La théorie de la correction symétrique des bilans( Télécharger le fichier original )par Mohamed Ben Mahmoud faculté de droit et des sciences politiques de TUNIS - mastère en droit des affaires 2005 |
b- Les conditions d'existence de l'erreurIl paraîtrait logique de limiter la correction symétrique aux erreurs. En effet, les erreurs peuvent être rectifiées à la demande du contribuable ou à l'initiative de l'Administration : c'est donc à l'occasion de la rectification de ces erreurs que s'appliquera, le plus souvent, la théorie de la correction symétrique. C'est la position du juge fiscal tunisien qui s'est penché à n'inclure dans le champ d'application de la théorie de la correction symétrique, que les « erreurs comptables ». La condition primordiale, bâtie par le juge, pour que l'erreur soit rectifiable est l'existence de la bonne foi. Etant à la fois précise et rigoureuse, la jurisprudence française ne s'est pas contentée uniquement d'établir la condition de la bonne foi. Un arrêt datant du 7 juillet 1972126(*) est venu énoncer les conditions d'existence de l'erreur comptable : « considérant que lorsque, tout en ayant pris en temps utile la décision d'enregistrer dans sa comptabilité, une dette ou une charge, une société a retracé ladite décision sous une rubrique autre que celle sous laquelle elle était tenue de l'inscrire en application des règles comptables, elle peut obtenir la déduction de ladite charge dès lors que l'erreur comptable alléguée est établie... ». Cette formulation, que l'on retrouve dans de nombreux arrêts permet de cerner la notion d'erreur comptable selon la jurisprudence française il faut que: - L'inscription comptable ait été faite en temps utile ; - La rectification ait pour objet de redonner à l'opération sa véritable nature de dette ou de charge ; - L'erreur provienne uniquement du non-respect de règles comptables ; - Enfin, que soit établie l'absence d'intention volontaire, au moment de la déclaration ou de l'inscription comptable127(*). Une autre condition pourrait venir s'ajouter à cet ensemble. En effet, l'erreur ne pourra être retenue qu'à la condition de ne pas être « inexcusable » lorsque l'erreur est telle, que, compte tenu de la personne du décideur, de son entourage administratif et de sa formation, il n'apparaît pas imaginable qu'elle n'ait pas été intentionnelle128(*). Cet ensemble de conditions, qui respecte le principe de la non-immixtion de l'Administration dans la gestion de l'entreprise, met l'accent, d'une part sur « l'absence d'élément intentionnel » et d'autre part sur la « discordance matérielle »129(*) à rectifier. c- Les types d'erreursLa qualification d'erreur ne peut être accordée aux opérations frauduleuses destinées à éluder l'impôt. En effet, l'erreur fait intervenir une notion d'appréciation objective, d'un fait ou d'un texte, appréciation qui montre une erreur dans le maniement des règles. Les erreurs de fait ou de droit, constatées dans chacun des bilans clos durant la période soumise au droit de vérification de l'Administration peuvent être rectifiées, tant par celle-ci, lorsqu'elles jouent au profit du contribuable, que par ce dernier lorsqu'elles ont joué à son détriment. On parlera d'erreur de droit lorsque l'erreur porte sur une interprétation de la loi fiscale, alors que celle-ci impose au contribuable une méthode d'imputation comptable pour l'enregistrement de certaines opérations, sans qu'aucun choix ne soit offert. On en distingue deux catégories : § Les erreurs d'évaluation, véritables erreurs de fond, découlant d'une mauvaise application reconnue de la loi fiscale § Les erreurs d'imputation, erreurs dans le temps, résultants du non respect des modalités de rattachement au bénéfice imposable : ainsi en va-t-il des créances et des dettes à inscrire dans les écritures de l'exercice au cours duquel elles sont nées (acquises ou exigibles) et non celui de leurs paiement, en vertu de la théorie du bilan. L'erreur de fait est le plus souvent une erreur manifeste, une erreur telle que, si elle était pérennisée, elle aboutirait à une « aberration » fiscale. Elle porte, sur l'existence, la valeur ou le nombre des éléments qui constituent le patrimoine de l'entreprise. Dans de pareil cas, l'enregistrement comptable est correct, mais l'écriture comptable est fondée sur des faits matériellement inexacts. Ce type d'erreur est bien sûr rectifiable, mais il appartiendra à l'entreprise d'apporter la preuve que la ou les écritures litigieuses résultent de la naissance, puis éventuellement, de la correction de cette erreur. L'erreur alléguée doit être justifiée. * 126 C.E., 7 juillet 1972, concl. DELMAS-MARSALET, D.F. 1973, n°44, comm. 1522. * 127 KORNPROBST (E), « La notion de bonne foi : application en droit fiscal français », op.cit., p.217. * 128 Le professeur GHESTIN note de façon particulièrement claire que « l'erreur soit inexcusable si l'auteur a fait preuve d'une légèreté ou d'une négligence coupable ; S'il a ignoré, alors qu'il aurait dû savoir, il ne pourra se prévaloir et tirer bénéfice d'une erreur dont il est responsable », in GHESTIN, « La notion de l'erreur dans le droit positif actuel » Thèse, Paris, 1963, cité par KORNPROBST (E), « La notion de bonne foi : application en droit fiscale français », op.cit., p.219. * 129 Ibid, p218. |
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