INTRODUCTION PARTIELLE
Il est légitime d'affirmer que la centralité de
l'institution présidentielle et du président de la
république dans le système étatique ne commence pas au
Cameroun avec le régime de Paul BIYA. Dans son livre «
Introduction à la politique camerounaise », Abel EYINGA le
montre bien en soulignant la prégnance du président de la
République et la centralité de l'institution
présidentielle dans la vie politique camerounaise sous le régime
AHIDJO.57 De même, il est tout aussi légitime de dire
que l'autocratie comme mode de gouvernement et la violence politique ne
commencent pas au Cameroun sous le second régime. FOCHIVE Jean dans
« ses révélations » souligne à suffisance
comment la violence, la répression et l'autoritarisme font partie des
legs d'AHIDJO à son successeur.58
De fait, la succession présidentielle du 6 novembre
1982, s'accompagne de la transmission des modes de gouvernement, des arts de
faire la politique, jusqu'au lexique politique. On assiste véritablement
à une succession au sens juridique d'héritage du patrimoine
coercitif et présidentialiste du de cujus politique (AHIDJO).
Or la rémanence politique du de cujus entraîne une crise de
succession présidentielle, caractérisée par un
exécutif bicéphale, qui se dénouera avec les
évènements de la nuit du 06 au 07 avril 1984.
Il y a véritablement eu décentrage
présidentiel dans le système étatique camerounais entre
1982 et 1984 : l'UNC d'une part, la présidence de la République
d'autre part. La maîtrise par l'actuel chef de l'État des
ressources et attributs liés à sa fonction lui ont permis de
triompher d'Ahmadou AHIDJO. Le coup d'État manqué d'avril 1984
n'est venu que confirmer une rupture qui était déjà
consommée.
Après le 6 avril 1984, commence l'ère du
recentrage présidentiel. Ce recentrage est marqué par la
stabilité de l'hégémonie
bureaucratico-présidentielle et par le repositionnement du
président de la République comme figure transcendantale du
système étatique. Le plus important ici n'est pas seulement de
savoir s'il y a repositionnement, mais par quels moyens et quelles ressources
ce repositionnement s'opère. Dans un contexte
d'illégitimité populaire, ce repositionnement se
caractérise essentiellement par la présidentialisation de la
politique de défense et de sécurité nationale, laquelle
politique de défense et de sécurité est travaillée
par l'obsession de la sécurité présidentielle et le
marquage coercitif de la contestation. A cet effet, le renouveau national
s'apparente à un renouveau de la politique de défense et de
sécurité.
57 EYINGA Abel, Introduction à la politique
camerounaise, Paris, L'Harmattan, 1984.
58 EBOUA Samuel, D'Ahidjo à Biya : le
changement au Cameroun, Paris, L'Harmattan, 1996.
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