II- Répercussions de la crise financière
sur l'économie tchadienne
Le Tchad, à l'instar des autres pays africains n'a pas
échappé aux effets de contagion de la crise à travers le
ralentissement de la demande mondiale et des flux des capitaux. Nous
analyserons les répercussions de cette crise via les canaux suivants :
Les exportations et l'aide publique au développement.
1- Impact de la crise sur l'économie réelle et
financière
v' Les exportations :
Le Tchad vend son coton et son pétrole sur le
marché mondial. Le ralentissement de la demande des principaux clients
du Tchad (Etats-Unis, Europe et Chine) dû à la crise, s'est
traduit par une chute des cours de ces matières premières. Le
volume global des exportations a fléchi Ainsi, d'après la
BEAC(2009), les exportations totales ont ralenti en pourcentage du PIB de 54%
en 2007, 53.7% en 2008 et ont baissé à 39.5% en 2009. Ce qui a
entraîné une dépréciation du solde commercial de
-26.7% du PIB en 2009 (voir graphique 1).
Graphique 1 : Evolution des
exportations et des soldes de la balance commerciale (2000- 2009)
-100
-120
-20
-40
-60
-80
40
80
60
20
0
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009
Exportations Soldes
Source : Tableau de bord
BEAC, 2009
La dépréciation du solde commercial s'explique, en
grande partie, par la baisse de la production du coton, de son prix et aussi
bien par le cours du pétrole sur le marché mondial.
La chute successive des cours du pétrole tchadien
allant de 42.8$ en 2007 à 34.7$ en 2009 et la baisse des exportations de
52.67 à 43.2(en millions de barils) pendant cette période, ont
entraîné la contraction des recettes pétrolières de
-26.42% en 2009, passant de 1,6 milliards de dollars en 2008 à 1.2
milliards en 2009 ( voir graphique 2 ).
Graphique 2 : Evolution des recettes
pétrolières et cours de barils tchadiens en dollars
(2003-2009)
Recettes en millions de
dollars
Recettes en millions de dollars
2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009
2000
1500
1000
500
0
Cours en dollars
Cours en dollars
2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009
60
50
40
30
20
10
0
Source : Ministère
du pétrole et FMI(2009)
Cette contraction des recettes pétrolières a
occasionné une baisse des recettes budgétaires de l'ordre de
37%4 en 2009. La situation budgétaire s'est fortement
dégradée en 2009. Face à l'évolution croissante des
dépenses publiques, le gouvernement tchadien a dû épuiser
les revenus pétroliers épargnés à la BEAC et s'est
endetté pour compenser le déficit budgétaire.
L'effet de la crise sur le budget a empéché
d'atteindre le taux de croissance de 5 % pour 2009, retenu dans le document de
la Stratégie Nationale de Réduction de la Pauvreté
(SNRPII). Le pays a enregistré d'après la BEAC (2009), un taux de
croissance du PIB de 0.2%.
1' L'aide publique au développement (APD)
L'APD représente les transferts accordés par les
pays industrialisés aux pays en développement pour leur permettre
de financer leurs projets de développement. Les apports de ressources
considérées comme une aide publique au développement
incluent : les dons offerts au secteur public, les opérations en capital
et les dons des organisations non gouvernementales offerts au privé. On
peut différencier :
- Les aides multilatérales qui transitent par les
organisations internationales (FMI et BM)
- Les aides bilatérales qui concernent les dons ou
prêts consentis par un pays à un autre.
Sous l'effet de cette crise, les tirages ont logiquement
diminué au Tchad. On a enregistré une baisse plus importante de
tirages en 2008 et 2009, soient -25.58% en 2008 et -24.08% en 2009 (voir
graphique 3).
Graphique 3 : Données sur les dettes
bilatérale et multilatérale
1000 800 600 400 200
0
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bilatérale multilatérale tirages
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2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009
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Source: Direction
Générale de la Dette Publique (Tchad)
4 Calcul fait par les auteurs à partir des
données de la BEAC
La diminution du volume des tirages s'explique par le fait que
les créanciers multilatéraux ont revu en baisse leur
capacité de financement, car ceux-ci ont été
touchés par les effets dévastateurs de la crise. Pendant cette
période (2008-2009), pour compenser son « gap budgétaire
» qui était de l'ordre de 605 milliards de FCFA, le
Tchad aurait du contracter un prêt d'appui budgétaire
auprès de la Lybie.6
Etant donné que la population tchadienne vit à
64% en dessous du seuil de pauvreté monétaire, la crise
financière puis économique, s'est transformée en une crise
sociale. La flambée des prix de produits alimentaires a donné
naissance à une inflation de 8% en 2008 et 10 % en 2009. La hausse des
dépenses publiques et l'augmentation des prix chez les partenaires
commerciaux ont été les principales causes de cette inflation qui
a occasionné les mécontentements de la population en 2010. Le
pouvoir d'achat a diminué, beaucoup de ménages ont vu leur
situation se dégrader. Les effets cumulés de la mauvaise gestion
des ressources pétrolières et de la crise ont creusé
davantage l'écart entre les riches et les pauvres. En outre, les
perturbations politiques (les guerres) et la crise ont concomitamment
donné un coup d'arrêt au progrès vers la réalisation
des objectifs du millénaire pour le développement (OMD) comme
montre le graphique 4.
Graphique 4 : Tchad-progression vers les OMD,
1990-2015
5 L'essentiel des réalisations internationales
n° 26 Août-Septembre 2009
6 Source : direction de la dette
Source : Rapport FMI-Tchad,
2010
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