II.B- Le BIR stratégique et le BIR
opérationnel
Le BIR est actuellement la force la plus équipée
et la plus entraînée du Cameroun. C'est véritablement le
coeur du système de défense et de sécurité du
territoire. Le BIR se déploie actuellement sur un quadruple plan : la
sécurisation de la presqu'ile de Bakassi ; la lutte contre les coupeurs
de route ; il est associé au sein de chaque région militaire
à la brigade d'intervention rapide ; et la sécurité
présidentielle. Les missions du BIR se sont énormément
étendues en dix ans. Forts de 4000 hommes, d'un matériel de
guerre polyvalent (terre, mer et air) et d'un entrainement adéquat, les
éléments du BIR occupent à ce jour un rôle de
premier plan dans la défense du territoire.
A Bakassi, c'est le BIR-DELTA, un groupement du BIR, qui
assure la sécurité et la protection du territoire contre les
actes de piraterie, rançonnage et sabotage de tous ordres. Le BIR-DELTA
dispose d'un bâtiment de guerre, des chaloupes et embarcations, des
radars et d'un hélicoptère. Il bénéficie
également du soutien de l'armée de l'air qui surveille la zone
avec deux avions. Les Forces Marines Commando, les Palmeurs de Combat et le
Bataillon Spécial Amphibie aident aussi le BIR dans cette tâche.
Le BIR-DELTA suscite à la fois la crainte et la fascination des
populations. Lorsque l'on observe les défilés de ces
dernières années, on peut faire un constat : chaque passage du
BIR-DELTA est suivi d'un tonnerre d'applaudissements. Le défilé
du cinquantenaire de l'armée camerounaise et le récent
défilé du 20 mai en sont les illustrations les plus
récentes. Il y a donc à la fois crainte et fascination.
Aux jours d'aujourd'hui, on a du mal à qualifier le BIR
de forces spéciales, eu égard à la taille de ses effectifs
par rapport à ceux de l'armée camerounaise. Le BIR
représente 10% des forces armées du Cameroun. C'est surtout une
armée aux mains du prince. Le BIR a son propre drapeau, marqué du
sceau du lion. Son recrutement est centralisé, contrairement à
celui du reste des recrutements de l'armée, y compris les forces
spéciales. La multiplication des unités spéciales au sein
de l'armée, de la gendarmerie et de la police ces dernières
années est la marque du régime du renouveau. Le renouveau
militaire et sécuritaire passe par la création d'unités
spéciales directement pilotées depuis la présidence ; ce
qui constitue une défiance vis-à-vis de l'armée
régulière. En effet, le suréquipement (selon le contexte
local) du BIR contraste avec celui de l'armée régulière.
Les victoires que le BIR remporte contribuent à en faire l'armée
du prince, ou l'armée sur qui le prince peut compter. La
flexibilité de son commandement contribue à son efficacité
opérationnelle. Lors de la récente attaque de la banque Ecobank
à Douala, tandis que les forces armées régulières
tentaient d'avoir le MINDEF pour avoir l'autorisation de faire décoller
un hélicoptère de combat, le BIR était déjà
à la poursuite des criminels. D'après le Comandant de la
région militaire du littoral, le BIR aurait intercepté ces
braqueurs au niveau des berges de Bakassi et aurait fait seize morts parmi les
assaillants. Si l'efficacité opérationnelle du BIR en tant que
forces spéciales ne peut être remise en cause, son
efficacité stratégique en revanche peut être
questionnée, en termes de fragilisation de la défense
camerounaise.
Dans le contexte camerounais, l'armée est l'essence de la
prophylaxie politique, c'est pourquoi il y a un biais dans la politique de
défense.
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