G. Le suivi-évaluation
Le PCET de Voiron étant en phase de mise en oeuvre,
c'est le seul territoire de notre échantillon qui dispose d'un
système de suivi-évaluation. Chaque fiche action dispose de son
indicateur, lequel est actualisé une fois par an. Concernant le Conseil
général d'Isère, leur système de
suivi-évaluation se limite pour le moment à un suivi de projet.
Cependant une réflexion est menée pour disposer d'un
système d'évaluation performant.
« Aujourd'hui la personne qui est innovante dans
cette conception des choses, c'est mon collègue qui passe avant moi sur
l'agenda 21, et qui, lui, cherche à développer un certains
nombres d'indicateurs d'effets. Ça c'est le plus important,
c'est-à-dire en quoi l'action menée contribue à
l'évolution sociétale ? C'est pas évident, mais bon, c'est
ce qu'il y a de plus pertinent pour une évaluation. Parce que savoir
qu'on a fait vraiment, qu'on a fait bien,
30 Frédéric Jacques, Chargé de mission Plan
Climat de la commune de Voiron, entretien réalisé le lundi
1er août, Voiron [38 min. 00 secondes de l'enregistrement]
qu'on a fait pas cher, c'est une chose, mais quels effets
vraiment ça a autour ? Ça, c'est aussi très important.
»31
Le PAV rencontrant des difficultés pour lancer ses
actions, l'élaboration du système de suiviévaluation est
laborieuse. Selon A. Micoud32, l'équipe du Pays n'est pas au
point sur les questions de suivi-évaluation des actions
climat-énergie et c'est une des raisons pour laquelle elle a
souhaité participer au projet « ClimactRegions » lancé
par l'agence RhônalpénergiesEnvironnement. L'organisation compte
notamment à travers cette initiative rendre évaluable le projet
de territoire par l'attribution de résultats attendus et des indicateurs
à la stratégie et aux projets là où ils n'existent
pas, et les vérifier là où ils sont déjà
définis. La participation à ce projet permettra de diffuser les
expériences du Pays et également de renforcer les
compétences de l'équipe pour le suivi-évaluation de la
démarche climat.
Le suivi-évaluation est un exercice nécessaire
afin d'adapter en permanence l'action en fonction de l'environnement. La
transversalité induite par les questions de développement durable
et la complexité du vivant accroissent la difficulté de
l'exercice. Les questions climatiques ont la particularité d'être
mondiales. D'ailleurs les connaissances sur lesquelles se basent l'ensemble des
politiques climat, même au plus petit échelon (commune), sont
pensées à l'échelle du globe. Nous savons qu'il est
crucial de diminuer l'impact des activités anthropiques sur
l'environnement, nous savons également que ce changement étant
inéluctable, il faut que nous nous y préparions en nous adaptant
au mieux à ses effets. Chaque geste est nécessaire et l'ensemble
des habitants de la planète doit s'engager vers cette transition. C'est
précisement ce phénomène qui rend l'exercice impossible.
Comment peut-on réellement isoler les effets d'une action ? Afin de
contourner la difficulté, les indicateurs devront représenter une
réalité construite, une sorte de susbstitut du réel. Par
exemple, un nombre de kilomètres parcourus par une moto correspondra
à un étalon d'émissions de GES. Même si les
émission réelles ne correspondent pas aux émissions de
l'étalon. Ainsi, l'ensemble des indicateurs d'effets ou d'impacts repose
sur une modélisation. Les personnes
31 Xavier Favrolt, Chargé de mission Plan Climat
d'Isère, entretien réalisé le mardi 2 août, Conseil
général d'Isère [23 min. 53 secondes de
l'enregistrement]
32 Anne Micoud, Directrice du Pays d'Ardèche Verte,
entretien téléphonique réalisé le mercredi 3
aoüt
en charge de mettre en place le système de
suivi-évaluation devront être attentivent à ne pas
évaluer uniquement les moyens mais également les
finalités.
Les chargés de missions étant seuls,
l'actualisation des données prend du temps. M. F.Jacques nous dit que
pour son cas, l'actualisation des données est facilitée du fait
qu'il travaille dans une commune. La taille de l'organisation rend possible le
suivi dans des délais raisonnables. Cependant, dans tous les territoires
interrogés, Voiron y compris, on compte beaucoup sur la participation
des différents services et directions. Sans quoi non seulement
l'évaluation sera difficile mais le portage par le chargé de
mission uniquement ne favorisera pas l'intégration d'action climat dans
chaque domaine.
« Moi aujourd'hui, parce que ça fait pas mal
d'années que je travaille dessus.... De toute façon, il n'y a pas
eu de renforcement d'équipe depuis que je suis là, ça fait
au moins 7 ans [...] je ne compte plus là-dessus pour développer
les projets. Je compte plus sur l'implication des directions et des personnes
dans les directions pour relayer le message et s'approprier un certain nombre
de projet, que dans le renforcement d'équipe. C'est notre
stratégie, mais comme on dit, ça prend plus de temps que d'avoir
quelqu'un sous ses ordres et de lui dire :
« tu fais ci » et « tu vas faire ça
». Ça demande du travail transversal, de la conviction,
voilàça demande beaucoup de choses. C'est très prenant de
temps, effectivement33. »
Le suivi-évaluation des activités climat va donc
dépendre des activités et du nombre d'acteurs
impliqués.
Les territoires de notre échantillon tâtonnent
mais avancent certainement et progressivement dans la mise en place de leur
plan-climat. La sensibilisation et le partage de l'enjeu semblent être
une clé importante pour appliquer la politique. L'exemple du PAV
illustre l'impact que peut avoir une mauvaise définition de la «
vision partagée ».
Une fois les acteurs rassemblés autour d'une cause, se
sont les questions d'ordre organisationnel qui se posent. Comment se
coordonner ? Comment prendre en compte les impératifs climat dans mon
domaine d'activités ? etc. Le Conseil Général
d'Isère est
33 Xavier Favrolt, Chargé de mission Plan Climat
d'Isère, entretien réalisé le mardi 2 août, Conseil
général d'Isère [49 min. 57 secondes de
l'enregistrement]
particulièrement innovant sur ces questions et bien que
le chargé de mission insiste sur le travail d'orfèvre pour
changer les habitudes, la structure s'oriente favorablement dans ce sens,
aidée par son mode de gouvernance34.
En revanche l'articulation horizontale n'est pas encore
évidente, chacun préférant dans cette période de
reconfiguration de l'identité des territoires, se concentrer sur ses
compétences et sur son management en interne avant de développer
ses partenariats et ses modalités d'articulation avec les autres
échelles de gouvernance. La réforme des collectivités
accompagne la transversalité des démarches, notamment en mettant
en place des outils juridiques permettant de formaliser le contour des
partenariats entre acteurs (schéma de mutualisation des services), mais
actuellement les collectivités ont des difficultés à
percevoir quelles formes de coopération elles pourront adopter. Faut-il
qu'elles se contentent d'une prestation de service, qu'elles mettent en place
une mutualisation des services ou qu'elles aillent plus loin en
transférant des compétences au sein d'une entité
supraterritoriale ? Ce transfert va-t-il aboutir à moins de pouvoirs
pour les élus ? Etc. Aujourd'hui le recul n'est pas suffisant. Les
collectivités sont dans une période d'expérimentation et
d'incertitudes fortes, accélérées par les réformes
des collectivités.
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