Introduction
Les mots n'apparaissent jamais par hasard. Derrière des
mots nouveaux s'exprime le besoin de formuler quelque chose
d'inédite.1
En fait, depuis quelques décennies, la transformation
des structures économiques comme préalable à la
redistribution et l'amélioration des conditions de vie matérielle
de la majorité de la population de par le monde, s'est effectuée
en dehors des structures démocratiques et participatives.
Ce modèle de développement n'est plus viable,
compte tenu de plusieurs facteurs, dont deux me semble pertinents. Le premier
facteur se rapporte à la prise de conscience qu'un Etat
centralisé apparaît de plus en plus comme frein au
développement.
Le deuxième facteur se rapporte aux changements
économiques, politiques, sociaux et culturels intervenus pendant les dix
sept dernières années, et qui sont dus aux effets de la
mondialisation capitaliste et de la lutte des peuples du tiers-monde aux fins
de jouir pleinement de leurs droits fondamentaux en tant que citoyens libres.
Ces facteurs nous incitent à un nouvel examen des questions du
développement dans les Pays en développement en
général et en Guinée-Bissau en particulier.
En effet, la mondialisation accélérée des
systèmes de production véhicule une nouvelle conception de la
culture et de l'être, dans laquelle, l'avoir tend de plus en plus
à prédominer. De support matériel et de cadre
d'organisation social du travail humain, le marché est de plus en plus
présenté comme une finalité, comme un ultime objectif.
Face à cette nouvelle réalité, la natre
et l'action de l'Etat sont en cause. La conception et l'organisation du
travail, de l'espace et société sont interpellées.
1 Philippe Moreau Défargues, la gouvernance éd. PUF
2003 P. 5
De même, la politique en tant qu'expression civique de
la classe publique est ébranlée.
Bref, depuis son accession à l'indépendance en
1974, la Guinée-Bissau a abordé toutes les questions liées
au développement du Pays, sans que la population ne soit
véritablement impliquée dans la dynamique d'un changement
positif. Elles sont restées au niveau de courroie de transmissions des
gouvernants centraux et conseillers régionaux, bien que ces derniers
supposent préserver l'intérêt de la population locale qui
n'a pu, malgré les velléités de changement et
d'évolution perceptible, être au niveau pertinent de prise de
décision en matière de développement.
Face à cette situation, les concepts de local, de
proximité, de participation, de partenariat et évidemment de
gouvernance s'imposent comme de nouveaux repères de modèles de
développement plus égalitaires qui touche à l'ensemble de
la population.
Cependant, le terme de gouvernance plonge ses origines dans
l'histoire utilisée à des propos divers. En France au XII
siècle, la gouvernance avait un sens très technique : la
direction des baillages. Les historiens anglais du moyen âge se
réfèrent à la gouvernance pour caractériser le mode
d'organisation du pouvoir féodal. Ce terme resurgit, dans la langue
anglaise, durant le dernier quart du XX siècle comme l'une des notions
clés de l'univers des entreprises et des organisations.
Mais qu'est-ce qu'au juste la gouvernance ? Dans un monde
devenu planétaire, la gouvernance serait justement ce processus
d'organisation et d'administration des sociétés humaines dans le
respect et épanouissement des diversités. En d'autre terme, la
gouvernance permet d'affirmer haut et clair combien il est vain de vouloir
régler aujourd'hui les problèmes de demain avec les solutions
d'hier !2
2 Marcel Proust Le concept de la gouvernance.
Dans son sens le plus général, la gouvernance
peut être définie comme l'usage de l'autorité politique,
économique, ou administrative pour gérer les affaires d'une
communauté. Cela implique un système de valeurs et de
règles que les membres de la communauté partagent par coutume ou
s'engage de respecter. Au sein des communautés politiques (locales,
nationales et internationales), le système en question comprend des
institutions et des règles du jeu par lesquelles la
société gère ses affaires.
Il me semble donc que, la gouvernance dont il est question
à cet égard, est une gouvernance locale démocratique et
participative. Car, en voulant centraliser et régler toutes les
questions liées au développement économique et social du
Pays, l'Etat se trouve submergé et incapable de répondre aux
attentes des citoyens qui doivent être les principaux acteurs de leur
développement.
Cette nouvelle stratégie de gouvernance locale qui
semble indispensable au développement de la Guinée-Bissau suscite
un certain nombre d'interrogation, à savoir :
D'abord, quelle est la pertinence du concept de la gouvernance
locale ? Ensuite, Pourquoi s'impose-t-elle comme un nouveau repère de
modèles de développement en Guinée-bissau ? Comment cette
nouvelle stratégie peut-elle contribuer à renforcer les bases du
développement économiques et social et soutenir les initiatives
locales de réduction de la pauvreté?
La mise en place de ce nouveau modèle de
développement nous incite à revoir les anciennes approches ou
stratégies qui n'ont pas réussi dans leur majorité
à conduire le pays sur les sentiers de la croissance et du
développement. Et au contraire ils ont largement participé
à la marginalisation, à la dépendance et à
l'appauvrissement des populations (résultat désastreux sur le
plan économique et sur le plan social).
Ces différentes approches se basent sur les principes
fondateurs de l'économie standard dans laquelle les rapports sociaux ne
tiennent qu'une place minime, principe même qu'aujourd'hui fait l'objet
de critiques importantes.
Ainsi, afin d'expliquer les interrogations citées plus
haut, et de recenser les éléments possibles de réponses,
nous allons dans une première partie décrire, analyser et
présenter brièvement et de manière concise les
stratégies de développement retenues en Guinée-Bissau qui
me semblent être l'explication plausible de la persistance du
sous-développement. Dans une deuxième partie, nous serons
amenés à déterminer la nécessité d'une
approche de la gouvernance locale qui met en évidence des relations
d'interdépendances entre les différents acteurs qui forment le
territoire. Enfin, se pencher sur son éventuelle mise en oeuvre dans
l'objectif d'aider un décollage économique et social.
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