INTRODUCTION
Choc de marché, défaut des intervenants les plus
exposés, incapacités de certains autres à couvrir ou
solder leurs positions dans un délai ou à un coût
raisonnable...quel que soit l'enchaînement des causes et des faits,
l'histoire économique récente ne manque pas d'exemples de ces
situations de crises ou de tensions extrêmes qui ont
démontré le rôle assez délicat que pouvait jouer un
système bancaire. Ainsi, une gestion approximative des activités,
un trop grand émiettement de l'offre ou une prolifération de
produits financiers, sont les symptômes classiques des institutions
bancaires et financières génératrices de
difficulté.
Le cas russe d'Août 1998 constitue probablement l'un des
plus spectaculaires, qui a vu l'effondrement du rouble et de la dette
souveraine provoquant ainsi la faillite du système bancaire national et
l'accumulation inéluctable des pertes chez les grandes contreparties du
marché au fur et à mesure qu'elles cherchaient en masse à
se dégager de leurs positions sur un marché qui avait perdu toute
liquidité. Dix ans plus tard, les marchés financiers
internationaux ont connu un grand bouleversement lié à la crise
des prêts hypothécaires à risque ayant sa source aux
Etats-Unis et dont nous débattrons dans la suite de notre essai.
Bien qu'imprévisibles dans leur développement,
ces crises expriment à l'origine un certain déséquilibre
de marché : présence d'acteurs dominants susceptibles
d'introduire une forte volatilité des paramètres de marché
dans le cas de la crise de l'or de septembre 1999, formation de bulles
spéculatives détachées des réalités
économiques dans le cas des crises immobilières ou une
sous-évaluation manifeste du risque dans le cas des prêts
hypothécaires à risque « subprime ».
Parlant donc de cette dernière crise liée aux
prêts hypothécaires, plusieurs auteurs, au travers des magasines
et journaux1, ont parlé de « limite de
l'ingénierie financière et des Collateralised debt obligation :
CDO». C'est ce qui nous a amené, au regard de l'ampleur de cette
crise sur le système financier international, avec ses
conséquences
1 Les échos du 28/09/2007, Bloomberg MarKet
« toxic debt » de juillet 2007
(démission, licenciement, faillite...), à nous
interroger sur l'importance de ce produit financier (CDO) et le rôle
qu'il joue dans la gestion des institutions financières. Fruits
d'innovations financières relativement récentes, les CDO sont des
titres représentatifs de portefeuilles de créances bancaires ou
d'instruments financiers de nature diverse.
Au confluent de la titrisation et des dérivés de
crédit, ces produits de finance structurée, en plein essor,
recouvrent des montages répondant à différentes
motivations des institutions financières, celles-ci pouvant chercher
aussi bien à réduire leur coût de refinancement ou à
exploiter des opportunités d'arbitrage qu'à se défaire de
risques de crédit. Toutefois, quelle que soit leur forme, les CDO ont en
commun d'être émis en différentes tranches dont le
découpage obéit aux techniques de la titrisation et permet de
redistribuer de manière ad hoc aux investisseurs les revenus et le
risque de crédit de leur portefeuille sous-jacent.
L'essor des CDO a facilité l'accès des
investisseurs non bancaires aux marchés de crédit et leur a
permis de s'abstraire des contraintes posées par la taille et la
diversification limitées du marché obligataire privé.
Ceux-ci peuvent désormais sélectionner des portefeuilles de
signatures correspondant au profil de rendement/risque de leur choix et
s'exposer à des risques de crédit auparavant cantonnés
dans les bilans bancaires comme ceux des petites et moyennes entreprises.
En tant qu'instrument de transfert du risque de crédit,
les CDO facilitent la distribution de ce risque au sein ou en dehors de la
sphère bancaire et financière, tout en renforçant le
degré de complétude du marché de crédit. Cependant
comme tel est souvent le cas pour les innovations financières,
l'évaluation des CDO et de leurs risques fait appel, à des
techniques complexes et plus ou moins éprouvées. Les
investisseurs, tout comme les intervenants du marché, peuvent ainsi
être exposés à des pertes plus ou moins
sévères. Il est à noter, en outre,
l'incompréhension des investisseurs et des agences de notations de la
nature réelle et des conséquences sur le profil de risque de ces
titres.
Par ailleurs, la multiplication des émissions de CDO
semble bien avoir contribué au resserrement prononcé des spreads
intervenu au cours des dernières années sur l'ensemble des
marchés de crédit. Ce phénomène soulève la
question des liens entre le marché des CDO et les marchés
d'obligations privées et de dérivés de crédit. Il
justifie, en particulier, de porter une attention particulière au risque
de propagation et d'amplification des tensions susceptibles de naître sur
le marché des CDO compte tenu de sa liquidité et de sa
transparence limitées.
La théorie financière explique que dans un
marché structuré, un actif peut être vendu à tout
moment sur un marché secondaire, à condition bien entendu que son
prix reflète les anticipations des investisseurs sur ses flux futurs. Si
les prix intègrent les paramètres de marché, les
marKet-maKers sont en capacité d'intervenir et de garantir la
liquidité des actifs aux investisseurs (et ceci quelle que soit la
nature des informations arrivant sur le marché). Ainsi, si l'on apprend
que telle entreprise a réalisé une perte importante et
inattendue, son cours de Bourse va baisser fortement jusqu'à un niveau
où les investisseurs considéreront que le prix est devenu «
équitable » compte tenu de la perte réalisée.
Pourtant, dans la crise des prêts hypothécaires
à risque, il n'en a rien été car des actifs financiers, en
l'occurrence des parts de CDO (qui intègrent les créances
immobilières américaines à l'origine de la crise) pourtant
notés « AAA » n'ont pas trouvé preneur sur le
marché secondaire. Cette crise pose donc, sur le plan théorique
et pratique, un certain nombre de questions nouvelles liées entre autre
à la liquidité. Problématiques donc qui sous-tendent notre
travail de recherche intitulé :
« Utilisation rationnelle des Collateralised Debt
Obligation »
Le but de notre travail consiste donc à mieux
appréhender le fonctionnement de ce produit financier et ce qui pourrait
en advenir après la grande crise financière de
l'été 2007.
Pour mener à bien notre mission, nous nous attellerons
dans une première partie, à présenter le marché des
CDO à partir de son avènement et de ses caractéristiques.
Ensuite, la deuxième partie portera sur l'utilisation qui en a
été faite par les institutions
financières jusqu'à la crise, au travers d'une
étude de l'évolution du marché de ce produit, son apport
dans la gestion des risques des institutions financières, en nous
attardant sur ses limites avant d'aborder ses perspectives d'avenir.
|