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L'analyse des déterminants de l'investissement direct au Cameroun

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par Martial NJOUM NGUENIN
Université de Douala - D.E.A 2006
  

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INTRODUCTION GENERALE

La participation du continent africain à l'économie mondiale a diminué au cours des 50 dernières années aussi bien du point de vue de son produit intérieur brut (PIB), de ses exportations que de ses influx d'investissements internationaux (Ocde, 2002). Le seul domaine dans lequel l'Afrique a prospéré, est sa population en raison d'une croissance démographique qui s'est accélérée au cours du vingtième siècle. Cette démographie, forte sur l'ensemble du continent, constitue un sérieux handicap à la croissance et au développement humain, de même qu'elle va impliquer à long terme des changements profonds dans les conditions d'activités économiques en Afrique.

En termes économiques, la part de l'Afrique dans le Produit intérieur brut mondial exprimée en parité de pouvoir d'achat a diminué d'un tiers environ entre 1950 et 2000 et sa part dans les exportations mondiales a été divisée par trois (Cnuced, 2002)1. L'évolution des termes de l'échange est un des facteurs explicatifs de cette tendance.

La déconnexion de l'Afrique de l'économie mondiale s'explique également par ses évolutions internes. Ainsi, la faible croissance de l'Afrique par rapport au reste du monde peut en elle même expliquer la diminution de son poids dans le commerce mondial. De plus, la transformation des capacités de production en capacités d'exportation est plus difficile en Afrique que dans le reste du monde en raison des faiblesses de la chaîne de commercialisation et de transport. En bref, on a lieu de se demander si «l'Afrique ne va-t-elle pas vers une diminution de ses avantages comparatifs» (Bekolo, 2000).

Dans un contexte économique où l'épargne domestique est faible et où il est pratiquement impossible d'accéder aux marchés financiers internationaux, le Cameroun, comme la plupart des autres pays africains recourt à certains modes de financement extérieur tels que l'aide publique au développement et l'emprunt extérieur dans le but de poursuivre ses objectifs de développement socio-économique. Or, les prêts en faveur des pays africains en général ont diminué ces dernières années pour passer à 3,8% en 2001 contre 6% du PIB en 1990. En plus, l'aide extérieure par tête a

1 Cnuced signifie: Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement

baissé pour atteindre la moyenne de 35 dollars entre 1989 et 1992 à 28 dollars entre 1993 et 2001 (Banque Mondiale, 2003), d'où la nécessité pour l'Afrique et plus particulièrement le Cameroun, de compenser le déficit de l'assistance extérieure en favorisant l'investissement direct étranger (IDE).

En effet, depuis une décennie, on remarque une croissance importante des flux d'IDE dans le monde. Ils sont passés de 198 milliards de dollars en 1990 à 321 milliards de dollars en 1995, et ont atteint 1050 milliards de dollars en 2003 selon les estimations World Investment Report (WIR 2005).

Cependant, la distribution géographique de ces investissements révèle une répartition inégalitaire. Par exemple, concernant les investissements directs étrangers pour l'année 2003, on note que les pays développés à économie de marché ont bénéficié de 985 milliards de dollars, les « pays et territoires en développement» ont reçu 210 milliards de dollars, alors que les pays d'Europe Orientale ont enregistré 20 milliards de dollars. Cette répartition ne révèle pas la part des investissements étrangers destinés à l'Afrique qui fait partie de la région « pays et territoires en développement ». En effet, dans cette région, l'Asie en développement attire à elle seule 133 milliards de dollars, 46 milliards pour l'Amérique Latine et le reste revient à l'Afrique, soit 10,5 milliards de dollars.

En Afrique, la dotation en IDE varie fortement d'un pays à un autre. L'Afrique du Sud, le Nigeria et la Côte d'Ivoire sont les pays qui ont le plus attiré l'IDE dans les années 1990. Comparativement au Cameroun, la Côte d'Ivoire a attiré huit fois plus d'IDE entre 1989 et 2003 (Cnuced, 2003). En plus, fort est de constater que la part de l'Afrique dans les investissements directs internationaux a connu une chute spectaculaire. Elle a baissé de moitié entre 1970 et 1980. A partir de cette date, et jusqu'à dans les années 1990, elle a encore diminué de moitié. Dans les années 1970, les pays pétroliers d'Afrique recevaient une proportion significative des investissements directs étrangers dans le monde. Par la suite, les flux d'investissements à destination de l'Afrique ont progressé lentement en valeur dans les années 1980 et ont repris vigoureusement dans les années 1990. Malgré cette reprise, la. Part de l'Afrique reste insignifiant par rapport à la croissance des investissements internationaux reçus par l'ensemble du monde. Le Cameroun fait partie des pays qui n'ont pas bénéficié de ces influx d'investissements directs étrangers. Il ne compte en

flux comme en stocks, que pour 1% de l'investissement mondial en Afrique (Cnuced, 2003).

En effet, depuis la dévaluation de janvier 94, le taux de croissance de l'économie camerounaise se situe en moyenne autour de 5%2 avec un accroissement du PIB par habitant compris entre 1,5% et 2,7%. L'agriculture étant le secteur le plus important, contribue aux recettes d'exportation à hauteur de 40%(Beac 2003) bien qu'elle fait face à la baisse des cours internationaux. Le secteur secondaire a aussi connu une croissance en 2003, liée à la reprise de l'investissement public et à la remise à niveau de la consommation. C'est cependant le secteur tertiaire qui a apporté la contribution la plus significative à la croissance du PIB en 2003, soit 4,65%.

Pourtant sa situation géographique entre l'Afrique occidentale et l'Afrique centrale lui assure une position stratégique unique en matière d'échanges commerciaux en plus de ses nombreuses ressources naturelles et agricoles3 .

Le Cameroun dispose d'un tissu industriel diversifié et en expansion, présentant un réseau permanent de sous-traitance et également d'une main-d'oeuvre abondante et qualifiée, bon marché et douée d'une grande capacité d'adaptation et d'initiative indispensable au développement des entreprises. Son cadre législatif et réglementaire consacre la liberté d'investir et le libre transfert des bénéfices industriels et commerciaux ainsi que des salaires.

Sur le plan macro-économique, le Cameroun, comme l'ensemble des pays de la communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale (Cemac), présente un taux de change fixe par rapport à l'euro4. La taxe sur le chiffre d'affaires (Tca) introduite par la reforme fiscale et douanière de 1993 est remplacée par la taxe sur la valeur ajoutée (Tva) en 1999. La tension inflationniste est maîtrisée et fluctue autour de 2% (Beac, 2003)5

En terme de financement, le Cameroun, qui pendant longtemps, a bénéficié des aides publiques au développement et des prêts concessionnels, est classé aujourd'hui parmi les pays les plus pauvres très endettés car ayant accumulé une dette extérieure

2 Notons tous de même que ces quatre dernières années, le taux de croissance du Cameroun était de 3.5%

3 Les ressources naturelles sont entre autres : le pétrole, le gaz, la bauxite, le fer, le nickel, le bois...et les ressources agricoles : le cacao, le café, le coton, la banana, l'hévéa, l'huile de palme, l'ananas...

4 L'euro est la monnaie unique européenne.

5 BEAC signifie : banque des états de l'Afrique centrale

Très importante dans les années 1980 au moment de la chute drastique des prix du pétrole.

Sur le plan structurel, un vaste programme de privatisations a été initié en 1994 et prévoit la libéralisation des principaux secteurs de l'économie. Le niveau de développement des infrastructures routières, ferroviaire, portuaire s'est également amélioré malgré quelques insuffisances dans leurs entretiens.

Sur le plan politique, le Cameroun connaît une stabilité depuis les années 1990 et ses institutions sont démocratiques.

Au regard de cette analyse, il apparaît que, le Cameroun, dans le cadre de la globalisation, peut bénéficier de l'interconnexion croissante des marchés en s'intégrant à l'économie mondiale. L'investissement direct étranger, par le biais de cette ouverture, peut ainsi contribuer à promouvoir Le développement économique du Cameroun.

Or, malgré l'engagement du gouvernement camerounais dans la mise en oeuvre des politiques d'ajustement et des reformes structurels proposés par le Fonds Monétaire International (Fmi) et la Banque Mondiale (BM), malgré la multiplication des partenariats dans le cadre des coopérations bilatérale et multilatérale et malgré ses atouts naturels, le constat est que le Cameroun attire .davantage moins d'investissements directs étrangers caractérisés par une présence moins importante des firmes multinationales (FMN)6 sur le territoire.

Le véritable problème qui se pose alors est celui de savoir pourquoi le Cameroun, malgré ses divers avantages mentionnés précédemment ne réussit toujours pas à attirer suffisamment d'investisseurs étrangers.

L'objet de notre étude sera de rechercher les variables pertinentes qui expliquent les flux entrants d'investissements directs étrangers au Cameroun afin de proposer des mesures de politiques économiques susceptibles d'améliorer l'attractivité de l'environnement économique du pays. Le cadre méthodologique repose sur l'estimation de la fonction d'attractivité par les moindres carrés ordinaires (MCO). Aussi, il conviendra de s'assurer de la stationnarité des séries observées car, lorsque les variables ne sont pas stationnaires, l'estimation par les MCO et les tests usuels des

6 Une multinationale (entreprises ou firme) est une entité qui réalise des opérations de production dans au moins dans deux pays. Elle est constituée d'une société mère (résidente d'un pays) et d'au moins une filiale (résidente d'un autre pays). Est filiale toute société dont le capital social est contrôlé par une entité.

t-student et f- fisher ne sont pas valides. Ceci dit, les coefficients estimés ne convergeront pas vers leurs vraies valeurs et on dira que les régressions sont fallacieuses. Nous utiliserons ainsi les tests de Dickey-Fuller augmenté (ADF) pour rendre compte de la stationnarité de ces séries.

Pour répondre à notre question centrale, notre travail sera organisé en quatre chapitres ; nous aborderons dans le premier chapitre les différentes théories qui ont étudié l'Investissement Direct Etranger. Ensuite, dans le deuxième chapitre nous allons nous intéresser à l'analyse des flux IDE et le cadre d'investissements au Cameroun.

Dans le chapitre trois, nous modéliserons les facteurs explicatifs des investissements directs étrangers, puis nous présenterons une analyse et les propositions de politiques économiques seront faite ceci au chapitre quatre.

PREMIERE PARTIE :
LE CADRE THEORIQUE ET CONCEPTUEL DE
L'ETUDE.

Depuis le début des années 70 le Cameroun accorde une importance capitale aux investissements directs étrangers (IDE) comme moyen de développement économique ; Cette volonté c'est accentué dans les années 90 et 2006. L'attraction des IDE a été pendant longtemps dans la pointe de mire des stratégies économiques nationales.

La littérature étant abondante sur la question, propose des déterminants et des théories économiques des IDE. La plus exhaustive date de 1992 [The determinants of foreign Direct Investment: Asurvey of the evidence, publication des Nations -Unies]. La majorité des auteurs s'accordent à souligner le rôle important des fondamentaux (niveau d'endettement externe, croissance économique, etc), du marché et des infrastructures. Aujourd'hui avec la mondialisation, les économistes [Nunnenkamp &Spatz (2002)] et Dunning (2002) mettent en avant de nouveaux déterminants non traditionnels axés plutôt sur le climat d'investissement. Pour Stern (2005), il s'agit d'une approche qui s'intéresse à la gouvernance et à l'environnement économique et institutionnel dans lequel les agents économiques prennent leurs décisions.

Nous constatons ainsi le manque de consensus de la littérature et les divergences de vue des auteurs en ce qui concerne les déterminants des IDE.

Pour cela, dans cette première partie, nous trouvons judicieux non seulement de clarifier les concepts utilisés, de faire une revue des théories économiques sur les IDE Au Chapitre 1, puis au chapitre 2 une illustration des flux des IDE et le cadre d'investissements au Cameroun sera faite.

CHAPITRE 1 : LA THEORIE DES INVESTISSEMENTS
DIRECTS ETRANGERS

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius