SECTION 1 : ANALYSE MULTIDIMENSIONNELLE
DE LA FAIBLE BANCARISATION
La présente analyse vise la détermination des
facteurs explicatifs de la faible bancarisation dans les pays de l'UEMOA et en
particulier au Bénin grâce à un aperçu de plusieurs
aspects à savoir : l'environnement socio-économique, le cadre
juridique et règlementaire ainsi que le système bancaire et
financier.
Paragraphe1 : L'environnement global, le
système bancaire et financier et les Institutions de Microfinance
I. L'ENVIRONNEMENT GLOBAL
Les traits caractéristiques de l'environnement global
concernent le cadre macroéconomique, le cadre juridique, les
infrastructures de base et l'alphabétisation.
A. L'insuffisance de la croissance économique, le
faible niveau du revenu et la prédominance du secteur
informel.
A l'instar des autres pays de l'UEMOA, le Bénin a une
croissance économique relativement instable. Pendant 18 années
(1990 à 2007), le taux de croissance du PIB réel a
évolué en dent de scie. En effet, ce taux est passé de
9,0% en 1990 à 4,6% en 2007 avec des fluctuations plus ou moins grandes
sur toute la période d'observation.
Figure N°2 :
10,0%
9,0%
8,0%
4,0%
0,0%
7,0%
6,0%
5,0%
3,0%
2,0%
1,0%
Taux de Croissance du PIB Réel du
Bénin
Source : INSAE
Commentaire : La figure N°2
montre que le taux de croissance du PIB réel du Bénin est
véritablement instable et est fréquemment faible. En dehors de
l'année 1990 où ce taux s'établit à 9,0%, il
demeure inférieur à 7% tout au long du reste de la période
d'observation (1991 à 2007) avec une hausse maximale de 6,3% en 2001.
Ce rythme d'augmentation du PIB réel dénote de
l'insuffisance de la richesse créée. Les Objectifs du
Millénaire pour le Développement (OMD) fixent à 7% le taux
minimal d'une croissance soutenue pour une réduction significative de la
pauvreté à l'horizon 2015. Actuellement, la croissance
économique du Bénin ne favorise pas la réalisation de cet
objectif parce que, notamment, le taux de cette croissance prend des valeurs
fréquemment rapprochées ou inférieures au taux de
croissance de la population qui s'établit à une valeur moyenne de
3,2%. Cela se traduit, en effet, par une faible croissance ou une
décroissance du revenu par habitant.
Par ailleurs, l'économie béninoise est
dominée par le secteur informel. La preuve est que dans les capitales de
l'UEMOA dont le Bénin est membre, 80,0% environ des emplois sont
créés dans l'informel (Vescovo, Bosquier et Torelli, 2007). Dans
le même ordre d'idée, les résultats d'une
enquête(19) effectuée dans l'Union montre qu'il existe
dans chaque ménage, en zone urbaine, une unité de production
informelle. La même enquête révèle que le secteur
informel ne dispose pas d'un capital suffisant pour la croissance de sa
capacité de production. En effet, ce capital est parfois absent ou
lorsqu'il existe, il a un montant insuffisant pour les besoins de la cause.
De plus, les entreprises du secteur informel ne peuvent pas
bénéficier des crédits bancaires parce qu'elles ne
réunissent pas les conditions les plus élémentaires
(enregistrement au Registre de Commerce et de Crédit Mobilier, tenue
d'une comptabilité, etc) pour y accéder. Cela met en exergue l'un
des maux qui minent l'essor de nos économies : l'inadéquation
entre l'offre et la demande de ressources financières. Les services
offerts par le secteur bancaire et financiers de l'UEMOA ne permettent pas de
couvrir les besoins de la majorité des agents économiques.
(19) : Enquête 1-2-3 de 2001 à 2002
réalisées par les instituts nationaux de statistique des Etats
membres publiée par l'UEMOA
(www.uemoa.int/Publication/2004/RapSectInform2.pdf).
51
APPROCHE ANALYTIQUE DE LA FAIBLE BANCARISATION DANS LES PAYS DE
L'U.E.M.O.A : CAS DU BENIN
B. Une justice inefficace.
Le système judiciaire des pays francophones et en
particulier ceux de l'UEMOA a subi une forte influence de la juridiction
française. Au Bénin, d'après Bako ARIFARI, les
dispositions du code pénal datent de 1930 (en pleine période
coloniale). Serpos TIDJANI a également évoqué la faible
couverture géographique des juridictions pour montrer que l'essentiel de
celles-ci sont dans les capitales et les grandes villes. Il existe alors des
difficultés pour que les populations accèdent facilement aux
juridictions du Bénin.
Par ailleurs, Transparency International a publié en
2007 un document dans lequel il est mentionné que l'administration
publique des pays membres de l'UEMOA est profondément menacée par
une corruption à nul autre pareil qui n'épargne pas l'appareil
judiciaire, notamment. Serpos TIDJANI en a donné des exemples en 2005
pour parler du paiement de commissions indues, de l'activation et l'utilisation
des liens personnels avec le juge, du détournement de deniers publics,
de la négociation illicite des peines qui sont des maux qui minent la
justice du Bénin.
Ces insuffisances de l'environnement juridique constituent
des freins à l'initiative privée dans la mesure où les
investisseurs recherchent la sécurité des affaires qui n'est pas
véritablement assurée dans l'UEMOA. Ceci concerne
l'investissement dans tous les secteurs d'activité y compris celui
bancaire. De plus, l'activité de la banque prospère au fur et
à mesure que les affaires sont intenses.
C. Des infrastructures de base
insuffisantes.
Dans le domaine des transports, d'après le Tableau de
Bord Social 2006(20), le Bénin dispose d'un réseau de
routes bitumées de faible densité. Plusieurs localités
manquent de voie d'accès en bon état. Son réseau
ferroviaire est le plus faible et il ne dispose que d'un seul aéroport,
ce qui ne répond pas aux normes internationales.
Dans le domaine énergétique,
l'électricité est difficilement accessible et quasi- inexistant
dans certaines zones rurales. L'une des manifestations de ce problème
est
(20): Document élaboré annuellement par le
ministère chargé du développement et l'INSAE.
la crise énergétique aigüe connue au
début de ce troisième millénaire.
Dans le domaine des télécommunications,
l'évolution exponentielle de la téléphonie mobile comble
un tant soit peu, certaines insuffisances du téléphone
conventionnel. Alors qu'il existait huit (08) téléphones
conventionnels pour 1.000 habitants (Bénin Télécoms SA),
le nombre de téléphones mobiles était en 2001 de 19 pour
1000 habitants au Bénin (WDI, 2005).
Toujours dans le domaine des télécommunications,
l'internet est devenu chose très courante dans les grandes villes de
l'U.E.M.O.A. Toutefois une franche partie de la population (notamment celle
rurale) ignore tout de ce système de télécommunication. De
plus, il se pose parfois des problèmes de connexion au réseau.
Tous ces problèmes dénotent de l'insuffisance des
infrastructures dont l'existence est primordiale pour l'installation de
guichets de banque.
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