La doctrine de la prestation caractéristique en droit international privé des contrats - une étude critique( Télécharger le fichier original )par Christian Robitaille Université Paris I - Panthéon-Sorbonne - D.E.A. droit international privé et droit du commerce international 1998 |
LA DOCTRINE DE LA PRESTATION CARACTÉRISTIQUE EN DROIT INTERNATIONAL PRIVÉ DES CONTRATS Une étude critique par Christian Robitaille Mémoire présenté au Professeur Vincent Heuzé dans le cadre du Diplôme d'études approfondies de droit international privé et droit du commerce international Université de Paris I (Panthéon-Sorbonne) Le jeudi 10 septembre 1998 TABLE DES MATIÈRES INTRODUCTION PREMIÈRE PARTIE: LA DOCTRINE DE LA PRESTATION CARACTÉRISTIQUE A) EXPOSÉ DE LA DOCTRINE DE LA PRESTATION CARACTÉRISTIQUE 1.- La thèse d'Adolf Schnitzer a) Le point de départ de la réflexion de Schnitzer b) Exposé et fondements théoriques de la doctrine de la prestation caractéristique i) Détermination du contenu essentiel du contrat : le critère de la prestation caractéristique ii) Le rattachement fonctionnel du contrat à l'aide de la notion de prestation caractéristique 2.- Développement ultérieur de la doctrine de la prestation caractéristique B) APPRÉCIATION DE LA DOCTRINE DE LA PRESTATION CARACTÉRISTIQUE 1.- La notion de prestation : son sens et son utilité dans le domaine des conflits de lois en matière de contrats a) Origine de la prépondérance de la notion de prestation b) Contenu de la notion de prestation c) Utilité de la notion de prestation dans le domaine des conflits de lois en matière de contrats d) Précision terminologique e) Conclusion 2.- Le principe de proximité en droit international privé des contrats 3.- La recherche du contenu essentiel du contrat a) Le critère de la nature du contrat i) Considérations méthodologiques á) Inutilité du recours aux comparaisons â) Inaptitude de la méthode ã) À prémisses erronées, conclusion erronée ä) La classification des contrats selon Schnitzer ii) Conclusion b) Le critère de la fonction du contrat i) Appréciation ii) Conclusion c) L' apriorisme inavoué de la doctrine de la prestation caractéristique d) Conclusion 4.- Le rattachement fonctionnel a) Le rattachement proposé b) Justifications i) Considérations d'ordre objectif ii) Considérations d'ordre subjectif c) Appréciation CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE DEUXIÈME PARTIE: LA NOTION DE PRESTATION CARACTÉRISTIQUE ET LES INTÉRÊTS EN CAUSE A) PRÉPONDÉRANCE DES INTÉRÊTS DU DÉBITEUR DE LA PRESTATION CARACTÉRISTIQUE : LES JUSTIFICATIONS DE RECHANGE FONDÉES SUR LE CONTENU CARACTÉRISTIQUE DU CONTRAT 1.- La prestation caractéristique : prestation plus complexe et faisant l'objet d'une réglementation plus intense a) Les arguments b) Appréciation 2.- La prestation caractéristique : la prestation qui comporte le plus de risques a) Le calcul des risques i) Coûts antérieurs à la transaction ii) Les coûts réels et potentiels découlant de la transaction b) Implication en droit international privé des contrats c) Appréciation 3.- Conclusion B) PREPONDÉRANCE DES INTÉRÊTS DU DEBITEUR DE LA PRESTATION CARACTÉRISTIQUE RÉVÉLÉE PAR LES CIRCONSTANCES ENTOURANT LA CONCLUSION DU CONTRAT 1.- Contribution d'une analyse économique du droit : la thèse de M. Gunst a) Exposé b) Appréciation 2- Contribution d'une analyse sociologique du droit : la thèse de M. Heuzé a) Les grandes lignes de la thèse b) Observations 3.- Conclusion CONCLUSION DE LA DEUXIÈME PARTIE CONCLUSION BIBLIOGRAPHIE INTRODUCTIONA défaut de choix de loi, le contrat est régi par la loi du lieu de la résidence habituelle du débiteur de la prestation caractéristique du contrat. Telle est, en substance, la solution générale proposée aujourd'hui par le droit international privé, notamment dans les pays membres de l'Union européenne, en Suisse et au Québec, pour résoudre le conflit de lois en matière d'obligations contractuelles lorsque les cocontractants n'ont pas valablement désigné la loi applicable à leur contrat1(*). Le champ d'application de cette « règle » est controversé. Toutefois, on affirme généralement que cette solution est relativement simple à mettre en oeuvre, et opportune, dans le cas de contrats synallagmatiques intervenus entre des parties résidant habituellement dans des États différents, lorsque le contrat a pour objet l'échange d'une prestation en nature contre une prestation pécuniaire, et qu'il n'appelle pas par ailleurs un traitement particulier en droit international privé, soit du fait de son objet (immobilier, par exemple), soit en raison de l'appartenance d'une des parties à une catégorie de personnes jugées dignes d'une protection particulière (consommateurs et travailleurs, par exemple). Dans le cadre des développements qui suivent, nous nous proposons de nous interroger précisément sur l'opportunité de cette solution au conflit de lois. Afin de ne pas nous éparpiller dans des considérations étrangères à l'objet de notre étude, nous raisonnerons principalement en fonction de l'hypothèse contractuelle décrite plus haut. Ainsi, nous ne discuterons pas de la question de savoir quelles conditions doivent être réunies pour déclencher l'application de la règle de conflit de lois en matière contractuelle. Nous n'aborderons pas non plus en détail le problème de l'interaction entre la « règle » de la loi de la prestation caractéristique et le principe plus large dans le cadre duquel celle-ci s'inscrit dans les différents instruments législatifs qui la consacrent, à savoir le « principe de proximité » suivant lequel le contrat doit être régi par la loi du pays ou de l'État avec lequel il présente les liens les plus étroits. Nous laisserons de côté également tous les contrats dont l'objet ou la qualité des parties justifie un traitement particulier. En outre, nous ne nous attarderons pas à l'étude des variations sur le thème de la « résidence habituelle »2(*). Enfin, nous ne nous occuperons pas des contrats pour lesquels l'identification de la prestation caractéristique est généralement considérée comme impossible (p.ex. les contrats synallagmatiques ayant pour objet un échange de prestations en nature) ou problématique (p.ex. les contrats bancaires). Ceci nous permettra de concentrer notre attention sur la doctrine de la prestation caractéristique là où elle est censée trouver des conditions optimales. Mais d'où vient donc cette idée de faire régir le contrat par la loi du lieu de résidence du débiteur de la prestation caractéristique? Quelle est l'origine de cette doctrine? Quels en sont les fondements théoriques, et quelle valeur peut-on leur accorder? Qu'est-ce que la prestation caractéristique d'un contrat? Quelle utilité cette notion peut-elle avoir pour résoudre le conflit de lois? Nous tenterons de répondre à ces questions dans la première partie de notre étude (I). Ensuite, dans quelle mesure la doctrine de la prestation caractéristique se concilie-t-elle avec les intérêts qui sont mis en cause par la détermination de la loi applicable au contrat en droit international privé? C'est ce que nous examinerons dans la seconde partie de nos développements (II). * 1 Cf. : Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles, art. 4; Loi fédérale suisse du 18 décembre 1987 sur le droit international privé, art. 117; Code civil du Québec, art. 3111, 3112 et 3113. * 2 L'article 4, paragraphe 2, de la Convention de Rome, par exemple, renvoie, selon les circonstances, à la « résidence habituelle », à « l'administration centrale », au « principal établissement » ou à « l'établissement [secondaire] ». Pour les fins de notre exposé, nous emploierons l'expression « résidence habituelle » pour désigner indistinctement tous ces points de rattachements. |
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