INTRODUCTION
Force est de constater que l'endettement est devenu un
véritable fait de société : plus d'un ménage
sur deux a aujourd'hui recours aux crédits. En effet, nous vivons dans
une société dite de « consommation »
où les personnes sont sollicitées par différentes offres.
L'obtention de prêt permet à certaines de réaliser des
projets personnels ou familiaux, tout en gardant un équilibre
budgétaire. D'autres, plus fragilisées, vont avoir un recours
important aux crédits à la consommation, les entraînant
parfois sur la voie du surendettement.
Le surendettement est donc devenu une question majeure. Au
moment de la création du premier dispositif par la loi NEIERTZ en 1989,
le nombre de ménages concernés était estimé
à 200 000. A cette époque, le surendettement était
souvent lié à un emprunt pour l'accession à la
propriété (taux progressif conduisant à des remboursements
trop élevés). Par la suite, de nouveaux facteurs ont
accentué le recours aux emprunts tels que l'augmentation du
chômage et le développement des séparations. Depuis, le
chiffre du surendettement a constamment progressé, ce qui a
justifié l'adoption de trois nouvelles lois en 1995, 1998 et 2003. A
titre indicatif, la Banque de France comptait 184 812 dépôts
de dossiers en 2006.
Une personne est considérée comme
surendettée lorsqu'elle est dans « l'impossibilité
manifeste de faire face à l'ensemble de ses dettes non professionnelles
exigibles et à échoir ». (cf. annexe 1)
Il existe deux types de surendettement :
* le surendettement dit « passif », est le
résultat d'une réduction sensible des revenus ou d'un
alourdissement des charges, pouvant être occasionné par un
licenciement, une naissance, une séparation, une maladie, etc.
* le surendettement dit « actif », est la
conséquence d'un recours volontaire à un nombre important de
crédit (accumulation des emprunts, engagements financiers en
surcharge...).
Le surendettement touche de plus en plus de ménages.
J'ai été moi-même confronté à cette
difficulté sur mon terrain de stage en BTS ESF. Je me suis aperçu
qu'elle touchait toutes les catégories socioprofessionnelles et qu'elle
pouvait être facteur d'exclusion sociale et économique.
Après avoir fait le constat que l'accompagnement par le
conseiller en économie sociale et familiale se poursuivait
au-delà de la mise en place du plan, je me suis posé la question
suivante :
« Quelles sont les difficultés que
rencontrent les personnes surendettées lorsqu'elles remboursent un plan
conventionnel de redressement ? »
Face à cette interrogation, j'ai essayé de
trouver des pistes de travail. Dans mes recherches sur ce sujet, les ouvrages
que j'ai pu consulté m'ont apporté toutes les connaissances
nécessaires sur le traitement des situations de surendettement, sur les
causes possibles de celui-ci, mais également sur la législation
relative au surendettement, ainsi que les moyens mis en place. Mais aucun
n'abordait les conséquences du plan conventionnel de redressement.
C'est donc à des professionnels que je me suis
adressé. Ces entretiens exploratoires m'ont permis de me rendre compte
que le plan conventionnel de redressement avait des conséquences sur les
familles concernées. Afin d'approfondir ce premier constat, j'ai
orienté ma recherche exploratoire vers le public, dans le but de
confirmer ou infirmer ce constat, et avoir plus de précisions. Le
questionnaire m'a permis de comprendre que le mode de vie des familles,
après la mise en place du plan conventionnel, était
complètement modifié.
Toutes ces recherches m'ont apporté de nombreux
paramètres et ont soulevé des questionnements concernant cet
aspect assez peu étudié. Ces constats m'ont permis de comprendre
que malgré l'accompagnement fait lors de la mise en place du plan
conventionnel, et les bienfaits que celui-ci engendre, il est difficile pour
ces personnes de pouvoir accéder à la société de
consommation, et surtout aux loisirs. Paradoxalement, l'accès aux
loisirs est un objectif national comme le mentionne la loi de lutte contre les
exclusions du 29 juillet 1998. En effet, l'accès aux loisirs favorise
l'épanouissement des individus. Alors pourquoi ces personnes ont
des difficultés à accéder aux loisirs ?
Pour tenter d'apporter des éléments de
réponse à cette question, je me suis attaché à
comprendre comment le plan conventionnel est proposé. Nous pouvons
d'ores et déjà dire que le plan conventionnel est
déterminé selon la capacité de remboursement du
débiteur après imputation des charges courantes et du forfait
« alimentation, hygiène, et habillement »,
appelé « reste à vivre », laissé au
débiteur par la Banque de France. Mais comment est
déterminé ce « reste à
vivre » ? Est-il facteur d'exclusion de
l'accès aux loisirs pour les personnes remboursant un plan conventionnel
de redressement ?
Cependant, chaque individu a un rapport à l'argent
différent, l'utilisation du « reste à vivre »
en sera donc différente. Peut-on dire alors que ce
phénomène d'exclusion résulte d'une cause plus profonde
propre à chaque individu ?
A l'issue de cette réflexion, nous pouvons
émettre l'hypothèse suivante :
La culpabilité et la honte sont les causes
principales de l'exclusion de l'accès aux loisirs des personnes
surendettées, remboursant un plan conventionnel.
Ce problème peut être abordé sous
plusieurs angles (sociologique, économique, juridique, psychologique,
psychiatrique, psychosociologique...). Cependant, j'ai fait le choix de centrer
ma recherche sur deux aspects : juridique et psychosociologique. En effet,
je pense que, pour accompagner au mieux ces personnes, il est indispensable de
connaître le cadre légal et la procédure de traitement du
surendettement des particuliers. De même, toute personne est inscrite
dans un environnement social, l'analyse psychosociologique permettra donc
d'expliquer, en partie, son comportement vis-à-vis de la
consommation.
Aussi, afin de vérifier si le « reste
à vivre » peut être facteur d'exclusion de
l'accès aux loisirs ou si ce sont les personnes qui s'excluent
elles-mêmes, j'ai choisi d'orienter la première partie de ce
mémoire vers une recherche théorique. Pour cela, j'ai tout
d'abord travaillé sur les caractéristiques et la procédure
de traitement du surendettement des particuliers. Ensuite, j'ai analysé
comment le consommateur pouvait être influencé par son
environnement lors de ses décisions d'achat. Enfin, j'ai
étudié les concepts d'exclusion sociale, de consommation et la
place des loisirs dans la société française.
Dans un second temps, je développerai l'enquête
que j'ai menée auprès de travailleurs sociaux et de personnes en
situation de surendettement, remboursant un plan conventionnel de
redressement.
Enfin, j'aborderai la question du surendettement dans une
perspective professionnelle. Que peut m'apporter cette réflexion en tant
que futur professionnel ? Qu'ai-je appris du rôle du CESF ?
Comment intervient-il auprès de ce public ? Comment me positionner
face à cette problématique ? Je tenterais d'apporter des
réponses à ce questionnement dans un troisième temps.
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