Introduction
Parmi les micro-organismes inertes, il y a ceux qui
participent à l'élaboration d'aliments fermentés (yaourt,
saucisson, fromage, etc.) et ceux qui, s'ils peuvent se multiplier dans
l'aliment, l'altèrent c'est-à-dire lui confèrent des
goûts, des odeurs ou des aspects inacceptables. Quelques espèces
pathogènes sont responsables des troubles divers, allant de
problèmes digestifs bénins à des maladies graves
provoquant jusqu'à 30 % de décès ou des séquelles
invalidantes (AFSSA, 2006).
La tendance actuelle des consommateurs à rechercher une
alimentation plus naturelle, a entraîné un regain
d'intérêt des scientifiques pour ces H.E. Cependant, c'est
seulement récemment que beaucoup d'attention a été
donnée à leur application potentielle comme conservateurs dans le
domaine agroalimentaire (PALMER, 1998).
Les H.E. et leurs composants, actuellement employés
comme arômes alimentaires, pourraient donc servir d'agents de
conservation alimentaire, d'autant plus qu'ils sont pour la plupart
classés "généralement reconnus comme sains:
Generally Recognized As Safe (GRAS) " ou approuvés comme additifs
alimentaires par la Food and Drug Administration Américaine (FDA). Ils
n'ont, par conséquent, pas besoin d'autorisation d'emploi dans les
aliments, mais des études préalables sont nécessaires pour
mieux cerner leur activité antimicrobienne (CAILLET et LACROIX,
2007).
L'évaluation des propriétés
antimicrobiennes des H.E. demeure très importante pour les exploiter
dans l'industrie comme étant des conservateurs naturels (GUESMI et
BOUDABOUS, 2006).
1- Systèmes de sécurité sanitaire
des aliments en Algérie
La disponibilité d'aliments sains et nutritifs est l'un
des droits fondamentaux de la personne et un facteur essentiel pour un
état de santé adéquat. Le problème de la
consommation d'aliments contaminés et de ses effets
préjudiciables à la santé humaine, n'a pas
été étudié de façon suffisamment approfondie
en Algérie. Le gouvernement devrait toutefois prendre les mesures
nécessaires pour garantir à sa population une alimentation saine
et en soutenir ainsi la santé et le développement
économique.
À l'échelon mondial, la sécurité
sanitaire des aliments est une question de santé publique de plus en
plus importante, centrée sur la participation des consommateurs et de
leurs associations aux processus décisionnels. Les maladies d'origine
alimentaire affectent lourdement la santé des gens et leur
bien-être et qu'elles ont des conséquences économiques non
seulement pour les individus, mais aussi pour les communautés et les
pays.
Les données de la surveillance des maladies devraient
permettre d'estimer le pourcentage des cas ayant une origine alimentaire et
plus spécifiquement, le nombre de ceux qui peuvent être
attribués à des aliments spécifiques. Cette information
est nécessaire pour la gestion des risques pour la
sécurité sanitaire des aliments, étant donné qu'il
existe également d'autres voies de transmission pour la plupart des
pathogènes que l'on trouve dans les aliments, par exemple à
travers l'eau, le contact avec les animaux ou l'environnement. Les
gestionnaires des
risques peuvent également cibler les contrôles avec
davantage de précision lorsque le lien spécifique entre le
pathogène et l'aliment peut être établi.
En Algérie, les toxi-infections alimentaires
accompagnées de symptômes tels que la diarrhée et parfois
la fièvre, sont monnaie courante et généralement
considérées comme sans gravité et spontanément
résolutives. Les médicaments, lorsqu'ils sont utilisés,
sont achetés au comptoir et les cas de maladie ne sont pas
déclarés.
Certaines coutumes régionales ou locales, comme la
consommation des viandes hachées (hamburgers, merguez, boulettes, etc.),
et certaines techniques de préparation spécifiques, telles que
les conditions de hachage et de conservation multiplient les risques de
contamination microbiologique et donc la diffusion des maladies d'origine
alimentaire.
De nombreux facteurs contribuent à la forte incidence
des maladies transmises par les aliments en Algérie. Des systèmes
de bonnes pratiques de fabrication (BPF) et d'assurance qualité comme
l'Analyse des Dangers-Points Critiques pour leur Maîtrise (ADPCM) , ont
été introduits dans le secteur de la production alimentaire et de
la restauration, mais leur mise en application est généralement
limitée voire même inexistante.
La vente de viandes fraîches exposées en
carcasses entières et parfois coupées en quartiers sur la voie
publique dans différentes villes d'Algérie à des
températures abusives et parfois mêmes des viandes issues d'un
abattage clandestin constitue une importante source de nourriture pour une
grande partie de la population algérienne et les vendeurs n'ont souvent
aucune formation spécifique aux risques qui peuvent découler de
ces pratiques.
L'impact des systèmes de sécurité
sanitaire des aliments sur la santé humaine en Algérie est
difficile à déterminer. Il n'existe pas d'études
comparatives; aucune vue d'ensemble des agents pathogènes, ni de
l'incidence des maladies d'origine alimentaire n'est disponible; et en
général les tendances de l'incidence de ces maladies ne sont pas
encore connues du fait du démarrage relativement récent de la
collecte de données. L'Algérie doit poursuivre ses efforts pour
que la sécurité sanitaire des aliments soit solidement inscrite
dans ses programmes nationaux de santé publique. La mise en place de
systèmes intégrés de contrôle des aliments et de
surveillance des maladies d'origine alimentaire, requiert une collaboration et
une coordination efficaces avec l'ensemble des parties prenantes dans les
secteurs de la santé, de l'agriculture et du commerce. Le renfort des
capacités scientifiques et techniques pour prévenir,
maîtriser et gérer les risques reste indispensable. La charge des
maladies d'origine alimentaire est encore très lourde dans la
région et des efforts doivent être déployés afin de
réduire l'impact de ces affections sur la santé humaine.
Les Algériens consomment de plus en plus la viande et
sous différentes formes. Sa qualité est d'une importance vitale
sur un marché, mais les conditions hygiéniques de sa
préparation et manipulation ainsi que celles de sa conservation sont peu
respectées.
L'arrivée de la saison estivale est
généralement à l'origine de plusieurs cas d'intoxications
alimentaires dues essentiellement à la consommation de produits
avariés, devenus impropres
pour le non-respect de la chaîne de froid ou défaut
d'hygiène notamment quand il s'agit de restauration publique.
Selon le bilan établi par la direction de la
Santé (DSP) et la direction du commerce, la capitale de l'Est
(Constantine) a enregistré durant cette année 4 115 interventions
assorties de 43 fermetures de différents commerces. La nature des
contraventions a touché beaucoup plus les viandes avec près de 9
tonnes saisies.
2- Quelques évènements récents sur
les intoxications alimentaires en Algérie
Au cours du premier semestre 2007, 1400 fermetures des
établissements alimentaires pour non-respect des conditions
d'hygiène sur des produits alimentaires et mettant en danger la
santé des consommateurs ont été enregistrées
(Ministère du Commerce: Alger). L'Algérie enregistre des cas
d'intoxications alimentaires de plus en plus fréquents et coûteux.
Près de 6000 cas ont été enregistrés par exemple en
2008 à l'échelle nationale et le risque est plus que jamais
présent avec l'arrivée de la saison estivale. Il est utile de
signaler que près de 40% des cas d'intoxication sont dus à
l'ingestion de viandes et dérivés impropres à la
consommation. Cette pathologie s'est développée à grands
pas en raison de la prolifération de la restauration collective, de la
libre circulation des denrées alimentaires et aussi du
développement de l'industrie agroalimentaire celle-ci s'est
aggravée à cause de l'absence et du non-suivi d'impératifs
d'hygiène, rupture de la chaîne de froid et de
sécurité alimentaire.
3- Les applications alimentaires des H.E.
Les études qui ont été
réalisées jusqu'à maintenant, montrent que les H.E.
peuvent être appliquées à tous les aliments. Ainsi, les
H.E. d'origan, de thym, de cannelle ou de coriandre sont efficaces pour les
viandes, les volailles, les charcuteries et les légumes; l' H.E. de
menthe pour les produits frais (salades, yaourts...); les H.E. à base de
cavarcrol ou de citral pour les poissons; les H.E. de thym, de noix de muscade
ou de gingembre pour les céréales (plus particulièrement
celles riches en carvacrol pour le riz); et les H.E. à base de carvacrol
ou de cinnamaldéhyde pour les fruits (CAILLET et LACROIX, 2007).
Les H.E. sont aussi utilisées pour apporter de la saveur
et un arôme raffiné au café, au thé, aux vins et aux
liqueurs distillées (MICROSOFT ENCARTA , 2008).
Les études de CAILLET et LACROIX (2007) ont
montré que l'incorporation d' H.E. dans la viande hachée du boeuf
a contribué au maintien de la qualité microbiologique et à
la réduction de l'oxydation des gras au-delà de sa durée
normale d'entreposage. Ils ont aussi démontré que l'utilisation
des H.E. pouvait augmenter la sensibilité des bactéries à
différents procédés de conservation des aliments
(chauffage, pasteurisation, atmosphère modifiée). Selon la
bactérie et le procédé utilisé, la sensibilisation
augmente de 2 à 10 fois. Par exemple, l'H.E. mélangée
à des carottes hachées, emballées sous air ou sous
atmosphère modifiée (AM ou MAP: Modified Atmospheres Packaging en
anglais) permet de multiplier par trois la sensibilité de Listeria
sp., de même que pour de la viande hachée emballée
sous les mêmes
conditions, une augmentation très significative de la
sensibilité d'E. coli (2.5 fois) et de Salmonelle (4.5 fois)
est constatée en présence d' H.E. Aussi, l'H.E. combinée
à un chauffage doux (55 °C pendant 1 minute) a permis d'inhiber
totalement Salmonelle, alors qu'en absence d'huile, un chauffage de plus d'une
heure était nécessaire pour arriver au même
résultat. Cependant, le seuil d'efficacité des huiles les plus
efficaces étant très bas, souvent inférieur à 0.1%,
leur ajout en très faibles quantités n'altère pas les
qualités organoleptiques de l'aliment.
D'après BOUSBIA (2005) des investigations ont
été effectuées pour évaluer l'efficacité de
quatre H.E. de plantes: Laurier, clou de girofle, cannelle et thym en tant que
conservateurs normaux. L'effet d'H.E. aux concentrations de 0,1 de 0,5 et de 1
% a été étudié en fromage à pâte molle
à faible teneur en matière grasse et à matière
grasse naturelle contre Listeria monocytogenes et Salmonella
enteritidis à 4°C et à 10°C respectivement, sur
une période de 14 jours. Ils ont conclu que les H.E. des plantes
choisies agissent comme inhibiteurs potentiels contre L. monocytogenes
et S. enteritidis dans ce produit alimentaire (PALMER et al.,
2001).
Les traitements du pâté tout
préparé de foie de porc avec le romarin retardent la croissance
de Listeria monocytogenes (BOUSBIA, 2005). Aeromonas hydrophila
et Listeria monocytogenes ont été inhibées
sur la viande cuite (poitrine de poulet) par des extraits d'eugénol et
de piment.
4- Facteurs influencent les propriétés
antimicrobiennes des H.E. dans
les aliments
D'après CAILLET et LACROIX (2007), certains facteurs
comme la température, les conditions de stockage, le pH ou la
composition de l'aliment, peuvent avoir une influence sur l'action des H.E. Il
est établi que l'efficacité de l'huile augmente avec la
diminution du pH de l'aliment, de la température de stockage ou encore
de la quantité d'oxygène dans l'emballage. Cela est d'autant plus
intéressant que les quantités d'huiles nécessaires pour le
contrôle de la croissance bactérienne dans les aliments
conservés à basse température pourraient être
réduites. Il est également prouvé qu'une même huile
sera plus efficace dans un aliment pauvre en gras et/ou en protéines.
Les fortes teneurs en eau et en sels d'un aliment vont aussi favoriser l'action
de l'H.E., alors qu'une structure gélatineuse va au contraire la
limiter.
L'incorporation des H.E. directement dans les aliments ou
l'application par vaporisation en surface de l'aliment (pièce de viande,
charcuterie, poulet, fruits et légumes entiers...) contribue à
contrôler la flore microbienne et à préserver l'aliment des
phénomènes d'oxydation (CAILLET et LACROIX, 2007).
5- Bactéries responsables de toxi-infections
alimentaires 5.1- Staphylococcus aureus
Nom commun: Staphylocoque doré (staph.=
grappe de raisin, aureus= doré). 5.1.1- Caractères
bactériologiques
Le genre Staphylococcus appartient à la famille des
Micrococcaceae et se compose de 34 espèces et 13
sous-espèces. Staphylococcus aureus en est l'espèce la
plus fréquente et la plus connue (LARPENT, 1997).
C'est un coque à Gram+ de 0,5 à
1 um de diamètre, non sporulé, immobile, aéro-anaerobie
facultatif, catalase+, fermentant le glucose, T° optimale: 37, pH optimum: 6-7,
aw optimale > 0,99. C'est une bactérie ubiquitaire,
présente dans tous les milieux naturels (air, poussière, sol,
eau, égouts, vêtements) mais également chez les animaux et
chez les hommes. Contrairement à la bactérie S. aureus,
ces entérotoxines sont très résistantes à la
chaleur (30 mn/120°C), aux variations de pH (entre 4 - 11) et aux enzymes
protéolytiques (papaïnes, trypsine). Ces caractéristiques
permettent aux toxines ingérées d'atteindre le tube digestif sans
modification de leur toxicité. Chez l'homme, les symptômes se
traduisent soit par des syndromes gastrointestinaux de types crampes
abdominales, vomissements, nausées, diarrhées. Dans le cadre des
intoxications alimentaires staphylococciques, les symptômes apparaissent
très rapidement après l'ingestion de l'aliment contaminé
(2 - 6 h) et les douleurs peuvent être très violentes, mais les
personnes récupèrent en 24 heures. Les aliments dits à
risque, c'est-à-dire souvent impliqués dans ces cas d'infections
à entérotoxine de staphylocoque, sont les produits
laitiers, les salades, les préparations à base de viande,
volailles et poissons, les oeufs et ovoproduits (DELARRAS, 2007).
5.1.2- Habitat et pouvoir pathogène
C'est le plus régulièrement pathogène,
d'origine humaine, animale (volaille, bovin, ovin, caprin...), environnementale
ou non spécifique (DELARRAS, 2007). C'est une bactérie
présente chez les humains, lesquels sont à 95% responsables des
contaminations alimentaires. 50% des humains sont porteurs de ce germe
(cavité nasale), ceci même chez un individu en santé. On
peut le retrouver en particulier dans les préparations alimentaires
à cause d'un manque d'hygiène du personnel (porteur sain ou
blessures). Il se retrouve facilement dans les aliments (LARPENT, 1997).
La présence de S. aureus dans les aliments
constitue un risque pour la santé humaine parce que certaines souches
sont capables de produire des entérotoxines (protéines
globulaires de poids moléculaire 25000-28000 Dalton) dont l'ingestion
provoque une intoxication (AFSSA, 2003). Cette bactérie peut provoquer
la staphylococcitose rarement mortelle chez l'homme (DELARRAS,
2007).
Les intoxications à S.aureus (la plus
fréquente) sont plus répandues que celles des Clostridium
botulinum. L'entérotoxine est produite dans chacune des phases de
croissance de la bactérie. Elle présente une grande
thermorésistence malgré que S. aureus est
détruite par un traitement de pasteurisation. Même les traitements
Ultra Hight Temperature (U.H.T.) (143°C/10½) n'activent pas les toxines.
Généralement, les symptômes indicateurs d'une intoxication
par S. aureus sont les suivantes: Période d'incubation de
quelques heures; les
entérotoxines agissent au niveau des nerfs du tube
digestif qui stimulent le centre des vomissements; douleurs abdominales;
diarrhées; crampes. On parle souvent de gastroentérites dues aux
Staphylococcies. Dans certains cas graves, l'individu infecté peut
manifester du sang dans les selles. Souvent, la maladie dure au maximum 2 jours
et la récupération est complète sans cas graves de
mortalité (AFSSA, 2006).
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