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La nationalité à  la lumière des législations françaises et maghrébines

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par Mohamed Amine MAAROUFI
Université Hassan 2 - Diplomes des Etudes Universitaires Approfondies 2005
  

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CHAPITRE 2ème : Le contexte externe

L'Etat reste libre de déterminer sa propre politique de nationalité par le biais de sa législation interne, néanmoins, les traités internationaux jouent un rôle loin d'être négligeable. En effet, la liberté de l'Etat se trouve parfois limitée en fait et /ou en droit70 ; en fait par quelques principes de solution qui sans les contraindre, inspirent leurs législations, et en droit par les traités.

Les législations nationales ne sont donc pas uniquement influencées par le contexte interne qui a fait l'objet du chapitre précédent, mais également par le contexte externe sur lequel va porter notre second chapitre.

En Europe par exemple, selon Martin MORIN, "la progression recherchée vers une citoyenneté européenne suppose une préalable clarification de la nationalité des Etats membres. Une difficulté grave peut être soulevée par des européens à l'égard d'une citoyenneté européenne conférée à des français, qui par ailleurs sont marocains, tunisiens ou algériens.

C'est un choix politique qui se profile à un horizon qui n'est pas éloigné. L'avenir de la France est- il européen ou africain ? La politique de l'Etat français depuis la Vème république, a été de privilégier l'Europe sans toutefois se résoudre à un désengagement africain. Cette politique est peut- être sage. Mais elle suppose que des mesures intérieures et extérieures soient prises, en cohérence avec ses buts. Faute de quoi, elle risque de rendre impossible l'unité européenne et l'influence en Afrique. »71 .

Par ailleurs, et sur le plan juridique, certains traités concernant la nationalité, vu leur
caractère souvent bilatéral ont un champ d'application limité dans l'espace, ces
traités ne constitue que le droit d'exception en la matière, il s'agit de ceux relatifs aux

70 DERRUPE (Jean), Droit international privé, 9ème édition, DALLOZ, Paris, 1990. Page 11.

71 MARTIN MORIN (Dominique), «l'Europe et la défense », Sous la direction de DOVILLERS (Trémolet), «immigration et nationalité, quelle réponse ? » D.D.M, Paris, 1990.

cessions de territoire, qui fixent la nationalité des habitants des territoires cédés ou réintégrés après un conflit armé tel est le cas du traité de Versailles de 1919 sur la nationalité des alsaciens et lorrains. Dans ce type de traités, les solutions généralement retenues font changer de nationalité toutes les personnes domiciliées dans le territoire cédé et ayant la nationalité de l'Etat cédant. Lorsqu'une option est accordée, elle est souvent subordonnée à l'émigration.

En droit français, au regard de la nationalité française, le code de la nationalité dans ses articles 11et 12 édicte de telles regles qui s'imposent en l'absence de traités72.

D'une manière générale, les Etats doivent d'une part respecter les stipulations relatives aux droits humains contenus dans les conventions bilatérales et multilatérales, et d'autre part, éviter les conflits positifs et les conflits négatifs de nationalité, ces derniers (les conflits négatifs) ne sont en fait que le résultat du non-respect des droits humains telle qu'ils sont universellement reconnus, notamment l'article 15 de la déclaration universelle des droits de l'Homme selon lequel tout individu a le droit à une nationalité ou les traités internationaux qui sont élaborés sous les auspices d'organisations internationales gouvernementales régionales comme c'est le cas de la Ligue des Etats Arabe, ou le Conseil de l'Europe.

Rappelons dans ce cadre que la littérature du droit international privé préfère étudier les cas d'apatridie comme suite aux conflits positifs de nationalités ou la pluripatridie, c'est ce chemin que nous allons suivre vu que nous consacrerons le premier chapitre à la place qu'occupe le phénomène de la nationalité au sein de la question des droits humains, tandis que la seconde question s'occupera des conflits positifs et négatifs de nationalité.

72 Op. Cit. DERRUPE, page 12

Section I : La nationalité au sein de la question des droits humains

Le phénomène de la nationalité occupe une place assez importante à l'intérieur des droits humains qui puisent leur source de la pratique internationale et des traités internationaux ratifiés par les Etats.

Au Maroc, par exemple, la place qu'occupe le traité dans la hiérarchie des normes reste relativement controversée en ce qui concerne les traités relatifs aux droits humains.

Le préambule de la constitution marocaine telle que révisée en 1992 déclare clairement que «conscient d'inscrire son action dans le cadre des organismes internationaux, ~ le royaume du Maroc souscrit aux principes, droits et obligations découlant des chartes desdits organismes et réaffirme son attachement aux droits de l'Homme tel qu'ils sont universellement reconnus ».

L'article 31 de cette constitution ne clarifie pas le rapport entre la loi et le traité dans l'ordre juridique interne. On peut avancer, jusqu'à présent qu'au moins un certain type de traités ont une autorité supérieure à la loi.

Un discours prononcé par feu S.M le Roi Hassan II le 2 août 1979 avait tranché la question et avait affirmé «la primauté des accords sur le droit interne », ce qui va nous amener à conclure que les traités relatifs aux droits humains, à titre d'exemple, la déclaration universelle des droits de l'Homme, qui donne à chaque individu le droit d'avoir et de changer de nationalité, sont directement applicables et font fonction d'une norme supérieure aux normes internes.

Ainsi, selon un discours prononcé devant S.M le Roi Mohamed VI à l'occasion de l'ouverture de l'année judiciaire 2000 /2001 par Monsieur Drisse DEHAK en sa qualité de président de la cour suprême, ce dernier a déclaré ce qui suit : «.. Au Maroc, certains arrêts de la cour suprême vont dans le sens de la primauté des conventions internationales sur le droit interne.

En outre, en l'état actuel de la jurisprudence, rien ne permet d'affirmer que la cour supreme s'est fixée définitivement sur la supériorité de conventions internationales sur le droit interne, même si les partisans de cette doctrine ne manquent pas d'arguments, parfois pertinent tel que celui le dahir de 1958 portant code de la nationalité,~ainsi que la réaffirmation constitutionnelle73 . . .et l'adhésion du Maroc à la convention de Vienne de 1969 sur les traités, laquelle ne permet nullement aux Etats signataire d'invoquer des dispositions de leurs droits internes pour se soustraire à leurs obligations conventionnelles internationales ~ »74.

Pour le cas de la république française, ce pays a aussi opté pour la supériorité des traités internationaux, dans ce sens, Monsieur Drisse DEHAK ajoute dans le cadre du même discours que «En France, l'article 55 de la constitution prévoit cette règle75 ; néanmoins cette consécration n'a pas empêché la justice française d'écarter la convention internationale des droits de l'enfants au motif que ladite convention ne prévoit pas de droits concrets applicables devant les tribunaux français ... ».

On distingue donc deux courants :

Le premier est libéral, et va vers l'application immédiate et directe de la convention.

Le second reste conservateur et méfiant, et suggere la prudence dans l'application de la convention internationale.

Toutefois en ce qui concerne les conventions relatives aux droits humains, la majorité des Etats va dans le sens de la supériorité de la convention, la constitution marocaine telle que modifiée en 1996 le déclare expressément dans son préambule.

73 Préambule de la constitution.

74 Royaume du Maroc, Cour Suprême, « Discours du premier président de la cour supreme à l'audience solennelle d'ouverture de l'année judiciaire 2001 », in « Bulletin d'information de la cour suprême », n° 9 Rabat, 2001, pp 9- 4.

75 La règle de la primauté de la convention internationale sur le droit interne.

Le droit international public reconnaît à chaque Etat une compétence exclusive pour définir quels sont ses nationaux. Cependant cette liberté se trouve limitée par les traités, notamment en matière de nationalité vu que le problème de la nationalité intéresse la communauté internationale car la nationalité est un critère de démarcation entre nationaux et les étrangers, en vertu de ces accords, l'Etat s'engage à respecter un idéal international en vertu duquel :

Chaque individu a le droit d'avoir une nationalité (A) ;

Les Etats doivent respecter le principe des nationalités en vertu duquel chaque entité sociologique a le droit de se constituer sa propre nationalité (B) ;

Les Etats doivent aussi prévoir l'égalité entre l'homme et la femme de façon à ce que cette dernière ait la possibilité de transmettre sa nationalité à ses enfants au même titre que son concitoyen de sexe masculin(C).

I. A. Le droit d'avoir et de changer de nationalité

Le droit d'avoir une nationalité est la conséquence immédiate de la règle universellement reconnue selon laquelle tout être humain a le droit d'avoir une nationalité, c'est ce qu'on peut dégager des dispositions de l'article 15 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme76 qui est ainsi libellé :

« 1- Tout individu a droit à une nationalité.

2-Nul ne peut être arbitrairement privé de sa nationalité, ni du droit de changer de nationalité ».

Cet article renvoi même à la liberté de choisir et de changer de nationalité qui n'est pas respecté par un très grand nombre de codes de la nationalité, y compris les codes français et marocain, vu que la notion d'allégeance perpétuelle n'étant pas toujours absente des législations étatiques77.

De l'autre coté, on peut s'apercevoir que cet article impose aux Etats d'éviter l'apatridie, ce qui sera approfondi dans le cadre de la seconde partie de ce chapitre, en offrant à l'apatride la possibilité de s'intégrer dans une nouvelle nationalité.

Pour ce qui concerne le droit de choisir et de changer de nationalité, celui- ci est plus respecté que le précédent. La plupart des codes prévoient cette faculté. On peut se demander si ce droit n'est pas assez théorique car la notion d'allégeance perpétuelle n'est pas toujours absente des législations étatiques.

La convention de La Haye de 1905 modifiée en 1930 a ordonné aux Etats de supprimer le caractère perpétuel du lien de la nationalité. En effet, dans la pratique des Etats, lorsqu'un étranger se trouve sur son territoire, il n'est point obligé d'acquérir la nationalité de cet Etat. Cette politique est conforme à l'idéal

76 Royaume du Maroc, Ministère des droits de l'Homme, Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, CDIFDH, Rabat, février 2003.

77 La convention de La Haye de 1905 modifiée en 1930 a ordonné aux Etats de supprimer le caractère perpétuel de l'allégeance.

international ce qui n'est pas le cas de certaines hypotheses; en cas de cession de territoire, effectivement, on peut donner aux populations une option entre la nouvelle et l'ancienne nationalité. Le problème se pose lorsque la partie qui choisit l'ancienne nationalité doit quitter ce pays et s'établir ailleurs. Il peut arriver que cette population se voie attribuer arbitrairement une nationalité, cela renvoi à un autre principe selon lequel nul ne peut être retenu malgré lui dans une nationalité.

Après les indépendances des pays africains antérieurement sous domination française, parmi lesquels figure l'Algérie, une série de textes a été mise en vigueur, comme l'ordonnance du 21 juillet 196278, et la loi du 28 juillet 1960 qui opère une répartition entre français de plein droit et français sous condition de reconnaissance. Les premiers sont ceux originaires du territoire français, ainsi que leurs conjoints, veufs, ou veuves et descendants. Tous ont conservé leur nationalité française de plein droit.

Une circulaire du ministère des affaires étrangères en date du 23 novembre 1961 a donné une définition large de «l'originaire » y englobant «toute personne dont un ascendant quelconque ... est né sur ce territoire ».79

78 L'ordonnance du 21 juillet 1962 concerne spécialement les algériens, elle a repris le critère traditionnel, utilisé par l'administration française, de la répartition selon le statut personnel. Elle a ainsi distingué les personnes de statut civil de droit commun et les personnes civiles de droit local, régies par le droit musulman.

79 Op.cit. ISSAAD (Mohand).

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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle