D.3. FACTEURS INFUENCANT L'UTILISATION DES PRESERVATIFS
CHEZ LES MINEURES PROSTITUEES
Dans notre échantillon, 59% des enquêtées
affirment faire des rapports sexuels avec utilisation de préservatif
contre 41 % qui disent ne pas l'utiliser, il revient de préciser que
cette utilisation n'est pas exclusivement féminine dans notre cas.
Saida Bennai-Bouraï et al ont trouvé dans leur
enquête réalisée auprès de 232 lycéens de
Caen ,un taux d'utilisation de préservatif de 66 % lors
de tous les rapports [19].Nous pensons que cette légère
différence serait justifiée par le niveau d'instruction
élevé de ces lycéens par rapport à nos adolescentes
mineures prostituées, et aussi le contexte dans lequel s'exerce l'acte
sexuel est totalement différent . Blaise Songo
and all quant à lui a remarqué une proportion
d'environ 22.5% chez les hommes Mossi du district sanitaire rural de Kaya au
Burkina Faso [20].Cette étude ayant était fait en milieu rural,
est de ce fait plus rapproché de la notre quoique le contexte ne soit
pas totalement le même. En effet Songo a fait son enquête sur toute
la population en âge de procréer alors que nous, nous avons
ciblé une population spécifique des mineures prostituées.
Régina GÖRGEN and all ont constaté que
seulement 29% de leur échantillon constitué des jeunes
célibataires en Guinée urbaine, utilisaient le préservatif
[21].
Dans l'ensemble, cette usage de préservatif se justifie
par sa grande particularité liée à la double
protection :- la protection contre les maladies sexuellement transmissible
et VIH/SIDA et -la prévention contre la survenue des grossesses [23].
Les grossesses sont perçues comme dangereuses pour l'avenir scolaire
des adolescentes qui étudient encore, pour la survie des mineures
prostituées car elles limitent la capacité fonctionnelle de
celles-ci avec réduction sensible de revenu et augmentation des charges
familiales suite à l'agrandissement de la taille familiale
déjà nombreuse et mal au point.
Nous remarquons les raisons de non utilisation de
préservatifs qui sont avancées par nos sujets d'enquête
ce : l'insatisfaction sexuelle de la fille et l'ignorance de l'importance
du préservatifs sont les principales causes de non utilisation de
préservatifs avec 36% chacune. Le refus de l'homme revient en
dernière position avec 28 %. Dans l'étude organisée en
Guinée-Conakry chez les prostituées on a constaté que
l'utilisation du préservatif engendre par ailleurs un
mécontentement des clients qui peut provoquer une perte de revenus
totale ou partielle : «C'est un grand problème
(faire utiliser la capote aux hommes). La majorité ne veut
pas utiliser. Ils augmentent le prix pour ne pas utiliser. A par cela
nombreuses croyances plaidaient en de faveur de cette utilisation notamment
celle selon laquelle le lubrifiant du préservatif serait responsable de
certains symptômes que les femmes perçoivent comme étant
potentiellement dangereux à long terme [16].
Aloys HAKIZIMANA dans son livre « Naissance au
Burundi entre traduction et planification » a écrit qu'une
panoplie de représentations négatives des contraceptifs modernes
comme celle de condom obstacle au plaisir sexuel, n'est pas fiable, peut se
perdre dans le vagin et entraîner la mort de la femme [21].
Il ressort de notre étude que les filles plus
âgées (15 à 17ans) utilisent presque deux fois plus le
préservatif par rapport aux plus jeunes (moins de 15 ans) cette
différence n'est pas statistiquement significative. Ce taux
d'utilisation est plus important quand le premier rapport sexuel a eu lieu dans
la tranche d'âge de 14à16 ans et moins important quand
l'âge est = à 12 ans. Cela s'expliquerait par l'accès
à l'information sur l'utilisation et les avantages de
préservatifs plus élevé chez les adolescentes
âgées suites à l'expérience, l'instruction et la
multitude des sources d'informations auxquelles elles ont accès par
rapport aux plus jeunes . Il ne serait pas exclus que l'extrême
précocité des premiers rapports sexuels soit liée aux
conditions de vie familiale extrêmement difficile avec tous ses
corolaires en terme de capacité ou pouvoir de négocier
l'utilisation du préservatif, bas niveau d'instruction, climat familial
détérioré, etc.
La scolarisation n'influe pas sensiblement sur l'usage de
préservatif quoi que nous ayons un taux élevé chez les
filles scolarisées (60%) par rapport aux non scolarisées (41.1%)
cette situation pourrait être liée à la présence de
peu d'effectifs des mineures prostituées scolarisées.
L'utilisation du préservatif varie de manière
significative en fonction du niveau d'instruction avec le taux d'utilisation le
plus élevé aux deux extrêmes c'est-à-dire chez les
illettrées et les diplômées. Nous pensons que chez les
illettrées, elle serait liée aux enjeux futurs en effet il est
fort possible qu'elles aient réalisé la précarité
extrême des conditions dans lesquelles elles vivent avec leur famille. La
venue d'un enfant peut compliquer dangereusement leur vie et celle de leur
famille. L'apparition des maladies IST/VIH peut aussi diminuer leur revenu
déjà insuffisant pour survivre et, en plus, comme dans
l'étude Guinéenne sur la prostitution, les aspirations futures
comme le changement de statut (le mariage) amènent les
prostituées à faire plus attention à leur état de
santé et à la préserver [16]. Nous pensons
également que les perspectives d'avenir limitées pour les
illettrées pourraient être un des éléments
déclenchant le reflexe de conservation de l'unique outil de
production : leur corps.
Pour les diplômées, il est évident que le
niveau d'instruction avec diversification des moyens et opportunités
d'accès à l'information en rapport avec le préservatif est
le facteur prédominant.
Les partenaires des filles de notre échantillon qui
exercent la profession d'artisan, fonctionnaire des ONG, Agent de bar,
enseignant, cinéaste, motard et chômeur utilisent à 100% le
préservatif. Les professions avec le plus faible taux d'utilisation des
préservatifs sont toutes les autres catégories et les
élèves. Nous pensons que ces petites différences sont
liées au hasard et qu'il n'ya pas de professions exercées par les
hommes qui les prédisposent à ne pas utiliser le
préservatif.
La résidence des filles enquêtées non
plus, n'intervient pas dans l'utilisation de préservatif quoique sous
d'autres cieux il a été prouvé que le milieu influe sur
l'usage des contraceptifs notamment au point que les gens qui habitent en
milieu urbain ont le taux le plus élevé d'utilisation des
méthodes de planification que ceux vivant en milieu rural [22]. Notre
étude a été effectuée en milieu rural et
malheureusement nous n'avons pas pu avoir accès aux résultats
d'une aucune étude ayant abordé cet aspect en milieu urbain,
c'est une brèche ou opportunité pour les autres chercheurs qui
viendront après nous.
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