tous ses effets que s'il réunit tous les actionnaires. Ce qui n'est
déjà pas chose facile si la société ne vit pas sous
des mauvais signes. C'est dire toute la rigueur qui entoure le contrôle
des sociétés
Le souci d'efficacité du contrôle des
commissaires aux comptes a amené le législateur à
appréhender tous les comportements et pratiques pouvant altérer
la bonne marche du contrôle et à les sanctionner. La sanction
n'est-elle pas « la mesure de son
efficacité » ?
CONCLUSION DE LA PREMIERE
PARTIE
Au terme de cette première partie consacrée
à l'efficacité recherchée du contrôle des
commissaires aux comptes dans la SA, il est permis de saluer l'oeuvre grandiose
entreprise par le législateur dans un double sens :
D'une part, toute personne qui veut accéder aux
fonctions de commissaires aux comptes doit au préalable avoir subi avec
succès les conditions positives et négatives.
D'autre part, un commissaire aux comptes
régulièrement entré en fonction doit convenablement
exercer sa mission, sinon, il peut engager contre lui-même certaines
actions en responsabilité au même titre que celles des dirigeants
qui entraveront le contrôle des sociétés. Ainsi les mesures
préventives et curatives apparaissent au sens de l'OHADA comme en droit
français comme des garanties de tout contrôle sérieux des
comptes. Cependant, malgré la consécration de ces
différentes mesures, certaines situations de fait ou de droit viennent
toujours entraver le contrôle crédible des comptes de sorte que le
contrôle opéré par le commissaire aux comptes reste
toujours d'une efficacité limitée.
DEUXIEME PARTIE : L'EFFICACITE LIMITEE DU CONTROLE DES
COMMISSAIRES AUX COMPTES DANS LA SOCIETE ANONYME
En confiant exclusivement au commissaire aux comptes le
contrôle des SA, le législateur OHADA voulait limiter
prévenir et combattre la survenance des scandales financiers dans sa
sphère. Mais, il s'était malheureusement trompé dans ses
prévisions. L'opération Epervier187(*) menée au Cameroun a
montré les faiblesses d'un système qui était
précisément censé empêcher leur survenance.
L'étude de cette opération met en cause les
auditeurs légaux et l'on se pose la question de savoir qu'est ce qui est
à l'origine de l'inefficacité du contrôle
opéré par eux dans les SA? Il semblerait d'après une
étude approfondie de l'acte uniforme que les limites à
l'efficacité du contrôle opéré tiennent à la
fois dans leur statut (chapitre I) et dans les missions (chapitre II) qu'ils
doivent exécuter.
CHAPITRE I : LES LIMITES TIREES DU STATUT DES
COMMISSAIRES AUX COMPTES
Les insuffisances des commissaires aux comptes
désignés dans le cadre de la loi de 1867 avaient conduit le
législateur français à intervenir
régulièrement pour renforcer leur compétence, pouvoir et
indépendance. Le législateur OHADA s'est inscrit dans cette
mouvance en renforçant le statut des commissaires aux comptes, mais il
n'est pas allé jusqu'au bout de son entreprise surtout sur le plan de
l'indépendance réelle. En conséquence,
l'indépendance renforcée est restée factice (section I)
dans divers domaines du contrôle sans oublier de nombreux obstacles
à l'effectivité de leurs prérogatives (section II).
Section I : L'INDEPENDANCE FACTICE DES COMMISSAIRES
AUX COMPTES
Le commissaire aux comptes est défini
comme « un organe neutre et indépendant appelé
à vérifier que les informations d'ordre comptable émises
par la société sont dignes de foi »188(*). Il est un professionnel
extérieur à la société et indépendant
d'elle. Cette indépendance est la première vertu des commissaires
aux comptes189(*), dans
l'AUSCGIE, elle est fortement compromise, ce qui risque de conduire à un
contrôle illusoire. Il est donc question pour nous d'inventorier ces
différents cas (§I) avant de voir les mesures à prendre
pour la garantir davantage (§II).
§I : Les
hypothèses d'indépendance factice des commissaires aux
comptes.
Dans l'acte uniforme sur les
sociétés commerciales, deux situations permettent de mettre en
évidence l'indépendance factice des commissaires aux comptes. La
première hypothèse intervient lors de leur
désignation par l'assemblée générale des
actionnaires. A ce stade, les dirigeants exercent une influence décisive
sur ladite assemblée (A). La seconde hypothèse concerne les
négociations d'honoraires des commissaires aux comptes où ces
mêmes dirigeants sont omnipotents (B).
A. L'influence décisive des
dirigeants sur l'assemblée des actionnaires au moment de la
désignation des commissaires aux comptes
L'article 703 AUSCGIE dispose que le premier
commissaire aux comptes et son suppléant sont désignés
dans les statuts ou par l'assemblée générale constitutive,
en cours de vie sociale par l'assemblée générale
ordinaire. Cet article met en exergue la compétence de principe de
l'assemblée des actionnaires dans le choix des commissaires aux
comptes.
Malheureusement, ce procédé n'offre pas une
garantie suffisante puisque l'assemblée est généralement
dominée par les dirigeants sociaux. Ce sont eux finalement qui proposent
la désignation ou le renouvellement du commissaire aux comptes
chargé de les contrôler. De même, bien qu'il est interdit au
directeur général s'il est administrateur de participer au
vote du conseil d'administration proposant à l'assemblée des
actionnaires la désignation des commissaires aux comptes lorsque la
société fait appel public à l'épargne, il pourra
toujours par divers procédés190(*)influencer le conseil d'administration ou ladite
assemblée.
Finalement, le choix des commissaires aux comptes par
l'assemblée n'est jamais libre, celle-ci devenant simplement une chambre
d'enregistrement des volontés des dirigeants sociaux, chargée
d'entériner le choix des commissaires aux comptes à elle
proposé par ces derniers.
Quand les dirigeants proposent à l'assemblée
le choix d'un commissaire aux comptes, ledit choix n'est jamais hasardeux. Ils
présentent toujours des contrôleurs avec lesquels ils ont des
liens bien raffinés, sachant que ces derniers ne peuvent exercer leur
mission de contrôle qu'avec mollesse en évitant de mettre à
mal le réseau de relation. Ils garderont toujours le silence sur une
grande partie des manoeuvres frauduleuses des dirigeants. Cette situation
s'accompagne pour la société contrôlée des
conséquences néfastes, le contrôle opéré par
les commissaires aux comptes devient purement illusoire du fait de leur manque
d'indépendance à l'égard des « dirigeants
malhonnêtes » qu'ils sont censés pourtant
contrôler. Même la publicité de la désignation
intervenue plus tard ne fait pas disparaître le vice.
Quand les dirigeants n'auraient pas réussi à
corrompre l'assemblée des actionnaires du choix d'un commissaire aux
comptes qui leur est favorable, ils attendront le moment des
négociations des honoraires pour mettre en oeuvre toute leur
omnipotence.
B. L'omnipotence des
dirigeants dans la négociation des honoraires
C'est le second volet de l'indépendance factice des
auditeurs légaux à l'égard des dirigeants peu scrupuleux
du bien-être de la société. En fait, l'article 723 al 1
AUSCGIE pose une règle d'or : « les honoraires
du commissaire aux comptes sont à la charge de la
société. ». Il en résulte une
négociation des honoraires entre le commissaire et la
société, mais a-t-on oublié que la société
n'est pas une personne physique, mais plutôt une personne morale agissant
par le biais de ses représentants en l'occurrence les dirigeants
sociaux ? C'est dire que, lorsqu'on affirme que la négociation des
honoraires se fait d'un commun accord entre le commissaire et la
société, ce n'est à proprement parler que d'une
négociation entre le commissaire et les dirigeants sociaux.
De l'avis de plusieurs auteurs191(*), ce système est
critiquable, car tout marchandage entre le commissaire et le dirigeant est
inconvenant, encore qu'il est sans doute très peu satisfaisant de faire
payer le contrôleur par le contrôlé. Ce dernier peut
à l'occasion lui fournir une rémunération mirobolante
destinée à le détourner du contrôle,
c'est-à-dire l'amener à garder le silence sur certains de leurs
actes fautifs passés au sein de l'entreprise.
Décidément, le système de
négociation des honoraires institué par l'OHADA entre le
dirigeant et le contrôleur n'offre aucune garantie réelle
d'indépendance pour ce dernier. Eût égard à la
nature insatiable de l'homme, tout commissaire aux comptes, aussi diligent
soit-il finira par tomber dans ce piège des dirigeants, ces derniers
leur maintenant dès lors dans une sorte de « boite
noire » en posant au grand jour et au grand dam des actionnaires
des actes déloyaux en toute impunité. En conséquence, les
résultats d'un contrôle livré par un contrôleur
« financièrement dépendant » des
dirigeants ne pourraient qu'être illusoires.
Au demeurant, l'indépendance factice des commissaires
aux comptes dans les SA est un problème grave, un obstacle majeur au
contrôle externe desdites sociétés qu'il faut
nécessairement résoudre si l'on veut que le contrôle reste
la pièce angulaire de la transparence dans la gestion des SA. Ainsi des
idées convergent vers l'émergence de nouvelles garanties
d'indépendance des commissaires aux comptes.
§ II : La
nécessité d'un accroissement des garanties
d'indépendance
L'émergence de nouvelles garanties
d'indépendances du commissaire aux comptes aura l'avantage de sortir ce
dernier du joug de la domination des dirigeants, lui permettant par la
même occasion d'exercer efficacement ses missions. Elles passent par
l'interdiction faite aux dirigeants sociaux de prendre désormais part
aux réunions du conseil d'administration ou de l'assemblée des
actionnaires appelée à désigner le commissaire aux
comptes, suivi de l'instauration d'un contrôle judiciaire
systématique de la désignation et l'institution d'un
système de barème des honoraires de taxation des honoraires
Tandis que les deux premières mesures visent à
accroître l'indépendance au stade de leur désignation (A),
la dernière vise à sauvegarder son indépendance au moment
de la rémunération (B).
A. L'accroissement des
garanties d'indépendance au stade de la désignation des
commissaires aux comptes
L'accroissement des garanties d'indépendance au niveau
de la désignation des commissaires aux comptes vise l'interdiction
formelle faite aux dirigeants sociaux de prendre aux réunions du conseil
d'administration ou de l'assemblée des actionnaires désignant les
contrôleurs (1) et l'institution d'un contrôle judiciaire de la
désignation (2).
1. L'interdiction
formelle aux dirigeants de prendre aux réunions du conseil
d'administration ou de l'assemblée des actionnaires désignant les
contrôleurs
Aucun système a priori n'est prévu par l'OHADA
pour vaincre l'influence des dirigeants sociaux sur l'assemblée des
actionnaires, et partant par voie de conséquence pour protéger
l'indépendance du commissaire aux comptes au moment de sa
désignation. Fort heureusement, la loi française de
sécurité financière du 1er août 2003
proclame de nouvelles garanties d'indépendance192(*) lors de cette
désignation en interdisant formellement au directeur
général et le directeur général
délégué s'ils sont administrateurs de prendre part aux
réunions du conseil d'administration ou de l'assemblée des
actionnaires désignant le contrôleur lorsque la
société fait appel public à l'épargne. Dans ces
sociétés, les comités d'audit joueront un rôle
très important dans le choix desdits commissaires en faisant des
propositions au conseil d'administration.
Les actionnaires minoritaires peuvent également
déposer des projets de résolution tendant à
désigner un ou plusieurs commissaires aux comptes, avec l'interdiction
toujours faite aux dirigeants sociaux d'y prendre part.
Ces nouvelles mesures applicables aux sociétés
faisant appel à l'épargne peuvent bien s'appliquer à
toutes les SA. Le législateur OHADA devrait introduire ces innovations
du législateur français dans son dispositif afin de renforcer
davantage l'indépendance de l'auditeur légal. En présence
d'un conseil d'administration ou d'une assemblée d'actionnaires
libéré des pressions des dirigeants, le choix des commissaires
aux comptes dont on est sûre de la compétence et de
l'indépendance est très possible, et bien éclairé,
ce qui aura des répercussions très positives sur le
contrôle des sociétés.
Pour assurer la pleine efficacité de ces prohibitions,
il serait souhaitable pour le législateur d'assortir leur inobservation
des incriminations pénales.
Mise à part cette mesure, l'indépendance de
l'organe de contrôle au niveau de son élection peut être
renforcée à travers l'institution d'un contrôle judiciaire
de la désignation.
2. L'institution d'un
contrôle judiciaire de la désignation des commissaires aux
comptes
Depuis longtemps, le juge judiciaire est toujours apparu comme
le meilleur garant des droits de l'homme du fait de sa neutralité
même quand l'on se trouve dans le domaine du droit des affaires. Certains
auteurs193(*) ont ainsi
proposé une nomination judiciaire des commissaires aux comptes dans le
souci d'affiner davantage leur indépendance. Une telle
désignation serait salutaire, car elle mettrait une fois de plus les
contrôleurs à l'abri de pressions des dirigeants. Cependant,
certaines précisions méritent d'être faites.
En effet, l'article 708 AUSCGIE dispose que
« Si l'assemblée omet de désigner un commissaire
aux comptes titulaire ou suppléant, tout actionnaire peut demander en
référé au président de la juridiction
compétente, la désignation d'un commissaire aux comptes (...) le
mandat ainsi conféré prend fin lorsqu'il a été
procédé par l'assemblée générale à la
nomination du commissaire ». Le commissaire aux comptes
nommé judiciairement dans le but de renforcer son indépendance
face aux dirigeants sociaux ne devra pas être soumis au même
régime que celui nommé dans le cadre de l'article 708.
L'application de cette dernière suppose une omission, une
incapacité de l'assemblée de désigner le commissaire aux
comptes alors que dans notre argumentation, c'est la question de
l'indépendance qui est en jeu.
A cet effet, il serait souhaitable que le commissaire aux
comptes désigné judiciairement en vue de l'accroissement de son
indépendance à l'égard des dirigeants gère son
mandat jusqu'à son terme. Ce qui signifie qu'il ne pourra être
mis fin à ses fonctions
« prématurément » par la nomination
d'un nouveau commissaire aux comptes par l'assemblée comme l'exprime
l'article 708, sauf cas de faute ou d'empêchement justifiant sa
révocation.
L'interventionnisme judiciaire dans la désignation des
commissaires aux comptes apparaît ainsi comme une panacée
destinée à vaincre l'influence que les dirigeants auraient pu
exercer sur l'assemblée et par voie de conséquence sur les
commissaires aux comptes eux-mêmes une fois en fonction. C'est en vue de
protéger ladite indépendance en cours d'exercice des fonctions
qu'il a été proposé d'instituer un système de
barème des honoraires.
B. L'institution d'un
système de barème des honoraires du commissaire aux comptes
Il ne servirait à rien de
régler avec minutie les conditions de nomination et la durée du
mandat des commissaires aux comptes si l'indépendance financière
ainsi édifiée était menacée par la libre discussion
des honoraires entre lui et la société194(*). Pourtant, le
législateur n'a rien prévu pour éviter cette situation.
La doctrine majoritaire195(*) souhaitant une atténuation de la
dépendance financière des auditeurs légaux avait
proposé un système libéral de négociation des
honoraires entre le commissaire aux comptes et la société sous
l'arbitrage de la chambre de discipline ou d'un juge. Ce système
« mi-libéral, mi-interventionniste » n'est
pas très cohérent. Les rapports de travail reposent sur la
confiance mutuelle des parties et l'immixtion d'un tiers dans la fixation des
honoraires risquerait non seulement de remettre en cause cette confiance, mais
aussi, rendrait lourde et onéreuse la procédure de fixation des
honoraires.
A notre sens, le renforcement de l'indépendance
financière des commissaires aux comptes pourra passer par l'institution
d'un système de barème des honoraires. A cet effet, les
commissaires aux comptes établiront un programme de travail, indiquant
le nombre d'heures nécessaires à l'accomplissement de ses
diligences. Ce nombre d'heures doit se trouver à l'intérieur
d'une fourchette fixée légalement en fonction de la taille de la
société.
Le législateur OHADA devra donc instituer un
barème des honoraires comprenant un nombre normal d'heures de travail
en fonction de la taille de la société. L'institution d'un tel
barème sera favorable aussi bien pour les actionnaires que pour le
commissaire aux comptes. Pour ce dernier, il lui permettra de s'exprimer
librement au sein de l'entreprise contrôlée en préservant
pleinement son intégrité et son indépendance. Pour les
actionnaires, le barème leur permettra de se faire une opinion sur
l'état du contrôleur qu'ils ont nommé, d'avoir des
informations précises sur le montant de leurs honoraires. Ce qui les
rassure que le commissaire aux comptes ne s'érige pas en protecteur
indéfectible des dirigeants sociaux.
L'intervention du juge et/ou de la chambre de discipline ne
sera plus qu'accidentelle196(*).
L'institution du barème des honoraires des
commissaires aux comptes est salutaire à plus d'un titre raison pour
laquelle le législateur communautaire gagnerait à
l'intégrer aussi rapidement dans son espace.
En définitive, l'émergence des nouvelles
garanties ainsi proposées, permettrait au commissaire aux comptes
d'accomplir ses missions avec plus d'objectivité, mais avant tout, il
faudrait régler le problème de nombreux obstacles à
l'effectivité de leurs prérogatives.
Section II : LES ENTRAVES AUX PREROGATIVES DES
COMMISSAIRES AUX COMPTES
C'est dans le souci de permettre aux
commissaires aux comptes d'exercer leurs missions dans des meilleures
conditions que la loi avait consacré les prérogatives.
Malheureusement, ces dernières connaissent de nombreux obstacles de fait
(§I) et de droit (§II) dans leur mise en oeuvre.
§ I : Les obstacles
de fait
Les obstacles de fait dans la mise en oeuvre effective des
prérogatives des commissaires aux comptes dans les
sociétés anonymes résident dans les
résistances197(*). Il faut les dénombrer (A) avant de proposer
des solutions (B).
A. Le contenu de
résistances
Les résistances de fait à la mise en oeuvre
effective des prérogatives des commissaires aux comptes peuvent provenir
des dirigeants de la filiale (1) ou des tiers (2)
1. La résistance des dirigeants
des filiales
Si le commissaire aux comptes peut
mettre facilement en oeuvre ses prérogatives dans le cadre d'une
société contrôlée sans difficulté majeure, il
n'en est pas de même quand il a à faire à un groupe de
société. Des difficultés d'un poids non négligeable
vont se poser.
Puisque les filiales et la société mère
ont chacun un commissaire aux comptes, les dirigeants des filiales peuvent ne
pas comprendre pourquoi après le contrôle de leur propre
commissaire aux comptes, ils doivent encore se plier aux vérifications
menées par les commissaires aux comptes des autres groupes de
sociétés198(*). Ainsi, ils vont s'opposer énergiquement aux
investigations diligentées par le commissaire aux comptes de la
société mère. Le même problème se posera
quand bien même la société établit les comptes
consolidés.
Cette situation est un obstacle aux investigations du
commissaire aux comptes qui ne pourra plus facilement achever le contrôle
entrepris ; d'où un certain nombre de conséquences. Alors
qu'une investigation du commissaire aux comptes de la société
mère auprès de la filiale aurait pu permettre de déceler
une irrégularité et d'en remédier rapidement, au cas
où les dirigeants de celle-ci s'y opposent et qu'un préjudice en
résulte, qui serait tenu pour responsable ? Est-ce le dirigeant de
la filiale qui a refusé de prêter main forte aux investigations du
commissaire aux comptes de la société mère ou ce dernier
lui-même ? A notre sens, le commissaire aux comptes de la
société mère doit être exonéré
puisqu'il a accompli ses missions avec toute la diligence souhaitée.
Reste que ne peut être tenu pour responsable que le dirigeant de la
filiale. Malheureusement, le législateur communautaire n'a prévu
aucune mesure destinée à vaincre cette opposition des dirigeants
des filiales. Le même mutisme se déploie en cas de
réticences provenant des tiers.
2. La résistance des tiers
L'alinéa 2 de l'article 720 AUSCGIE
conformément à l'al 4 de l'article 229 de la loi française
de1966 précise que les tiers ne peuvent opposer le secret professionnel
au commissaire aux comptes pour refuser de répondre à ses
questions sauf s'il s'agit des auxiliaires de justice.
Cette disposition était nécessaire. Le
législateur a entendu donner au commissaire aux comptes les moyens pour
exercer pleinement sa mission de contrôle et d'information. A cette fin,
il n'a pas voulu que les personnes qui ont accompli des opérations pour
le compte de la société en particulier à la demande des
dirigeants puissent se rétracter derrière le secret professionnel
pour refuser de communiquer aux commissaires aux comptes des renseignements qui
lui sont utiles, mais la réalité est tout autre. Certains tiers
s'y opposent volontairement au grand dam de la société à
se prêter à leurs vérifications.
Ce refus de collaborer est regrettable, car la plupart de ces
tiers sont les notaires, les commissionnaires et les banquiers et il est
à penser que les dirigeants ont distrait des sommes importantes chez
eux, ou même ont passé avec eux des affaires occultes dont la
moindre information au commissaire aux comptes leur serait
préjudiciable.
Décidément, résistance des tiers et
résistance des dirigeants des filiales de groupes de
sociétés apparaissent comme l'une des grandes entraves à
l'effectivité des prérogatives des commissaires aux comptes qu'il
faut nécessairement remédier par l'institution d'une
communication forcée des informations.
3. La nécessité d'une
communication forcée des informations
Il est fort probable que si les tiers et certains dirigeants
des filiales dans l'espace OHADA résistent aux investigations du
commissaire aux comptes, c'est parce qu'ils savent qu'il n'existe aucune
injonction à leur encontre.
En effet, aucune disposition de l'AUSCGIE ne prévoit
la communication forcée des documents sociaux (bilans, comptes de
l'exercice, rapport du conseil d'administration ...) utiles aux
investigations des commissaires aux comptes qui ne participent pas à la
gestion de l'entreprise, ce qui nous paraît regrettable. Pourtant, le
législateur se doit d'établir une procédure qui permettra
un déroulement harmonieux de leurs investigations auprès des
tiers et des dirigeants des filiales. Celle-ci passera par l'institution d'une
communication forcée des informations.
Le législateur communautaire pourrait d'ailleurs
s'inspirer du droit français qui dans son article 229 al 5 de la loi du
24 juillet 1966 autorise la demande en justice de la communication
forcée des documents à tous les tiers ayant accompli des
opérations pour le compte de la société. La même
obligation devra s'étendre aux dirigeants des filiales puisque
« c'est leur gêne qui serait le fondement de la
nécessité de recourir à la décision de justice pour
obtenir ladite communication »199(*). Il s'ensuit que chaque fois que le commissaire aux
comptes sera confronté à un obstacle des tiers ou des dirigeants
des filiales, il pourra aussitôt mettre en oeuvre la procédure de
communication forcée des informations en sollicitant l'appui du
Président de la juridiction compétente.
Pour assurer la pleine efficacité de cette mesure, le
législateur devrait même édicter des sanctions
pénales à l'égard des destinataires qui refuseraient de se
soumettre. L'absence desdites sanctions au cas où interviendrait une
éventuelle reforme dans l'espace OHADA serait d'ailleurs constitutive
d'un obstacle de droit
§ II : Les obstacles
de droit
Les obstacles de droit à la mise en oeuvre effective
des prérogatives des commissaires aux comptes sont variés. Si
certains d'eux sont propres aux groupes de sociétés200(*) (A), d'autres par contre se
rencontrent dans toutes les SA (B)
A. Les obstacles de
droit « propres » aux groupes de
sociétés.
Les obstacles de droit à l'effectivité des
prérogatives du commissaire aux comptes dans les groupes de
sociétés sont nombreux. Ils vont du respect scrupuleux du secret
professionnel entre les commissaires aux comptes du groupe (1) à
l'absence d'incrimination des entraves des dirigeants des filiales aux
investigations des commissaires aux comptes (3) en passant par le
problème particulier de la loi applicable aux groupes de
sociétés qui s'étendent sur plusieurs pays (2).
1. Le respect scrupuleux
du secret professionnel entre les commissaires aux comptes des
sociétés du groupe.
En contrepartie de nombreux droits reconnus
aux commissaires aux comptes dans le contrôle des sociétés
anonymes, la loi les a soumis à un certain nombre d'obligations au rang
desquelles figure le secret professionnel. Les raisons d'un tel secret sont
apparemment fondées.
« Confident
nécessaire »201(*), le commissaire aux comptes détient
des informations « confidentielles » dont la
divulgation pourrait nuire à la société qu'il
contrôle. Il doit donc être discret à l'égard de
toute personne qui voudrait avoir une quelconque information sur la situation
de la société qu'il contrôle. Ainsi s'il a
« le droit de tout savoir », il a
« l'obligation de ne pas tout dire ». Ainsi,
l'article 310 du Code pénal camerounais sanctionne pénalement la
violation du secret professionnel.
Une analyse extensive des textes laisse comprendre que le
secret professionnel étend ses ramifications aux groupes de
sociétés en l'occurrence entre les commissaires aux comptes du
groupe ainsi que le pose clairement l'article 233 al 3 de la loi de 1966 dont
la sanction en cas de violation prévue à l'article 457 al 3,
qui renvoie à l'article 378 du code pénal français
s'applique également à la communication des faits, actes ou
enseignements entre les commissaires aux comptes opérant au sein d'un
même groupe.
Du fait de la sanction pénale qu'ils peuvent encourir,
chaque commissaire aux comptes du groupe refusera de fournir à son
confrère des informations qu'il a eu à connaître dans
l'exercice de ses missions. Aucune possibilité n'est plus donc
donnée aux commissaires aux comptes pour les permettre de mener
à bien leur mission dans les groupes de sociétés. Le
respect du secret professionnel est trop critiqué dans les groupes de
sociétés d'autant plus que c'est sur la base des
premières informations livrées au commissaire aux comptes de la
société mère par son homologue de la filiale qui lui
aurait permis de prendre rapidement connaissance de certains aspects de la vie
de la filiale.
Finalement sans collaboration entre les commissaires aux
comptes, les investigations auprès des sociétés du groupe
ne peuvent qu'être hypothétiques. C'est compte tenu de toutes ces
critiques que la Commission Nationale des Commissaires aux Comptes en France,
optant pour la levée du secret professionnel, a dans une
recommandation202(*)
pris le contre-pied des dispositions légales en affirmant que
« les commissaires aux comptes des sociétés
filiales sont tenus de fournir toutes les informations demandées par le
commissaire aux comptes de la société mère sans que
l'objection du secret professionnel puisse être
soulevée ». Heureusement, le législateur
français a suivi la logique de la CNCC à travers la loi du 03
janvier 1985 203(*) qui
prévoyait la levée dudit secret entre les commissaires aux
comptes des sociétés consolidées et ceux de la
société consolidante. Une levée du secret professionnel
permettait d'atteindre facilement certains objectifs tels que la centralisation
de l'information du contrôle, si chère aux groupes de
sociétés et aux sociétés établissant des
comptes consolidés.
Bien plus, le commissaire aux comptes de la
société mère, responsable de la centralisation des comptes
consolidés doit assumer un rôle de coordinateur des commissaires
des autres sociétés du groupe. Coordination rendue difficile
lorsque le secret professionnel est minutieusement respecté. Il est
donc indispensable pour le législateur communautaire africain
d'insérer dans son dispositif la levée du secret professionnel
entre les commissaires aux comptes des groupes de sociétés
surtout quand elles s'étendent sur plusieurs pays.
2. Le problème de
la loi applicable aux groupes de sociétés
« transfrontalières »
On sait que les groupes de
sociétés comportent plusieurs dizaines, voire de centaines de
sociétés. Les pouvoirs d'investigation s'exercent aussi
auprès de la société mère que des filiales. Mais
une difficulté interviendra lorsque ces sociétés se
situent dans des Etats différents : c'est le problème de la
loi applicable.
L'AUSCGIE ne traite pas de la question. Il se borne dans son
article 718 al 3 de disposer que les investigations peuvent s'étendre
auprès « des sociétés mères ou
filiales ». Face à cet état de chose, quelle est
la loi applicable ? Est-ce le droit OHADA ou la loi du lieu du
siège. En effet, certains auteurs 204(*) affirment chaque société est
régie par la loi du lieu de son siège. Le commissaire aux comptes
qui contrôle les comptes d'une société située dans
l'espace OHADA tire ses pouvoirs d'investigation de la législation OHADA
inapplicable à l'étranger. Inversement, celui qui contrôle
les comptes d'une filiale d'une société mère de l'OHADA
située à l'étranger (c'est-à-dire dans un Etat non
membre de l'OHADA) doit aussi se soumettre à la loi
étrangère. Mais cette dernière peut être très
restrictive des moyens d'investigation offerts au commissaire aux comptes.
Malheureusement, aucune solution n'est encore concevable. A
notre avis, le législateur OHADA devrait se rallier à la tendance
proposée par la doctrine, c'est-à-dire de reconnaître
expressément que toutes les sociétés sont soumises
à la loi de leur siège même, quand il s'agit des filiales.
C'est l'unique voie, du moins à présent pour le règlement
de la crise de la loi applicable quand les groupes de sociétés
s'étendent sur plusieurs pays.
Le vide juridique laissé par le législateur
communautaire en matière de contrôle exercé par le
commissaire aux comptes dans les groupes de sociétés est
très grand quand l'on sait qu'il n'a même pas incriminé les
entraves des dirigeants des filiales et des tiers à leurs
vérifications.
3 : Le silence du législateur sur l'incrimination des
entraves aux vérifications du commissaire aux comptes nonobstant une
décision de justice
Le législateur communautaire africain n a pas
prévu des incriminations pénales de nature à vaincre les
résistances des tiers et des dirigeants des filiales qui, malgré
une décision de justice refusent de se prêter aux
vérifications des commissaires aux comptes alors même que les
infractions prévues à l'article 900 AUSCGIE ne l'englobent pas,
car seules sont incriminées les entraves aux vérifications
provenant des « dirigeants ou des employés qui sont au
service de la société contrôlée ».
Il s'agit là une fois de plus d'un manquement
grave de l'AUSCGIE qui doit être remédié. Le
législateur OHADA devrait ériger ces deux comportements en
infraction pénale. Les actes matériels pourraient consister dans
les tracasseries diverses dans la mise en oeuvre des pouvoirs d'investigation.
L'élément moral serait la volonté chez le dirigeant de la
filiale ou du tiers d'avoir la pleine conscience qu'il entrave le
contrôle des commissaires aux comptes. Il reviendra enfin à chaque
législateur national de prévoir les sanctions pénales y
afférentes. Au Cameroun, les peines prévues à l'article 18
de la loi du10 juillet 2003 précitée peuvent recevoir
application. Mais quelle sanction sera-t-elle applicable en cas de
défaut de leur convocation aux réunions du conseil
d'administration.
B. Les obstacles de droit
commun à toutes les sociétés anonymes : l'absence du
délit de non convocation des commissaires aux comptes aux
réunions du conseil d'administration
Si l'on peut saluer l'oeuvre du législateur dans la
définition des infractions relatives au contrôle des SA telles
visées aux articles 897 à 900 AUSCGIE, c'est avec beaucoup de
réserves.
En effet, le législateur n'est pas allé
jusqu'au bout de son oeuvre. De nombreuses atteintes aux vérifications
des commissaires aux comptes n'ont pas été incriminées. Le
cas le plus flagrant est l'irresponsabilité pénale des dirigeants
qui n'ont pas convoqué les commissaires aux comptes aux réunions
du conseil d'administration alors que la loi en fait une obligation.
Dans la SA, le législateur avait prévu la
convocation « obligatoire » du commissaire aux
comptes aux réunions du conseil d'administration205(*), l'invitation devant
intervenir dans un délai raisonnable afin que ce dernier puisse se faire
un compte sur la séance. Malheureusement, l'acte uniforme n'a pas
assorti la violation de cette obligation des dirigeants de sanctions
pénales. En conséquence, il est permis de penser que les
dirigeants ne se voient plus du tout contraints à respecter
l'obligation puisqu'ils n'encourent aucune sanction, l'obligation devient de ce
fait « une faculté». Il semble pourtant que
cette incrimination aurait pu les responsabiliser davantage.
La présence des commissaires aux comptes aux
réunions du conseil d'administration serait pourtant très utile
surtout dans le cadre des difficultés des entreprises en l'occurrence
lors de l'alerte où ils peuvent mieux expliquer au conseil
d'administration et aux actionnaires plus que toute autre personne les
difficultés que traversent l'entreprise. Telles sont les raisons qui
convergent en faveur de la reconnaissance d'un délit de non convocation
des commissaires aux comptes aux réunions du conseil
d'administration.
Le délit supposerait une condition
préalable : la réunion du conseil d'administration.
L'élément matériel du délit pourra consister dans
l'omission c'est-à-dire le fait de n'avoir pas convoqué le
commissaire aux comptes. La convocation tardive pourrait même être
assimilée à un défaut de convocation dans la mesure
où le contrôleur n'aura pas le temps nécessaire pour se
préparer.
L'élément moral consisterait en principe dans
l'inexécution consciente de l'obligation, c'est-à-dire la
volonté des dirigeants de ne pas convoquer le commissaire aux comptes.
Mais, parce que cette obligation est bien prévue dans tous les statuts
des sociétés anonymes, les dirigeants pourraient aussi tomber
sous le coup de la loi quand bien même leur omission résulterait
d'une simple négligence..
La répression du délit suppose donc que le
législateur l'incrimine et que chaque Etat dans sa législation
pénale prévoie des sanctions destinées à intimider
davantage les dirigeants sociaux.
A notre avis, les sanctions pourront consister
dans « le double des peines» de
l'article 17 de la loi du 10 juillet 2003 traitant du défaut de
désignation ou de convocation des commissaires aux comptes aux
assemblées. Il s'agira là d'une peine exemplaire. La menace d'une
sanction pénale aussi forte permettra sans aucun doute au commissaire
aux comptes de vaincre tous les obstacles susceptibles de nuire à
l'effectivité de ses prérogatives, sauf s'ils proviennent de
l'exercice même des missions.
CHAPITRE II : LES LIMITES TIREES DES MISSIONS DU
COMMISSAIRE AUX COMPTES
Comme son homologue français, le législateur
OHADA a fait du commissaire aux comptes l'acteur central du contrôle
externe de la SA. Ainsi, il a considérablement élargi son domaine
d'intervention par une panoplie de missions. Cependant, ces missions telles
que présentées sont apparues comme l'un des fondements de tout
contrôle inefficace, parce que très souvent mal définies
(section I), ce qui donne lieu à des difficultés
d'exécution (section II).
Section I: LA DEFINITION INCORRECTE DE CERTAINES
MISSIONS
Le contrôle des sociétés
opéré par le commissaire aux comptes ne peut véritablement
être efficace que si ses missions sont clairement définies. Or,
tel n'est pas le cas dans l'AUSCGIE où elles ne sont pas exactement
définies. C'est le cas de l'imprécision de la notion
« d'image fidèle » (§I) suivie de la
mission d'alerte donc les critères de déclenchement restent
très ambigus (§ II)
§ I :
L'imprécision de la notion d' « image
fidèle »
L'article 710 AUSCGIE dispose que « le
commissaire aux comptes certifie que les états financiers de
synthèse sont réguliers et sincères et donnent une image
fidèle du résultat des opérations de l'exercice
écoulé ainsi que de la situation financière et du
patrimoine de la société à la fin de cet
exercice ».
Si les termes de
« régularité » et de
« sincérité » ne posent pas de
problèmes majeurs parce qu'ils sont aisément définis, il
n'en est pas de même de la notion « d'image
fidèle ». Cette dernière est difficile à
appréhender et l'acte uniforme sur le droit comptable institue juste une
présomption d'image fidèle206(*) sans toutefois lui donner une définition
légale. Finalement, il n'existe dans le droit OHADA aucune
définition de la notion empruntée au législateur
français à travers son article L 123-10 al 1du Code de commerce
issu de la loi du 30 avril 1983 207(*)qui, en harmonie avec la quatrième
directive208(*) sur les
comptes annuels dispose que « les comptes annuels doivent
être réguliers, sincères et donner une image fidèle
du patrimoine, de la situation financière et du résultat de
l'entreprise ».
Cette notion est la traduction de l'expression
anglaise « true and fair view209(*) » qui a une signification
particulière210(*) pour les praticiens anglo-saxons. Malheureusement,
depuis son introduction en France, elle n'a reçu aucune
définition, cette situation est également observée dans le
droit OHADA où le législateur n'a pas jugé
nécessaire de la définir.
D'après PITROM et PHAM-BA211(*), la question se pose de
savoir si la notion même «d'image fidèle »
a un sens et peut faire l'objet d'une traduction technique unanimement
acceptée ? La difficulté naît du fait que le concept
vient de la Grande Bretagne, pays de la Common Law et doit être
appliqué dans les pays de droit écrit. Le concept a
été donc importé de l'Europe et plaqué sur des
règles déjà existantes qui ne s'adaptaient pas
forcément avec cette exigence. Cette transposition dans les
systèmes juridiques différents ne peut causer que des
difficultés au commissaire aux comptes.
Parce que la notion n'est pas définie, il est difficile
de dire à partir de quand les règles ne permettent plus de donner
une image fidèle de la situation de la société. Aussi,
avec insistance, la doctrine comptable212(*) s'est posée la question de savoir à
quoi les comptes doivent être fidèles, comment doit
s'apprécier la fidélité213(*) ? Le législateur ne répond
à aucune de ces préoccupations. Par conséquent, la mission
du commissaire aux comptes devient très difficile, car il doit
contrôler les comptes en présence des règles et des
principes dont le contenu reste flou.
Bien plus, la difficulté liée à la
définition de la notion « d'image
fidèle » peut conduire à une absence de la
sanction par le juge pénal. Bien que l'article L.242-6 du Code de
commerce prévoit le délit de présentation des comptes
annuels ne donnant pas une image fidèle, comme le soulignent PITROM et
PHAM-BA « comment sanctionner l'absence d'image fidèle de
la situation de l'entreprise alors que la notion demeure
imprécise ? Et plus précisément encore, comment le
juge pénal contraint par la loi d'apprécier strictement les faits
qui lui sont soumis pourrait-il s'aventurer à caractériser un
délit dont l'un des éléments constitutifs est
imparfaitement défini ?»214(*).
L'on constate que l'absence de définition de la notion
porte un coup dur à l'efficacité du contrôle légal
des comptes. Face à tous ces obstacles, la notion telle que
présentée a été critiquée par certains
auteurs215(*) qui y
voient une redondance. Pour eux, certifier la régularité et la
sincérité des comptes, c'est déjà attester que les
comptes donnent une image fidèle de la réalité
sociale.
Il est donc souhaitable que le législateur
communautaire intervienne : A défaut de supprimer la notion, il
devrait la définir avec clarté pour faciliter la mission du
commissaire aux comptes, sinon on tomberait dans le même chaos comme ce
que l'on observe en cas d'ambiguïté des critères de
déclenchement de l'alerte.
§II :
L'ambiguïté des critères de déclenchement de
l'alerte
Instituée par la loi française du 1er
mars 1984, l'alerte est reprise par le législateur africain dans
l'AUSCGIE où elle apparaît comme une profonde innovation dans le
droit des sociétés de la plupart des pays membres de l'OHADA.
Elle est destinée à attirer l'attention des
dirigeants sociaux sur la situation préoccupante de l'entreprise.
Cependant, malgré sa dénomination, celle-ci ne tend pas seulement
à avertir les dirigeants car ceux-ci sont généralement
conscients des difficultés que traverse l'entreprise. Elle a aussi pour
but de les mettre en face de leurs responsabilités en leur invitant
à prendre des mesures de redressement. Il s'agit à travers
l'alerte de favoriser une prise de conscience aussi rapide que possible des
difficultés menaçant l'entreprise en provoquant une discussion
interne à l'entreprise, dont l'objet sera à la fois de prendre
la mesure la plus exacte possible des difficultés rencontrées ou
sur le point de survenir, de proposer, à la suite de la discussion, les
solutions les plus appropriées à résoudre les
difficultés. Selon la formule d'un éminent professeur 216(*) « l'alerte est
l'éveil de l'attention en vue du combat, non la reddition ou
capitulation ; elle est l'aube propice aux redressements, non la nuit des
ruines. ».
L'alerte vise donc à « tirer la
sonnette d'alarme, pour réunir les volontés de toutes les
personnes intéressées afin d'éteindre le feu avant qu'il
ne prenne des proportions qui rendraient sa maîtrise
difficile »217(*). Elle est destinée à favoriser la
détection précoce des problèmes en vue d'organiser
rapidement et discrètement une résistance efficace.
Cependant, si la loi définit avec précision la
procédure à suivre218(*), elle demeure muette sur les critères de
déclenchement.
La mise en oeuvre de la procédure d'alerte
repose sur un diagnostic du commissaire aux comptes, mais le législateur
n'a pas retenu un ensemble de critères précis lui permettant de
mettre en oeuvre la procédure d'alerte puisqu'il évoque, d'une
manière assez générale, « tout fait de
nature à compromettre la continuité de
l'exploitation ».
Les critères de déclenchement de l'alerte sont
transmis dans leur intégrale ambiguïté, à la
compétence des commissaires aux comptes qui doit agir avec tact et
finesse. L'on comprend la raison pour laquelle un auteur219(*) affirmait
qu' « à y regarder de près, le
législateur s'est déchargé sur le commissaire aux comptes
de la part essentielle de sa fonction ». Finalement, sur quels
éléments doit-il se référer pour déclencher
l'alerte ? Là est tout le problème. Bien que les textes
utilisent le singulier « tout fait », on estime
que l'alerte doit être déclenchée s'il existe un ensemble
convergent de faits significatifs220(*) suffisamment préoccupants
En pratique, le commissaire aux comptes pourra
s'attacher à toutes sortes d'éléments objectifs permettant
de craindre une rupture dans la continuité de l'exploitation. Cette
notion de « continuité de l'exploitation »
est empruntée au « going concern »
anglo-saxon, elle traduit une poursuite de l'activité dans des
conditions normales221(*). Les faits doivent donc être de nature
à compromettre la continuité de l'exploitation,
c'est-à-dire à provoquer une cessation de paiements si aucune
mesure de redressement n'est prise en temps utile.
L'alerte doit aussi être donnée en cas de
rupture d'équilibre des flux financiers222(*). Le commissaire aux comptes
pourra également s'appuyer sur toutes les informations obtenues
desquelles il est permis de constater une altération des conditions de
l'exploitation telles que : la dégradation de la situation
financière (fonds propres insuffisants, endettement excessif,
injonctions de payer à répétition), les résultats
déficitaires, le non paiement des impôts et des cotisations
sociales, la perte des clients importants, cession d'actif immobilier,
durée et répétition des grèves, la baisse anormale
d'activité, etc.
La formule légale est
« vague » et laisse un large pouvoir
d'appréciation au commissaire aux comptes, mais il doit s'assurer que
les faits constatés ou allégués sont
« réellement » graves et concordants, de
manière à ne pas alerter inopinément les dirigeants.
La menace doit donc être précise et une
défaillance à venir très probable. L'absence de
précision du critère lui impose d'agir avec circonspection, car
une mauvaise appréciation de la situation peut provoquer sa
responsabilité civile223(*), encore faut- il que ces faits soient relevés
à l'occasion de sa mission. Le commissaire aux comptes devient
« le juge de l'opportunité » des cas
d'ouverture de l'alerte.
Finalement, la mission d'alerte telle que définie
par le législateur OHADA ne facilite pas un exercice crédible du
contrôle légal. La démarche utilisée n'est pas
très féconde224(*), le législateur ayant renoncé à
dresser une liste de « clignotants ». Il s'en est
tenu à une formule très générale susceptible de se
dilater à l'excès. Le critère tels qu'énoncé
n'offre aucune précision souhaitée, ce qui complique
sérieusement la tâche du commissaire aux comptes.
Le législateur devra faire preuve de plus de
clarté. Il conviendrait de préciser « la
notion de fait de nature à compromettre la continuité de
l'exploitation » de manière à ce que l'on
établisse clairement, grâce à des critères aussi
objectifs le seuil que l'on ne doit pas franchir pour prétendre au
déclenchement de l'alerte. Pour cela, l'alerte devra reposer uniquement
sur des éléments certains, potentiels, mais toujours susceptibles
d'affecter l'exploitation avec une probabilité suffisante. Une telle
démarche aura le mérite d'aider les commissaires aux comptes dans
leurs fonctions et permettre ainsi d'éviter les actions inopportunes. En
effet, les suites de l'alerte sont parfois si importantes que son
déclenchement gagnerait à être minutieusement
clarifié, ce qui peut d'ailleurs être perçu comme un
début de solutions aux difficultés d'exécution de la
mission des commissaires aux comptes.
Section II : LES DIFFICULTES D'EXECUTION DES
MISSIONS
L'efficacité du contrôle des SA
opéré par le commissaire aux comptes n'est pas facilitée
par les conditions d'exercice de ses missions. Dans leur exercice, le
commissaire aux comptes rencontre un certain nombre de difficultés qui
viennent fausser le jeu normal de tout contrôle. Ces difficultés
proviennent pour l'essentiel de la disparité des missions (§ I) et
du respect du principe de non immixtion (§ II).
§ I : La
disparité des missions du commissaire aux comptes
L'acte uniforme sur les sociétés commerciales ne
charge pas seulement le commissaire aux comptes de certifier les comptes et de
communiquer les informations aux actionnaires. Il lui attribue des missions
diverses qui n'ont pas toujours un aspect uniquement comptable ou financier. En
effet, la complexité de la vie sociale empêche de le cantonner
dans une mission trop définie225(*).
Celui-ci contrôle tous les aspects juridiques de la vie
sociale puisqu'il doit signaler à la plus prochaine assemblée
générale les irrégularités et les inexactitudes
qu'il a relevées au cours de l'accomplissement de sa mission. Ces
missions diverses incombent à tous les commissaires aux comptes,
c'est-à-dire qu'elles ne nécessitent pas un mandat
spécial. Elles découlent de plein droit de la survenance de tel
ou tel événement. Elles ont l'avantage d'aboutir à un
contrôle plus global, mais risque aussi de détourner le
commissaire aux comptes de l'essentiel de sa mission parce que trop
partagé.
En se référant à l'adage familier
selon lequel « on ne peut poursuivre deux lièvres à la
fois », le commissaire aux comptes qui contrôle les
comptes et les certifie en même temps qu'il surveille les
opérations financières de la vie sociale (rapport sur les
modifications du capital, certification de bilan en vue de la distribution
d'acomptes sur les dividendes, rapport sur les conventions
réglementées et celles passées entre les dirigeants et la
société...) et veille au respect de l'égalité entre
actionnaires, pourra-t-il prétendre bien accomplir sa mission ? Que
dire quand l'on est en présence des groupes de sociétés ou
lorsque l'entreprise établit des comptes consolidés ?
Un cas typique est la situation d'un commissaire aux comptes
qui, plongé pieds et mains liés dans la préparation de son
rapport général pour présentation à
l'assemblée, intervient concomitamment une opération de
réduction ou d'augmentation du capital de la société,
aura-t-il le temps nécessaire pour surveiller en même temps et au
même moment les deux opérations ?
Nous pensons qu'il ne pourra aucunement dans les deux
situations prétendre avoir minutieusement accompli sa mission. Bien
plus, le commissaire aux comptes n'a pas reçu le don d'ubiquité.
Il ne peut donc être partout au même moment et faire un bon
travail. Malheureusement, c'est dans cet univers que vit le commissaire aux
comptes dans l'espace OHADA. Il est devenu l'acteur central du contrôle
des sociétés dans tout son ensemble. C'est pour cette raison que
la doctrine226(*) a pu
dire qu' « il est devenu un commissaire des
sociétés qu'un commissaire aux seuls comptes ».
Cette prolifération inquiétante des missions ne
peut qu'avoir des répercussions négatives sur l'efficacité
du contrôle. En effet, le contrôle opéré ne peut que
se révéler illusoire parce que trop étendu pour être
brillamment accompli par un seul individu.
Résolument, force est de constater que
l'éparpillement des missions porte un coup dur au contrôle des
commissaires aux comptes. Pourtant, le législateur se doit de
remédier à cette situation, il pourrait d'ailleurs s'inspirer du
droit français qui, depuis 2003 a créé un organe
chargé d'assister le compte dans l'exécution de ses
missions : il s'agit du comité de comptes227(*).
Ce comité devrait avoir pour mission essentielle de
s'assurer de la pertinence et de la permanence des méthodes comptables
adaptées pour l'établissement des comptes sociaux ; de
vérifier que les procédures internes de collecte et de
contrôle des informations garantissent celles-ci ; et d'apporter
leur contribution et leur assistance à l'exécution rationnelle de
la mission. Il ne s'agira pas pour le comité d'entrer dans le
détail des comptes, ni d'en apprécier la fiabilité des
procédures qui concourent à leur établissement ; ni
de s'immiscer dans la gestion; ni de créer une connivence entre le
commissaire aux comptes et les dirigeants228(*), mais seulement d'apporter son assistance au
contrôleur en l'éclairant et en facilitant davantage ses
missions. A ce titre, le comité devrait se substituer progressivement
aux experts et collaborateurs que le commissaire commet dans l'exercice de ses
missions.
Pour ce faire, la désignation des membres du
comité devra respecter les mêmes conditions négatives
(incompatibilités, interdictions et déchéances) et
positives (diplôme d'expertise comptable, aptitude et compétence
requises) que celles des commissaires aux comptes d'autant plus qu'ils exercent
la même fonction. En clair, il devra être composé de
personnes intègres, dotées d'une expérience en
matières financière et comptable, dûment informées
des spécificités comptables.
L'institution du comité de comptes se présente
comme une solution à l'épineux problème de
l'éparpillement des missions des commissaires aux comptes dans les SA.
Son utilité est largement partagée par le professeur LE CANNU qui
déclare : « puisque la légitimité
du contrôle est de nature technique, il faut sérier les
problèmes selon la nature des techniques qu'ils convoquent, et
réunir des experts qui devraient apporter des solutions objectivement
meilleures. Ce dessein se manifeste essentiellement dans la technique des
comités d'audit »229(*).
De cette argumentation, il semble que le comité
d'audit aura les mêmes prérogatives que les commissaires aux
comptes, et corrélativement soumis au respect de maintes
obligations230(*)au rang
desquels figure le principe de non immixtion dans la gestion.
§II : Le principe de
non immixtion dans la gestion, un principe difficilement applicable
Inconnu dans la loi de 1867, consacré par la loi du 24
juillet 1966231(*), le
principe de non immixtion est repris par le législateur OHADA dans
l'acte uniforme sur les sociétés commerciales en son article 712
qui dispose que « le commissaire aux comptes a pour mission
à l'exclusion de toute immixtion dans la gestion, de vérifier
les valeurs et les documents comptables de la société et de
contrôler la conformité de sa comptabilité aux
règles en vigueur. »
Il signifie en premier lieu que le commissaire aux comptes ne
doit être investi d'aucune prérogative dans la conduite des
affaires externes (représentation de la société) et
internes (prises de décision) de la société. Ensuite, il
ne saurait être un conseiller de la gestion. Ce faisant, il remplirait
une mission qui appartient aux dirigeants et serait amené à
donner des conseils qui constitueraient une immixtion. Enfin, qu'il doit se
garder de toute « interférence »232(*) dans la conduite
des affaires sociales.
Bien qu'il soit facile à définir, le respect
scrupuleux du principe de non immixtion ne va pas sans soulever des
difficultés majeures dans l'exécution des missions du commissaire
aux comptes.
La première difficulté vient du fait que la loi
dispose que le commissaire aux comptes ne doit pas s'immiscer dans la gestion
des dirigeants alors que l'exercice de plusieurs de ses missions est
indétachable d'une immixtion dans la gestion. En effet, il ne peut pas
se désintéresser de la gestion de l'entreprise qui vit, au jour
le jour et sur une longue durée, sous la forme juridique de la
société dont il est l'organe du contrôle
légal233(*), que
l'on soit en présence de ses missions traditionnelles ou de ses
missions nouvelles.
Dans l'accomplissement de ses missions traditionnelles, il
doit certifier que les états financiers de synthèse de la
société contrôlée sont réguliers et
sincères, donnent une image fidèle de la situation des
opérations de l'exercice écoulé, de la situation
financière et comptable de la société à la fin de
l'exercice. Très souvent, il sera obligé de procéder
à des sondages ainsi qu'à des inspections sur le terrain, il
pourra même recueillir toutes les informations utiles auprès des
tiers ayant accompli des opérations pour le compte de la
société pour être sûr, et certifier en professionnel
lesdits états financiers. Dans un cas comme dans l'autre, il
apprécie la gestion.
La difficulté s'accroît avec les rapports qu'il
est appelé à établir sur les conventions
réglementées, les fusions et les opérations sur le
capital. D'après l'article 441AUSCGIE, le commissaire aux comptes veille
sous sa responsabilité à l'observation des dispositions relatives
aux conventions réglementées et dénonce toute violation
dans son rapport à l'assemblée générale. Cette
prescription qui lui permet d'étendre son contrôle au delà
des seuls comptes l'autorise indirectement à apprécier la gestion
des dirigeants sociaux. Les rapports sur les modifications du capital ou des
opérations de fusion sont aussi autant de signes d'immixtion dans la
gestion des dirigeants, « car on ne peut s'acquitter sans
apprécier plus ou moins, la gestion de la
société »234(*).
Telles sont quelques hypothèses d'immixtion dans le
cadre des missions traditionnelles du commissaire aux comptes. Il en existe
d'autres qui sont spécifiques à l'exercice des missions nouvelles
et dont le cadre par excellence est la mission de l'alerte.
La procédure d'alerte telle qu'organisée par le
législateur donne des grandes possibilités au commissaire aux
comptes d'intervenir dans la gestion en l'appréciant. Déjà
même en invitant les dirigeants ou le conseil d'administration à
se prononcer sur les faits dont il a requis des explications, le commissaire
aux comptes porte inévitablement une appréciation sur un ou
plusieurs actes de gestion des dirigeants sociaux. L'établissement du
rapport spécial à présenter à l'assemblée
générale suppose qu'il ait également
apprécié la gestion. Plus caractéristique, est enfin sa
décision de convoquer l'assemblée générale. Cette
convocation suppose en effet l'existence d'un motif déterminant et
justifiant la crainte que la continuité de la société ne
soit compromise. Or, ce motif ne peut résulter que d'un exercice au
cours duquel il fait irruption et apprécie la gestion235(*).
Le principe de non immixtion dans la gestion se
présente vraisemblablement comme l'une des questions les plus
controversées à propos du commissariat aux comptes, le
législateur est contredit et pour ne prendre que deux exemples, enseigne
aussi bien que le commissaire aux comptes « a le
contrôle de la régularité et de la sincérité
de la gestion » ou à l'inverse que « le
commissaire aux comptes commettrait une faute en portant une
appréciation sur la manière dont la société est
gérée », deux positions parfaitement
incompatibles, puisque la même attitude du commissaire aux comptes est
perçue tantôt comme une obligation, tantôt comme une faute.
Cette situation alambique ne peut que contribuer à nuire au
contrôle des commissaires aux comptes.
Sous le couvert du principe à respecter, les
commissaires aux comptes ne peuvent plus bien exercer leur contrôle qui
devient de ce fait illusoire. A l'occasion, ils seront tentés de se
limiter à un contrôle superficiel, évitant d'aller plus
loin au risque de s'immiscer dans une gestion susceptible d'engager leur
responsabilité. Or, en se limitant en surface, leur
responsabilité pourra aussi être engagée pour n'avoir pas
dénoncé les fautes de gestion des dirigeants236(*).
Face à ce paradoxe, le commissaire aux comptes peut ne
plus savoir à quel sein se vouer, respecter le principe ou ne pas le
respecter donnera toujours lieu à sa responsabilité.
Finalement, que devient ici le principe de non
immixtion?237(*) Il
devient purement et simplement une entrave à l'efficacité du
contrôle légal des comptes puisque, non seulement, il risque de
paralyser l'exercice normal de toutes les missions du commissaire aux comptes,
mais pourra aussi consacrer la passivité légale de ce
dernier238(*).
Pour une meilleure efficacité du contrôle, il
serait souhaitable que le législateur procède à une
révision du principe allant dans le sens d'une délimitation du
domaine dans lequel l'immixtion peut être tolérée ou
sanctionnée. En réalité, il ne s'agit pas seulement de
distinguer ce qui relève de l'immixtion ou ce qui est exclu ; il
s'agit à maintes occasions du contrôle légal de
déterminer ce que le commissaire aux comptes n'est pas autorisé
à faire, ce qu'il peut faire et enfin ce qu'il doit faire.
CONCLUSION DE LA DEUXIEME
PARTIE
L'examen de cette partie montre que les
limites à l'efficacité du contrôle opéré par
les commissaires aux comptes dans les SA tiennent à deux grandes
raisons :
D'une part, elles proviennent du statut,
matérialisé par leur indépendance factice et les limites
à leurs prérogatives.
D'autre part, elles proviennent des missions même des
commissaires aux comptes très souvent mal définies avec de
nombreuses difficultés d'exécution. Ce faisant, parce qu'on ne
peut dénoncer qu'en proposant, la pratique a formulé plusieurs
souhaits allant dans le sens des stratégies de renforcement de
l'indépendance et des prérogatives des commissaires aux comptes,
et d'une précision nette de ses misions. Il appartient au
législateur de les mettre en oeuvre s'il veut que le contrôle des
sociétés anonymes garde un sens à l'avenir.
CONCLUSION GENERALE
Au terme de cette étude, on peut constater que
l'efficacité du contrôle des SA opéré par le
commissaire aux comptes reste à parfaire, tant sur le plan des mesures
préventives que sur le plan des mesures curatives.
S'agissant des mesures préventives, la situation de
l'aménagement du statut du commissaire aux comptes que celle de
l'harmonisation du cadre d'exercice de la mission nécessitent des
améliorations.
En ce qui concerne le statut, malgré les
avancées réalisées par l'AUSCGIE, force est de constater
que beaucoup reste à faire pour assurer aux commissaires aux comptes
une indépendance réelle. Pour cela, il faudrait qu'aux garanties
classiques d'indépendance qui existent déjà, soient
ajoutées des nouvelles garanties telles que l'interdiction faite aux
dirigeants sociaux de prendre désormais part aux réunions du
conseil d'administration ou de l'assemblée des actionnaires
appelée à désigner le commissaire aux comptes,
l'instauration d'un contrôle judiciaire de la désignation et
l'institution d'un système de barème des honoraires de taxation
des honoraires des commissaires aux comptes.
Sur le plan de l'harmonisation du cadre d'exercice de la
mission, de nombreuses prérogatives ont été
attribuées aux commissaires aux comptes, mais, elles se
révèlent aujourd'hui fortement affaiblies du fait des
résistances des tiers et des dirigeants des filiales de la
société mère. Il serait souhaitable d'instituer une
communication forcée des documents à toutes les étapes du
contrôle.
S'agissant des mesures curatives, des actions visant les
personnes et leurs actes ont été consacrées pour vaincre
les différents obstacles au contrôle. Leur contenu parait
très restrictif, car l'acte uniforme n'a pas incriminé tous les
obstacles aux vérifications des commissaires aux comptes. C'est le cas
des résistances des tiers ou des dirigeants de filiales, et
l'irresponsabilité des dirigeants sociaux en cas de non convocation des
commissaires aux comptes aux séances du conseil d'administration. Il
faudrait nécessairement les incriminer, la menace d'une sanction
pénale peut contribuer à intimider davantage les personnes
hostiles au contrôle.
Par ailleurs, les missions du commissaire aux comptes ne sont
pas du reste sur les limites à l'efficacité du contrôle.
Certaines de ces missions sont très mal définies, ce qui facilite
les difficultés d'exécution dans leur accomplissement. Il
faudrait une intervention du législateur communautaire allant dans le
sens d'une « plus grande clarification des
missions ».
La consécration de toutes ces mesures souhaitées
et attendues du législateur africain permettra de combler les lacunes
constatées en vue d'une amélioration du contrôle externe
des sociétés anonymes. La mondialisation de l'économie
exige la pratique du contrôle soit en harmonie avec la volonté
législative comme l'a affirmé opportunément un
auteur239(*),
« il y a toujours une saine elegantia juris à mettre le
modèle législatif en harmonie avec la pratique
effective ». Il reviendra aussi aux commissaires aux comptes de
se comporter de façon loyale, l'efficacité du contrôle
qu'ils assurent dépendra aussi de leur sens de l'éthique.
ELEMENTS BIBLIOGRAPHIQUES
I -OUVRAGES GENERAUX ET SPECIALISES
1- CHAPUT (Y.), Le commissaire aux
comptes, partenaire de l'entreprise, Presses de sciences politiques, CREDA.
1999.
2- CHARTIER (Y.), Droit des affaires,
sociétés commerciales, T.2, collection.Themis, 3e
édition, 1992.
3- COZIAN (M.), VIANDIER (A.), (DEBOISSY (F.),
Droit des sociétés, Paris, Litec, 13e
édition, 2000.
4- DELGA (J.), Le droit des
sociétés, Précis Dalloz, 1998.
5- DIDIER (P.), Droit commercial. Les
entreprises en société, T.2, collection Thémis,
P.U.F.1993.
6- FILIGA (M. S.).Droit des
entreprises en difficulté, Bruylant Bruxelles, 2002.
7- FRANCE (G.), HERAUD (A.), Droit des
sociétés, manuel et applications, 10e
édition, Collection. Dunod, 2003.
8- GAUTIER (P.), LAURET (B.), Droit
pénal des affaires, Economica, Paris, 1990-1991.
9- GUYON (Y.), Droit des affaires,
entreprises en difficultés, redressement judiciaire, faillite, Tome
2, 6e édition. Economica, Paris, 1997.
10- GUYON (Y.), Droit des affaires, droit
commercial général et sociétés,
Tome,12e édition, Economica, Paris, 2003.
11- LARGUIER (J.), CONTE (P.), Droit
pénal des affaires, 11e éd, A.Clin, 2004.
12- JEANTIN (M.), Droit commercial,
instruments de paiement et de crédit, entreprises en
difficulté, 4e édition, Précis Dalloz,
1995.
13- LEGEAIS (D.), Droit commercial, cours
élémentaire, droit, économie, 10e
édition, Sirey, Paris, 1995.
14- MERCADAL (B.), JANIN (Ph.).
Mémento pratique, droit des affaires, Sociétés
commerciales, Paris, 2004.
15- MERLE (P.), Droit commercial,
Sociétés commerciales, 9eéd, Précis
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16- MESTRE (J.), BLANCHARD (D.). Les
sociétés commerciales, Lamy SA, Paris, 1995.
17- MONEGER (J.), GRANIER (T.), Le
commissaire aux comptes. Dalloz, .2003.
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des sociétés commerciales au Cameroun, P.U.A, Yaoundé,
1996.
19- POUGOUE (P.G.), ANOUKAHA (F.), NGUEBOU (J.),
Le droit des sociétés commerciales et du groupement
d'intérêt économique OHADA, P.U.A,Yaoundé,
1998.
20- POUGOUE (P.G.), ANOUKAHA (F.), NGUEBOU (J.), CISSE
(A.), DIOUF (N.), SAMB (M.), Le droit des sociétés
commerciales et du groupement d'intérêt économique
OHADA, Bruylant, Bruxelles, 2002.
21- RIPERT (G.), ROBLOT (R.) en collaboration
avec GERMAIN (M.), Traité de droit commercial,
Tome.1, Volume.2, 18e édition, LGDJ, Paris, 2002.
22- SAINT-ALARY HOUIN (C.), Droit des
entreprises en difficultés, 2eédition,
Montchrestien, Paris, 1996.
23- VIDAL (D.), Le commissaire aux comptes
dans la société anonyme. (Evolution du contrôle
légal, aspects théoriques et pratiques). LGDJ, Paris.1985.
II- MEMOIRES
1- ADAMOU (R.). Le droit pénal des
affaires. Droit pénal des affaires au Niger : une construction
duale entre droit uniforme et législation nationale, mémoire de
DEA, www. ohada.com
2- BRUNOUW (L.). L'exercice du contrôle
dans les sociétés anonymes, mémoire de DEA,
Université de Lille2, octobre 2003.
3- KEM CHEKEM (B.M.). Entreprises en
difficultés et droit des salariés dans la zone OHADA : le
cas du Cameroun, mémoire de DEA, Université de Dschang, mars
2004.
4- KOM KAMSU. Le droit pénal des
sociétés commerciales dans l'Acte Uniforme OHADA, mémoire
de DEA, Université de Dschang, 1999.
5- NJEUFACK TEMGWA (.R.). La
responsabilité des dirigeants des sociétés commerciales,
Université de Dschang, mémoire de DEA, Université de
Dschang, janvier.1999.
6- NJOYA KAMGA (B.). Les interventions des
tiers dans la gestion des sociétés commerciales, mémoire
de DEA, Université de Dschang, 1999.
7- NKOA ATANGANA (E.T.). Les dirigeants des
sociétés anonymes dans l'Acte Uniforme relatif au droit des
sociétés commerciales, mémoire de DEA, université
de Dschang, avril 1999.
III- ARTICLES DE DOCTRINE ET
CHRONIQUES
1- AMATO (V.). Faut-il supprimer le
commissaire aux comptes dans les petites et moyennes sociétés
anonymes... et 10.000 emplois, Les Petites Affiches, n°66,
juin1991, p.25 et s.
2- BARBIERI (J.F.). Le contentieux de la
rémunération des commissaires aux comptes, Bull. Joly,
avril 1998, p.293 et s.
3- MURE (C.). La responsabilité
pénale des commissaires aux comptes, en finir avec le poncepilatisme,
Le Messager, n°2108 du 18 avril 2006.
4- COURET (A.). Le secret professionnel du
commissaire aux comptes à l'épreuve des infractions civiles,
Bull. Joly, janvier, 1996, p.7et s.
5- COURET (A.). Synthèse de la
jurisprudence récente sur la révocation et la
responsabilité civile des commissaires aux comptes, Les Petites
Affiches, décembre 1993. n°148, p.7 et s
6- DELHOMME (M.). Le secret professionnel de
l'expert comptable, Les Petites Affiches, numéro spécial,
septembre.2000, n° 191, p.49 et s.
7- JOHNSON (A.F.). Les interdictions et les
incompatibilités à l'exercice d'un mandat de commissaire aux
comptes, Revue Experts Associés, n°2, août 2005.
8- JOH NSON (A.F.). La nomination du
commissaire aux comptes dans une société : faculté ou
obligation ? Revue Experts Associés, n°1, juillet
2004.
9- KLING (D.). Existe- t-il un secret
professionnel des commissaires aux comptes ? In Les Petites
Affiches, numéro spécial, Septembre 2000, n°191. p.45 et
s.
10- LAMPERT (E.). Le rôle de la
profession comptable libérale, Les Petites Affiches,
numéro spécial, Septembre 2000, n°191, p.49 et s.
11- LE BARS (B.), MARTOR (B.). Management et
financement de la société anonyme de droit OHADA, la Semaine
Juridique, (JCP), n°5, 2004, p.12 et s.
12- LOHOUES-OBLE (J.), Innovations dans le
droit commercial général, Les petites Affiches,
numéro spécial OHADA, n°205, 2004, p.8 et s
13- MERLE (P.), La responsabilité des
commissaires aux comptes : Le point sur la jurisprudence, Les Petites
Affiches, numéro spécial 2000, p.37 et s.
14- MILLOT (P.M.), La procédure
d'alerte du commissaire aux comptes, La Lettre de l'Observatoire Consulaire
des Entreprises en Difficultés, n°24, juillet.2004.
16- NGOMO (A.F.), L'amélioration du
contrôle interne de la gestion des sociétés commerciales
dans l'avant-projet d'acte uniforme relatif aux sociétés et au
groupement d'intérêt économique dans la zone franc,
Revue BEAC, n° 226, avril 1996, p.101 et s.
16- NGUIHE KANTE (P.). Réflexions sur
la notion d'entreprise en difficulté dans l'acte uniforme portant
organisation des procédures d'apurement du passif OHADA. Anales de la
FSJP, Tome 5, P.U.A, 2001, n°26, p.97.
17- ONANA ETOUNDI (.F.). La
responsabilité du commissaire aux comptes dans la gestion de
l'entreprise, rapport du séminaire international sur « le
rôle du commissaire aux comptes dans la gouvernance de
l'entreprise », Douala, 7 et 8 février 2007.
18- PAILLUSSEAU (J.), L'acte uniforme sur le
droit des sociétés, Les Petites Affiches, numéro
spécial, octobre 2004, n°205, p.19 et s.
19- POUGOUE (P.G.), L'impact de l'acte
uniforme de l'OHADA relatif au droit des sociétés commerciales et
du groupement d'intérêt économique sur le contrôle et
le développement des entreprises locales, Juridis
périodique, n°66, avril- mai- juin 2006, p.107 et s.
20- ROQUILLY (C.). Les
contrariétés au processus d'informations dans les
sociétés anonymes, Les Petites Affiches, 1e
partie, n°76, juin 1993 p.18 et s ; 2e partie,
n°80, juillet 1993, p.15 et s.
21- VIDAL (D.). Le statut du commissaire aux
comptes, Les Petites Affiches, mars 1993, n°30, p.16 et s.
22- VIDAL (D.). L'intervention du commissaire
aux comptes dans la gestion de l'entreprise sociale qu'il contrôle,
Les mélanges en l'honneur de HONORAT (A.), 2000, p.327 et s.
IV- LEGISLATION
1- Acte Uniforme relatif au droit des sociétés
commerciales et du groupement d'intérêt économique
2- Acte Uniforme portant organisation et harmonisation de la
comptabilité des entreprises.
4- Loi du 24 juillet 1867 sur les sociétés.
5- Loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés
commerciales.
6- Le décret n°69-810 du 12 août1969 relatif
à l'organisation de la profession des commissaires aux comptes de
sociétés.
7- Le décret n°85-665 du 3 juillet 1985 relatif
à l'organisation et au statut des commissaires aux comptes.
8- Loi n°2003/008 du10juillet 2003 portant
répression de certaines infractions contenues dans certains actes
uniformes OHADA.
TABLE DES MATIERES
DEDICACE
I
REMERCIEMENTS
II
PRINCIPALES ABREVIATIONS
III
SOMMAIRE
V
RESUME
VI
ABSTRACT
VII
INTRODUCTION GENERALE
1
PREMIERE PARTIE : L'EFFICACITE
RECHERCHEE DU CONTROLE DES COMMISSAIRES AUX COMPTES DANS LA SOCIETE
ANONYME
9
CHAPITRE I : LES MESURES PREVENTIVES
11
Section I : L'AMENAGEMENT GRADUEL DU
STATUT DU COMMISSAIRE AUX COMPTES
11
§I : Le renforcement sensible de
l'indépendance du commissaire aux comptes
12
A- Les incompatibilités :
garantie principale de l'indépendance
12
1. Les incompatibilités
générales
12
2. Les incompatibilités spéciales
13
3. Les incompatibilités temporaires
15
B. Les autres garanties de l'indépendance
du commissaire aux comptes
16
1. La récusation des commissaires aux
comptes
17
2. Le droit d'expression du commissaire aux
comptes
19
§II : La rationalisation des conditions
d'accès à la profession :
19
Les garanties de moralité et de
compétence
19
A. La moralité suffisante pour
exercer la fonction
20
B. Les aptitudes professionnelles et
compétences requises
20
1. Le diplôme d'expertise
comptable
21
2. L'agrément de l'ordre des
experts-comptables
21
Section II : L'HARMONISATION DU CADRE
D'EXERCICE DE LA MISSION DE CONTROLE
22
§ I. La stabilité de la fonction des
commissaires aux comptes
23
A. La garantie matérielle de
stabilité : la rémunération du commissaire aux
comptes
23
B. Les garanties personnelles de la
stabilité des fonctions
24
1. La durée du mandat des
commissaires aux comptes
25
2. Les conditions strictes de la
rupture « anticipée » du mandat
25
§II : Les prérogatives des
commissaires aux comptes
28
A. Le droit d'information des commissaires
aux comptes
29
1. Le droit du commissaire aux comptes
d'assister aux assemblées
29
2. Le pouvoir exceptionnel de convoquer les
assemblées
30
B. Les pouvoirs d'investigation du
commissaire aux comptes
31
1. L'investigation auprès des
sociétés
31
2. L'investigation auprès des
tiers
33
CHAPITRE II : LES MESURES CURATIVES
34
Section I : LES ACTIONS CONTRE LES
PERSONNES : LES RESPONSABILITES CONSECUTIVES AU CONTROLE
34
§1 : Les actions en
responsabilité contre les dirigeants sociaux
34
A : Le sens de la responsabilité civile
des dirigeants sociaux
35
1. La faute, élément central
de la responsabilité civile des dirigeants
35
2 : Le régime de l'action en
responsabilité civile des dirigeants
36
B : La responsabilité pénale
des dirigeants sociaux de sociétés anonymes
38
1. L'absence de désignation ou de
convocation des commissaires aux comptes
39
2. L'entrave aux contrôles des
commissaires aux comptes
40
§II : les actions en
responsabilité contre les commissaires aux comptes
42
A. Les actions en responsabilité contre les
commissaires aux comptes dans l'acte uniforme sur les sociétés
commerciales.
43
1 : Le renforcement de la
responsabilité civile des commissaires aux comptes
43
2 : L'aggravation de la responsabilité
pénale des commissaires aux comptes
51
B. La responsabilité disciplinaire des
commissaires aux comptes.
59
1. La finalité de la
responsabilité disciplinaire : l'amélioration de la
qualité du contrôle des commissaires aux comptes
60
2. Le régime des poursuites
disciplinaires
61
Section II : LES ACTIONS CONTRE LES
ACTES : LA NULLITE DES DELIBERATIONS.
64
§I. La nullité des
délibérations pour défaut de désignation des
commissaires aux comptes
64
§ II : La nullité des
délibérations du commissaire aux comptes
65
A. La nullité des
délibérations pour désignation
irrégulière
65
B. La nullité de la convocation
irrégulière de l'assemblée.
66
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
68
DEUXIEME PARTIE : L'EFFICACITE LIMITEE DU
CONTROLE DES COMMISSAIRES AUX COMPTES DANS LA SOCIETE ANONYME
69
CHAPITRE I : LES LIMITES TIREES DU STATUT DES
COMMISSAIRES AUX COMPTES
71
Section I : L'INDEPENDANCE FACTICE DES
COMMISSAIRES AUX COMPTES
71
§I : Les hypothèses
d'indépendance factice des commissaires aux comptes.
71
A. L'influence décisive des
dirigeants sur l'assemblée des actionnaires au moment de la
désignation des commissaires aux comptes
72
B. L'omnipotence des dirigeants dans la
négociation des honoraires
73
§ II : La nécessité d'un
accroissement des garanties d'indépendance
74
A. L'accroissement des garanties
d'indépendance au stade de la désignation des commissaires aux
comptes
75
1. L'interdiction formelle aux dirigeants de
prendre aux réunions du conseil d'administration ou de
l'assemblée des actionnaires désignant les contrôleurs
75
2. L'institution d'un contrôle judiciaire de
la désignation des commissaires aux comptes
76
B. L'institution d'un système de
barème des honoraires du commissaire aux comptes
77
Section II : LES ENTRAVES AUX PREROGATIVES
DES COMMISSAIRES AUX COMPTES
78
§ I : Les obstacles de fait
79
A. Le contenu de résistances
79
1. La résistance des dirigeants des
filiales
79
2. La résistance des tiers
80
3. La nécessité d'une
communication forcée des informations
81
§ II : Les obstacles de droit
82
A. Les obstacles de
droit « propres » aux groupes de
sociétés.
82
1. Le respect scrupuleux du secret professionnel
entre les commissaires aux comptes des sociétés du groupe.
82
2. Le problème de la loi applicable aux
groupes de sociétés
« transfrontalières »
84
3 : Le silence du législateur sur
l'incrimination des entraves aux vérifications du commissaire aux
comptes nonobstant une décision de justice
85
B. Les obstacles de droit commun à toutes
les sociétés anonymes : l'absence du délit de non
convocation des commissaires aux comptes aux réunions du conseil
d'administration
86
CHAPITRE II : LES LIMITES TIREES DES MISSIONS
DU COMMISSAIRE AUX COMPTES
88
Section I: LA DEFINITION INCORRECTE DE
CERTAINES MISSIONS
88
§ I : L'imprécision de la notion
d' « image fidèle »
88
§II : L'ambiguïté des
critères de déclenchement de l'alerte
90
Section II : LES DIFFICULTES D'EXECUTION
DES MISSIONS
93
§ I : La disparité des missions du
commissaire aux comptes
93
§II : Le principe de non immixtion dans
la gestion, un principe difficilement applicable
96
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE
100
CONCLUSION GENERALE
101
ELEMENTS BIBLIOGRAPHIQUES
103
TABLE DES MATIERES
108
* 1 SAWADOGO
(F.M.) Droit des entreprises en difficulté, avant propos
par DAVID (J.), .Bruylant, Bruxelles, 2002, p.5.
* 2 Organisation pour
l'harmonisation en Afrique du Droit des Affaires.
* 3 MARTOR (B.),
THOUVENOT (S.), « l'uniformisation du Droit des affaires en
Afrique par l'OHADA », in La Semaine Juridique, JCP,
n°5, 2004, p.5.
* 4 Les actes uniformes
déjà adoptés par le conseil des ministres concernent les
différents domaines du droit des affaires : le droit commercial
général ; le droit des sociétés commerciales
et du groupement d'intérêt économique ; les
sûretés ; les procédures simplifiées de
recouvrement et les voies d'exécution ; les procédures
collectives ; le droit de l'arbitrage ; l'organisation et
l'harmonisation de la comptabilité des entreprises ; les contrats
de transports de marchandises par route.
* 5 ALLIALI
cité par NGOMO (A.F.), le projet de code des
sociétés de l'UDEAC. (Etude d'une reforme), thèse de
droit, Paris II, 1989, p.10.
* 6 POUGOUE
(P.G.), « L'impact de l'Acte Uniforme de l'OHADA relatif au
droit des sociétés commerciales et du groupement
d'intérêt économique sur le contrôle et le
développement des entreprises locales ». In Juridis
Périodique, n°66, avril-mai-juin 2006, p.107.
* 7 POUGOUE (P.G.),
ANOUKAHA (F.), NGUEBOU (J.), Le droit des sociétés
commerciales et du groupement d'intérêt économique
OHADA, P.U.A, Yaoundé, 1998, n°3, p.2.
* 8 LOHOUES- OBLE
(J.). « Innovations dans le droit commercial
général », in Les Petites Affiches,
numéro spécial OHADA., n°205, 2004, P.8.
* 9 NGOMO
(A.F.), « L'amélioration du contrôle interne de
la gestion des sociétés commerciales dans l'avant- projet d'acte
uniforme relatif au droit des sociétés et au groupement
d'intérêt économique dans la zone franc »,
Revue BEAC, n° 226, avril 1996, pp. 101et s.
* 10 PAILLUSSEAU
(J.). « L'acte uniforme sur le droit des
sociétés », in Les Petites Affiches,
numéro spécial OHADA, 2004, n°205, p.19.
* 11 Le nouveau droit
maintient les formes des sociétés : SNC, SCS, SARL, SA.
Mais la société en commandite par actions disparaît
désormais. En revanche, la SARL et la SA. unipersonnelles, le
groupement d'intérêt économique, la société
entre époux et la SA faisant appel public à l'épargne
sont introduits dans le tissu économique. Enfin, les structures occultes
telles les sociétés en participation, les sociétés
de fait et les sociétés créées de fait sont saisies
et suffisamment intégrées dans le champ juridique.
* 12 Art 4
AUSCGIE. « La société commerciale est
créée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent par un
contrat, d'affecter à une activité des biens en numéraire
ou en nature, dans le but de partager ou de profiter de l'économie qui
pourra en résulter... »
* 13 Art 385 al 1 AUSCGIE.
« La société anonyme est une société dans
laquelle les actionnaires ne sont responsables des dettes sociales qu'à
concurrence de leurs apports et dont les droits des actionnaires sont
représentés par des actions
* 14 PAILLUSSEAU
(J.), « L'acte uniforme sur le droit des
sociétés », op.cit, p.22.
* 15En ce qui concerne le
fonctionnement, la grande originalité concerne le choix du mode
d'organisation du pouvoir : on peut opter pour une SA avec conseil
d'administration, dirigée soit par un président directeur
général, soit par un président du conseil d'administration
et un directeur général, ou pour une SA avec un administrateur
général unique. Toutefois, cette dernière option n'est
admise que si le nombre d'actionnaires n'est pas supérieur à
trois
* 16 Petit Larousse
illustré, 1996, voir contrôle, p.268-269.
* 17 CORNU
(G.), Vocabulaire juridique, Association Capitant, Paris, PUF,
3e édition, 1992, voir contrôle, p, 222.
* 18 GUYON
(Y.), Droit des affaires, droit commercial général
et sociétés, Tome 1, 12e édition,
Economica Paris, 2003, n°359, p.390.
* 19 TUNC
(A.), « L'effacement des organes légaux de la
société anonyme », D.1952, Chronique, n°4,
p. 73.
* 20 RIPERT
(G.), Aspects juridiques du capitalisme moderne, Paris,
L.G.D.J, 1951, réédition L.G.D.J, 1992, n°42, p. 98 et s.
* 21 MONEGER (J.),
GRANIER (T.), Le commissaire aux comptes, Répertoire des
sociétés, Dalloz .2003, n°7, p.7.
* 22 GUYON
(Y.), op.cit, n°359, p.390.
* 23 DIDIER
(P.), Droit commercial, les entreprises en
société, Tome 2, P.U.F, 1993, P.106.
* 24 Le contrôle
interne est exercé par les actionnaires et les dirigeants. Contrairement
à l'ancien droit, le contrôle des actionnaires a
évolué. Ils ont un droit d'information étendu, un droit de
communication des documents sociaux, un droit de poser les questions
écrites, un droit d'alerte et un droit de recourir à l'expertise
comptable. Le président du conseil d'administration contrôle la
gestion du directeur général.
* 25 Art 376AUSCGIE.
* 26 Art 694 AUSCGIE.
* 27 Art 702 AUSCGIE.
* 28 POUGOUE
(P.G.), ANOUKAHA (F.), NGUEBOU (J.), CISSE (A.), DIOUF (N.), SAMB
(M.), Le droit des sociétés commerciales et du
groupement d'intérêt économique OHADA, Bruylant,
Bruxelles, 2002, p.404.
* 29 RIPERT
(G.), Les aspects juridiques... op.cit, p.1951, n°46.
* 30 NGOMO
(A.F.), L'amélioration du contrôle interne de la
gestion...op.cit, p.103.
* 31 Les commissaires aux
comptes sont des professionnels chargés de contrôler la
comptabilité de la société, de la certifier, et plus
généralement de vérifier que la vie sociale se
déroule dans des conditions régulières. (Art L225-242 du
Code de commerce.)
* 32 NGOMO
(A.F.), Guide pratique du droit des sociétés
commerciales au Cameroun, P.U.A, 1ère éd, 1996,
p.196.
* 33 POUGOUE (P.G.),
ANOUKAHA (F.), NGUEBOU (J.), DIOUF (N.), SAMB (M.), op.cit,
n°857, p.404.
* 34 MEUKE
(B.Y.), « L'information des actionnaires minoritaires dans
l'OHADA : réflexion sur l'expertise de gestion »,
www.ohada.com (ohadata D-05-56)
* 35 NGOMO
(A.F.), L'amélioration du contrôle interne... op.cit, p.
103.
* 36 GUYON
(Y.), op.cit, n °359, p.398.
* 37 CHAPUT
(Y.), Le commissaire aux comptes, partenaire de l'entreprise,
Presses de sciences po, CREDA. 1999, P.15.
* 38 Loi n°66-537 du 24
juillet 1966 régissant les sociétés commerciales.
* 39 Le décret n°
69-810 du 12 août 1969 portant règlement d'administration publique
et relatif à l'organisation de la profession et au statut professionnel
des commissaires aux comptes de sociétés.
* 40 CHAPUT
(Y.), op.cit, p.24.
* 41 VIDAL (D.),
op.cit, n °349, p.270.
* 42 L'incompatibilité
est l'interdiction légale d'exercer une activité professionnelle
ou une fonction.
* 43 GUILLIEN
(R.) et VINCENT (J.), Le lexique des termes
juridiques Dalloz, 13ème éd, 2001, p.313,
définit l'intérêt comme « la condition de
recevabilité de l'action consistant dans l'avantage que procurerait au
demandeur la reconnaissance par le juge de la légitimité de sa
prétention. ». Dans le cadre du contrôle des
sociétés, l'intérêt s'entend
de « ce qui est utile, profitable à
quelqu'un ».
* 44 GUYON (Y.),
op.cit ; n°362, p. 393.
* 45 POUGOUE
(P.G.).ANOUKAHA (F.).NGUEBOU (J.), op.cit, n°304, p .139.
* 46 VIDAL (D.),
op.cit, n°346, p.268.
* 47 Art 724 al 2. 1°) et
2°) AUSCGIE.
* 48 Art 724 al 2. 3°)
AUSCGIE.
* 49 Ces cas de
récusation peuvent être entre autres, la partialité, et la
dépendance excessive envers les dirigeants sociaux.
* 50 Art 158 CPCC.
* 51 CA Colmar, 23
février 1983, Rev .Soc, 1983, 583, note GUYENOT (J.).
* 52 Art 732 al 3 AUSCGIE.
* 53 Art 730 al 2 AUSCGIE.
* 54 VIDAL (D.),
op.cit, n°340, p .264.
* 55 CHAPUT (Y.),
op.cit, p.98.
* 56 GUYON (Y.),
op.cit, .n°373, p .404.
* 57 Cf, infra,
2ème partie, Chapitre I, Section I, § II, A, 2.
* 58 Art 3 du décret
n°69-810 du 12 août 1969 précité.
* 59 Art 695 AUSCGIE.
* 60 L'agrément est un
instrument préventif de contrôle, un acte juridique à
partir duquel la création d'une activité privée
individuelle ou collective est juridiquement réalisée.
* 61 L'Ordre National des
Experts-comptables du Cameroun (ONECCA). Il a été
créé par la loi n° 85 / 11 du 11 décembre 1985,
modifié successivement par la loi n° 2000-05 du 10 janvier 2000 et
la loi n° 2001-283 du 12 août 2001. L'article 2 de la loi de 1985
lui charge d'une mission essentielle : « veiller au
maintien des principes de moralité, de probité, de
dévouement indispensable à l'exercice de la profession dont il
défend l'honneur et l'indépendance. ».
* 62 L'Union
Douanière et Economique de l'Afrique Centrale a été
instituée par le Traité de Brazzaville du 8 décembre 1964.
Elle regroupait le Cameroun, le Congo, le Gabon, la Guinée
Equatoriale, la République Centrafricaine et le Tchad.
* 63 Acte n°4 /
70-UDEAC-133 du 27 novembre 1970 portant statut de la profession
d'expert-comptable et de comptable agréé, modifié
successivement par l'acte n°2 / 71-UDEAC-133 du 18 décembre 1971,
l'acte n°11/ 76-UDEAC-133 du 19 décembre 1976, l'acte n°1/
79-UDEAC-133 du 19 décembre 1980 ; l'acte n°5/82-UDEAC-324
adopté le 18 décembre1982 relatif au commissariat aux comptes et
à l'expertise de gestion en comptabilité dans les Etats membres
de l'UDEAC.
* 64 La Communauté
Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale est l'aboutissement d'un
long processus amorcé à la suite des crises que connaît
l'UDEAC à partir de 1983. Elle sera finalement instituée le 16
mars 1994 au sommet de Ndjaména au Tchad. Elle regroupe tous les Etats
de l'ex-UDEAC.
* 65 Art 696 AUSCGIE.
* 66 Le décret
n°85/665 du 03 juillet 1985 porte modification de certaines dispositions
du décret du 12 août 1969.
* 67 POUGOUE (P. G.),
ANOUKAHA (F.), NGUEBOU (J.), op.cit, n°548, p.238.
* 68 Cf, infra,
2ème partie, Chapitre I, Section I, § I, B.
* 69 Art 724 al 2 AUSCGIE.
* 70 GUYON
(Y.), op.cit, n°373, p.404.
* 71 Art 227de la loi du 26
juillet 1966.
* 72 Loi n°84-148 du
1er mars 1984 relative à la prévention et au
règlement amiable des difficultés des entreprises.
* 73 Cass.com, 22 octobre 1991,
Bull.Joly 1992, 46, note BARBIERI (J.F.)
* 74 Cass.com, 19
février 1963, Rev. Soc, 1964, 315, note Du PONTAVICE (E.).
* 75 CA, Paris, 17
février 1999, Bull. Joly, 1999, 445, note BARBIERI (J.F.)
* 76 VIDAL
(D.), op.cit, .n°354, p.273.
* 77 GUYON
(Y.), « l'indépendance des commissaires aux
comptes », JCP, 1977, I, 2831, n°14.
* 78 COURET (A.),
Synthèse de la jurisprudence récente (1) concernant la
révocation et la responsabilité civile des commissaires aux
comptes, in Les Petites Affiches, n°148, p.7.
* 79 Du PONTAVICE
(E.), cité par VIDAL (D.), op.cit, n°356,
p.275.
* 80 CA Nîmes, 27 mars
1973, Rev.Soc, 1974.327, note Du PONTAVICE (E.).
* 81 Le commissaire aux
comptes peut être conduit à quitter la société
contrôlée à la survenance d'une incompatibilité ou
d'une interdiction ou en cas de maladie. De même, il est admis qu'il peut
démissionner s'il rencontre des obstacles dans l'accomplissement de ses
missions. Il en est ainsi en cas de refus de la société de tenir
compte des observations répétées, d'impossibilité
d'obtenir des honoraires jugés nécessaires pour accomplir les
diligences normales ou de non paiement des honoraires dus.
* 82 V, note 80.
* 83 Loi n° 2003/008 du 10
Juillet 2003 portant répression des infractions contenues des certains
actes uniformes OHADA.
* 84 Art 722 al 1 AUSCGIE.
* 85 Ceci est prévu
par l'article 156 et n'est possible que dans les sociétés
anonymes à l'exclusion des autres sociétés commerciales
où l'article 152 autorise seulement qu'un rapport spécial soit
adressé aux associés ou qu'il soit présenté
à la plus prochaine assemblée générale. Ce pouvoir
de convocation n'est pas une création du législateur OHADA. La
loi française du 24 juillet 1966 le reconnaissait déjà
dans les termes presque identiques dans ses articles 230-1al.3.
* 86 Art 519 AUSCGIE et s.
* 87 L'appréciation
souveraine du caractère déterminant du motif du changement de
lieu de réunion ne doit pas amener le commissaire aux comptes les
prescriptions légales relatives qui gouvernent la tenue des
assemblées. Par exemple, il doit tenir compte des délais si le
nouveau lieu proposé est plus éloigné.
* 88 MESTRES (J.),
op.cit, n°113, p.473.
* 89 Art 718 AUSCGIE.
* 90 Art 900 AUSCGIE.
* 91 Art 178 AUSCGIE .Une
société est filiale de l'autre quand cette dernière
possède plus de la moitié de son capital.
* 92 Journal officiel OHADA
.Droit comptable et système comptable. n°10, 4e
année, 2000, p. 378.
* 93 MERLE
(P.), Droit commercial. Sociétés commerciales,
9e éd, Précis Dalloz, 2003, .n°517, p.595 ;
GUYON (Y.), Droit des affaires, droit commercial...
op.cit, n°369, p .399.
* 94 CHAPUT (Y.),
op.cit, p.7.
* 95 GULLIEN (R.),
VINCENT (J.), Lexique des termes juridiques, 13e
édition, Dalloz 2001, p .258.
* 96 Art 694AUSCGIE.
* 97 Art 702 AUSCGIE.
* 98 ROUSSEAU
(J.), SARL, gérance, pouvoirs- responsabilité.
JCL Société fascicule.74, p.15.
* 99 Art 166 AUSCGIE.
* 100Art 168 AUSCGIE.
* 101 Art 169 AUSCGIE.
* 102 RIPERT (G.),
ROBLOT (R.) par GERMAIN (M.), Traité de
droit commercial, les sociétés commerciales, T.1, Vol.2,
18e éd, n°1752, 2002, p.505.
* 103 CHAPUT
(Y.), op.cit, p.49.
* 104 POUGOUE (P.G.),
ANOUKAHA (F.), NGUEBOU (J.), op. cit, n°299, p.137.
* 105 GAUTHIER (P.),
LAURET (B.). Droit pénal des affaires,, Paris 1991,
p.453.
* 106 Cass.crim, 11mai1981,
n°79-94.330B, Rev.Soc, 1982, p.102.
* 107 L'art 15 de ladite loi
ne vise que les assemblées générales, l'absence de
convocation aux réunions du conseil d'administration n'étant pas
visée.
* 108 GAUTHIER (P.),
LAURET (B.), op.cit, p.455.
* 109 Ibidem.
* 110 CA Paris, 29 juin1 976,
RTDC, 1976, p.559.
* 111 Cass.com, 11mai1981, D,
1982, note BOULOC (.B)
* 112 Paris, 1èr
février 1991, droit pénal 1991, 239
* 113 GAUTHIER (P.),
LAURET (B.), op.cit, p. 456.
* 114 CA Paris, 9e
chambre, 19 novembre 1981.Gaz.Pal .1982.1, jur, p.179.
* 115 POUGOUE
(P.G.), op.cit, p.110.
* 116 GUYON
(Y.), op.cit, .n°386, p.416.
* 117 Art 725 al 1AUSCGIE.
* 118 Art 725 al 2AUSCGIE.
* 119 Cass.com, 10 mars 1992,
n°90-13.701 B, Liaisons juridiques et fiscales, 14 mars 1992,
.p.3.
* 120 CA Paris,
7fevrier1997.Bull Joly 1997.P.445, note PASQUALINI (F.)
* 121 CA Lyon, 23novembre
1971.Bull CNCC1972.P.235.Trib.Corr.Paris, 24 janvier 1986, p.187, note
Du PONTAVICE (E.).
* 122 TGI Le Havre, 15
novembre1979, Bull CNCC, 1980, n°37.P.44.
* 123 CA Paris 1998, JCP,
1998, p.2001.
* 124 Cass.com. 19 octobre
1999, RJDA, 2000, n°36.
* 125 TGI Paris 12 juillet
1984, Bull CNCC, 1985.P.478.
* 126 CA Paris, 1er
fevrier1984, Rev.Soc.1984.779, note SCHMIDT (D.)
* 127 CA Paris, 6 octobre
1987, Rev Soc1988.293, obs. GUYON (Y.)
* 128 Cass.com, 12 novembre
1992, Bull CNCC, 1993, p.110, note Du PONTAVICE (E.).
* 129 CA Dijon, 27 novembre
1985, Bull CNCC, 1986, p.179, note Du PONTAVICE (E.)
* 130 Cass.com, 6 septembre
2000, RJDA, 2001, n°698.
* 131 CA Paris, 19
fevrier1993, JCP.1993.II, 485, note BARBIERI (J.F.).
* 132 CHAPUT (Y),
Droit de la prévention et du règlement amiable des
difficultés des entreprises, PUF, 1986, p.80.
* 133 Cass.com, 06octobre
1992, Bull Joly, 1992, n°147, p.1291 ; Cass.com, 19octobre 1999, Bull
Joly, 2000, p.43, note PASQUALINI (F.).
* 134 MONEGER
(J.) ;GRANIER (T.), op.cit, n°512, p.59.
* 135 GUYON
(Y.), op.cit, n°388, p.417.
* 136 CA Bordeaux, 7mars 1990,
Droit des sociétés, 1991, n°225.
* 137 GUYON
(Y.), op.cit. n°389, p.418.
* 138 Cass.com, 6 octobre
1992, Bull Joly, 2000, 11juillet 2000, note COURET (A.)
* 139 Cass req, 9mars 1942,
JCP.II, 1930, note BASTIAN (D.)
* 140 CA Paris, 16 octobre
1979, JCP, 1980.II.19321, note GUYON (Y.)
* 141 Cf. supra, note 123.
* 142 TGI Montauban,
21mars1985, Bull CNCC, 1985, n°58, p.234.
* 143 TGI Lorient, 23fevrier
1983.Bull CNCC 1983, n°49.p.92.
* 144 Le contrôle de la
gestion ou l'appréciation de son opportunité est un domaine
exclusivement réservé aux dirigeants sociaux.
* 145 RIPERT (G.),
ROBLOT (R.), par GERMAIN (M.), op.cit, n° 1472,
p.495 et s.
* 146 CA Dijon, 17
fevrier1996. Bull CNCC1996, p.716, note MERLE (P.)
* 147 Bordeaux, 17octobre
1990.Bull CNCC, 1990, p.499, note Du PONTAVICE (E.)
* 148 Cass.Com.15juin1993.
Bull Joly, 1130, note JEANTIN (M.)
* 149 GUYON (Y.),
op.cit.n°390, p.420.
* 150 Le législateur
est tenu de déterminer avec précision la notion de faute et du
lien de causalité.
* 151 CA Paris, 8 mars
1978, Rev. Soc, 1978, note SCHMIDT (D.)
* 152 Art 1833 C.civ,
« Une société est constituée dans
l'intérêt commun des associés ».
* 153 CA Paris, 6 janvier
1973, Bull CNCC, 1973, p.75.
* 154 POUGOUE (P.G.),
ANOUKAHA (F.), NGUEBOU (J.), op.cit, n°303, p.138.
* 155 Art 5 al 2 du
Traité OHADA
* 156 Trib corr, Lyon, 5
février 1973, Bull. CNCC, 1973, 263, note Du PONTAVICE (E.)
* 157LARGUIER (J.),
CONTE (P.), Droit pénal des affaires, 11e
éd, A.Clin, 2004, p.149.
* 158 Cass.crim, 2 avril 1990,
RJC, 1992, n°1347, p.24.
* 159 POUGOUE
(P.G.), ANOUKAHA (F.), NGUEBOU (J.), CISSE (A.), DIOUF (N.), SAMB
(M.), préc, p.281.
* 160 Article 716 al 2
AUSCGIE.
* 161 Cass.crim, 12 janvier
1981, JCP. 1981,2, 19660.
* 162 CA Paris, 11e
chambre, 26 juin 1984, Bull CNCC, 1984, n°55.P.342.note Du PONTAVICE
(E.) ; Cass.Crim. 15 septembre 1999, Bull Joly, 2000, 25.
* 163 Trib.corr, Lyon, 20 juin
1985.Gaz .Pal, 1985.II, p.782.
* 164 Cette
appréciation de la mauvaise foi est de la compétence exclusive
des juges ; Cass.crim, 8 juillet 1981, n°80-94, 319,
inédit.
* 165 POUGOUE (P.G.),
ANOUKAHA (F.), NGUEBOU (J.), op.cit, n°306, p.140.
* 166 DELMAS-MARTIS
(M.), Droit pénal des affaires, 3e éd,
Coll. Thémis, 1990.
* 167 Art 96 C P C.
* 168 L'aide peut s'entendre
des secours ou soutiens apportés à quelqu'un par quelqu'un
d'autre.
* 169 Art 74 al 2 CPC.
* 170 Cass.crim, 5 juin 1975,
Bull CNCC, n°146 : affaire dite de la garantie foncière.
* 171 CA Paris, 30 novembre
1978, Bull CNCC, 1980, p.294.
* 172 Cass.crim, 3
janvier.1983, JCP 1983, obs. BOULOC (B.)
* 173 CA Nancy, 23 octobre
1975, Bull CNCC, 1975.444.
* 174 Cass.crim,
26mai1986.JCP.1987, note DEVEZE (J.)
* 175 Trib.corr.Paris, 24
octobre 1979, Bull CNCC.1978.
* 176 Cass.civ, 19mai 1903,
Sirey.1905.1.121.
* 177 Les peines du droit
pénal commun en matière de complicité s'appliquent encore
à la complicité du commissaire tant qu'une loi spéciale ne
l'a pas régi. En effet la loi n°2003/008 du 10juillet 2003 portant
répression de certaines infractions pénales contenues dans
certains actes uniformes OHADA ne traite aucunement l'infraction de
complicité des commissaires aux comptes, il s'ensuit donc qu'elle reste
soumise au droit pénal commun.
* 178 Les articles 7 et 8
de la loi n°2003/008 du 10juillet 2003 punissent les dirigeants qui
présentent des faux bilans ou procèdent à la distribution
des dividendes fictifs d'un emprisonnement de (1) an à (5) cinq ans et
d'une amende de 1.000.000 à 10.000.000 frs.
* 179 Il semble se dessiner
à travers le contentieux que l'honneur relèverait des
règles de la dignité individuelle, telle la fierté,
l'estime, le respect, alors que la probité toucherait aux règles
de la morale comme l'intégrité.
* 180 Toutes infractions
aux lois, règlements et règles professionnelles, toute
négligence grave, tout fait contraire à la probité ou
à l'honneur commis par un commissaire aux comptes constituent une faute
disciplinaire passible d'une peine disciplinaire, Art 88 du décret du 12
août 1969 précité.
* 181 La suspension
d'activité peut s'entendre de la cessation temporaire
d'activité.
* 182 CHAPUT
(Y.), Le commissaire aux comptes, partenaire...op.cit, p.118.
* 183 Art 701 AUSCGIE.
* 184 Art 694 à 700
AUSCGIE
* 185 GUYON
(Y.), op.cit, n°364, p.395.
* 186 MERCADAL (B.),
JANIN (P.), Droit des affaires, Mémento
Sociétés commerciales, Paris, n°2234, 2004.
* 187 Il s'agit d'une vaste
opération d'assainissement des entreprises publiques et parapubliques
lancée en avril 2006 par le gouvernement camerounais pour traquer les
détourneurs de deniers publics. Plusieurs commissaires aux comptes
furent arrêtés et incarcérés pendant cette campagne.
Certaines sources parlaient de huit commissaires aux comptes détenus
dans les geôles ; Voir, MURE (C.G.), le Messager,
n°2108, du mardi 18 avril 2006.
* 188 GARAUD
(E.), Jurisclasseur commercial, Commissaires aux comptes,
2002, n°1, p.3.
* 189 MERLE
(P.), op.cit, n°503, p.580.
* 190 Certains dirigeants
sociaux en raison de leur grande surface financière attendront la veille
des élections des commissaires par le conseil d'administration ou par
l'assemblée pour organiser une manifestation spéciale en leur
honneur avec pour seule finalité de leur détourner d'un choix
objectif.
* 191 GUYON (Y.),
op.cit, n°372, p.403; ONANA ETOUNDI (F.), La
responsabilité du commissaire aux comptes dans la gestion de
l'entreprise, 2007, p.3.
* 192Art L.225-228 al
1er du nouveau Code de commerce.
* 193 GUYON
(Y.), op.cit, n°363, p.394; VIANDIER (A.), COZIAN (M.),
DEBOISSY (F.), Droit des sociétés, Paris, Litec,
13eéd, n°962, p.322.
* 194 VIANDIER (A.),
COZIAN (M.), DEBOISSY (F.), op.cit, n°964, p.323.
* 195 GUYON
(Y.), op.cit, n°372, p.404; MERLE (P.), op.cit,
n°509, p.587.
* 196 Les juges
n'interviendront qu'en cas de litiges. Ces litiges viseront toutes les
hypothèses dans lesquelles le commissaire aux comptes n'a pas
reçu ses honoraires tels que fixés par le barème. Ils
devront être portés devant le président de la juridiction
du lieu de situation de la société.
* 197 Le dictionnaire
universel définit la résistance comme le fait de ne pas
céder à la volonté de quelqu'un.
* 198 GUYON
(Y.), Droit des affaires, droit commercial...op.cit, n°359,
p.398.
* 199 VIDAL (D.),
op.cit, n°234, p. 195.
* 200 Un groupe de
société est, dit l'article 173 AUSCGIE « l'ensemble
formé par des sociétés unies entre elles par des liens
divers qui permettent à l'une d'elles de contrôler les
autres. »
* 201 GUYON (Y.),
Droit des affaires, droit commercial...op.cit, n°371, p.402.
* 202 CNCC. Recommandation
particulière, délibération, 11octobre 1973.
* 203 Loi n°85 -11du 03
janvier 1985 relative aux comptes consolidés de certaines
sociétés commerciales et entreprises publiques
* 204 GUYON (Y.),
Droit des affaires, droit commercial général...op.cit.
n°369, p.399.
* 205 Art 722 al 1 AUSCGIE.
* 206 Art 10 AUC.
* 207 Loi n°83-353 du 30
avril 1983 relative à la mise en harmonie des obligations comptables des
commerçants et de certaines sociétés avec la
quatrième directive adoptée par le conseil des communautés
européennes le 28 juillet 1978.
* 208 Directive n°78/660
du 25 juillet 1978 sur les comptes annuels européens.
* 209 MONEGER (J.),
GRANIER (T.), op.cit. n°388, p.45.
* 210 L'image fidèle
suppose que les comptes reflètent la situation économique de la
société et donner une explication des principes comptables et des
règles d'évaluation retenues, les comptes doivent permettre de
porter un jugement éclairé sur la situation et les
résultats de l'entreprise, afin de faciliter les prises de
décision. A la limite, la recherche de l'image fidèle peut
conduire à l'abandon d'un principe comptable bien établi.
* 211 PITROM
(M.) PHAM-BA (J.P.), « L'image fidèle de
l'entreprise, du principe à la réalité », JCP,
2003, Commentaires, n°105, p.117.
* 212 SIMONE
(D.). La fiabilité des comptes sociaux, réflexion sur la
notion de fidélité, G.P.1981, 1, document
.55 : « cette image qu'on exige qu'elle soit fidèle,
mais fidèle à quoi ? La fidélité ne
s'apprécie pas dans l'absolu.
* 213 VIDAL (D.),
op.cit, n°96, p.91.
* 214 PITROM (M.),
PHAM-BA (J.P.), op.cit, p.118.
* 215 DIDIER (P.),
op.cit, P.197 ; Dans le même sens, voir CHAPUT
(Y.), op.cit, p.43.
* 216 DU PONTAVICE
(E.), cité par CHAPUT (Y.), op.cit, p.79.
* 217 KEM CHEKEM
(B.M). Entreprises en difficultés et droits des salariés
dans la zone OHADA, mémoire de DEA, Université de Dschang, mars
2004, p.50.
* 218 Art 153 à 157
AUSCGIE.
* 219 VIDAL
(D.), op.cit, n°434, p.330.
* 220 GUYON
(Y.), Droit des affaires, entreprises en difficultés,
redressement judiciaire, faillite,Tome2, 6eéd, Economica,
1997, n°1051,p.55.
* 221 SAINT-ALARY
HOUIN (C.), Droit des entreprises en difficultés,
2e éd, Montchrestien, 1996, n°131, p.78.
* 222 C'est-à-dire
lorsque les recettes normalement prévisibles ne permettront plus de
régler les dettes qui vont venir à échéance dans
un avenir relativement proche.
* 223 Le commissaire aux
comptes doit considérer l'ensemble de la gestion, et non la survenance
d'un seul fait négatif qui pourrait être contrebalancé par
d'autres facteurs favorables. C'est donc bien la cessation des paiements qui
doit poindre pour justifier le déclenchement de l'alerte, ou encore, un
ensemble convergent de faits significatifs conduisant à une rupture de
l'équilibre des flux financiers.
* 224 NGUIHE KANTE
(P.), « Réflexions sur la notion d'entreprise en
difficulté dans l'acte uniforme portant organisation des
procédures d'apurement du passif OHADA ». Anales de la
FSJP, Tome 5, P.U.A, 2001, n°26, p.97.
* 225 GUYON (Y.),
Droit des affaires, droit commercial... op.cit. n°382, p.413.
* 226 MERLE (P.),
op.cit, n°510, p.587.
* 227 En France, face à
l'extension galopante des missions du commissaire aux comptes, le rapport
VIENOT I dans le cadre des reformes sur le gouvernement des entreprises avait
souhaité que se développe dans certaines sociétés
anonymes cotées « des comités d audit ».
ce souhait avait retenu l'attention du législateur français qu,i
dans la loi de sécurité financière de 2003 a donc pris le
soin de le créer.
* 228 GUYON (Y.),
Droit des affaires, droit commercial général...op.cit,
n°381.p.412.
* 229 LE CANNU
(P.), « Légitimité du pouvoir et
efficacité du contrôle dans les sociétés par
actions », Bull. Joly, 1995. n°23, p.644.
* 230 En plus des obligations
citées haut, le comité reste tenue au secret professionnel comme
le commissaire aux comptes, il ne doit non plus s'immiscer dans la gestion.
* 231 Art 228 de la loi
française du 24 juillet 1966.
* 232
Interférence : en physique est un phénomène
résultant de deux superposition de deux mouvements vibratoires. Par
extension, interférer signifie se mêler, se superposer en
créant des renforcements ou des oppositions. Critiquer ouvertement
l'administration et la direction, tout en restant étranger aux prises de
décisions, c'est s'immiscer dans la conduite des affaires sociales par
interférence.
* 233 VIDAL (D.),
« L'intervention du commissaire aux comptes dans la gestion
de l'entreprise sociale qu'il contrôle », les
Mélanges en l'honneur de ADRIENNE (H.), 2000,
p.328.
* 234 VIDAL
(D.), le commissaire aux comptes dans la société
anonyme...op.cit, n°192, p.165.
* 235 NJOYA KAMGA
(B.). Les interventions des tiers dans la gestion des
sociétés commerciales. Mémoire de DEA, Université
de Dschang, 2000, p.9.
* 236 Il s'agit là
des fautes dont seule des investigations profondes permettraient de
détecter. C'est notamment le cas des délits de
présentation de faux bilans, les informations mensongères et les
détournements de fonds ou l'abus des biens sociaux
* 237 VIDAL
(D.), Le commissaire aux comptes dans la société
anonyme...op.cit, n°204, p.171.
* 238 VIDAL
(D.), Le commissaire aux comptes dans la société
anonyme...op.cit, n° 170, p.152.
* 239 CARBONNIER (J.),
Flexible Droit. Pour une sociologie du droit sans rigueur, LGDJ,
8ème éd, 1995, p.315.
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