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Decomposition regionale du bien-ėtre social au cameroun pendant et apres les ajustements structurels: une application de la fonction de bien-ėtre social generalisee

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par Ferdinand Joel Martin MBENDA KOMBO
Université Yaoundé II SOA - DEA Economie mathématiques et économétrie 2008
  

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2. 3. Évolution de la pauvreté au Cameroun pendant et après les PAS

Nous aborderons la pauvreté ici à travers sa relation avec les paramètres que sont la croissance et l'inégalité. Il s'agira d'abord de les prendre séparément, puis de les analyser ensemble de manière à ressortir leurs contributions respectives à la pauvreté.

2.3. 1. Croissance et pauvreté au Cameroun

Entre 1985 et 1989, le Cameroun a subi les effets des chocs extérieurs majeurs, et a vu sa performance économique s'effondrer. Ce qui a engendré un bouleversement de la structure sociale, non seulement sur le plan régional, mais aussi en termes des réactions de la population pour y faire face. Les conclusions du rapport du PNUD (1998) sur le Développement Humain au Cameroun, dont le thème central porte sur la pauvreté, révèlent qu'au milieu des années 80, une pauvreté de grande ampleur et de dimension multiple s'est installée dans l'ensemble du pays et dans toutes les couches socioprofessionnelles. Au regard de la pauvreté monétaire, le rapport note que 50,5 % de la population était considérée comme pauvre en 1996, contre 40 % en 1984. Face à une pauvreté généralisée, la préoccupation est celle de la coordination entre croissance et lutte contre la pauvreté.

Cependant comme le révèle le tableau 2 et la figure 2, le taux de croissance du PIB réel est passée à 5% en 1995/1996, oscillant autour de cette valeur tout au long de la seconde moitié des années 90 au point d'atteindre en 2000/2001 le taux de 5,2%.

Tableau 2 : L'évolution du taux de croissance du PIB réel au Cameroun depuis la seconde moitié des années 90

Année

1994-1995

1995-1996

1996-1997

1997-1998

1998-1999

1999-2000

2000-2001

Croissance
du PIB (%)

3,3

5,0

5,1

5,0

4,4

4,2

5,2

Source : DSRP (1998) et World Table (Banque Mondiale 2002).

Figure 2 : L'évolution du taux de croissance du PIB réel au Cameroun depuis la seconde moitié des années 90

6

5

4

3

2

1

0

1994-

 

1995-

1996-

1997-

1998-

1999-

2000-

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Source : Construit par l'auteur à partir des données du tableau 2.

Dans ces conditions de croissance modérée, sur la base des résultats de deux enquêtes ECAM I et II (tableau 3 et figure 3), le taux de pauvreté a régressé d'environ 13 points sur les 5 ans, passant de 53,3 à 40,2% de la population. Au cours de la même année, l'écart entre le revenu moyen des pauvres et la ligne de pauvreté s'est aussi amélioré, passant de 19,1% en 1996 à 14,1% en 2001(tableau 3 et figure 4). Ceci implique qu'en 1996 il fallait transférer en moyenne un revenu supplémentaire de 35.429 francs CFA à un individu pauvre pour le sortir de la pauvreté contre 26.154 francs CFA en 2001 (INS, 2002).

Tableau 3 : Evolution du taux de pauvreté (%)

 

1996

2001

Variation en %

Incidence (P0)

Rural

59,6

49,9

-9,7

Urbain

41,4

22,1

-19,3

Total

53,3

40,2

-13,1

Profondeur (P1)

Rural

21,5

18,3

-3,2

Urbain

14,7

6,3

-8,2

Total

19,1

14,1

-5,0

Source : DSCN, rapport ECAM I et II.

Figure 3 : Evolution de l'incidence de la pauvreté au Cameroun (P0)

60

50

40

30

20

10

0

-10

-20

Rural Urbain

Total

Milieu de
résidence

1996 2001 Variation en %

Années et variation de (P0)

Source : Construit par l'auteur à partir du tableau 3

Figure 4 : Evolution de la profondeur de la pauvreté au Cameroun (P1)

25
20
15

10

Milieu de

résidence 5

0

-5

-10

 
 
 
 

Rural Urbain Total

 
 

1996 2001 Variation en %

Années et variation de (P1)

Source : Construit par l'auteur à partir du tableau 3.

L'analyse de l'évolution de l'incidence de la pauvreté ne peut à elle seule, permettre d'apprécier correctement les progrès réalisés en matière de réduction de la pauvreté. Elle doit être complétée par une analyse de l'évolution des inégalités dans la distribution des revenus pour disposer d'une vue complète de la dynamique de la pauvreté monétaire.

2.3. 2. Inégalité et pauvreté au Cameroun

Au niveau national, les trois indicateurs d'inégalité utilisés, à savoir le coefficient de variation, l'indice de GINI et le rapport du cinquième au premier quintile de revenus Q5/Q11, indiquent que les inégalités se sont maintenues et parfois accrues entre 1996 et 2001. Comme le révèle le tableau 4 et la figure 5, le coefficient de variation est passé de 1,043 en 1996 à 1,054 en 2001; ce qui correspond à une hausse de 0,011 point de pourcentage. Ainsi, la dépense par unité de consommation qui est l'indicateur de revenu est plus dispersée au sein de la population en 2001 qu'en 1996. En d'autres termes, il existe en matière de revenus, plus de disparités entre les individus en 2001 qu'en 1996.

Cette situation est confirmée par l'indice de GINI qui montre qu'en 2001, la distribution des Revenus s'est un peu plus éloignée d'une répartition égalitaire qu'en 1996. En passant de 0,406 en 1996 à 0,408 en 2001, l'indice de GINI révèle que les inégalités se maintiennent au lieu de se résorber.

De même que l'inégalité globale au sein de toute la population, celle entre les groupes extrêmes (en terme de pauvreté) s'est accrue. En 1996, la consommation des 20% de la population les plus riches représentait en moyenne 7,6 fois celle des 20% les plus pauvres. En 2001, ce rapport est de 8,3 fois, ce qui montre que les écarts se sont accrus entre les deux groupes au détriment des pauvres. La croissance économique aurait donc davantage profité aux plus riches.

1 Le rapport du cinquième quintile sur le premier Q5/Q1 : c'est le rapport de la moyenne des revenus des 20 % de la population les plus riches et de la moyenne des revenus des 20 % des individus les plus pauvres.

Tableau 4 : Evolution des inégalités de revenus dans les milieux de résidence et dans les régions du Cameroun

 

1996

2001

coefficient de variation

l'indice de GINI

rapport Q5/Q1

coefficient de variation

l'indice de GINI

rapport Q5/Q1

Urbain

1,112

0,449

9,1

1,072

0,406

8,5

Rural

0,786

0,345

5,8

0,801

0,369

6,8

Yaoundé

1,307

0,487

7,5

1,202

0,433

6,8

Douala

1,082

0,485

4,8

1,082

0,410

6,5

Autres villes

1,009

0,397

6,5

0,879

0,378

7,2

Rural forêt

0,588

0,287

5,8

0,839

0,377

5,7

Rural plateau

0,775

0,346

7,5

0,875

0,398

8,1

Rural savane

0,789

0,354

8,4

0,696

0,330

9

Ensemble

1,043

0,406

7,6

1,054

0,408

8,3

Source: ECAM I; ECAM II; INS

Figure 5 : Evolution des inégalités dans les milieux de résidence au Cameroun

10 9 8 7 6 5 4 3 2 1 0

Urbain Rural Ensemble

coefficient de
variation

l'indice de GINI rapport Q5/Q1

coefficient de
variation

l'indice de GINI rapport Q5/Q1

2001

1996

Source : Construit par l'auteur à partir du tableau 4

Selon le milieu de résidence, la situation des zones urbaines se caractérise par une légère amélioration des inégalités, traduite par le comportement des trois indicateurs utilisés. En effet, on enregistre une réduction des inégalités, quel que soit l'indicateur utilisé. En zones rurales, les résultats sont moins favorables qu'en milieu urbain; la hausse du coefficient de variation, de l'indice de GINI et du rapport Q5/Q1 dans ce dernier milieu est caractéristique de l'accentuation des inégalités. Néanmoins, les inégalités y demeurent moins importantes en terme d'ampleur par rapport au milieu urbain. Bien que le rattrapage en terme de niveau d'inégalités entre les deux milieux ne soit pas encore réalisé, il est socialement dangereux de ne rien faire pour arrêter le phénomène d'accroissement des inégalités dans le monde rural qui a par ailleurs les revenus les plus bas.

Figure 6 : Evolution des inégalités dans les régions au Cameroun

2001

1996

coefficient de
variation

l'indice de
GINI

rapport
Q5/Q1

coefficient de
variation

l'indice de
GINI

rapport
Q5/Q1

Yaoundé Douala

Autres villes Rural forêt Rural plateau Rural savane Ensemble

9 8 7 6 5 4 3 2 1 0

 

Source : Construit par l'auteur à partir du tableau 4.

A l'intérieur du milieu urbain, selon le tableau 4 et la figure 6, la «palme d'or» du recul des inégalités revient à la ville de Douala. Cette région enregistre une baisse de l'indice de GINI de 15%. La distribution des revenus à Douala en 2001 se rapproche donc d'une répartition égalitaire par rapport à celle de 1996, même si les inégalités demeurent assez importantes par rapport aux autres régions. Dans cette ville également, l'inégalité entre les groupes extrêmes des plus pauvres et des plus aisés (Q5/Q1) diminue très sensiblement, par rapport à la ville de Yaoundé où la baisse de cet indicateur est moins importante. Cette différence entre Douala et Yaoundé en ce qui concerne l'évolution des inégalités, traduirait les fortes disparités de revenus à Douala dans le secteur privé et une certaine homogénéité des revenus à Yaoundé dont la bonne frange de revenus issue de la fonction publique présente très peu de variation ces dernières années.

En termes de niveau et non plus d'évolution, les inégalités demeurent plus importantes à Yaoundé qu'à Douala ; l'indice de GINI y est de 0,43 3 en 2001. Toujours en 2001, la consommation moyenne des 20% de la population la plus aisée de Yaoundé représente 6,8 fois celle de la tranche des 20% les plus pauvres contre 6,5 fois pour la ville de Douala.

Le milieu rural pour sa part présente une plus grande hétérogénéité que le milieu urbain. La hausse des inégalités est enregistrée en région rurale Hauts plateaux et en région

rurale Forêt. Cette dernière enregistre des hausses records pour tous les indicateurs (43% pour le coefficient de variation, 31% pour l'indice de GINI et 35% pour le rapport des quintiles). En 1996, la région rurale Forêt était celle où la distribution des revenus était la plus proche d'une répartition égalitaire (indice de GINI le plus bas). En 2001, la répartition des revenus y est aussi inégalitaire que dans les villes du Cameroun autres que Yaoundé et Douala, et devient même plus inégalitaire que la région rurale Savane. En plus de la région rurale Forêt, une autre région qui s'illustre en milieu rural est la région rurale Savane ; c'est la seule région dans ce milieu à enregistrer une baisse des inégalités (baisse de l'indice de GINI de 6,8%). La bonne tenue des campagnes cotonnières entre 1996 et 2001, et le fait que la région dispose en général de bas revenus seraient responsables de cette évolution.

Le gain notoire en terme de recul de l'incidence de la pauvreté indique bien que celle- ci est sensible à la croissance et aux politiques d'accompagnement mises en oeuvre par le gouvernement. Toutefois, la persistance d'un niveau élevé d'inégalités indique aussi qu'il y a un manque à gagner en terme d'impact des politiques sur la pauvreté. Les politiques et stratégies à mettre en oeuvre, dans le cadre de la réduction de la pauvreté devront de ce fait viser non seulement, l'intensification de la croissance afin de relever les revenus moyens, mais aussi assurer une meilleure distribution des fruits de la croissance.

2.3. 3. Croissance, redistribution et pauvreté au Cameroun

Dans un contexte où la pauvreté a une forte ampleur et où la lutte pour sa réduction est au coeur des politiques de développement, il faut se poser la question de savoir dans quelle mesure la croissance et éventuellement la redistribution sont profitables aux plus pauvres. Il s'agit en outre de chiffrer leur contribution en terme de réduction de la pauvreté. L'approche méthodologique utilisée pour décomposer la modification de la pauvreté entre effets croissance et redistribution est celle proposée par Datt et Ravallion (1992). L'analyse prend en compte l'incidence, l'intensité et la sévérité de la pauvreté. Les résultats obtenus montrent que le recul de la pauvreté, quel que soit l'indicateur examiné, est beaucoup plus imputable à la croissance qu'à la redistribution des revenus. La redistribution n'a contribué ni à la baisse de l'intensité ni à celle de la sévérité. Ceci présagerait d'une aggravation des inégalités chez les pauvres.

Comme on peut le voir à partir du tableau 5 et de la figure 7, l'ampleur du recul de l'incidence de la pauvreté en milieu urbain est le double de celui obtenu en milieu rural. La

baisse en milieu urbain est le résultat de la conjugaison à parts égales des effets de croissance et de redistribution. Par contre, la diminution de l'incidence enregistrée en milieu rural est totalement imputable à la croissance économique. Les effets de redistribution dans ce milieu perturbent l'impulsion donnée au niveau de vie par la croissance. La différence qui apparaît entre les deux milieux de résidence s'explique par la répartition des revenus. Ceux ci sont nettement plus disparates en milieu urbain qu'en zone rurale. En 2001, le coefficient de variation des revenus en milieu urbain est de 1,07 alors qu'il est de 0,80 en milieu rural et ces niveaux n'ont pas changé significativement depuis 1996.

Tableau 5 : Décomposition de l'évolution des indicateurs de pauvreté entre 1996 et 2001 en (%)

 

Variation totale

Effets de croissance

Effets de redistribution

Résidus

P0

P1

P2

P0

P1

P2

P0

P1

P2

P0

P1

P2

Urbain

-19,3

-8,3

-4,3

-9

-4,7

-2,5

-8,4

-4,7

-2,5

-1,8

1

0,8

Rural

-9,8

-3,1

-0,8

-13,3

-6,6

-3,8

1,7

3,4

3,1

1,9

0,1

-0,2

Cameroun

-13,1

-4,9

-2

-11,8

-5,9

-3,3

-1,8

0,6

1,2

0,6

0,4

0,2

P0 : incidence de la pauvreté P1 : intensité de la pauvreté P2 : sévérité de la pauvreté

Sources: ECAM I; ECAM II; INS

Figure 7 : Evolution des indicateurs de pauvreté selon le milieu de résidence entre 1996 et 2001 (%)

80,00% 60,00% 40,00% 20,00%

0,00%

variation en %

-20,00% -40,00% -60,00% -80,00%

-100,00%

P0

P1

P2 P0

P1

P2

P0 P1

P2

Variation totale Effets de croissance

Effets de redistribution

Cameroun Rural Urbain

Source : Construit par l'auteur à partir du tableau 5.

En ce qui concerne l'intensité de la pauvreté, elle a reculé au niveau national de près de 5 points, recul essentiellement dû à la croissance. Le milieu urbain est encore celui qui a enregistré le plus fort recul (8,3 points). Ceci est attribuable à parts égales à la croissance économique et à la réduction des inégalités.

La sévérité (tableau 5 et de la figure 7) de la pauvreté quant à elle a également baissé au niveau national de 2 points. La baisse est faible en milieu rural et exclusivement imputable à la croissance économique alors qu'elle est assez forte en milieu urbain et attribuable autant à la croissance qu'à la baisse des inégalités de revenus. Le résidu ou élément qu'on ne maîtrise pas, s'interprète comme la part de la modification qui n'est attribuée ni à l'effet croissance ni à l'effet redistribution. Le fait qu'il soit nul pour un indicateur de pauvreté dans un milieu signifie que la totalité de la modification de cet indicateur dans ce milieu est imputable aux deux facteurs que sont la croissance et la redistribution. En somme, la croissance est autant bénéfique au milieu urbain qu'au milieu rural, mais les fortes inégalités existantes en milieu urbain font jouer à la redistribution un rôle très important dans la lutte contre la pauvreté.

Tableau 6 : Variations des indicateurs de la pauvreté selon les régions

 

Variation totale

Effets de croissance

Effets de redistribution

Résidus

P0

P1

P2

P0

P1

P2

P0

P1

P2

P0

P1

P2

Yaoundé

-30,7

-13,3

-6,7

-9,7

-5,3

-3,2

-20,2

-10

-5,3

-0,8

2

1,8

Douala

-18,8

-8,6

-4,4

-7,9

-4,4

-2,3

-7,5

-5,2

-3

-3,4

1

0,9

Autres
villes

-10,1

-4,2

-2,1

-8,7

-4,2

-2,1

0,7

-0,2

-0,1

-2

0,2

0

Rural
forêt

-17,1

-5,7

-1,5

-15

-8,2

-4,8

-6,8

1,1

2,8

4,7

1,4

0,5

Rural
plateau

-12,2

-2,1

0,3

-14,4

-6,9

-4

-0,8

4,2

4,4

3

0,7

-0,1

Rural
savane

1,3

-1,2

-1

-10,2

-4,7

-2,6

13,4

5,4

2,6

-1,9

-1,9

-0,9

Cameroun

-13,1

-4,9

-2

-11,8

-5,9

-3,3

-1,8

0,6

1,2

0,6

0,4

0,2

P0 : incidence de la pauvreté P1 : intensité de la pauvreté P2 : sévérité de la pauvreté

Sources: ECAM I; ECAM II; INS

Figure 8: Evolution des indicateurs de pauvreté selon le milieu les régions entre 1996 et 2001 (%)

60% 40% 20% 0%

-20%

variation en %

-40%

-60% -80% -100%

Cameroun Rural savane Rural plateau Rural forêt Autres villes Douala Yaoundé

P0 P1 P2

P0 P1 P2

P0 P1 P2

Variation totale

Effets de
croissance

Effets de
redistribution

Source: Construit par l'auteur à partir du tableau 6.

Il faut remarquer que la situation présentée ci-dessus n'est pas uniforme dans tous les milieux urbains du pays. Le tableau 6 et la figure 8, montre que Douala et Yaoundé se démarquent très nettement des autres villes et le cas particulier de Yaoundé qui enregistre un effet de redistribution de 20 points sur l'incidence de pauvreté est assez révélateur de l'ampleur de l'inégale répartition des revenus dans cette ville; de plus, les effets de redistribution des revenus font diminuer la profondeur de la pauvreté deux fois plus que ceux de la croissance.

Dans la ville de Douala, la diminution de l'incidence de la pauvreté, de la profondeur et dans une certaine mesure de la sévérité de la pauvreté est autant imputable à la croissance qu'à la redistribution. Les autres villes du pays se comportent à peu près comme la moyenne dans le milieu rural à savoir un effet de redistribution quasiment inexistant. Toute la réduction de la pauvreté est soutenue par la croissance.

De même que le monde urbain, le milieu rural recèle de très fortes disparités qui méritent d'être soulignées. Tout d'abord, les performances enregistrées dans la région rurale Forêt sont assez intéressantes. L'incidence de la pauvreté y recule de 17 points et la contribution de la croissance à ce mouvement atteint 15 points, ce qui est la plus forte contribution enregistrée par rapport à toutes les zones agro écologiques retenues pour l'étude. De plus, l'apport de la réduction des inégalités est assez palpable (près de 7 points). Cette zone présente donc des performances semblables à celles enregistrées dans le monde urbain bien que se situant en milieu rural.

Cette ressemblance ne s'étend pas à la réduction de la profondeur de la pauvreté et encore moins à la sévérité de la pauvreté. La redistribution dans la région rurale Forêt aggrave légèrement la profondeur de la pauvreté, de même que sa sévérité d'environ 3 points de pourcentage. En somme, la zone rurale Forêt bénéficie surtout de la croissance que de la redistribution, du fait sans doute d'un accroissement des activités des sociétés forestières et du comportement des prix du cacao. Ce n'est pas le cas de la région rurale Hauts plateaux qui présente une évolution du type de celle présentée pour l'ensemble du monde rural. Cette région enregistre néanmoins une légère augmentation de la sévérité de la pauvreté (due à la redistribution) malgré le fait que l'incidence ait fortement reculé. Le cas de la région rurale Savane est particulièrement paradoxal. C'est la seule région qui fait exception à la baisse générale de pauvreté constatée. L'incidence de la pauvreté y est un peu plus grande en 2001

qu'en 1996. Elle augmente de 1,3 points malgré la forte contribution de la croissance (10 points de pourcentage) pour la réduire, cette situation est imputable à une quasi-absence de la redistribution.

Contrairement à ce que l'on pourrait attendre et à ce que l'on observe dans tout le reste du pays, la redistribution des revenus dans cette partie du pays s'effectue fortement au profit des non pauvres. S'il n'y avait pas eu cette modification de la distribution des revenus, l'incidence de la pauvreté y aurait reculé de près de 11 points. Cependant, l'intensité de la pauvreté dans la région rurale Savane a reculé ; les pauvres y ont en 2001, un niveau de revenus moyens plus proche du seuil de pauvreté qu'en 1996. Ceci est confirmé par une légère baisse de la sévérité de la pauvreté (indicateur de dispersion des revenus moyens des pauvres), baisse qui traduit le fait que les pauvres ont des revenus moyens moins dispersés en 2001 qu'en 1996.

L'équité et l'efficacité sont deux éléments qui intéressent le décideur en politique économique, et la décomposition de la pauvreté monétaire en effet croissance et effet redistribution apparaît être un assez bon début dans la capture de ces deux éléments. Seulement, pour une prise en compte plus pertinente de l'équité et de l'efficacité, il serait intéressant de les analyser dans le cadre d'une fonction de bien-être social, comme nous envisageons le faire dans la suite de notre travail.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery