II- Stratégies concevables
A- Stratégie offensive
B- Stratégie d'usure
C- Les attitudes possibles
*Notes sur Machiavel et Clausewitz
I- Précision conceptuelle
Le concept de stratégie a un champ très
extensif, le sujet que nous abordons balaie un vaste domaine de
réflexion ouvert à l'homme quand il doit penser et agir pour
résoudre les problèmes posés dans la
société. Il n'y a pas de stratégie pour un but
considéré avec certitude comme inaccessible. Elle suppose ainsi
la disposition de ressource et la capacité de les mobiliser et s'inscrit
dans une durée physique et psychologique.
Aussi, on ne peut pas voir dans toutes actions humaines la
mise en place de stratégie car elles ne satisfont pas les
critères de celle-ci. D'innombrables actions telles que le choix d'un
plat plutôt qu'un autre, ou d'occuper ses loisirs de telles ou telles
façons s'appliquent à des buts sélectionnés plus ou
moins aléatoirement au sein d'un ensemble
prédéterminé par l'inconscient dans ses dimensions
personnelles et sociales. De même que d'innombrables actions collectives
ou individuelles comme l'organisation des services publics correspondent
à la mise en oeuvre de routine, où l'on évite le
coût de réforme qui supposerait, elle, la définition
d'objectifs et de stratégie. Pour que l'on puisse parler de
stratégie, il faut aussi que la part de volonté et la tension
durable qui en résulte soit essentielle, de même que le
critère de difficulté crucial.
Il convient dès lors de délimité le champ
politique et de dire quels sont les acteurs de la stratégie dans la
société.
A- Délimitation du champ politique
Bien qu'emprunté au vocabulaire militaire, le mot
stratégie trouve aussi sa place dans le champ politique. En effet et
selon les auteurs tels que Machiavel, la conflictualité est au principe
même de la politique puisque la lutte pour le pouvoir est au centre de la
vie politique. Gérer la cité est une mission importante qui
concerne bon nombre d'acteur individuel ou constitué en groupe. Si le
politique concerne le monde des essences, la politique elle relève du
monde des contingences, (évènement, concret...). Elle est le lieu
des divisions et des conflits.
Parce que les décisions qui relèvent du pouvoir
politique ou des élites dirigeantes engagent la
société, elles sont l'enjeu d'une compétition très
vive
entre les groupes, catégories ou classe sociales. Ils
s'organisent pour défendre et faire prévaloir leur
intérêt, s'efforcent d'influer sur les décisions par la
propagande, la persuasion, ou par la manifestation de leur puissance,
éventuellement par la violence qui est souvent le signe de leur
faiblesse.
Les détenteurs du pouvoir politique assurent
généralement l'exécution de leur décision par un
mélange d'autorité et de coercition. Cependant, d'autres
procédés plus subtils font que les dirigeants arrivent à
leur fin.
B- Les stratèges de la « polis »
L'univers de la politique est celui des passions collectives.
La servitude et la grandeur du métier politique consiste à
gérer rationnellement et à canaliser cette matière
inflammable : la psychologie des masses. L'homme d'Etat (maléfique ou
bienfaisant, car la « stratégie en tant que telle échappe
à la morale1 ») y parvient en comprenant « les
raisons que la raison ne connait pas«. Il peut alors conduire ses actions
en stratège, comprendre les tendances, les comportements et les humeurs
des collectivités humaines. Celui (l'homme) décrit par
Gérard Chaliand est une tête pensante, un « homo
stratégicus », l'idée évoquée est celle
déjà décrite par le général
Beaufre2. Ce dernier définie la stratégie comme
étant l'art de la dialectique des volontés employant des
ressources pour résoudre leur conflit. « Son but est d'atteindre la
décision en créant des contraintes sur l'exploitation des
ressources de l'adversaire suffisant pour lui faire accepter les conditions
qu'on veut lui imposer3 », car il y va du respect et même
de l'hégémonie.
Au niveau des objectifs, les héros de l'histoire sont
souvent (peut-être pas toujours) animés par leur ego autant que
par les intérêts qui les dépassent. D'où
l'importance de ce que les stratèges appellent la recherche de « la
gloire », une gloire posthume et éternelle pour le martyr.
Aujourd'hui, les instituts de recherche et les groupes de
pression ont un pouvoir croissant dans l'élaboration de
stratégie politique en matière de
1 Anthropologie mondiale de la stratégie. Des origines au
nucléaire, Gerard Chaliand, éditions Robert Laffont S.A Paris,
1990.
2 Auteur de «introduction à la
stratégie«, 1963 et militaire dans l'armée Française
de 1921 à 1975.
3 Ces contraintes peuvent portées sur les ressources
elles-mêmes ou sur leurs modes de mobilisation.
relation extérieur et surtout dans la définition
de ce qu'est «l'intérêt national «d'un Etat. Un
intérêt qui ne fait pas souvent partie de l'attention de la
population. Dans les pays développés il s'agit des lobbies, des
multinationales, ou des intellectuelles représentant d'une
idéologie4 ou d'un courant (ex les conservateurs) qui
influent sur les orientations de la politique de l'Etat.
II- Les stratégies concevables
Savoir gérer une conflictualité aussi permanente
que polymorphe et imprévisible est dès lors le premier
impératif de l'homme politique car pour Machiavel, l'unique
pensée et l'unique objectif est d'abord savoir quand, pourquoi et
comment faire la guerre. Dans cette configuration, il n'est pas d'hommes
politiques qui ne doivent être un fin stratège. A
l'évidence, l'intelligence est une des ressources essentielles au
commandement, cependant, les stratégies déterminent
réellement la volonté des acteurs.
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