Les enjeux géopolitiques de la "percée" chinoise au Sénégal( Télécharger le fichier original )par Xavier Aurégan Institut Français de Géopolitique - Master 2007 |
AnnexeS
* Il est de coutume que, lorsque des projets et aides chinoises sont proposées au gouvernement sénégalais, l'ambassadeur chinois rencontre les personnes mandatées et responsables. Exemple : le 15 Janvier 2007, l'ambassadeur Lu Shaye et le ministre des Affaires étrangères, Cheikh Tidiane Gadio, procèdent à un échange de lettres portant sur la remise en état des stades Alassane Djigo de Pikine et Ely Manel Fall de Diourbel. Sources : Agence de Presse Sénégalaise Annexe Iii Liste des produits made in China
relevés.
Autres :
Cette liste contenant obligatoirement des oublis montre avant tout l'hétérogénéité des marchandises importées et vendues par les commerçants chinois. 154 158 Annexe IIn. Carte des grands projets. Site Internet de l'APIX - http://www.investinsenegal.com/ 160 2. Entretiens Dans un souci d'honnêteté envers mes interlocuteurs, j'ai tenté de retranscrire au mieux leurs mots et idées. C'est pour cette raison que je ne rectifie pas certaines fautes et manquements à la langue française. La majorité d'entre eux n'étant pas enregistrés, certaines informations trop parcellaires ne peuvent être retransmises. Présence Chinoise au Sénégal : ? Commerçants installés à Dakar Les réponses étant multiples du fait du caractère quantitatif de cette étude, je ne fournirai ici que les questions posées. J'ai, avec Marie Gaborit, effectué une étude auprès de ces derniers : se reporter au troisième point du chapitre II de la première partie. ? Monsieur Yin Monsieur Yin nous reçoit (avec Marie Gaborit) dans son luxueux restaurant La Noix d'Or, situé sur la Corniche Ouest, à l'ouest de la presqu'île du Cap Vert. X.A : Qui êtes-vous ? M. Yin : Je me définirai comme adepte de Confucius, matérialiste et marxiste-léniniste. Je suis vraiment un mélange. Je viens de la province très riche du Jiangsu. J'ai fait en Chine des études d'agronomie et de la langue française. Ensuite j'ai été envoyé en Afrique pour conseiller les entreprises dans la riziculture afin d'aider le Mali à son indépendance : aides et crédits sans intérêts sur 30 ans. J'ai fait 8 pays africains, le Mali, le Burundi, le Bénin, la Guinée-Conakry puis le Sénégal. X.A : Vous êtes encore payé par l'Etat chinois ? M. Yin : Oui je suis retraité de l'Etat j'ai une pension. X.A : Depuis quand êtes-vous au Sénégal ? M. Yin : Je suis arrivé il y a 4 ans, je me suis habitué au pays mais toujours pas à tout, pas à la cuisine ! X.A : Vous parlez très bien le français... M. Yin : Oui j'ai été environ 30 à 40 fois à Paris dans des délégations et j'ai étudié à Montpellier. J'aime beaucoup Honoré de Balzac que j'ai traduit, le mouvement des réalistes. J'aime aussi Tolstoï... X.A : Comment et pourquoi êtes-vous arrivé à Dakar ? M. Yin : Je suis arrivé pour travailler avec Sénégal Pêche, ensuite, mon contrat terminé, j'ai crée une société d'export-import et de tourisme. Maintenant j'ai ouvert le restaurant et je crée une société dans le PVC, pour les fenêtres... Ici, c'est encore rare mais c'est moins cher que le fer ou le bois et ça résiste mieux... X.A : Et quant aux Chinois vivant au Sénégal ? M. Yin : Il doit y avoir 200 à 250 magasins sur le boulevard donc de 500 à 700 Chinois. Il y a quelques problèmes avec cette population, par exemple, les Sénégalais font des trous dans les murs des boutiques ou des maisons pour voler les marchandises, maintenant, les commerçants dorment dans les mêmes pièces que leurs marchandises. X.A : Comment parviennent-ils à migrer ici ? M. Yin : Les nouveaux migrants n'ont pas de visas, ils les achètent aux fonctionnaires corrompus. X.A : Combien ça coûte ? M. Yin : Un visa c'est 500000 (760 6) et la carte de séjour 1 million (1500 €). X.A : Les médias occidentaux et français parlent beaucoup de la Chine-Afrique... M. Yin : Oui pourtant au contraire des Français, les Chinois ne veulent pas quitter la Chine (en faisant une parenthèse sur la Chine et son économie) : Mao lors de la révolution à émis des objections sur la planification. En France ou aux USA, c'est le contraire. On peut pas tout laisser libéral, faut centraliser car l'état peut mobiliser les capitaux, c'est plus rapide et plus simple pour les achats au contraire des capitaux privés... Les produits fabriqués dans les campagnes ne sont pas aux normes internationales, françaises ou américaines. Dans les campagnes, ils achètent les machines, la technologie occidentale pour produire et vendre sur le marché intérieur et le surplus est exporté. X.A : Les Chinois sont regroupés, organisés ? M. Yin : Non, les commerçants ne se regroupent pas en association, c'est dur de s'unir. Il y a eut une proposition de se confédérer mais c'est pas possible, les commerçants ont un capital trop faible et sont égoïstes, en plus ils se font concurrence donc les prix chutent. X.A : Leurs affaires marchent t 'elles ? M. Yin : Depuis deux ans, ça marche moins car l'UNACOIS met des bâtons dans les roues, ils font pression. Ensuite, le prix du revient augmente, le loyer aussi : avant c'était de 50 (Francs CFA* ou FCFA, soit 76 6) à 100000 (150 €), aujourd'hui c'est 400000 (600 6) et les magasins de 500 (750 6) à 700000 (1050 6). X.A : Par an ? M. Yin : Oui. A Gibraltar 3 c'est 350000 (530 6) mais ici c'est plus cher, il y a moins de voleurs. X.A : Et les conteneurs ? M. Yin : Avant c'était de 7 à 8 millions (10600 € à 12170 6) mais aujourd'hui à cause des douaniers corrompus c'est de 12 à 14 millions (18200 € à 21300 6). X.A : Et les taxes ? M. Yin : Elles ont baissé de 5 %, de 25 à 18 % pour tous les Sénégalais en 2006 mais pas pour les Chinois, c'est l'inverse (sous-entendu pour les Libanais et Sénégalais, mais la corruption touche particulièrement les Chinois). X.A : 12 à 14 millions, c'est pour dédouaner les conteneurs ? M. Yin : Oui, avant c'était de 7 à 8 mais aujourd'hui c'est 14 : il y a les taxes de douanes, la TVA, l'examen des conteneurs, la main d'oeuvre pour le déchargement, le transport Asie-Afrique. En plus, les Chinois vont en Chine inspecter leurs conteneurs et pour savoir quoi exporter au Sénégal, donc environ 2 fois par an ça fait 2 visas par an... X.A : Combien de temps dure la traversée ? M. Yin : C'est 35 à 45 jours pour le transport, 3 mois maximum. Aujourd'hui il faut 10 personnes pour chaque conteneur mais avant une seule (sous-entendu, il faut corrompre dix personnes). X.A : Quels sont les secteurs qui marchent ? M. Yin : Le textile ça ne marche plus. X.A : Quel est l'investissement pour investir ? M. Yin : Il faut de 2 à 3 millions de Yuan (196000 à 294000 6) pour un projet. Par exemple, dans les produits phytosanitaires ou engrais chimiques, on rachète aux Français pour revendre les produits ici. X.A : Les affaires sont-elles bonnes au Sénégal ? M. Yin : Non, les Africains ne respectent pas les normes, n'ont pas de parole, je n'aime pas travailler avec eux. Ils pensent que les aides sont normales, ils comptent dessus, ils attendent des dons. Mais il faut faire de la collaboration internationale, si les Chinois investissent, il faut un retour sur investissement. Moi je respecte la pensée de Confucius, je respecte mes parents, les règles, la moralité. X.A : Avez-vous des enfants ? M. Yin : Oui j'ai deux filles dont une qui est mariée avec un Japonais... X.A : Et lors de la reconnaissance de Taiwan par le Sénégal, y a-t-il eut des conflits ici ? M. Yin : Non pas de réels problèmes, mais il n'a fallu qu'une semaine pour vider l'ambassade ! (sous-entendu, l'ambassade de Taiwan à été vidée de ses locaux en une semaine, afin d 'y accueillir les Chinois de la République Populaire de Chine en 2005 lors de la réhabilitation) X.A : Pour revenir à la Chine-Afrique, quelle est votre position ou comment voyez-vous cette relation (on parle de pillage ou au contraire de co-développement) ? M. Yin : Les votes africains ont beaucoup aidé la Chine à obtenir son siège à l'ONU, c'est une raison de du soutien Chinois en Afrique. Mais il y a beaucoup de propagande occidentale contre la Chine. Ici, c'est tout petit, au Nigéria, ils sont 50000, en Algérie 100000. Ici c'est comme en Côte d'Ivoire. X.A : Et les produits made in China sont de plus en plus visibles en Afrique... M. Yin : Grâce à la concentration humaine, les produits sont pas chers et tout le monde est équipé. X.A : Mais les détracteurs dénigrent ces produits qui seraient de qualité médiocre... M. Yin : C'est certain qu'ils sont de mauvaise qualité mais que veux-tu, les Sénégalais achètent et demande des qualités toujours moins chers, alors les Chinois fournissent. C'est l'offre et la demande. Mais en Chine on fabrique et achète des produits de meilleure qualité. X.A : Le Sénégal est t 'il une plateforme pour la sous-région ? M. Yin : Non, il n'y a pas de réelle possibilité d'exporter vers la sous-région. Un peu avec la Gambie. Fin de l'entretien, salutations d'usage * 1 Euro est égal à 655, 957 FCFA. ? Madame Yin Madame Yin nous reçoit (avec Marie Gaborit) au restaurant. X.A : En quelle année êtes-vous arrivée au Sénégal ? Mme Yin : Je suis arrivée en 1998. X.A : Quelles études avez-vous faites ? Mme Yin : J'ai étudié à Chicago, l'économie (The University of Chicago Graduate School of Business). X.A: Dans quel secteur travaillez-vous ? Mme Yin : Dans le textile. X.A : Depuis combien de temps ? Mme Yin : Depuis cinq ans. X.A : Vous importez de Chine ? Mme Yin : Oui, selon la demande sénégalaise, je fais fabriquer les produits en Chine. Ces produits sont réservés à l'export, en Chine, on n'achète pas ce type de textile. X.A : Pourquoi ne pas produire sur place ? Mme Yin : C'est la même manière de tisser donc on n'a pas besoin d'investir ici. Par contre, c'est du coton égyptien, car les fils chinois sont trop courts. Il y a environ trente chaînes de montages pour la wax, mais on ne la vend pas au Sénégal, c'est trop cher (tissu africain traditionnel, est vendu au Mali et au Nigéria par exemple). Au Nigéria, c'est le Chan Group qui vend, c'est une grosse industrie reconnue. X.A : Avez-vous des magasins ? Mme Yin : J'ai un magasin à Yoff (nord de la presqu'île du Cap Vert) et deux boutiques à l'angle El Hadj Abdoukarim Bourgi et Lamine Guèye (plateau de Dakar). X.A : Mais comment faites-vous pour créer les motifs spéciaux ? Mme Yin : Pour le design, je copie les motifs et les reproduits en Chine. En Afrique, ils ont un meilleur sens des couleurs. On ne peut pas inventer. On ne crée pas. Pour le batik (technique de teinture du tissu), ce n'est pas la même technologie, on achète le tissu et on peint dessus. X.A : Est-ce rentable d'investir au Sénégal ? Mme Yin : Non, la main d'oeuvre est trop chère, en plus ce n'est pas un grand marché, ce n'est pas intéressant. Par exemple, en Inde, c'est de meilleure qualité mais on produit pourtant en Chine car on veut les prix les plus faibles. X.A : Où sont situées les usines ? Mme Yin : Elles sont dans la province de Shandong (Nord-Est) où il y a une longue histoire du textile. X.A : Vous importez tout de Shandong ? Mme Yin : J'importe du bazar, la wax c'est moins rentable et trop cher pour les Africains. La wax c'est moins de 10 % du marché au Sénégal. Avant 12 yards (unité de mesure) c'était 9500 (15 6) aujourd'hui c'est 7000 (10 €), il n'y a plus de bénéfices pour personne. Je suis la première à avoir importé de Chine la wax et j'ai donc fait baisser les prix. Les Sénégalais veulent toujours moins 100 francs (CFA) mais avant (l'arrivée des Chinois) c'était plus cher, et en plus ils payent le tailleur pour 4000 francs (6 €) ! Au Mali, ils font la différence mais pas ici, ils ne paient pas pour la qualité. Ici ils veulent des prix bas donc la qualité est basse et on change les produits. En Chine, c'est la fabrique du monde, les produits sont importés, transformés et exportés, pas vendus dans le marché intérieur, c'est juste pour la main d'oeuvre. X.A : Vous vendez en gros, détail ? Mme Yin : En gros et par conteneur, il me suffit de trois clients qui ont des boutiques, comme ça je récupère mes crédits facilement. X.A : Vous faites crédit ? Mme Yin : Non, comme ils n'épargnent pas, je ne fais pas d'avances, il faut être clair dès le début. Par exemple si une femme est enceinte, elle ne l'est pas d'hier ! Par contre, pour les maladies c'est de l'imprévu, donc je fais des avances sur salaire. X.A : Que pensez-vous du contexte économique ? Mme Yin : Ici, il y a un problème immobilier, c'est trop libéral, en plus il n'y a pas d'industries, de ressources contre l'inflation générale, donc... Il y a toujours des problèmes d'argent, ici, il n'y a rien, il faut tout importer, donc le Sénégal doit toujours de l'argent, il investit donc la balance commerciale... Le droits de douanes sont élevés donc les produits importés ne sont pas réexportés vers la Gambie qui est un port franc, ou Cotonou. Pourtant, le prix du transport (Asie-Afrique) n'est pas cher, c'est moins de 10 % du prix total. X.A : A combien s'élèvent les taxes ? Mme Yin : Pour le textile c'est environ 50 %. Il n'y a pas de bons économistes, le gouvernement est trop libéral. X.A : Combien de Chinois sont dans ce secteur ? Mme Yin : Il y a trois Chinois. Les Sénégalais vont acheter en Chine aussi. Dans le secteur de l'habillement, 70 à 75 % vient de Chine, le reste d'Inde, du Pakistan, d'Indonésie, de Thaïlande et 1 % d'Europe. Ici, ils gaspillent : quand ils ont besoin de six yards, ils en achètent 8, plus le tailleur qui gaspille... Donc maintenant quand ils ont besoin de 6 yards, je vend 4. X.A : Vous partez en Chine pour les achats ? Mme Yin : Oui, mon mari est trop occidental, il se ferait rouler. Je rentre 2 à 3 fois par an. Ici, la productivité est faible, en Chine, ils travaillent huit heures avec juste cinq minutes de pause toilettes. Ici, il faut trois fois trente minutes pour la prière, ils font la sieste, ils ne travaillent pas le week-end... X.A : Quels sont vos projets ? Mme Yin : Une usine de bois et un investissement avec un Libanais en Gambie (dans le textile). X.A : Y a-t-il une organisation chinoise ? Mme Yin : Non, l'ambassade m'a demandé mais je ne veux pas car il n'y a pas de reconnaissance, pas de retours, ils sont trop individualistes (les commerçants Chinois). X.A : Vos employés dans le restaurant sont Chinois (en cuisine, les serveurs sont Sénégalais) ? Mme Yin : Oui, ils restent deux à trois ans pour se faire de l'argent et rentrent car ils n'ont pas de dépenses, ils sont logés, nourris, blanchis, contrairement en Chine où le logement est très cher en ville. Ici, les Sénégalais profitent des Chinois, ils multiplient par 10 % les loyers mais ce n'est pas normal, on ne loue pas pour six mois ou un an. Moi je loue pour dix ans. X.A : Que pensez-vous de l 'UNA COIS ? Mme Yin : Les Chinois gèrent mal leur implantation, ils font trop de bruit, il ne faut pas faire de commerce de détail, toujours faire en gros sinon il y a des problèmes (les prix sont tirés vers le bas) et sont en première ligne. L'UNACOIS est contre le détail mais les Sénégalais pensent que deux ou trois articles c'est déjà du gros ! X.A : Les Libanais ? Mme Yin : Eux ils ont des prix fixes, sont organisés... Les Chinois grignotent leurs marges pour avoir plus de clients, donc il y a concurrence entre eux. X.A : La politique des Chinois est mauvaise ?! Mme Yin : Oui elle est suicidaire à long terme ! X.A : Et plus largement, en Afrique ? Mme Yin : Les Chinois en Afrique sont là depuis longtemps, ce n'est pas une nouveauté, mais il n'y a pas de nouveaux marchés : ils sont trop pauvres. Fin de l'entretien ? Mission Économique Chinoise Après une rapide présentation (étudiant à l'IFG, faisant une étude de terrain sur la présence Chinoise au Sénégal) qui est de fait effectuée à chaque début d'entretien (c'est pour cette raison que je ne le rappellerai pas), le jeune homme se présente : Je m'appelle Liou. X.A : Quelle fonction occupez-vous ? M. Liou : J'ai le statut de diplomate. X.A : Quel est votre parcours ? M. Liou : Je suis arrivé il y a huit mois. Je suis de la province de Shandong. J'ai étudié le français et le commerce à l'Université de Pékin. Je travaillais au Gabon et au Tchad pour une société de prospection internationale. X.A : Pourquoi l'Afrique ? M. Liou : C'est sur ordre du gouvernement... X.A : Quel est le but de cette mission économique au Sénégal ? M. Liou : On intervient auprès des entreprises... X.A : Lesquelles ? M. Liou : China géologique dans la construction à Dakar, dans l'informatique, les télécommunications. X.A : Combien de Chinois travaillent pour ces entreprises ? M. Liou : Environ trente personnes pour chacune. X.A : Sinon, que faites vous ? M. Liou : Le but est de promouvoir les relations sino-sénégalaises avec le ministère des Affaires étrangères. X.A : Vous avez des relations avec d'autres ministères ? M. Liou : Oui, le ministère de l'Économie et des finances, du commerce, de l'agriculture, dans quasiment tous les domaines... Nous travaillons aussi à la réhabilitation des relations Chine-Sénégal, dans le domaine médical, de l'agriculture, du BTP. Nous proposons aussi une assistance gouvernementale pour le développement du Sénégal. X.A : Vous avez des exemples ? M. Liou : Les travaux du grand théâtre de Dakar : un appel d'offre à été lancé et c'est une entreprise chinoise qui l'a pris. X.A : Donc, des employés Chinois sont sur ce chantier ? M. Liou : Des techniciens, les ouvriers sont sénégalais. C'est un cadeau offert par la Chine lors de la réhabilitation. La mission économique à un rôle d'intermédiaire. X.A : Quelles sont vos relations avec les ministères ? M. Liou : C'est difficile, on a des difficultés pour se comprendre, ils ont leur point de vue, leurs idées, leurs manières de faire, ça prend du temps, ils sont entêtés. X.A : Il y a beaucoup de corruption au niveau gouvernemental, particulièrement... M. Liou : Des fois on accepte les bakchich, car on est au Sénégal... X.A : Quel est votre rôle dans le domaine médical ? Avant la reconnaissance de Taiwan par le Sénégal, la Chine formait des médecins à Ziguinchor, à l'hôpital Silence. M. Liou : Maintenant, on s'installe dans l'hôpital de Pikine (Est de Dakar) à cause de l'instabilité (en Casamance). X.A : Et en agriculture ? M. Liou : C'est des experts agronomes qui viennent, une dizaine, ils font un roulement. X.A : Dans quelle région ? M. Liou : Ils sont installés près du lac Rose (Est de Dakar). X.A : Que font-ils ? M. Liou : Ils donnent une assistance technique, des cours, forment. Ils vont dans les campagnes donner des cours pour le riz et les légumes. Ça marche bien, même si la terre est trop salée ou sablée. On apporte la technique. Sinon on forme des fonctionnaires Sénégalais, une trentaine déjà. X.A : Dans quels domaines ? M. Liou : Dans différents domaines car plusieurs ministères. Le domaine administratif, pour la gestion. Mais on n'est pas encore très bien installé. X.A : Quels sont les fonctionnaires choisis ? M. Liou : On adresse une note verbale au ministère des Affaires étrangères et il transmet aux différents ministères. X.A : Combien de Chinois vivent au Sénégal et à Dakar ? M. Liou : Ils vivent tous à Dakar. Je dirai environ 800. Les commerçants viennent du Henan (centre-Est de la Chine, province pauvre). Ceux qui travaillent pour les entreprises viennent de partout. X.A : Et comment se développent les relations ? M. Liou : Très rapidement, Wade est venu deux fois en Chine. On accorde 40 visas par jour pour les Sénégalais, depuis 2005. En fait c'est pour promouvoir les projets dans le cadre des accords bipartites. Donc on donne une assistance au Sénégal pour les projets. X.A : Avant l'arrêt des relations, la Chine construisait, enseignait... A ujourd 'hui, c'est donc la même volonté ? M. Liou : Oui, par exemple, on va remettre en état les onze stades du Sénégal. X.A : Le gouvernement n'a pas de problèmes avec Wade étant donné qu'il se tourne beaucoup vers les États- unis ? M. Liou : Il va gagner aux élections. X.A : Et concernant la parenthèse avec Taiwan ? M. Liou : Il n'y aurait pas eu de réhabilitation si le Sénégal n'avait pas arrêté avec Taiwan. Fin de l'entretien ? PETROSEN ou Senegal National Oil Company X.A: Bonjour, je vais vous demander votre nom... Bonjour, je m'appelle Mamadou Ka. X.A : Et que faîtes vous à Petrosen ? M. Ka : Je suis géologue à l'exploration. X.A : Vous pouvez me parler des ressources pétrolifères au Sénégal ? (Il me montre la carte des blocs et permis du bassin sédimentaire sénégalais) M. Ka : Selon les couleurs, les blocs sont attribués aux différentes sociétés. Donc lorsqu'une zone est marquée permis c'est qu'une entreprise est sous contrat et qu'elle prospecte. Il n'y a que dans la zone AGC (Agence de Gestion et de Coopération) qu'on exploite (Sud-Ouest du Sénégal, au large de la Guinée Bissau) mais le pétrole est lourd (donc l'extraction est moins rentable). X.A : Qu'est ce que la phase de prospection ? M. Ka : C'est l'étude du sous-sol. Tous les blocs sont en état de prospection, hormis l'ACG où on a donc trouvé du pétrole. X.A : Quelles sont ces sociétés ? M. Ka : Al Thani est basée à Dubaï elle est dans l'immobilier ; Hunt Oil c'est américain, de Dallas ; Fortesa est Américaine également, Maurel & Prom c'est Français, Energy Africa était Malaisienne mais elle a été rachetée par une société irlandaise, Edison c'est Italien. X.A : Combien de puits sont déjà installés ? M. Ka : A l'heure actuelle entre 140 et 142. X.A : Et quelles sont les réserves estimées ? M. Ka : A environ 5OO à 1 milliard de barils. X.A : Et le pétrole prospecté est facile à exploiter ? M. Ka : Disons que pour l'instant ce n'est que du off-shore, mais ce n'est pas trop profond, environ 200 mètres au maximum. Par contre, il y a une zone sismique à Rufisque, et là c'est profond. X.A : Et concernant le gaz de Thiès ? M. Ka : A Thiès, on exploite 60000 mètres cubes par jour. X.A : Oui, on l'a vu, en Mauritanie, le pétrole rapporte, enfin commence à rapporter une manne, certains détracteurs de Wade lui reproche de ne pas dévoiler les véritables ressources... M. Ka : En fait, on est attractif, on a une législation de 1998. Mais il faut tout faire pour faire venir les gens, pour les impôts. D'ailleurs, en Mauritanie, au nord du fleuve Sénégal, c'est une société chinoise qui prospecte. X.A : La CNPC (China National Petroleum Corporation) ? Il y aurait donc du pétrole dans le bloc de Louga ? M. Ka : Oui la CNPC et il faudrait prospecter à Louga mais il n'y a encore aucune entreprise intéressée. X.A : Quelles sont les mesures incitatives ? M. Ka : Par exemple, il n'y pas de taxes lors de l'exploration, d'ailleurs on prospecte pour eux. X.A : Et qu'en est t 'il de la région de Tambacounda, au sud-est ? M. Ka : Elle est prometteuse ! X.A : Oui, le terrain est très faillé, ils ont trouvé du gaz... M. Ka : Oui mais le problème c'est le transport, il faut créer une autoroute, un port en Casamance... Ce sera long et coûteux ! Fin de l'entretien Entreprises ? Nouvelle Société du Textile Sénégalais (NSTS) X.A : Bonjour, quelle fonction occupez-vous à NSTS ? Bonjour, je suis le secrétaire. X.A : Et vous vous appelez... Diongue. X.A : Très bien, quelles sont les principales activités de NSTS ? M. Diongue : On pratique la filature, le tissage, le tricotage, la confection, l'anoblissement (teinture et impression). En fait on est présent de la fibre jusqu'au vêtement. X.A : En quelle année a-t-elle été créée ? M. Diongue : En 1991, en 2002 on a fusionné avec INCOSEN. X.A : Et quel est votre Chiffre d'Affaire (C.A) ? M. Diongue : Le C.A est de 2 milliards (environ 3 millions d'euros). X.A : Que pensez-vous des entreprises chinoises dans ce secteur ? M. Diongue : C'est de la concurrence déloyale ! Au niveau de la main d'oeuvre, de l'électricité, des marges bénéficaires, des ingrédients, et cætera ! A cause d'eux nos activités sont gelées ! C'est pas un coût analytique, les prix et marges sont fixés. X.A : Et comment ces Chinois peuvent-ils vendre à des prix si bas ? Certains vêtements sont vendus au même prix que la matière première, comment l'expliquez-vous ? M. Diongue : Ils se concertent avec le gouvernement ! En plus ils engagent des prisonniers condamnés aux travaux forcés ! X.A : Et que fait le gouvernement sénégalais pour garder ces activités ? M. Diongue : Rien, avant, en 1986, il y avait une commission textile, toutes les importations textile étaient soumises à une commission. En plus il y a la concurrence de la Gambie. X.A : Le textile est acheminé au port franc de Banjul ? M. Diongue : Oui mais ils fabriquent aussi, ils sont moins chers que les Sénégalais. X.A : Comment vous employez-vous pour faire pression sur le gouvernement ? M. Diongue : Justement, là on gèle les activités pour faire pression. On a fermé quatre usines. X.A : Lesquelles ? M. Diongue : Deux a Thiès, une à Louga et une à Kaolack. X.A : Vous êtes soumis aux mêmes taxes que les Chinois ? M. Diongue : Oui mais elles ne sont pas assez fortes pour délocaliser. X.A : Quelle est votre position par rapport à l 'UNA COIS ? M. Diongue : On est avec eux. X.A : Et que faudrait-il pour relancer la production ? M. Diongue : Il faut réinstaurer la commission textile. Elle agréait ou non. X.A : C'est-à-dire ? M. Diongue : Si un tee-shirt chinois était vendu à 300 francs ici et que nos tee-shirts étaient au même prix, les commissaires rejetaient le produit chinois. Fin de l'entretien ? Société des Mines de Fer du Sénégal Oriental (MIFERSO) Bonjour, je suis X.A, étudiant... Bonjour ! Macoumba Diop, géologue. X.A : Qu'est ce que la MIFERSO ? M. Diop : C'est une société étatique autonome. Nos activités c'est majoritairement pour l'Etat. X.A : Quelles sont les sociétés intéressées par le gisement dans la région de Tambacounda ? M. Diop : Il y en a plusieurs. Mitsubishi, Mettal Steel, Kumba Iron Ore (Afrique du Sud) et une entreprise chinoise. X.A : Quelle est l'estimation des réserves ? M. Diop : Les réserves certifiées sont à 450 millions de tonnes. X.A : Et les réserves potentielles ? M. Diop : Les réserves probables sont à 750 millions. Mais pour qu'une entreprise prenne le marché il faut que ces réserves soient certifiées. X.A : Quelle somme représente cette extraction ? M. Diop : En tout environ 2 milliards de dollars. X.A : J'ai lu dans la presse que pour extraire le fer, l'Etat envisage de moderniser le port en Casamance ? M. Diop : En fait il y a quatre composantes dans ce projet : il y a la mine, le chemin de fer à construire vers le port qu'il faut donc moderniser et la sidérurgie. X.A : Et à quelle date le gisement sera exploitable ? M. Diop : D'ici deux ans minimum mais l'exportation en elle-même d'ici quatre ans. C'est le gisement de fer de la Falémé pour préciser. X.A : Y a t'il d'ores et déjà des sociétés sur le terrain ? M. Diop : Oui, la Kumba pour certifier les réserves. Si les 750 millions sont prouvées, la durée de vie de la mine sera donc de trente années au rythme d'une exploitation de 25 millions par année. X.A : Selon vous, quelle est la mieux placée ? M. Diop : Kumba et Mittal je pense. Peut être un joint venture ?! Fin de l'entretien ? China Shipping Container Lines Shenzen Co., Ltd Dongguan Branch (CSCL) Bonjour, comment je vais tout d'abord noter votre nom s'il vous plait. Bonjour, je suis Sogui Diop. X.A : Quelles sont les activités de votre entreprise ? S. Diop : On fait de la manutention, consignataire, transitaire. On est un agent maritime en quelque sorte. X.A : Lorsque j'étais venu la première fois, votre collègue m 'a informé de votre voyage en Chine... S. Diop : Oui, c'est mon deuxième voyage. Je ne suis agent que depuis un an. X.A : Et que faisiez-vous ? S. Diop : C'est une réunion d'agences avec 150 personnes de partout dans le monde. X.A : Vous parlez chinois ? Quelle est votre qualification ? S. Diop : Eh non, c'est trop difficile ! Sinon je suis agent importateur. X.A : Et depuis quand est t 'elle créée ? S. Diop : Depuis les années 1970. X.A : Vous pouvez m'expliquer l'objet de l'entreprise ? S. Diop : En fait, CSCL est un armateur basé à Shanghai, ici on représente les agents de Dakar. X.A : Et combien de navires la société possède t 'elle ? S. Diop : Environ 70. X.A : Qui font le transit Chine-Sénégal ? S. Diop : Non, ici c'est juste un bateau tous les quinze jours. X.A : D'accord. Et combien de conteneurs ? S. Diop : C'est 4000 conteneurs, dont 200 pour Dakar. On en prévoit jusqu'à 400. X.A : Quel est le trajet des transporteurs ? S. Diop : C'est Dakar, Côte d'Ivoire, Ghana et Nigéria. Il y a différents conteneurs : 20 pieds c'est 18 tonnes et 40 pieds c'est 25. X.A : Quels sont les produits exportés, importés ? S. Diop : C'est surtout du divers, par exemple de l'habillement pour l'import et du coton, sel et poisson à l'export. Mais il y a beaucoup d'armateurs qui importent et exportent vers la Chine, par contre on est le seul pavillon chinois. X.A : J'ai lu dans la presse, Jeune Afrique pour le citer, que le gouvernement chinois est en instance de créer une nouvelle route commerciale vers l'Afrique de l'Ouest pour éviter l'Espagne ou l'Italie... S. Diop : Non, je ne suis pas au courant. Nous, on vient d'Anvers vers Dakar. Mais dans tous les ports, Côte d'Ivoire, Ghana, Nigéria, Afrique du Sud, on a des agents représentants. X.A : Et que pensez-vous des Chinois, de la Chine ? S. Diop : Je trouve ça très intéressant de travailler avec eux. C'est un grand peuple, ça me fait plaisir. X.A : Existe-t-il des armateurs avec des liaisons plus régulières ? S. Diop : Oui par exemple Delmas il y a des bateaux réguliers, toutes les semaines. Fin de l'entretien, c'était l'heure de la prière. Syndicats et représentations ? Union Nationale des Commerçants et Industriels du Sénégal (UNACOIS) Je suis reçu par Ismaël Dikhaet, secrétaire départemental de la région Dakar pour l'UNACOIS. En attendant le président Moustapha Sakho, il m'explique son statut et ses activités. Il est président de la section UCAD de l'UNACOIS (pour l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar). Il est présent à l'Union depuis deux ans et représente les prestataires de services de l'Université. Arrive donc le directeur général. X.A : Quelle est la date de création de l 'UNACOIS ? M. Sakho : De 1989. C'est le plus grand syndicat, on compte 100000 membres. X.A : Comment devient-on membre ? M. Sakho : Il faut être commerçant et acheter la carte 2000 francs (3 euros) et cotiser à hauteur de 5000 (7,60 euros) à un million (1500 euros) selon la taille de l'entreprise. X.A : Vous êtes subventionné ? M. Sakho : Non. X.A : Pourquoi intègre t 'on l 'UNACOIS ? I. Dikhaet : Pour le dynamisme ! Avec l'UNACOIS, on a un réel poids... X.A : Et ce sont donc toutes les entreprises ou commerçants... M. Sakho : Oui, des entreprises informelles aux PME. X.A : Vous êtes donc le relais politique des commerçants ? M. Sakho : Oui, avant, il y avait des contraintes, on était pourchassé dans nos limites, et les commerçants allaient plutôt voir les marabouts. Mais mieux vaut se réunir ! X.A : Parlez-moi de la grève et des manifestations anti-chinoises... M. Sakho : Eh bien, pendant trois jours on a fermé les boutiques, on a fait un blocage sur tout le territoire, le pays était bloqué et l'état a eu peur ! Mais on a fait d'autres grèves, pour le riz : le prix du riz était géré par l'état mais les commerçants voulaient libéraliser le prix et on avait le soutien de la Banque Mondiale donc la filière s'est libéralisée même si le riz est importé. X.A : Le Sénégal est producteur pourtant le riz est importé... M. Sakho : Oui, mais aujourd'hui il y a le choix, il n'y a plus de rupture, il y a différentes qualités. Avant, on n'avait qu'un choix, maintenant, on mange du riz thaïlandais, vietnamien... X.A : Au sujet des commerçants Chinois ? M. Sakho : La grève de 2004 était contre les Chinois et contre le sucre. Une entreprise française ne devait pas importer juste produire sur place, en plus elle a le monopole, ce n'est pas encore libéralisé. X.A : Il y avait combien de Chinois lors de la grève ? M. Sakho : En 2003, ils étaient une dizaine mais depuis ils augmentent tous les ans ! On veut briser leur mécanisme, leur stratégie. X.A : Expliquez-moi... M. Sakho : Ils ne vendent que des produits chinois, fabriqués par eux-mêmes, au Cameroun c'est différent. On parle même du mouton chinois importé pour les fêtes ! X.A : Que pensez-vous des produits made in China ? M. Sakho : C'est de la qualité zéro. En plus leurs produits sont pas règlementés, les jouets et chaussures par exemple ne répondent pas aux conditions tropicales. X.A : La qualité est mauvaise mais c'est la demande qui détermine l'offre... M. Sakho : Oui la qualité est nulle mais il faut faire en sorte que les bons produits soient accessibles par tous. X.A : Comment expliquez-vous l'implantation des commerçants chinois sur le boulevard (du général de Gaulle) ? M. Sakho : C'est évidemment parce que le boulevard est bien entretenu, c'est une fierté à Dakar le boulevard ! En plus, ici ils sont accessibles, le toubab (Blanc en wolof) n'est pas trop accosté. X.A : Ils logent également à Gibraltar (quartier résidentiel jouxtant le boulevard)... M. Sakho : Ils occupent toutes les maisons parce qu'ils payent jusqu'à un million et demi (plus de deux milles euros) ! X.A : Et concernant les douanes ? M. Sakho : On nous a dit que les Chinois produisaient eux-mêmes sur place ! X.A : C'est-à-dire ? M. Sakho : Ils montent eux-mêmes les produits dans leurs commerces ou maisons, ce sont de petites industries ! Ils déchargent même la nuit pour ne pas se faire voir ! X.A : Et en ce qui concerne les conteneurs ? M. Sakho : Ils déclarent la moitié et passent sans payer toutes les marchandises. X.A : Comment se passe l'arrivée au port ? M. Sakho : Au départ, c'est un Sénégalais qui dédouane car le conteneur est au nom d'un Sénégalais, c'est un intermédiaire qui dédouane... X.A : Et pendant l'arrêt des relations ? M. Sakho : Là c'était des semi-clandestins, venus comme touristes donc en situation irrégulière. X.A : J'ai appris que les Chinois achètent leurs passeports... M. Sakho : C'est vrai. Le premier Sénégalais qui a travaillé avec eux a gagné beaucoup d'argent, il a même appris le chinois. X.A : Il s'appelle comment ? M. Sakho : Moustapha mais il est en France maintenant ! X.A : Et vous avez des relations avec la mission économique chinoise ? M. Sakho : L'année dernière l'ambassade de Chine est venue pour résoudre les problèmes. Aujourd'hui on a plus de relations. X.A : Vous aviez interpellé le gouvernement ? M. Sakho : Oui, Wade. Il nous avait dit qu'on peut pas interdire les Chinois parce qu'il y a des Sénégalais partout dans le monde. Il y a des Sénégalais en Chine qui font du transit... X.A : D'accord. J'ai appris que les Chinois se font concurrence entre eux... M. Sakho : Oui ils vendent au même prix en gros ou en détail ! Il y a un problème, tout le monde qui dit vendre en gros vend en détail dans des boutiques ! A cause d'eux, on ne trouve plus de bonnes ! Elles viennent travailler une journée et l'autre elles vont acheter sur le boulevard pour tel prix et revendent dans les quartiers. X.A : Donc, ils créent de l'emploi ?! M. Sakho : On peut dire ça mais juste entre 300 et 500. Ce n'est pas bien, c'est de l'informel, ils ne payent pas d'impôts... Maintenant c'est fini, avant on avait des rues qui nous appartenait ! X.A : Concernant les Libanais... M. Sakho : Eux, ils participent à la vie locale, les Chinois ne dépensent pas, ils importent même le papier toilette ! Ils ne vont pas à la banque, il y a une fuite des devises qui sont converties en dollar et rapatriées en Chine ! X.A : Vous ne voulez aucun Chinois à Dakar ? M. Sakho : Peut être pas mais il faut réglementer, les limiter sinon demain ils seront dans toutes les villes. A terme, leurs cartes de séjour ne doivent pas être renouvelées, il faut rester à 800 comme nous l'avait promis Wade mais les douanes ont augmenté les cartes de séjour. Il faut des commissions, multiplier par deux pour les obliger à partir d'eux-mêmes. Les Chinois n'achètent pas leur marchandise : on leur envoie de Chine et lorsqu'ils ont vendu, ils rapatrient les devises. Le gouvernement chinois les incite : il y a un système pour envoyer les Chinois ailleurs : ils sont subventionnés par l'état. Ce sont des éclaireurs ! X.A : Et à quelle fréquence les conteneurs arrivent-ils à Dakar ? M. Sakho : De Chine, en moyenne une dizaine par jours. X.A : Comment réagi la Chambre de Commerce ? M. Sakho : Elle nous soutient, les artisans en ont assez, ils ne vendent plus. X.A : S'ils ne vendent plus c'est parce que leurs prix sont trop hauts par rapport à la concurrence ?! M. Sakho : Oui, les Sénégalais ne peuvent pas payer les bons produits. X.A : En Afrique, les commerçants Chinois s'implantent de plus en plus, est-ce positif ? M. Sakho : Non, pas du tout, cela fait du chômage, surtout pour les petits commerçants. X.A : Et qu'elle est l'évolution possible pour ces prochaines années ? M. Sakho : Il est certain que si le gouvernement laisse les Chinois s'installer ils seront des milliers, comme aux Etats-Unis ou en France ! X.A : Enfin, pourquoi ne pas fédérer les deux UNA COIS pour faire pression, d'un bloc, sur le gouvernement ? M. Sakho : C'est tout à fait vrai, en février, nous allons tenter de nous réunir pour être plus gros et ainsi avoir une parole forte avant et après les présidentielles. Fin de l'entretien, salutations d'usage. ? UNACOIS-Développement économique et financier Je me présente aux locaux de l'UNACOIS-DEF situés en plein centre du quartier commercial du Plateau de Dakar. Les deux hommes finissant leur prière sur un tapis placé dans une grande cour m'envoie Oussynou Niang, le secrétaire permanent. X.A : Bonjour, je suis passé à l 'UNA COIS sur le boulevard. J'aimerai connaître votre point de vue quant au fait chinois et notamment sur les commerçants. O. Niang : Oui, comme l'UNACOIS, on est monté au créneau pour interpeller les pouvoirs publics. Pour la commission d'implantation des migrants. Même si avant cette époque, on n'avait pas de relations avec le gouvernement chinois. X.A : C'est l'époque de Taiwan ? Et vous n'aviez aucune relation ? O. Niang : Oui mais on avait tout de même des relations commerciales. X.A : Que pensez-vous de ces Chinois ? O. Niang : C'est de la concurrence déloyale ! C'est un géant ! X.A : Et concernant les commerçants ? O. Niang : Pour eux, ils ont vu leur chiffre d'affaire baisser de plus en plus. X.A : Vous avez donc participé à la marche ? O. Niang : Oui mais elle n'était pas autorisée, pendant la grève, tous les rideaux étaient baissés. X.A : Que diriez-vous des produits made in China ? O. Niang : C'est un problème car ce sont des produits de pacotille ! X.A : Pourtant les Sénégalais se déplacent en Chine pour importer ?! O. Niang : Oui mais ils ne sont plus concurrentiels ! Pourtant le Sénégal a signé la loi anti-dumping ! Mais la matière première est au même prix que les produits finis, donc les commerçants Sénégalais sont toujours pénalisés. Les produits ne sont pas certifiés, c'est de la pacotille et il n'y a pas de structure qui règlemente. X.A : Comment arrivent-ils à vendre ces produits à de tels prix ? O. Niang : C'est parce qu'ils importent des pièces détachées. Pas des produits finis. Ils fabriquent sur place, sous les comptoirs, ils ont des usines de transformation, de montage. C'est un système mystérieux, opaque ! X.A : Mais les Sénégalais n'achètent de toute manière aucun produit de qualité, ils préfèrent acheter le même produit trois fois par an mais à un prix très bas. O. Niang : Oui mais avant le Sénégalais avait le goût de la qualité, aujourd'hui c'est juste un besoin de se satisfaire. X.A : Et les Libanais ? O. Niang : Eux ils sont sérieux, ils vendent de la qualité mais ils ne sont pas non plus épargnés par les Chinois donc ils collaborent avec eux. X.A : Comment cela ? O. Niang : Ils achètent ensemble un conteneur et vendent les mêmes produits. X.A : Par exemple ? O. Niang : Le Sénégalais lambda ne fait pas la différence entre la mauvaise et bonne qualité. C'est dans tous les domaines mais aujourd'hui on ne fait plus la différence entre un robinet français et chinois, la copie est excellente. X.A : Pour les Chinois, comment font-ils pour investir alors qu'ils viennent majoritairement d'une province très pauvre, paysanne ? O. Niang : C'est pas difficile, ils peuvent investir en moins d'une semaine, ils envoient par Internet ! X.A : Ils créent des emplois ? O. Niang : Non ! C'est de l'exploitation, de l'esclavage ! Ils inondent le marché de leurs produits défectueux ! X.A : Ils ne participent pas à l'économie ? O. Niang : Non, il faudrait qu'ils investissent dans les secteurs porteurs, pour le PIB (Produit Intérieur Brut), il n'y a pas de transfert de technologie ! Les Sénégalais ne bénéficient pas de leur technologie. En plus, on envoie des déchets au Sénégal, les limites de péremption sont dépassées ! X.A : Vous pouvez me parler de l'UNACOIS-DEF ? O. Niang : Oui, on représente 60000 commerçants, et quelques industries. On a comme mission d'intervenir dans la micro finance, on facilite les visas, on est partenaire avec la France, l'Indonésie, l'Iran, Dubaï, avec l'ambassade l'Inde... X.A : Avec les États-unis ? O. Niang : Non, on s'est juste limité à des discussions. X.A : Selon vous, que représente le secteur dit informel ? O. Niang : C'est environ 60 % du PIB. Mais on préfère l'appeler l'économie populaire. Vous savez ici on ne parle pas d'informel ! C'est un concept flou dont la définition pose problème ! X.A : Et dans le tertiaire ? O. Niang : Non, vous savez le tertiaire tourne au ralenti ! Fin de l'entretien. ? Conseil National du Patronat (CNP) Je m'entretien avec Monsieur Papa Nall Fall, président de la commission économique et financière et responsable au Conseil de la République pour les affaires économiques et sociales. X.A : De quelle année date le CNP ? Papa Nall F. : De 1961, pour répondre à votre prochaine question, notre budget est de 4500 milliards par an (moins de 7 millions d'euros). X.A : D'accord ! Vous représentez qui et combien ? Papa Nall F. : Environ 27 syndicats pour 1200 entreprises. X.A : Travaillez-vous avec les entreprises chinoises ? Papa Nall F. : Oui, avec Henan Chine, dans le BTP. X.A : Oui c'est l'entreprise qui travaille sur l'autoroute ? Papa Nall F. : Oui, et Jean Lefèbvre est en association avec l'entreprise chinoise pour l'élargissement. X.A : Vous représentez beaucoup d'entreprises françaises ? Papa Nall F. : Toutes, les vieilles et les plus jeunes. X.A : Concernant les Chinois, que représentent-ils dans l'économie ? Papa Nall F. : Très peu, la part de marché est faible, ils sont surtout dans les petits commerces. X.A : Et dans l'informel... Papa Nall F. : L'informel a tendance à gonfler... Pour les entreprises chinoises, tout dépendra de la qualité de l'offre chinoise. X.A : Et font-elles concurrence aux autres entreprises dans les secteurs déjà représentés ? Papa Nall F. : Oui, dans le BTP, le coût a déjà baissé ! Mais il n'y a que des modifications structurelles internes qui permettent d'analyser l'impact positif ou négatif. Il faut du transfert de savoir-faire, de la valeur ajoutée... X.A : Les Chinois sont régulièrement victimes... Papa Nall F. : Il ne faut pas toujours voir le mauvais coté. X.A : Quelles est la position du CNP ? Papa Nall F. : Nous avons des rapports avec le MEDEF (Mouvement des Entreprises de France), alors ce serait anachronique d'être xénophobe ! Fin de l'entretien. ? Confédération Nationale des Employeurs du Sénégal (CNES) Youssoupha Diop, adjoint du directeur exécutif m'accueille. X.A : Qu'est ce que la CNES ? Y. Diop : C'est une organisation patronale qui regroupe des entreprises dans tous les secteurs (industrie, commerce, services, professions libérales...). X.A : Que faites-vous pour elles ? Y. Diop : C'est pour la promotion des chefs d'entreprises sénégalaises (et multinationales étrangères). X.A : Oui... Y. Diop : On ne représente pas les artisans, que le commerce formel, les industriels du textile, de l'emballage... X.A : Combien d'entreprises ? Y. Diop : Environ 1600. X.A : Vous représentez des sociétés chinoises ? Y. Diop : Non. X.A : Ces dernières concurrencent-elles les entreprises sénégalaises ? Y. Diop : Oui mais on ne peut chiffrer les dommages et pertes causées. Mais ce qui est sûr est que le mal existe. X.A : Il n'y a pas d'études qui chiffrent ces dommages ? Y. Diop : Non, je ne sais pas ce que représente en pourcentage ces pertes, il n'y a pas d'études à tous les niveaux... X.A : Quel rôle avez-vous par rapport au CNP... ? Y. Diop : En fait, la CNES a été à la base de la création du CNP, en 1993, il y a eut écartement, des divergences. La CNP s'occupe plus des entreprises étrangères. X.A : Quelle est votre position par rapport aux entreprises chinoises ? Y. Diop : Ce pays est le notre, on a un devoir et une responsabilité citoyenne. X.A : Et par rapport aux entreprises françaises ? Y. Diop : Là, le capital français est important, surtout jusqu'à la fin des années 1980 et 1990, aujourd'hui ça a tendance à s'inverser. Maintenant les capitaux viennent du Maroc, de l'Inde, de la Chine et des pays Arabes. X.A : Et les Libanais ? Y. Diop : Ici ils sont considérés comme Sénégalais, ils sont très présents. Au début ils étaient dans le commerce, aujourd'hui dans les industries, des PME, les industries de transformation alimentaire. Ce sont les Sénégalais qui ont pris les parts de marchés des commerçants Libanais. X.A : Que faudrait-il pour développer l'industrie sénégalaise ? Y. Diop : Beaucoup de choses ! Il faudrait, c'est ce que l'on prône, un environnement favorable aux investissements, notamment dans le secteur industriel. Il faut assainir l'environnement, l'accès à la terre et au foncier. Il faut assouplir le code du travail (embaucher et licencier plus aisément). Il nous faut un vrai secteur judiciaire en cas de conflits, lutter contre la corruption ; et il y a les problèmes des infrastructures, de la mobilité urbaine, le problème des financements des entreprises (car les banques financent peu avec des taux d'intérêts élevés)... X.A : Monsieur Wade tente de le faire, en construisant l'autoroute payante ? Y. Diop : Oui, il y a une volonté de désengorger Dakar. Il y a des critères et des mesures d'encouragement, mais je suis sceptique... X.A : Le nouvel aéroport également... Y. Diop : Oui alors là l'actuel est déjà sous-exploité et il y a des problèmes de mise aux normes alors au lieu de construire un nouveau... X.A : Et les enjeux du foncier ? Y. Diop : Oui, depuis le conflit en Côte d'Ivoire, et l'ONU et les étudiants Ivoiriens, il y a une forte demande. X.A : Oui d'où concentration et spéculation... Les Chinois ont eux contribués à baisser les prix des produits de première nécessité... Y. Diop : Comme vous dites oui, mais la qualité c'est autre chose, mais ça arrange la population... Comme je dis toujours, à Noël, tous les enfants peuvent avoir un cadeau, même s'il dure deux jours ! X.A : Vous avez combattu les migrants Chinois avec l 'UNA COIS ? Y. Diop : Oui, on a tiré la sonnette d'alarme, à cause de l'invasion. Maintenant, avec la réhabilitation, toutes les portes sont ouvertes. Mais on est pas contre qu'ils viennent, à condition qu'ils investissent parce qu'eux tout ce qui les intéresse, c'est de rapatrier les devises ! Les
commerçants sont subventionnés par le gouvernement
chinois. Y. Diop : (haussement d'épaules...) X.A : Oui ? Y. Diop : Ils sont très bien organisés, c'est toute une filière, toute une stratégie, c'est un encerclement, un positionnement. On a même vu des Chinois avec des passeports Sénégalais et une carte d'identité ! X.A : J'ai lu dans la presse que Wade n'est pas contre un Chinatown dakarois ?! Y. Diop : Oui, nous non plus mais il faut réguler en contrôlant les entrées. Fin de l'entretien. ? Association des Consommateurs du Sénégal (ASCOSEN) Le président national Momar Ndao, qui est par ailleurs mandaté comme président des associations de consommateurs à l'Union Économique et Monétaire Ouest-Africaine (UEMOA) me reçoit dans son bureau situé sur la VDN ou voie de dégagement Nord. X.A : Parlez-moi de la contestation des commerçants sénégalais à l'encontre des Chinois. M. Ndao : Oui, c'est un problème économique : les Sénégalais allaient en Chine acheter les produits et les Chinois les ont doublé. De fait, les Chinois vendent tous les produits maintenant : les chaussures, le textile, les bibelots, la maroquinerie, les sacs, les gravures... X.A : Oui j 'ai observé dans certains taxis les photos de marabouts. Le cadre est fabriqué en Chine M. Ndao : Oui, avant les Sénégalais faisaient même faire les photos en Chine et les revendaient 10000 francs (15 6) alors qu'aujourd'hui les Chinois les vendent 1000 (1,5 €). Ils les vendent au prix réel. X.A : Donc les commerçants ont commencé à critiquer ces Chinois... M. Ndao : Oui, ils voyaient leurs marges diminuer, d'où des propos xénophobes. Nous on leur dit qu'un Sénégalais ne peut pas être xénophobe, c'est contraire à l'éthique, de ne pas accueillir. La guerre économique ne doit pas être transformée en xénophobie. X.A : Certains parlent de falsification des permis de commercer ? M. Ndao : Oui mais tout commerçant doit avoir ses documents et si le Chinois le possède c'est bon. Pareillement, tous les étrangers doivent respecter la police aux frontières et les conditions du séjour. X.A : La mission économique chinoise parle de corruption, pour les visas et autres... M. Ndao : Oui, mais les visas sont étudiés par les ministères au cas par cas. Même quand il n'y a pas d'ambassade (exemple : Chinois de la République Populaire de Chine en 2000). X.A : Sinon à l 'UNA COIS on nous a parlé de fabriques derrière les comptoirs ? M. Ndao : Non, les commerçants ne sont pas des fabricants ! On ne peut pas tout remettre en cause ! Par contre c'est vrai qu'ils assemblent certains produits sur place. X.A : Concernant les artisans Sénégalais ? M. Ndao : Oui, eux ne sont pas réellement révoltés, ils sont mécontents de la façon de faire des commerçants en général : avec leurs marges notamment. Ah oui, en plus, ils ne signent pas (made in Sénégal) à la demande des commerçants, pour qu'ils signent made in Italy par exemple ! X.A : Pour quelles raisons, signe d'une meilleure qualité ? M. Ndao : Oui, et selon les moeurs, les meilleurs produits viennent toujours de l'extérieur ! X.A : Pensez-vous que la présence des Chinois est positive ? M. Ndao : Oui c'est certain, aujourd'hui, dans les villages on utilise des verres en verre. Avant, c'était le caoutchouc car ça ne casse pas mais avec les prix des Chinois on achète du verre. X.A : C'est le cas aussi pour les vêtements... M. Ndao : Oui avant on achetait dans des friperies, aujourd'hui pour 1000 francs (1,5 euro), on habille un enfant. Au Sénégal, c'est spécifique, pour les femmes, il vaut mieux pouvoir changer de vêtements que de garder un habit longtemps : si une femme met toujours les mêmes vêtements, elle sera mal vue. Donc, elles préfèrent beaucoup de produits peu chers qu'un de qualité cher ! X.A : Oui par contre les Chinois n'arrivent à copier les motifs sénégalais ? M. Ndao : Oui pour l'instant, mais ils étudient comment faire le bazin. X.A : Sinon, les Chinois ont fait exploser le prix des loyers, notamment à Gibraltar... M. Ndao : Oui, en moyenne c'est 20 % d'augmentation par an ! Cela dépend de la demande. Mais la réelle raison est l'arrivée des organisations onusiennes ! X.A : Sont-ils organisés ? M. Ndao : Il y a une ancienne organisation, l'amitié sino-sénégalaise qui est en léthargie. X.A : D'accord. Concernant la qualité dénoncée ? M. Ndao : Oui, la qualité est relative. Ça dépend de la satisfaction du consommateur. Comme c'est le paraître qui compte... Il n'y a pas de calculs sur le long terme, le consommateur Sénégalais n'a pas de démarche logique, scientifique. Pour les textiles, on peut acheter un tissu de basse qualité mais bien le coudre chez le tailleur. X.A : C'est la même logique au Mali, en Mauritanie ? M. Ndao : Non, le Mauritanien est peu sédentaire. L'homme a toujours une robe blanche et il ne change que les chemises, contrairement aux Sénégalais qui se changent tous les jours. En Mauritanie, l'habit à moins d'importance, ici, on est plus coquets, on suit une certaine mode. X.A : Que feriez-vous pour lutter contre cette concurrence Chinoise ? M. Ndao : Il faut influer sur les Chinois, faire des micro-industries, des usines d'assemblages, même artisanales. X.A : Qu'attendez-vous des Chinois ou des investissements ? M. Ndao : Il faut des transferts de technologie, de la valeur ajoutée. Par exemple, on a du sable et pour faire le verre il nous faut juste des fours ! X.A : Parlez-moi de l 'ASCOSEN... M. Ndao : Oui, elle a été crée le 4 novembre 1989. Nous avons 30000 membres dans toutes les régions et plus de la moitié ont leur carte de membre. X.A : Quelles sont vos revendications ? M. Ndao : La qualité des produits, des services, un bon environnement, des banques de développement, la santé, l'administration, la sécurité des biens, les transports... Si vous voulez savoir, nous sommes un organisme très incriminé ! X.A : Pourquoi ? M. Ndao : Par exemple on a fermé Coca pendant une semaine, à cause de moisissures relevées. On relève aussi des problèmes sur les produits pharmaceutiques qui ne sont pas aux normes, sur ou sous dosés... X.A : Vous avez manifesté contre l 'UNA COIS, en faveur des commerçants Chinois... M. Ndao : Oui nous étions les seuls. X.A : Oui, où sont installés les Chinois ? M. Ndao : Ils sont très marginaux hormis à Dakar. Mais on consomme leurs produits dans tout le Sénégal car peu chers. Cela crée des emplois, surtout chez les femmes. X.A : Quels sont vos moyens d'action ? M. Ndao : On a la presse, une émission de télé en wolof. X.A : Quelle est cette émission ? M. Ndao : C'est Nay Leer (que ce soit clair), c'est pour éduquer le consommateur. X.A : Vous avez des relations avec les asso françaises ? Par exemple 50 millions de consommateurs ? M. Ndao : Oui, on veut s'allier pour avoir de nouvelles idées et moyens. Mais je vais souvent sur leur site pour voir. X.A : Vous êtes présents dans toutes les régions, c'est-à-dire ? M. Ndao : En fait, dans chaque hôpital par exemple, on a une asso de consommateurs. On a aussi un conseil des infrastructures, pour contrôler les infrastructures et leurs cohérences, la transparence. X.A : Pour le BTP? M. Ndao : Là ya un bureau de contrôle. X.A : Vous êtes rémunérés? M. Ndao : Non, nous sommes tous bénévoles, moi je suis consultant. X.A : Il existe des associations au Mali, en Mauritanie ? M. Ndao : Oui, je suis d'ailleurs le président des associations de consommateurs à l'UEMOA. Fin de l'entretien. ? Groupement des Armateurs et des Industriels de la Pêche au Sénégal (GAIPES) Le secrétaire général Monsieur Dougoutigui Coulibaly me salue et m'invite à m'asseoir. X.A : Qu'est ce que la société Sénégal Pêche ? D. Coulibaly : Sénégal Pêche et Sénégal Armement sont des sociétés différentes. Ce sont deux sociétés de droit Sénégalaises qui ont des partenaires Chinois. 51 % du capital est détenu par le privé Sénégalais. X.A : Donc vous travaillez avec eux (les Chinois) ? D. Coulibaly : Oui indirectement. X.A : Combien de sociétés représentez-vous ? D. Coulibaly : 24. X.A : Et Africamer ? D. Coulibaly : Oui elle a des conserveries de thon, des unités de transformation et de congélation. Elle a une flotte ... C'est une société intégrée. X.A : Pouvez-vous me parler du secteur de la pêche au Sénégal ? D. Coulibaly : Oui bien sûr, je vais vous faire un historique rapide... Au départ, c'est le commerce avec les Français, le groupe Adrien Michel. A la fin des années 1970 c'est Senepesca, un groupe Japonais puis au début des années 1980 les Coréens. Les Coréens ne sont pas des investisseurs, ils suivaient le poulpe, c'était des sociétés mal montées et ils travaillaient avec des pavillons de complaisance. Ils payaient comme faire valoir les Sénégalais soi-disant comme partenaires. Quand ils sont partis après le poulpe, on les a retrouvés dans d'autres milieux du monde. X.A : Oui et après ce fut les Chinois... D. Coulibaly : Oui, lorsque les ressources se sont faites rares à cause des Coréens, les Chinois sont arrivés et ont racheté Africa Sea Food (spécialisé dans les sardinelles) mais il n'y avait pas de compétitivité car la transformation et le stockage étaient trop chers. Ils ont investis et acheté des « bateaux glaciers et congélo ». X.A : Il y a eut une excellente année à la fin des années 1990 ? D. Coulibaly : Oui en 1999, le poulpe est revenu et on a exporté environ 124000 tonnes ! X.A : Les Chinois sont plus soucieux de l'environnement ? D. Coulibaly : Oui un peu plus que les autres Asiatiques. Mais il faut une pratique responsable, pas un gaspillage démesuré et être conforme avec la législation. Donc c'est tout de même bien que ce soit le Sénégal qui détienne 51 % du capital. X.A : Ici, les Chinois produisent de la valeur ajoutée ? D. Coulibaly : Oui, il y a des retombées comme la balance commerciale, des emplois, des devises à l'exportation qui reviennent au Sénégal. X.A : Vous n'avez donc pas combattu les Chinois ? D. Coulibaly : Si, nous avons été à l'origine du combat contre les Chinois. Contre le chalutage en boeuf. X.A : Qu'est ce que la chalutage en boeuf ? D. Coulibaly : C'est lorsqu'on tire un filet géant avec deux bateaux ! C'est totalement dévastateur : contre la préservation et la conservation des ressources halieutiques ! Maintenant c'est fini, c'est inscrit dans la loi de 98-02. X.A : Depuis quand ? D. Coulibaly : Depuis 1999, 2000. X.A : Et où en est le secteur de la pêche au Sénégal aujourd'hui ? D. Coulibaly : C'est toujours très important, en terme de stabilité sociale, d'emplois, de devises. C'est 30 % à l'exportation. Même si ça coince, les entreprises ont fermé, en 1993, il y en avait une centaine, aujourd'hui, c'est cinquante ! La crise a favorisé... X.A : Quelle crise ? D. Coulibaly : Les ressources se sont raréfiées, les conditions d'exploitation sont devenues difficiles et le marché de plus en plus dur, il y a une sévère concurrence, on rencontre les produits d'élevage d'Asie, d'Europe qui subventionne ses pêcheurs. X.A : Par exemple ? D. Coulibaly : Par exemple nous les produits sauvages c'est 1000 Francs, celui du Pérou c'est 500 Francs (1,5 € et 0,75 6). X.A : Et quelles sont les conditions d'exploitation ? D. Coulibaly : C'est le gazole, la main d'oeuvre, les différents intervenants, la dévaluation (du Franc CFA en 1994) a été positive pour les prix maintenus en devises pour l'exportation mais multipliés par deux pour l'importation. X.A : La pêche industrielle survit donc ? D. Coulibaly : Oui, il n'y a plus beaucoup de profits mais elle reste la principale donne financière. X.A : Quelles conditions permettraient la relance ? D. Coulibaly : Hum, il faudrait que l'on s'adapte, se réajuste, suivre les techniques et les normes, suivre les volontés des consommateurs. Il faudrait mettre en place un label et créer des richesses au niveau qualitatif. X.A : Vers quelles régions exporte le Sénégal ? D. Coulibaly : A 60 % c'est vers l'Europe. Mais avec l'AGOA (L'African Growth and Opportunity Act), on tente de diversifier, puis vers la Chine, le Canada. X.A : Et l'état investit ? D. Coulibaly : Non, le libéralisme a ses limites ! Il faut pourtant protéger car dans deux ou trois ans on n'aura plus rien. Le Sénégal ne peut plus aujourd'hui obtenir de licences car c'est surexploité ! Mais le secteur est sous contrôle, il est trop important pour le pays, on est conforme aux lois et règlementations. X.A : Le privé est sous contrôle ? D. Coulibaly : Oui. Surtout le privé. X.A : Et pensez-vous que la Chine investirait ces prochaines années ? D. Coulibaly : Non, pas pour l'instant vu les ressources. Si c'est pour augmenter la capacité, la flotte ou pour moderniser les usines, faire de la valeur ajoutée avec des techniques nouvelles, des expertises, du knowledge (connaissance), oui. X.A : J'ai entendu parler de trafics de devises avec les marins chinois ? D. Coulibaly : Oui sûrement ! X.A : Oui ? D. Coulibaly : Sur les plages, quand il y a moins de volumes, il y a des Chinois qui viennent dans les grands hôtels et achètent plus du double du prix pour l'export avec l'agrément des pêcheurs ! X.A : Avant de conclure, vous pouvez me parler des Chinois ? Ils travaillent comment ? D. Coulibaly : On peut dire qu'ils travaillent correctement. Mais c'est difficile avec eux, ils sont liés au gouvernement donc la concurrence est dure. D'ailleurs, quand il y a pénurie de poissons ici, ils se font livrés ailleurs en Afrique. X.A : Ils ont d'autres implantations... D. Coulibaly : Oui, avant ils trichaient beaucoup mais maintenant ça va. X.A : Comment cela ? D. Coulibaly : Ils allaient pêcher dans les zones interdites... X.A : Ils sont bien intégrés ? D. Coulibaly : Non, ils sont très réservés. Moi je n'ai jamais de contacts avec eux contrairement aux Sénégalais (les Sénégalais possédant 51 % du capital de Sénégal Pêche). Ils sont un peu bizarres. En plus ils sont subventionnés par l'état pour faire rentrer les devises. X.A : Oui beaucoup de gens que j 'ai rencontré affirment cela, mais qui peut le prouver ? D. Coulibaly : Pour le prouver c'est très difficile. Tout ne revient pas au Sénégal, il y a toujours la possibilité de faire circuler les devises. Mais comme tout n'est pas vendu ici c'est difficile ! Fin de l'entretien Présence sénégalo-libanaise ? Samir Jarmache Samir Jarmache reçoit chez lui. Je suis accompagné de Jihane Raugemar, étudiante à Bordeaux III et préparant son mémoire sur la population Libanaise au Sénégal. J'ai effectué deux entretiens avec Samir Jarmache : Premier entretien : X.A : Pouvez-vous me parler de la population libanaise vivant au Sénégal ? Ou plutôt de la population libanosénégalaise ? S. Jarmache : Oui car on ne distingue pas les deux ! Les Libanais sont Sénégalais ! X.A : Pouvez-vous me rappeler leur histoire ? S. Jarmache : La diaspora est à l'origine de la misère à cause de l'Empire Ottoman. En 1914-1918, la France, l'Allemagne et l'Angleterre repoussent l'Empire Ottoman. Des pays arabes deviennent indépendants. La France va alors orienter intelligemment les Libanais vers l'Afrique et donc le Sénégal. Les Libanais croyaient aller rejoindre leurs parents aux Etats-Unis mais s'arrêtaient en Afrique de l'Ouest. X.A : Vos parents ont suivis le même parcours ? S. Jarmache : Oui, c'est la première génération, entre 1900 et 1960, il y a eut deux vagues. Mon père est parti vers 1920 car il était orphelin. Il est venu seul. Il est originaire du Nord du Liban. X.A : Vous avez de la famille aux États-unis ? S. Jarmache : Oui, mon oncle. Il est donc arrivé sur un vieux rafiot ! Et il est débarqué vers Rufisque (Sud-Est de Dakar). X.A : Les migrants venaient seuls ou en famille ? S. Jarmache : Ils étaient souvent célibataires. Ils partaient pour les Amériques. X.A : Et durant les guerres... S. Jarmache : J'ai quitté le Liban pendant six ans, vers 1948. X.A : Votre père donc... S. Jarmache : Il voulait partir aux États-unis avec les gens du village mais ils étaient trop fatigués. C'est la première vague. Dans chaque village, dans la brousse, il y avait un commerçant libanais, c'était les pionniers. Moi mon père est resté à Dakar, j'ai donc pu aller à l'école publique à Dakar. X.A : C'est général aux migrants ce parcours ? S. Jarmache : Oui, à 80 %, c'est le cursus familial commun. De toute manière, on ne peut parler d'histoire sans intégrer la question Libanaise. Même la Banque Mondiale en a parlé ! X.A : Aujourd'hui, quelle est votre activité ? S. Jarmache : J'ai deux magasins, plus une quincaillerie et une droguerie. X.A : Ah oui, vous êtes donc de la seconde génération... S. Jarmache : Oui, la troisième est partie aux USA, en France et y reste. Mais elle reste attachée au Sénégal. X.A : Concernant les Chinois vivant à Dakar ? S. Jarmache : Oui, la Chine il y a vingt ans, c'était un phénomène. De toute façon ici tous les Asiatiques sont Chinois. Ils vivent comme des fourmis. X.A : Que faisaient-ils lors de l'arrêt des relations, pendant les relations sénégalo-taiwanaises ? S. Jarmache : Ils construisaient les stades, les hôpitaux, les infrastructures quoi. X.A : Financés par le gouvernement ? S. Jarmache : Oui c'est la Chine qui paye. L'Europe n'a pas vu que quand la Chine met son petit doigt ils s'investissent. Pour Taiwan, ça leur a coûté des milliards, le Sénégal sous Diouf, a tiré son épingle du jeu dans l'agriculture, les infrastructures, la médecine. Il a exploité le clash. Mais quand l'Europe a vu le péril jaune, c'était trop tard. X.A : L'Afrique serait le nouvel eldorado Chinois ? S. Jarmache : Oui c'est sûr ! L'Afrique c'est le continent où la Chine va faire des miracles ! C'est un véritable ouragan ! X.A : Vous connaissez l'histoire des migrants ? S. Jarmache : Il y a maximum cinq ans, les Chinois ont débarqué par familles entières. Mais au départ c'est les Libanais qui sont partis en Chine avec les conteneurs. Comme toujours, les Libanais sont les initiés, ils ont appris où et comment partir aux Sénégalais, la filière et le chemin à suivre. Le problème c'est que les Sénégalais sont autorisés à frauder, pas les Libanais, ils se sont donc enrichis de manière extravagante ! Du coup ils se plaignent aujourd'hui, mais ce sont eux qui ont amené le loup dans la bergerie ! X.A : Et... S. Jarmache : Le Chinois prend le pain de la bouche du Sénégalais qui l'a lui-même pris de la bouche du Libanais ! X.A : D'accord... Vous avez donc vu la tentative des commerçants pour stopper les Chinois ? S. Jarmache : Oui, j'étais au code du commerce ! C'est une concurrence déloyale. X.A : Il y a de fortes disparités entre les Chinois et les Libanais, dans le mode de vie... S. Jarmache : Le Libanais veut un minimum de confort, les Chinois non, ils s'en foutent, ils dorment entre eux, font la loi entre eux... Ah oui, il faut que vous le sachiez pour votre mémoire, à l'époque de la présidence Senghor, il a enlevé les prérogatives aux Libanais, il a empêché les Libanais d'acheter de l'arachide, donc ils n'avaient plus de raisons de rester en brousse et sont revenus en ville pour l'instruction des enfants. X.A : Il n'y a donc plus de Libanais en brousse ? S. Jarmache : Non, nous sommes partout sur le territoire mais en ville. En plus il y a eut des périodes de sécheresse donc les jeunes sont partis. Mais c'est le génie Libanais, on s'adapte à tout... Il y a même une diaspora bis qui est partie en Australie ! Vous voyez ! En fait l'élément Libanais a toujours été combattu ! Les Libanais musulmans ont été interdits d'aller à la Mosquée, d'apprendre l'arabe dans les écoles pour éviter l'assimilation mais on s'adapte ! X.A : Oui vous êtes maronite ? S. Jarmache : Oui mais la majorité sont Chiites à 90 %. X.A : Et les Sunnites ? S. Jarmache : Très peu. X.A : Et les druzes ? S. Jarmache : Pareil. X.A : Vous devez avoir beaucoup de liens avec les Français ? S. Jarmache : Oui mais il y a une différence ! Le Français n'a jamais voulu apprendre le wolof, se mettre au niveau des Sénégalais, le Libanais si. De toute façon, derrière chaque grand homme africain il y a un Libanais ! Mais ça ne se voit pas dans la politique interne car l'Etat est le plus mauvais payeur ! X.A : La seconde génération s'est diversifiée ? Elle n'est plus que commerçante ? S. Jarmache : Oui, ils sont les leaders dans les études, le commerce, l'industrie, le sport, la médecine... On a une culture différente des Noirs. Par exemple, les Blanches mariées aux Noirs repartent toujours un mois après le retour au pays du mari ! X.A : Comment cela ? S. Jarmache : C'est quand le mari revient dans son milieu naturel ! X.A : Les Libanais sont donc bien intégrés ? S. Jarmache : Oui c'est sûr mais c'est différent en France ! Mon frère est professeur de droit à Bordeaux et aujourd'hui il représente la France à l'étranger ! Ici on n'a même pas le droit d'être planton ! X.A : Et la troisième génération se sépare donc du pays ?! S. Jarmache : Oui, elle vient ici comme les occidentaux, pour se faire dorer ! X.A : Quelles sont les organisations libanaises ? S. Jarmache : Il y en a deux principales : l'Alliance mais qui est en stand-by. C'est la Mission Notre Dame du Liban, qui est une association de bienfaisance. X.A : Oui vous êtes le vice-président de l'Alliance, qui est chrétienne ? S. Jarmache : Oui, et le Cheikh pour les musulmans, mais il n'y a pas de distinctions entres communautés religieuses, nous sommes tous Libanais et Sénégalais ! X.A : J'ai entendu une histoire, vous pouvez me la confirmer ? C'est en 1992, 1993, le meurtre de la bonne... S. Jarmache : Ah d'accord ! Oui, elle a été tuée soi-disant par un Libanais, on a frôlé la catastrophe à cette époque ! X.A : Oui, il y a eut des manifestations anti-libanaises ? S. Jarmache : Très peu, c'était une manifestation peu hostile en fait... X.A : Cette bonne (qui travaillait au domicile de Libanais), qui l'a tuée ? S. Jarmache : On a vérifié deux jours plus tard que c'était des dealers ! Ce sont toujours les Libanais qui sont les premiers à être visés ! Heureusement la France était là pour nous protéger ! X.A : Pour revenir à l'Alliance, que fait t 'elle précisément ? S. Jarmache : C'est une association de la seconde génération, créée par des intellectuels pour lutter contre la non-intégration. Il y a aussi une association de docteurs. X.A : Ils sont nombreux ? S. Jarmache : Tous les docteurs ou presque sont libanais, ils sont environ 150. X.A : Combien sont commerçants à Dakar ? S. Jarmache : C'est difficile à dire. Ils sont partout mais très présents rue Diouf et Lamine Guèye. X.A : Et les Chinois concurrencent... S. Jarmache : Ils pénalisent le commerce, nous, on a des clients depuis longtemps, qui demandent de la qualité. X.A : Oui, et où achetez-vous ? S. Jarmache : Je ne fais que recevoir... X.A : De Chine ? S. Jarmache : ... X.A : Les Libanais achètent aux Chinois ? S. Jarmache : Oui mais que les perles. X.A : Que des perles ? S. Jarmache : ... X.A : Pourquoi les Sénégalais achètent aux Libanais alors que les Chinois sont moins chers ? S. Jarmache : Je ne sais pas... Second entretien X.A : Vous me parliez des commerçants chinois... S. Jarmache : Oui, et je préfère un Chinois à un Américain ! X.A : Pourquoi ? S. Jarmache : C'est leur logique, je ne les aime pas... X.A : D'accord, donc les Chinois... S. Jarmache : Oui, c'est l'Etat chinois qui subventionne. Ils vendent les invendus ici. Il y a 5000 conteneurs qui attendent un marché à Hong Kong. X.A : Et que pensez-vous des relations sino-sénégalaises ? S. Jarmache : Ce sont des relations d'Etat à État, on ne peut rien faire, si ce n'est plus intéressant, on partira ailleurs, comme on l'a toujours fait ! X.A : Que faisiez-vous durant la grève organisée par l 'UNACOIS ? S. Jarmache : On était avec eux, on a fait grève en baissant les rideaux. Mais l'accord avec Wade on ne l'a jamais vu de quoi il en était. X.A : Vous êtes donc opposés à Wade ? S. Jarmache : Non, surtout pas, Wade c'est l'homme du Sénégal... X.A : Pour revenir à la communauté libanaise, quel était le rôle de la France ? S. Jarmache : Les Français pour diffuser leurs produits et les produits alimentaires (vivriers et vivriers marchands) dans la brousse déléguaient ces choses aux Libanais. X.A : Et durant l'ère Senghor, vous n'aviez plus les privilèges établis par les Français ? S. Jarmache : Oui, on a été combattu par les autochtones qui avaient certains privilèges, il y avait une loi qui disait qu'on devait renier la nationalité libanaise pour opter pour la nationalité sénégalaise. Bref, aujourd'hui, il y a plus d'hommes d'affaires sénégalais même si on garde des pouvoirs. Par exemple, les privilèges des Sénégalais leur permettaient d'importer des produits finis. Mais grâce au génie, à la ténacité Libanaise, on a une place importante, par exemple de distributeurs. X.A : Et avec les Chinois ? S. Jarmache : Jusqu'à il y a dix ans, la Chine exportait en Afrique et les Libanais y sont allé puis les Chinois ont pris le relais. Les Libanais sont même installés en Chine, à Taipeh, Hong Kong. Ce sont des relais entre les industriels Chinois et les clients Africains. X.A : Les Libanais sont relativement riches ? S. Jarmache : Oui et non, il y a des familles qui vivent dans le besoin et vivent de l'argent de la générosité. X.A : Les Chinois exportent et importent au Sénégal des produits de basse qualité... S. Jarmache : Cà c'est sûr mais avec le temps ils monteront d'un cran... Les Chinois sont partis pour conquérir l'Afrique et rien ne pourra les arrêter ! Les Libanais eux veulent la paix. X.A : Ils n'ont pas de stratégie ? S. Jarmache : Non, il n'y a que l'insécurité qui pourrait les faire partir. X.A : Est-ce positif ou négatif alors cette concurrence Chinoise ? S. Jarmache : C'est bien fait pour eux si les Chinois prennent tout, ils ont été racistes... Il n'y a aucun élu Blanc. On leur en veut et on leur a dit à un moment. Moi je le dis à des responsables. En tout cas la France a un grand rôle à jouer. Même dans le cas des musulmans, en France on les dénigre, mais ici 80 % des intellectuels sont musulmans... X.A : Tous les Libanais ne sont pas affectés par la présence chinoise ? S. Jarmache : Non, les industriels non. Eux gèrent tout. Mais pour le commerce c'est la Chine. Ils achètent tous là-bas, il y a un million d'articles. X.A : Dans quels secteurs investissent-ils ? S. Jarmache : Dans l'immobilier par exemple. Ici chacun à sa maison. Fin des entretiens. ? Commerçants Libanais Un seul commerçant a daigné me répondre : il est situé dans la rue Galandou Diouf. X.A : Vous êtes de la seconde génération ? Oui, mes parents sont restés en brousse. X.A : Vous avez des enfants ? Oui, une fille qui a fini ses études d'expert comptable. X.A : Que pensez-vous de la concurrence Chinoise ? En fait elle touche surtout les Sénégalais, les Libanais sont plus dans l'industrie. Moi je ne suis pas affecté en tout cas. X.A : Vous achetez des produits chinois ? Oui, tout ce que vous voyez (chaussures et textile), ça vient de Chine. X.A : Que pensez-vous de l 'UNA COIS et de sa politique ? Je suis à 100 % avec eux. Moi je suis optimiste ! X.A : Vous êtes musulman ? Oui. X.A : Chiite ? Oui, comme 90 % des musulmans en Afrique ! X.A : Avez-vous de la famille au Liban ? Oui j'ai deux frères. X.A : Et ici... Ici, j'ai par exemple mon beau-frère qui construit un hôtel place de l'Indépendance, vous voyez... X.A : Oui. Le Liban est dangereux en ce moment, que pensez-vous de cette guerre ? Je suis contre, même si on est resté ici, on suit ça de très près. X.A : Est-ce difficile de faire des affaires au Sénégal ? Non, pas plus qu'ailleurs, c'est dans les pays à risques qu'on gagne de l'argent ! X.A : Vous vendez principalement en gros ? Oui, tous les Libanais X.A : Que pensez-vous des Chinois ? .Ils ne sont pas bénéfiques au Sénégal, ils n'apportent rien... X.A : A votre avis, qui paye le mieux ses employés Sénégalais ? Moi je les paye 100000 francs (150 € par mois), plus la nourriture, le transport, car on travaille ensemble, on est de la même famille ! Les Chinois eux les paye 40000 francs maximum (60 €). X.A : A quel montant se trouve le minimum de salaire ? A 55000 (83 €). Vous savez, les Sénégalais ont trois ou quatre femmes, donc il faut des revenus annexes... X.A : Vous voulez parler de l'informel ? Oui de la corruption quoi, c'est un système installé par les colons... Mais ce n'est pas plus corrompu qu'en Europe, en France, ici c'est pour vivre ! C'est le système capitaliste ! On dédouane en Espagne, en Italie, il y a des Sénégalais qui vivent ici mais travaillent là-bas : on n'est même pas obligé de passer par des douanes formelles ! On achète les douaniers qui amènent les marchandises jusqu'à chez nous ! X.A : C'est plus rentable ? C'est plus rapide surtout ! Il faut un mois pour dédouaner et faire entrer le conteneur, par voie informelle c'est une journée ! Fin de l'entretien, il devait travailler. Séminaire de Niar,am du 3 et 4 février 2007 Ce séminaire organisé par Marie Gaborit et dont l'objet est « la Chine et le Sénégal, entre discours officiels optimistes et réalités complexes, comment les chinois étendent-ils leurs présence sur le sol sénégalais et quelles peuvent en être les conséquences pour le pays ? ». Il accueillit Marie Gaborit donc, son père Jean- Pierre, Éric Hazard (à l'ONG Enda Tiers Monde), Babacar Fael et Waël Haidar (employés à Batiplus, société de BTP), Nazrine (amie et future femme de Waël), Yann (retraité, il travaillait avec l'UNESCO à Dakar), Carla (fille de Yann et ayant vécu trente années au Soudan) et moi-même. Il permit d'échanger les idées, représentations, effets positifs et négatifs de la présence Chinoise au Sénégal et en Afrique. Les principaux thèmes abordés furent la présence chinoise au Sénégal, la présence libanaise (Deuxième partie, chapitre II et point 1), l'historique de Sénégal Pêche et Armement (Première partie, chapitre I, point 2).
3. Presse et citations Page 10 « Conformément aux intérêts et aux aspirations des peuples chinois et sénégalais, la République Populaire de Chine et la République du Sénégal ont décidé de rétablir leurs relations diplomatiques au niveau d'ambassadeurs à partir du 25 octobre 2005. La République Populaire de Chine et la République du Sénégal sont convenues d'échanger de nouveau des ambassadeurs et de s'accorder, sur la base de la réciprocité, des facilités pour le fonctionnement de leurs ambassades respectives. Le Gouvernement de la République Populaire de Chine soutient le Gouvernement de la République du Sénégal dans ses efforts déployés pour la sauvegarde de la souveraineté d'État et le développement de l'économie nationale. Le Gouvernement de la République du Sénégal reconnaît qu'il n'y a qu'une Chine dans le monde, que le Gouvernement de la République Populaire de Chine est l'unique gouvernement légal représentant toute la Chine et que Taiwan fait partie intégrante du territoire chinois. Le Gouvernement de la République Populaire de Chine apprécie cette position du Gouvernement de la République du Sénégal. Après la cérémonie de signature, les Ministres des Affaires étrangères des deux pays ont eu un entretien officiel au cours duquel ils ont procédé à un échange de vues approfondi sur les relations bilatérales et les questions d'intérêt commun et sont parvenus à une large identité de vues. ». Xinhua du 25 octobre 2005. Page 17 Le centre agricole de Sangalkam. Les agronomes chinois ont remplacés ceux originaires de Taiwan. Voici leur témoignage : « en quittant ce lieu, nos prédécesseurs ont presque tout emporté : des machines, des ustensiles, des outils... Les pompes à eau ont été bradées et des installations sapées. A notre arrivée en novembre 2006, nous avons trouvé les locaux complètement vides comme une coque d'ceuf cassée déplore le chef de l'équipe d'agronomes chinois, Yang Tingming, 58 ans [...] et ce n'est pas tout, les champs étaient envahis par les herbes folles, si bien que rien n'y pousse sans un aménagement de fond en comble ». L'article ajoute, « planter 25 espèces de légumes comme par exemple les choux, les haricots, les aubergines, les concombres, les tomates, les ciboulettes [...] ont déjà organisé trois séances de formation technique à l'intention des cultivateurs locaux [...] en outre, sachant que beaucoup de personnes sont analphabètes, ils ont conçu un plan de formation plus direct et plus facile à suivre, sous l'appellation « de bouche à oreille et de main en main » [...] très prochainement, l'équipe chinoise va se scinder en deux groupes de cinq membres chacun, l'un toujours à Sangalkam et l'autre à Podor (nord) pour se livrer à la riziculture avec les habitants riverains du fleuve Sénégal. ». Le Quotidien du 22 octobre 2004. Page 18 « Combien sont les Africains qui connaissent le nom de Zhenxing Wei ? Il mérite d'être célébré partout dans le monde, et davantage sur un continent où un enfant meurt du paludisme toutes les trente secondes. Décédé le 7 septembre 1999 dans la ville de Jinan où il servait à l'Institut de Recherche de Shandon, Wei était un professeur de médecine traditionnelle chinoise. C'est lui qui, à partir des années 1960, a mené une enquête sur les propriétés de réduction de la fièvre par l'artémisine. Depuis deux mille ans, les Chinois utilisent la plante médicinale dont elle provient pour lutter contre la fièvre et le paludisme. Ils l'appellent qinghaosu, une armoire dans leur langue. C'est en 1972 que des chimistes chinois ont isolé la substance responsable de son action thérapeutique. Depuis lors, son efficacité a franchi les frontières. Personne ne doute désormais que l'artémisine peut éliminer, en moins de trois jours, le virus et la fièvre causés par le paludisme. Il s'agit d'un médicament qui peut même sauver la vie de ceux qui contractent la version la plus dangereuse, cérébrale, de la maladie. Sa découverte a évité la mort à des centaines de milliers de personnes. Cela mérite d'être souligné au moment précis où les remèdes utilisés en Afrique pendant des décennies, comme la chloroquine, la quinine ou le fansidar, ont commencé à perdre leur efficacité d'antan à cause de la résistance développée par le virus. Aucun autre médicament n'offre, à ce jour, un aussi grand espoir que l'artémisine, mais il n'est que l'un des nombreux traitements que révèlent les résultats obtenus par des siècles de médecine traditionnelle chinoise » Gaye, Adama, Chine-Afrique : Le dragon et l'autruche - Essai d'analyse de l'évolution contrastée des relations sinoafricaines : sainte ou impie alliance du XXIème siècle ?, L'Harmattan, juillet 2006, Paris, pp. 9 et 10. Page 39 « Cinq pays Ouest-Africains s'organisent pour la défense de leurs ressources halieutiques : réunis à Dakar, les ministres chargés de la pêche du Sénégal, de la Mauritanie, du Cap-Vert, de la Gambie et de la Guinée Bissau ont proposé la création d'un comité de concertation doté d'un secrétariat permanent pour la défense de leurs richesses halieutiques dans les domaines de la détection, de la poursuite, et de la répression des navires délinquants dans les eaux relevant de la juridiction nationale des Etats de la sous-région. Par ailleurs, la Conférence a recommandé qu'une attention particulière soit portée à la promotion de la pêche artisanale et à la création de flottes et d'industries locales concernant la pêche ». Car Adrien Senghor, ministre sénégalais du développement rural dit : « il s'agit d'imposer un respect strict de la souveraineté de chaque État face au pillage des ressources maritimes par des pays industrialisés de l'Est comme de l'Ouest dotés de flottes sophistiquées ». M. Senghor fait ici allusion au Japon et à la Corée, mais la Chine continentale est directement visée car intéressée par les ressources halieutiques. La Documentation Africaine, du 26 octobre 1976 Page 40 « Pilier important de l'économie du Sénégal en termes d'entrées de devises, le secteur de la pêche ploie aujourd'hui sous des difficultés sans précédent. Pourvoyeur d'emplois, avec en moyenne plus de 500 000 actifs, 12% du Pib du secteur primaire et 2,5% du Pib total, la pêche traverse une zone de tempête qui oblige les industriels à mettre la clé sous le paillasson. Senemer, Africamer, Sochechal, Interco, entre autres entreprises de pêche, ont fini de se noyer dans les eaux troubles d'une gestion gabégique dépourvue de tout système de contrôle [...] de 2000 à nos jours, pas moins d'une dizaine d'entreprises ont fermé boutique. [...] Africamer a contraint ses 2 500 employés au chômage [...] et la liste est longue pour un secteur occupé à 80% par les femmes. Une catastrophe sociale causée par une combinaison de plusieurs facteurs, notamment la gestion opaque et laxiste de certains chefs d'entreprise, mus par leur cupidité au détriment de l'intérêt de leur société. [...] Africamer, naguère une référence dans le secteur de la pêche, a perdu son lustre d'antan. L'entreprise dirigée pendant longtemps par l'actuel ministre des Sports, El Hadji Daouda Faye, agonise aujourd'hui si elle n'a pas fini de tirer sa révérence. La société se débat dans une situation chaotique. Plus de 2500 employés désormais occupés à raser les murs. Des pères et mères de familles en détresse. Leurs enfants exclus du système scolaire pour non-paiement, sans oublier les centaines de foyers détruits. Les permanents sont restés 13 mois sans salaires. Les journaliers pour leur part, n'ont pas vu la couleur de leur argent depuis plus de 15 semaines. Ils accusent leur directeur d'être responsable de la faillite de l'entreprise » L'Observateur du 17 mai 2006 Page 41 « Le poisson et les produits halieutiques frais constituent le produit d'exportation le plus important et le plus précieux du Sénégal. Le revenu annuel total dégagé par l'exportation des produits marins s'élève à environ 165 milliards de Franc CFA, soit 28 pour cent de la valeur des exportations nationales. Son importance sociale et économique est donc considérable. Or, compte tenu des risques réels de surexploitation, le secteur des pêches est vulnérable. Les pêcheurs artisanaux se plaignent de la diminution des captures, un phénomène imputable, selon eux, aux accords de pêche et aussi, aux bateaux de nationalité asiatique. Cela crée des tensions entre navires de pêche industrielle et pêcheurs artisanaux (en pirogues). Depuis une dizaine d'années, le gouvernement sénégalais s'efforce de contrôler davantage le secteur des pêches, mais la définition et la mise en place d'une politique nationale claire, voire durable reste à définir. En raison de ce manque de vision et des opportunités d'affaires à court terme que représentaient les ressources halieutiques sénégalaises, les entreprises sénégalo-chinoise « Sénégal Pêche » et « Sénégal Armement » ont prospéré, en dépit de la rupture des relations diplomatiques entre les deux pays. La société « Sénégal Armement » a été créée en 1987, lorsque les opérateurs de la « China National Fish Cooperation » ont immatriculé leurs chalutiers en territoire sénégalais, par le biais d'un partenaire local. L'objectif de la société chinoise était ainsi d'élargir sa zone d'intervention pour garantir l'approvisionnement de ses marchés, mais aussi, possiblement, pour accroître l'utilisation d'une flotte surdimensionnée pour les eaux territoriales chinoises. Cependant, en raison de la du déclin des ressources marines du Sénégal et de la hausse des prix du pétrole, seuls 12 des 30 chalutiers initialement en activité sont encore utilisés à ce jour. « Sénégal Pêche » est une usine de transformation de poisson qui exporte principalement ses produits vers l'Europe, et dans une moindre mesure vers l'Asie, où son principal client est le Japon. Le poisson provient de plusieurs source : les prises effectuées par les chalutiers de Sénégal Armement représentent environ 40 pour cent du total, le secteur artisanal et les mareyeurs des aires locales de débarquement de pêche environ 10 pour cent. En outre, 50 pour cent des produits sont fournis par les chalutiers de la CIFC, qui pêchent en Afrique de l'Ouest sous pavillons chinois et de complaisance nationaux, et débarquent leurs captures à Dakar. En 2003, les produits halieutiques représentaient 67 pour cent des exportations globales (en valeur) du Sénégal vers la Chine. Toutefois, l'Asie ne représentait en 2003 que tout juste 7 % des volumes d'exportations sénégalaises de poisson contre 52 % pour l'Europe. La même année, en termes de valeur des exportations, l'Asie représentait 10 % (comparé à 81 % pour l'Europe). Le marché asiatique s'intéresse notamment aux ailerons de requins, aux céphalopodes et aux mollusques. Cependant, le marché chinois est important pour « Sénégal Pêche » puisque la quasi-totalité des produits halieutiques de Sénégal Pêche y trouvent des acquéreurs. Compte tenu des problèmes de surexploitation des ressources halieutiques sénégalaises, des controverses qui entourent l'activité des opérateurs chinois dans les eaux sénégalaises et de la pression exercée sur le gouvernement pour qu'il résolve ce problème, il semble que les entreprises chinoises de pêche devront s'entendre avec les autorités et les pêcheurs locaux pour adapter leurs activités et faire preuve de davantage de transparence. ». Direction de la Protection et de la Surveillance des Pêches Page 46 « Quel secteur d'activité au Sénégal échappe à la contrefaçon ? question facile, réponse sèche : aucun ! Tant pour les marques étrangères que les nationales, le fléau s'étend à tous les secteurs, de la maroquinerie en passant par les oeuvres artistiques, l'horlogerie, la lunetterie, la parfumerie, les cosmétiques, l'électronique, la maroquinerie, les produits d'hygiène, mais aussi le petit matériel électrique, les articles de bricolage, la serrurerie, la robinetterie, la papeterie et surtout les médicaments, sont l'objet d'un marché parallèle qui s'approvisionne essentiellement en Chine [...] mais il est un secteur comme le textile, inscrit comme une priorité gouvernementale dans la fameuse Stratégie de croissance accélérée (Sca) et dont l'impact désastreux de la contrefaçon sur la situation de l'industrie locale est palpable. Une industrie locale qui, déjà confrontée a sa faible compétitivité en raison du coût élevé des facteurs de production, la vétusté des unités (devenues rares), la volatilité du cours mondial du coton, les difficultés d'approvisionnement en matières premières, a du mal à survivre face à la concurrence de la friperie et des tissus étrangers - asiatiques en particulier - et l'importance de la fraude qui signe le déclin malheureux du secteur. ». Que préconise le gouvernement ? « Le directeur de l'Industrie prônait il y a quelques jours, entre autres mesures, « l'instauration du port obligatoire de l'uniforme dans les écoles, doublé d'une suspension de l'importation de la friperie » qui est pour lui « le réceptacle de toutes les pratiques (fraude, contrefaçon, contrebande...) », afin de doper le secteur du textile et de la confection. Mesures pertinentes qui reviendraient à rétablir l'équilibre voire à garantir, ipso facto, par des actions énergiques et sans complaisance, la survie d'une industrie locale très mal en point, d'une filière malade et d'un marché sénégalais du textile bien fripé par une concurrence... contrefaite. Sud Quotidien du 19 mars 2007 Page 48 « Les secteurs économiques les plus touchés par cette concurrence chinoise sont le textile et l'électroménager. D'après l'un des grossistes libanais dakarois, « depuis trois ans, les tissus chinois inondent le marché. Ils ont imité le tissu nigérian, "Angel", reprenant la marque et apposant le logo "garantie wax de qualité" alors qu'il n'y a aucun contrôle et que le tissu est très fin, de qualité médiocre. Le wax Sotiba [usine locale] se vend à 8500 francs CFA le yard alors que le Chinois se vend 7000 francs CFA [...] Tous les magasins maintenant sont obligés de vendre du tissu chinois car c'est ce qui intéresse le client qui a de moins en moins d'argent ». Il semblerait même que les représentants commerciaux de Sotiba soient conduits à racheter eux-mêmes des tissus fabriqués en Chine alors que leur propre usine implantée dans la région dakaroise périclite. Comme partout en Afrique, depuis l'essor de la friperie et aujourd'hui en lien avec la concurrence chinoise, l'industrie textile décline notablement au Sénégal en dépit des multiples restructurations. L'usine Sotexka à Kaolack a fermé ses portes alors que celle de Thiès (FTT) était reprise par la Nouvelle Société Textile Sénégalaise. Mais cette dernière a dû arrêter la production de pagnes africains en 2005, ne pouvant rivaliser avec les tarifs proposés par les fabricants chinois. Premier fournisseur de tee-shirts du pays, elle connaît également des difficultés croissantes sur ce créneau. Les fripiers qui, depuis quelques années, avaient porté un coup sérieux aux vendeurs de wax et couturiers, à mesure que se dégradait le pouvoir d'achat des consommateurs, sont eux-mêmes concurrencés par les commerçants chinois écoulant des vêtements neufs à des prix inférieurs. « Pour 1 000 francs CFA, tu peux avoir un short et un tee-shirt pour la fête de la Tabaski pour ton enfant, ce n'est même pas le prix d'un ensemble à la friperie. Mais dans le futur, c'est dangereux pour celui qui nourrit sa famille car c'est un trou, tu dois remplacer souvent, c'est pas la bonne qualité. » Bredeloup, Sylvie, Bertoncello, Brigitte, La migration chinoise en Afrique : accélérateur du développement ou « sanglot de l'homme noir » ? », Afrique contemporaine, N° 218, Février 2006, pp.199 à 224. Page 49 « C'était un cadre de vie idéal. Il était bâti sur le modèle des logements sociaux qui, alors, poussaient comme des champignons dans la capitale sénégalaise. Refuge de rêve et de retraite, l'endroit présentait l'avantage d'offrir un habitat accessible en termes de coûts, sans oublier la cerise sur le gâteau, qui le rendait encore plus attractif, à savoir sa proximité avec le centre-ville qui permettait d'éviter le piège des nombreux embouteillages qui, déjà, transformaient souvent la capitale sénégalaise en un véritable enfer. [...] Mais brusquement, tout a changé avec la rapidité d'un éclair que personne ou presque n'a vu venir. Comme un tsunami humain, des hommes et des femmes aux yeux bridés, cheveux ras et noirs, aussi discrets que redoutablement efficaces, tels des félins, sont arrivés. Pour se faire une place aux côtés des autochtones, ils n'ont pas hésité à les bousculer, en louant au prix fort la plupart des maisons du quartier [...] leurs maisons furent reconfigurées pour faire place à des échoppes chinoises, mais aussi pour permettre aux nouveaux venus de se loger dans les arrière-cours. Du jour au lendemain, un nouveau « Chinatown » tropical voyait le jour. Gaye, Adama, Chine-Afrique : Le dragon et l'autruche - Essai d'analyse de l'évolution contrastée des relations sinoafricaines : sainte ou impie alliance du XXIème siècle ?, L'Harmattan, juillet 2006, Paris, pp. 25 et 26. Page 56 « S'il est facile pour les vendeurs ambulants et autres rabatteurs de dénicher les lieux où ils peuvent s'approvisionner à moindre frais en jouets et autres gadgets, il reste que le fait de les écouler relève d'un véritable tour de force. En effet, désengorgement du centre-ville oblige, les commerçants ont été chassés du rond-point Petersen, le lieu où la plupart d'entre eux avaient l'habitude d'exercer. D'où la colère de Ibra Sall, porte parole des commerçants ambulants du rond-point Petersen, qui tempête: « pourtant, nous travaillons ici pour gagner notre pain quotidien et voila que cette mesure nous réduit tous au chômage ». Interrogé, ce responsable de la ville de Dakar justifie la mesure de déguerpissement par le fait par que « la situation de Petersen était insoutenable, la circulation était bloquée, car les commerçant avaient pris possession de la chaussée et du carrefour ». Les éternelles courses-poursuites entre forces de l'ordre et commerçants ambulants, dopés par la flopée de produits à bon marché des Chinois, sont loin de s'estomper... » APS du 29 décembre 2004. Page 58 « Les Chinois ont été frustrés de la façon dont ils ont été traités dans le marché de la construction de l'aéroport de Diass [...] le consortium Zakhem/Etat chinois n'a pas été retenu. Alors qu'il était sorti premier devant le groupe saoudien Ben Laden [...] sorti en tête de l'appel d'offres non seulement grâce à la viabilité technique de son offre, mais aussi puisqu'il est moins disant de près de 100 millions de dollars, soit 55 milliards de francs environ [...] il s'y ajoute que le consortium avait déjà mis sur la table quelque 180 millions de dollars [près de 100 milliards de francs] correspondant au financement de 90 % du projet [...] il apparaît désormais que cet appel d'offres a été conduit en totale illégalité. Lequel appel d'offre rappellerait certaines pratiques déjà en exergue lors de chantiers [...] des commissions de près de 20 milliards de francs ont été prévues dans le cadre de ce marché [...] l'homme d'affaires, Pierre Aïm, serait impliqué dans ce dossier. Celui-là même qui avait touché une commission dans le cadre des fonds taïwanais » (cf Chapitre II de la Troisième partie). Wal Fadjri du 2 janvier 2007. Page 61 « Partout ailleurs, à Pékin, Shanghai, Shenzhen, où le « miracle chinois » est en marche, ils sont des millions - plus de 100, selon les statistiques officielles, 140 d'après Human Rights in China [...] à avoir pris, comme Xiang Long, le chemin des villes. Ce phénomène migratoire, consécutif à la politique d'ouverture et de réformes initiée par Deng Xiaoping au début des années 80, est aujourd'hui l'un des piliers de la croissance chinoise. Entassés à la périphérie des villes, les mingong forment un gigantesque réservoir de main d'oeuvre taillable et corvéable à merci. Ils représentent 80 % des ouvriers dans le bâtiment et les travaux publics et occupent près de 70 % des emplois non qualifiés dans le secteur de l'électronique. Ces émigrés sans bagages, fuyant la misère des campagnes et attirés par les lumières de la ville, ne bénéficient d'aucune protection sociale. Ils sont en effet considérés par l'administration comme des ouvriers clandestins, ayant quitté leurs villages sans y avoir été autorisés. Ils sont les dernières victimes du régime d'assignation à résidence mis en place sous Mao pour maîtriser les flux migratoires internes. Bien qu'assoupli, ce système de domiciliation obligatoire, attestée par un certificat, le hukou [...] perdure et continue à diviser la Chine, entre villes et campagnes, faisant de l'ensemble des travailleurs migrants des sans-papiers de l'intérieur. ». Alternatives économiques N° 252 de novembre 2006. Page 72 « Les ressortissants de cette région essentiellement agricole, grande productrice de tabac, vivent dans des conditions misérables d'autant que le froid y sévit une bonne partie de l'année. L'exode en ville constitue souvent leur seul salut. Ils font partie de ces « migrants ruraux » qui, dans les années 1980, en pleine « décollectivatisation » des campagnes, ont afflué de manière temporaire dans les bourgs voisins où une industrialisation des campagnes a été lancée par le gouvernement [...] migrants les moins démunis s'appuient sur les réseaux en place pour envisager une migration internationale. ». Bredeloup, Sylvie, Bertoncello, Brigitte, La migration chinoise en Afrique : accélérateur du développement ou « sanglot de l'homme noir » ? », Afrique contemporaine, N° 218, Février 2006, pp.199 à 224. Page 83 « Je suis très content des nouvelles relations entre la Chine et le Sénégal » a déclaré dans un français approximatif, Gao Feng, commerçant arrivé à Dakar il y a six mois [...] avant, se souvient-il, « tout était difficile. J'espère avoir une carte de séjour avec la réouverture de l'ambassade de Chine populaire à Dakar ; c'est bon », s'est exclamé de son côté, Hui Dong installé à Dakar depuis quatre ans pour étudier le français. Il estime que cette nouvelle donne favorisera les échanges universitaires entre les deux pays, « il était très difficile pour nous de venir étudier ici », se souvient Hui Dong ajoutant que beaucoup d'étudiants chinois aimeraient venir apprendre le français au Sénégal. « Mais avec toutes les difficultés pour avoir les papiers, ils abandonnent », déplore-il qu'avec la reprise prochaine des activités d'une ambassade, les choses vont changer ; Pour Feng Wei, la reprise des relations vient atténuer le « calvaire » que vivent, selon lui, les Chinois au Sénégal. « Notre prochain ambassadeur au Sénégal va coopérer avec la police pour nous sécuriser ici », espère-t-il. Il souligne que ce nouvel accord va améliorer les relations commerciales entre les deux peuples ». Côté Sénégalais : « Nous ne sommes pas contre les Chinois, mais ce sont leur façon de faire que nous n'aimons pas », déclare-t-il ajoutant qu'en plus « leurs produits ne sont pas bons et c'est la raison pour laquelle ils vendent à 100 francs CFA ce qui doit coûter 500 francs ». Saliou Séne, un autre commerçant, ajoute : « le rétablissement des relations est une bonne chose, c'est dans notre intérêt mais, les chinois doivent partir parce que ce qu'ils vendent n'est de la bonne qualité. Depuis qu'ils [les commerçants chinois] sont arrivés, tu peux rester une journée entière sans rien vendre et tu es obligé de payer les taxes » a-t-il déploré estimant que le gouvernement a tardé à rétablir les relations avec la Chine populaire. « On attend la suite », indique un vendeur d'appareils électroniques, membre de l'Union nationale des commerçants et industriels du Sénégal (UNACOIS), organisation ayant toujours dénoncé la concurrence déloyale des Chinois. « La Chine populaire nous arrange le plus. Le commerce mondial se fait aujourd'hui en Chine. Et nous avions d'énormes problèmes pour obtenir des visas » a ajouté le commerçant sous le couvert de l'anonymat. « J'ai un visa de Chine mais à chaque fois que je quitte une ville pour une autre, au cours de mes voyages en Chine, je rencontre beaucoup de problèmes. Il nous faut aller jusqu'à Paris où Dubaï pour le visa », raconte-il espérant qu'avec l'accord signé mardi à Pékin, ce sera plus facile et moins cher. La gérante d'un magasin de porcelaine à Sandaga, le grand marché du centre-ville de Dakar estime que si c'est simplement pour avoir une place de permanent au conseil de sécurité de l'Organisation des Nations unies (ONU) que le Sénégal à fait ça, ça ne vaut pas le coût. « On a laissé les Taïwanais investir des milliards dans le pays et subitement on rompt avec eux, c'est de la malhonnêteté » a-t- elle déploré en se posant des questions sur ce que le Sénégal va chercher dans la jungle qu'est l'ONU où seuls les riches commandent. Abondant dans le même sens, Xian Li Lang alias Singua, s'est dit « très contente en espérant beaucoup plus de sécurité et moins de problème dans les affaires. Le rétablissement des relations entre la Chine et le Sénégal va permettre aux Chinois de mieux connaître le Sénégal », pense M. Wei relevant que mardi, des amis l'ont appelé de Chine pour en savoir plus sur le Sénégal ». APS Page 88 « Les conditions d'établissement des commerçants chinois sont obscures aux yeux du candidat de la coalition Alternative 2007. Et ce chef de file de ce regroupement politique veut connaître, d'une manière claire, les conditions dans lesquelles les commerçants chinois sont établis au Sénégal [...] lors de sa visite aux membres de l'Union nationale des commerçants et industriels du Sénégal (Unacois). « Dans quelles conditions, les commerçants chinois sont installés au Sénégal ? Est-ce un accord international avec le président de la République populaire de Chine... ? », s'est-il demandé sur un accent comique. [...] « Si nous arrivons au pouvoir par la grâce de Dieu, il n'y aura pas de chasse aux sorcières. Je ne les chasserai pas. Mais je vais quand même revoir leur affaire » a-t-il promis aux commerçants. [...] « Le commerçant sénégalais qui achète, par exemple, des chaussures à l'étranger, paye beaucoup d'argent durant toutes les étapes de la marchandise. Une fois la marchandise arrivée dans son magasin, il n'arrive pas à vendre la paire de chaussure à 3000 francs parce que le Chinois vend à côté le même produit à 1000 francs. Çà ce n'est pas normal. C'est ça qui est à l'origine de la faillite du commerce sénégalais » Wal Fadjri du 23 février 2007. Page 90 « Les chinois sont en Europe, aux États-Unis et partout dans le monde, mais nous respectons toujours les lois et règlements des pays qui nous accueillent (Liu Hongugun établi au niveau de la rue Amadou Assane Ndoye x rue Jean Jaurès et spécialisé dans les chaussures) » [...] exerçant auparavant au Togo et au Ghana, il explique le choix de s'installer finalement au Sénégal par l'ouverture et la stabilité politique du pays, « nous sommes prêt à redoubler d'effort pour mériter la confiance du peuple sénégalais et nous nous battrons pour le développement de l'économie du pays [...] nous achetons directement nos marchandises en Chine et nous les acheminons au Sénégal à l'aide de containers, pour ensuite les revendre a des prix très bas. Nous préférons avoir 200 voire 300 francs de bénéfice sur chaque produit vendu et l'écouler rapidement que de le garder dans nos cartons » [...] on veut travailler sainement avec tout le monde ». Selon Lui, plusieurs commerçants membres de l'UNACOIS viennent s'approvisionner en articles chez eux pour les revendre ensuite sur le marché. Il a confié s'étonner donc d'entendre les mêmes personnes demander qu'on les expulse du Sénégal. Pour sa part, Jin Hongxin, établi depuis 6 ans au Sénégal, affirme sans ambages que tous les commerçants chinois installés à Dakar sont en règle et ne font pas de concurrence déloyale aux Sénégalais. Pour lui, les marchandises proposées sont très conformes à la bourse des sénégalais pauvres, car la situation de plusieurs familles est très difficile. « C'est pourquoi nous faisons venir de Chine des chaussures, des vêtements, des jouets, des sacs pour écoliers et tout ce dont les familles sans moyens ont besoin pour le leur proposer à des prix très abordables. Nous n'avons pas le même problème que les commerçants sénégalais qui achètent leurs produits à Dubaï et qui viennent les revendre au Sénégal. Ils y cherchent de gros bénéfices, ce qui n'est pas notre cas », ajoute Jin. Il a également souligné qu'avec l'installation des commerçants chinois au Sénégal, les Sénégalais sans emplois ont pu trouver un créneau, en achetant et revendant des produits chinois, tirant quelques bénéfices de leur petit commerce. « Avec un capital de 5 à 10.000 francs CFA, ces jeunes sénégalais se retrouvent, au finish, avec des dizaines de milliers de francs », souligne Jin qui ajoute que « les propriétaires sénégalais de magasins loués par les Chinois bénéficient de leur installation dans le pays, en plus des taxes reversés à l'Etat sénégalais ». Le doyen des commerçants chinois au Sénégal, Shen Wenqi établi à la rue Faidherbe x Petersen, ne cache pas son amertume concernant la réaction de certains commerçants sénégalais, mais se dit très réconforté par la réaction des autorités et des populations. « Pour nous chinois, le peuple sénégalais fait partie des peuple les plus ouverts au monde et je suis fier d'être ici », clame-t-il. Il déplore cependant le fait que ses compatriotes ne sont pas bien organisés, chacun étant occupé à ses affaires. « Aujourd'hui, nous travaillons à les regrouper et à essayer d'avoir la solidarité de tous les chinois installés au Sénégal et à partir de cette base, intégrer les coutumes et règles de vie du pays qui nous accueille », indique Shen qui gère une usine en chine soulignant que le Sénégal a besoin de se développer, estimant que « l'apport des Chinois sera bénéfique à l'économie du pays. Dans un contexte de pauvreté très avancée, il faut des mécanismes pour faire de sorte que chacun puisse trouver ce qu'il veut et selon sa bourse. Nous Chinois sommes conscients de cela et nous faisons venir au Sénégal des marchandises qui s'adaptent aux besoins des populations », dit-il. « Nous ne sommes pas là pour dicter notre loi et aujourd'hui nous essayons de trouver un lieu idéal pour y faire notre commerce, comme au centre commercial El hadji Maodo Sylla (de la grande mosquée de Dakar), où nos compatriotes s'installent petit à petit », assure Shen. Il a ajouté que lui et ses compatriotes s'installeront là où les autorités voudront et confié que l'idée d'un grand centre d'achat chinois est en vue. « Nous essayons de nous organiser pour la réalisation d'un grand china-town à Dakar ». D'autres commerçants comme Bao Jia Sen et Ding déplorent, eux, la barrière de la langue qui empêche la communication entre Chinois et Sénégalais. « Nous essayons d'apprendre le français et le wolof. En plus, nous prenons avec nous un à deux employés qui sont sénégalais et qui servent d'intermédiaire », souligne cependant Ding ». APS du 5 septembre 2004 Page 97 « Leur histoire semble toujours commencer de la même façon : en quête d'une vie meilleure, leurs aïeux, parents ou grands-parents, ont quitté le pays d'origine pour aller vivre, dans les pays d'accueil, l'hospitalité des habitants autant que des débuts difficiles, la misère, parfois la guerre, et enfin la fortune et la gloire. L'histoire des Libanais d'Afrique est souvent ainsi faite. Selon les sources, ils seraient sur ce continent entre 250 000 et 300 000 : de 50 000 à 80 000 en Côte d'Ivoire, 30 000 au Sénégal, 25 000 au Nigeria, moins de 10 000 en Sierra Leone, au Ghana, au Gabon... De confessions diverses, chrétiens maronites, musulmans sunnites et essentiellement chiites [...] une première vague d'émigration abandonne, dès le début du XIXe siècle, la région de la montagne libanaise pour se rendre en Égypte. La seconde conduit, entre 1850 et 1950, 400 000 Libanais vers le Nouveau monde. C'est à peu près à ce moment-là que les premiers émigrants débarquent aussi en Afrique. « Au début, c'est quasiment par "accident" qu'ils arrivent sur ce continent, explique Nadim Shehadi, chercheur au Centre d'études libanaises d'Oxford (Angleterre). Les premiers ont soit raté le bateau, soit été floués par les voyagistes qui leur promettaient les Amériques en les faisant passer par Dakar ou Marseille. » [...] les communautés libano-africaines occupent de très larges pans de l'activité économique des pays d'accueil. Au Sénégal, selon l'hebdomadaire français L'Express (24/10/2002), la communauté libanaise détient 60 % des PME-PMI [...] il existe pourtant, à côté d'hommes d'affaires aux comportements fort divers, des médecins, des avocats, des enseignants, voire des hommes politiques - même si beaucoup demeurent de discrets conseillers des chefs d'Etats - ayant pris fait et cause pour leur pays d'adoption. Les Libanais de la deuxième, troisième ou quatrième génération parlent les langues locales, se marient parfois avec les habitants du pays d'accueil qu'ils considèrent comme le leur. Ils se sentent ni plus ni moins sénégalais, maliens, ivoiriens, sierra-léonais, gabonais même s'ils ne perdent pas totalement attache avec le pays du Cèdre. Ils veulent avant tout être jugés à l'aune de ce qu'ils font et non de clichés. En dépit des marques de patriotisme dont ils peuvent faire preuve, un sentiment de suspicion pèse toujours sur eux. « On reste avant tout blanc et on est vu comme tel », regrette Mary Ambourouet, un Libanais né au Gabon il y a vingt-neuf ans, et qui se dit fier d'avoir « pris un nom de Libreville ». Rfi.fr du 10 juillet 2003, http://www.rfi.fr/fichiers/MFI/CultureSociete/952.asp Page 97 « Les Sénégalais d'origine libanaise vivent, c'est vrai, repliés sur eux-mêmes. « Le communautarisme libanais n'est pas différent de celui des Sénégalais de New York ou des immigrés du monde entier. Et n'oublions pas qu'au temps de la colonie Arabes et Africains fréquentaient des mosquées distinctes: ce cloisonnement obligatoire a influencé les rapports sociaux, c'est certain », plaide Fayçal Sharara. Qui balaie une autre critique récurrente: « On nous reproche l'absence de mariages mixtes. Mais l'intégration ne se joue pas au niveau de la ceinture! Le fond du débat consiste à savoir si les Libanais participent au développement du pays et partagent des aspirations communes avec le reste de la nation. La réponse est oui. » Réputé pour sa stabilité, le pays de la teranga (mot wolof pour hospitalité) n'est pas entièrement à l'abri de troubles intercommunautaires. Les mini-émeutes de 1996, déclenchées par un fait divers, sont encore dans les mémoires. Cette année-là, une employée de maison est retrouvée assassinée au domicile d'un Libanais. Avant que la police n'ait le temps de démasquer le criminel - un Nigérian - la rue désigne spontanément la communauté libanaise à la vindicte. Une foule hostile se masse dans le centre-ville. Avec l'aide de certains médias, le mouvement est vite désamorcé. « Mais cet épisode nous a profondément traumatisés. Ce fut un électrochoc », se souvient Fayçal Sharara, qui décide alors, avec d'autres, de fonder l'Alliance. L'objectif unique de cette association laïque est de rapprocher les deux communautés, en remédiant au déficit d'image des Libanais. Une conférence publique est organisée, pour briser tabous et non-dits. « Il fallait mettre la "question libanaise" sur la place publique. On m'a dit: "Tu es fou!"; "Ne braquons pas les projecteurs sur nous!", autrement dit: vivons cachés pour être heureux. A mon sens, il faut au contraire sortir du ghetto et participer davantage à la vie de la cité. » Depuis, l'Alliance a convaincu les Libanais, ces abstentionnistes congénitaux, de la nécessité de sortir de l'ombre en votant lors des élections, manière d'affirmer leur citoyenneté. Jusqu'à présent, rares sont les Libanais à s'être aventurés dans les sables mouvants de la politique, hormis Kazem Sharara (père de Fayçal), ex-conseiller du président Diouf, Fares Attyé, ex-militant socialiste, Samir Abou Risk, aujourd'hui conseiller municipal de Rufisque, ou encore feu Ramez Bourgi. Au vrai, ils ne s'y sentent pas les bienvenus. «Pas un seul haut fonctionnaire, député ou ministre n'est d'origine libanaise. Parmi 60 conseillers, le président Abdoulaye Wade n'a pas daigné choisir un seul Libanais... Notre communauté comporte pourtant des gens de talent qui, à l'instar des Corses en France, estiment devoir être représentés au niveau de l'État », remarque Samir Jarmache, vice-président de l'Alliance. ». L 'Express du 24 octobre 2002, http://www.lexpress.fr/info/monde/dossier/liban/dossier.asp?ida=358580&p=1 Page 104 « Pour des raisons liées à l'histoire, au statut et au rôle de la France dans le monde, l'Afrique en général et le Sénégal en particulier s'intéressent évidemment à tout changement politique majeur en France [...] de toute évidence, la France et nous avons désormais plusieurs défis à relever ensemble : notamment la question de l'immigration, la coopération pour le développement (qui n'est pas nécessairement le co-développement), la lutte contre le terrorisme, la protection de l'environnement et le futur partenariat eurafricain, pour ne citer que quelques exemples. En scrutant l'horizon, beaucoup d'observateurs du futur voient dans leur «radar» de nouvelles puissances qui domineront le monde : la Chine, l'Inde, le Brésil et les États-unis d'Amérique. L'Europe n'y apparaît au mieux qu'en pointillé, l'Afrique de façon encore plus discrète, marginale. [...] C'est pourquoi je pense que l'Afrique, riche de ses immenses potentialités humaines et naturelles - quoique freinée par son retard technologique -, et l'Europe, nantie de ses formidables avancées technologiques et scientifiques - mais souffrant d'un déclin démographique -, peuvent forger un avenir commun dans un véritable partenariat stratégique, fondé sur une nouvelle solidarité objective, débarrassée de tout complexe d'anciens colonisés et d'esprit paternaliste. [...] Cette dimension humaine est irréductible dans les relations franco-africaines, plus encore dans les relations franco-sénégalaises. Nos intérêts sont liés et interdépendants. On ne peut effacer d'un trait ce legs historique. En somme, il y aura toujours un besoin d'Afrique pour la France comme il y aura toujours un besoin de France pour l'Afrique ». Le Figaro du 15 mai 2007 |
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