La liberte contactuelle dans les sûretés personnelles en droit OHADA( Télécharger le fichier original )par Huguette Eliane Ndounkeu Université de Dschang - DEA en droit communautaire 2006 |
B- L'imposition des contraintes aux garantsLa loi peut expressément mettre à la charge de certains garants des obligations particulières301(*) (1). Elle peut aussi le faire de manière tacite302(*) (2). 1- Les obligations des garants financiersL'exercice de diverses professions impliquant la détention de fonds pour le compte de la clientèle, est subordonné à l'existence d'une garantie financière qui peut être fournie par une banque, une société de caution mutuelle ou tout autre organisme ayant le statut d'établissement de crédit303(*). Le prototype en est la garantie des professionnels de l'immobilier. Ainsi, les organismes de garantie de ces professionnels administrateurs de biens, agents immobiliers engagent-ils leur responsabilité, s'ils n'ont pas veillé à ce que la garantie soit conforme aux exigences légales, spécialement quant au montant. Si l'insuffisance de la garantie est imputable à leur négligence, ils peuvent se voir condamnés à payer au-delà des limites de la garantie effectivement constituée, les créances qui auraient dû être couvertes et qui ne l'ont pas été304(*). Un léger doute a pu naître au sujet de la qualification même de ces garanties financières, considérées comme constitutives de garanties autonomes305(*). Pourtant, elles ont bien pour objet le paiement des dettes même des professionnels garantis. Mais, au regard de l'évolution jurisprudentielle postérieure, il est possible de considérer que cette solution est tout à fait propre à ce type de garanties qui ne s'apparente peut-être d'ailleurs pas à des garanties autonomes stricto sensu.306(*). Quoiqu'il en soit, leur assimilation aux garanties autonomes met une obligation supplémentaire à la charge des garants, découlant de la notion de paiement utile. 2- La notion de paiement utile : une entrave à la liberté du garantLe législateur OHADA subordonne les recours du garant ou du contre garant contre le donneur d'ordre à un paiement utile fait par lui au bénéficiaire. Vraisemblablement, il a voulu ériger le garant en juge de l'exécution du contrat principal307(*). Ce dernier n'aura pas fait un paiement utile chaque fois qu'il aurait pu rejeter la demande de paiement du créancier pour une raison quelconque, tirée du rapport principal. Cette notion renvoie au rapport de causalité entre l'inexécution ou la mauvaise exécution du contrat de base, et le paiement de la somme due au titre de la garantie. Le donneur d'ordre pourra, sur ce fondement, opposer une fin de non recevoir à l'action récursoire du garant308(*), qui se verra alors obligé, en cours de contrat, d'être très vigilant sur l'évolution du contrat de base. Une telle démarche remet en cause le caractère autonome de la garantie et l'inopposabilité des exceptions qui en découle. Pourtant, la Cour de Cassation relevait déjà que « même si l'engagement (de la banque) avait pour cause le contrat (de base) dont la nullité était alléguée, en l'état, la banque, en raison de son engagement de payer à première demande, ne pouvait se dérober à cette obligation309(*) ». Il faut tout de même remarquer qu'une telle nullité pourrait éventuellement être révélatrice d'un appel manifestement abusif. En principe, peu importe que le débiteur ait exécuté la totalité de ses obligations. De même, il est impossible d'opposer au bénéficiaire l'extinction de l'obligation garantie ou même l'impossibilité pour le donneur d'ordre de se retourner pour des raisons politiques ou autres, contre le bénéficiaire si l'appel en garantie se révélait injustifiée310(*). Une telle rigueur, s'agissant d'une garantie, n'est pas dans la nature des choses. Comment un garant peut-il être tenu de payer alors même que la nullité du contrat n'est pas douteuse, que le donneur d'ordre a pleinement rempli les engagements garantis, que le contrat a été rompu du seul fait du bénéficiaire qui appelle la garantie311(*) ? Cette sévérité propre à la garantie autonome est heureusement atténuée par certains droits qui en découlent. * 301 Tel est le cas pour les garants professionnels, fournisseurs de la garantie financière obligatoire pour l'exercice de certaines professions. * 302 C'est du moins ce qui ressort du « Paiement utile » qu'elle prescrit au garant dans la lettre de garantie * 303 On peut mentionner les notaires, les avocats, les agents d'affaire, les agences de voyage. Au Cameroun, la loi n° 90/059 du 19 déc. 1990 portant organisation de la profession d'avocat contient une disposition semblable à l'article 5. al. 7. * 304 CA Paris, 30 Janv. 1998; Juris-Data, n° 021305. * 305 Cass. Ass. Plen. 4 Juin 1999, JCP G 1999, II, 10152 et E 1999, 1294, note BEHAR-TOUCHAIS (M.). La Cour de Cassation a considéré, que la garantie financière dont doivent justifier les professionnels de l'immobilier, « en raison de son autonomie ... n'est pas éteinte lorsqu'en cas de redressement ou de liquidation judiciaire de l'agent immobilier, le client ne déclare pas au passif, sa créance de restitution de la somme versée ». * 306 BORGA (N.), op. cit, P.39. * 307 Les pouvoirs de contrôle du garant étant suffisamment limités, il ne saurait s'ériger en juge de l'exécution du contrat principal. Voir CABRILLAC (M.) et MOULY (C.), Droit des sûretés, Paris, Litec, 1990, P. 315. * 308 SOUPGUI (E.), mémoire précité, P. 16. * 309 Cf Cass. Com. 20 déc. 1982 précité. * 310 Voir cependant certaines décisions ayant accordé une mise sous séquestre de la garantie pour de telles raisons, Cf C A Paris, 29 nov. 1982, D. 1983, inf. rap., P. 302, obs. VASSEUR. * 311 SIMLER (Ph.), ouvrage précité, n° 883, P. 794. |
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